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Table des matières

Table des matières

Préface. 6

Introduction. 9

Première partie : Éclairages. 15

Chapitre 1 : Eclairage historique  19

  1. Aperçu sur le legs d’une évolution historique. 19
  2. Quelques exemples significatifs. 23

2.1. La justice des premiers temps. 23

2.2. L’Inquisition. 25

2.3. Les saints juristes. 29

2.4. L’index et la condamnation des livres. 33

2.5. Les procès en sorcellerie. 34

2.6. La justice pour les « indigènes ». 36

2.7. La justice pendant les guerres de religion. 37

2.8. La justice française après la Révolution. 38

2.9. La justice ecclésiastique après 1917. 40

Chapitre 2 :  Principes, organisation et procédures  47

  1. Les principes de la justice ecclésiastique. 47

1.1. La justice : donner à l’autre ce qui est sien. 49

1.2. La miséricorde et la charité. 50

1.3. Le bien commun, l’équité et la communion. 52

  1. Le droit et la justice administratifs. 57

2.1. Les frontières du droit administratif 57

2.1.1. Les frontières avec le droit séculier 57

2.1.2. Les frontières avec le droit sacramentaire. 61

2.1.3. Les frontières avec le droit pénal 62

2.1.4. Les frontières internes au droit canonique. 63

2.2. Le droit administratif 64

2.2.1. La notion d’acte administratif. 64

2.2.2. La légalité des actes administratifs. 66

2.2.3. Les actes susceptibles de recours. 69

  1. Les procédures de recours. 71

3.1. L’organisation de la justice. 73

3.2. Les recours gracieux et hiérarchiques. 76

3.2.1. Les recours gracieux (Remonstratio) 77

3.2.2. Le premier recours hiérarchique. 78

3.2.3. Les recours hiérarchiques à Rome. 79

3.3. Les recours contentieux-administratifs. 80

3.3.1. L’éligibilité du recours. 81

3.3.2. L’admissibilité du recours. 83

3.3.3. L’examen au fond du recours. 84

3.3.4. Les conséquences d’un recours. 84

Chapitre 3 :  Les sources de jurisprudence  86

  1. La jurisprudence administrative. 87

1.1. Les publications. 88

1.2. Les causes contentieuses. 90

1.3. Les sentences. 93

1.4. Les statistiques. 94

  1. La base de données. 94

2.1. L’identification et l’accès à la base. 94

2.2. La recherche des causes. 95

2.3. Les caractéristiques d’une cause. 96

2.4. L’affichage d’une sentence. 97

2.5. Le dialogue avec les administrateurs. 97

Deuxième partie : Casuistique. 99

Chapitre 4 : La justice pour les laïcs  103

  1. Le remodelage des paroisses. 106
  2. La réduction des églises à un usage profane. 108

2.1. Le droit applicable. 109

2.2. Les difficultés et les recours. 111

  1. Les décrets particuliers pour les laïcs. 115
  2. Les associations de fidèles. 116
  3. Les autres sujets à recours. 125

Chapitre 5 : La justice pour les clercs  131

  1. Les révocations et mutations de curés. 136

1.1. Les révocations de curés. 137

1.2. Les mutations. 139

  1. Les sanctions administratives. 141

2.1. Incardination et excardination. 142

2.2. Refus ou retraits d’autorisations. 143

2.3. Les pertes de l’état clérical 146

2.4. Les actes les plus graves. 148

2.5. Les autres litiges concernant des clercs. 154

Chapitre 6 : La justice pour les consacrés  155

  1. Le droit et son application. 155

1.1. Droit et obéissance. 156

1.2. La protection des droits et obligations. 159

  1. La justice pour les consacrés. 167

2.1. La sortie des instituts. 168

2.1.1. La sortie volontaire d’un institut 169

2.1.2. Les exclaustrations imposées. 170

2.1.3. Les renvois. 171

2.1.4. Les conséquences des renvois. 175

2.2. Les autres recours pour les consacrés. 176

  1. La justice pour les institutions de consacrés. 176

3.1. La création et la suppression. 177

3.2. Les droits de propriété. 178

3.3. La gestion des instituts. 179

Chapitre 7 : La justice administrative face aux charismes  181

  1. Les révélations privées. 181

1.1. Le droit des révélations privées. 185

1.2. Les difficultés rencontrées. 188

1.3. Les épreuves imposées. 191

1.3.1. Les sanctions envers les « voyants » et amis. 192

1.3.2. Les sanctions envers les curés et les religieux favorables. 198

1.3.3. Les sanctions envers les pèlerins. 200

1.4. Les voies de recours et la justice. 202

  1. Les nouveaux mouvements religieux et les sectes présumées. 207

2.1. Le droit applicable. 208

2.2. Les difficultés et les sanctions. 211

2.3. Les recours possibles. 212

Chapitre 8 : La justice administrative par dicastère  215

  1. Les recours par rapport aux Congrégations. 218

1.1. Congrégation pour la doctrine de la foi 218

1.2. Congrégation pour les Églises orientales. 222

1.3. Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements. 222

1.4. Congrégation pour la cause des saints. 224

1.5. Congrégation pour les Evêques. 224

1.6. Congrégation pour l’évangélisation des peuples. 225

1.7. Congrégation pour le clergé. 225

1.8. Congrégation pour les instituts de vie consacrée et sociétés  de vie apostolique  226

1.9. Congrégation pour l’Education catholique. 227

  1. Les recours face aux autres dicastères. 228

2.1. Le Secrétariat d’Etat 228

2.2. Dicastère pour les laïcs, la famille et la vie. 228

2.3. Dicastère pour le Développement humain intégral 229

2.4. L’administration du patrimoine (APSA) 230

2.5. L’office du travail du Siège apostolique (ULSA) 230

2.6. La Rote romaine. 231

2.7. La Signature apostolique. 231

Troisième partie : commentaires  233

Chapitre 9 : Retour sur la procédure  237

  1. Les étapes de la procédure. 237

1.1. Les étapes préalables. 238

1.1.1. Le décret initial 238

1.1.2. Les recours gracieux. 241

1.1.3. Les recours hiérarchiques. 242

1.1.4. L’instruction du Dicastère. 243

1.2. Les recours contentieux-administratifs. 244

1.2.1. La décision préalable d’éligibilité. 245

1.2.2. La décision du Congrès. 247

1.2.3. Le recours au Collège des Pères. 249

1.2.4. La fin du litige. 250

1.2.5. La sentence définitive du Collège. 251

1.3. Les causes connexes et leurs effets. 251

1.3.1. Les causes incidentes et liées. 252

1.3.2. L’effet suspensif. 252

1.3.3. Le rétablissement de la situation antérieure. 253

1.3.4. La réparation des dommages. 254

1.3.5. La mise en œuvre de la décision. 255

1.4. La jurisprudence sur la procédure. 256

1.4.1. Les procédures générales. 256

1.4.2. Les procédures particulières. 257

  1. Les résultats statistiques. 258

2.1. Le nombre de contestations significatives. 259

2.2. Le nombre de recours déposés. 259

2.3. L’origine des recours déposés. 261

2.4. La nature des demandeurs. 262

2.5. Le devenir des recours déposés. 262

2.6. Les délais de traitement des recours. 267

  1. La conciliation et la médiation. 268
  2. Les aspects transversaux. 268

4.1. Le demandeur 269

4.2. Les difficultés de la procédure. 269

4.2.1. Le langage. 270

4.2.2. L’accès à l’information et le secret 272

4.2.3. L’avocat 274

4.2.4. Les témoins. 277

4.2.5. Les preuves. 278

4.2.6. Les délais. 279

4.2.7. Le coût de la justice et le paiement des frais. 280

4.3. Le droit de la défense et de revendication. 282

Chapitre 10 : Conciliation et médiation  289

  1. La médiation ecclésiastique. 291

1.1.         La médiation ecclésiastique en France. 294

1.1.1. Les Conseils diocésains de médiation. 294

1.1.2. La médiation dans l’enseignement catholique. 299

1.2. La médiation ecclésiastique dans le monde. 300

  1. La médiation dans la société civile. 304

2.1.         Les méthodes de la médiation. 304

2.2.         Tour d’horizon de la médiation. 306

2.3.         La médiation dans les confessions chrétiennes. 309

Chapitre 11 : Perspectives d’évolutions  313

  1. Prévenir les recours. 316

1.1. Favoriser les procédures de médiation au niveau des diocèses. 316

1.2. Préciser le droit administratif 318

  1. Améliorer la justice administrative. 319

2.1. Ajuster le champ de la justice. 320

2.2. Simplifier la procédure de recours. 323

2.3. Décentraliser la procédure des recours. 324

2.4. Recourir à l’e-justice. 326

  1. Développer l’information et la formation des fidèles. 329

3.1. Est-il légitime d’infliger des sanctions ?. 331

3.2. Est-il licite de recourir à la justice ?. 332

3.3. Est-il possible de recourir à la justice ?. 333

3.4. Est-il souhaitable de recourir à la justice ?. 334

3.5. Est-il juste de recourir à la justice ?. 335

3.6. Faut-il promouvoir la justice administrative ?. 338

Chapitre 12 : Adresse finale. 343

  1. Conclusion. 343
  2. Canonistes sans frontières. 345

2.1. Orienter les fidèles catholiques. 345

2.2. Apporter une aide aux Officialités. 347

2.3. Partager des bonnes pratiques. 349

2.4.         Aider les autres communautés chrétiennes. 350

2.5.         Se structurer juridiquement 351

Principales sources et bibliographie  353

Table des matières. 363

Table des illustrations. 369

Eclairage historique

Chapitre 1 : Eclairage historique

Dans toute démarche innovante, une approche historique s’impose, comme le rappellent nos amis africains « si tu ne sais pas où tu vas, regarde d’où tu viens », ou comme l’expliquent Mgr. Jean-Louis Bruguès, « la mémoire permet d’accéder à l’identité et à la confiance[1] » ainsi que  le préfet du Secrétariat pour la communication (SpC) du Saint-Siège :

Nous devons avoir très à cœur l’histoire, la mémoire, l’avenir » et accepter « de renaître une seconde fois. Renaître d’en-haut pour voir à la manière de Dieu les événements du monde[2].

Ce premier chapitre apporte un aperçu historique de la justice de l’Église depuis l’origine du christianisme jusqu’au 15 août 1967, lorsque le bienheureux pape Paul VI promulgue la Constitution apostolique Regimini Ecclesiae Universae qui réorganise la Curie romaine et donne compétence au Tribunal suprême de la Signature apostolique en matière de contentieux-administratif.

  1. Aperçu sur le legs d’une évolution historique[3]

Traiter de la justice administrative dans l’Église telle qu’elle fonctionne depuis un demi-siècle n’implique pas nécessairement une étude historique, ne serait-ce que parce que cette « justice administrative » ne fut pas une réalité organisée comme telle au cours des temps. Il nous semble néanmoins nécessaire, pour appréhender la situation actuelle, d’évoquer brièvement quelques traits de ce que fut l’histoire de la justice ecclésiastique au cours de l’histoire de l’Église.

Certes, le Nouveau Testament ne prévoit pas la justice ecclésiastique, mais il formule certaines propositions en ce sens : saint Matthieu (18, 15-20) incite le chrétien à corriger son frère avec charité ; saint Paul
(I° Cor., 6, 1-8) demande aux chrétiens de ne pas recourir aux juges païens mais de résoudre les difficultés entre eux. Telles sont les bases de la « Correction fraternelle », dont le pape François rappelle régulièrement l’importance, en précisant qu’elle est une action pour guérir le corps de l’Église[4].

Dès l’origine, des litiges éclatent et l’existence d’une justice semble nécessaire. Jusqu’à la fin du iii° siècle, l’Église est soit ignorée, soit persécutée par le pouvoir impérial romain ; dans ce contexte, elle s’organise néanmoins et une justice ecclésiastique se met en place ; celle-ci fonctionne en étant essentiellement aux mains de l’évêque bien que, parfois, le litige soit porté devant une réunion d’évêques, l’une des fonctions des premiers conciles locaux étant de trancher les litiges. Il est intéressant de noter ces deux modalités d’action (qu’il serait sans doute abusif de qualifier de « procédure » au sens juridique du terme) : soit intervention de l’évêque, autorité « monarchique », soit sentence d’une assemblée d’évêques, autorité « collégiale ». L’alternative entre les deux mécanismes d’autorité se retrouvera tout au long de l’histoire de l’Église.

Au iii° siècle, le christianisme est tout d’abord toléré et reconnu (édit de Milan en 313 sous Constantin), puis déclaré seule religion de l’Empire romain (édit de Thessalonique en 380 sous Théodose I°)[5]. Les relations entre la nouvelle religion et le pouvoir politique prennent alors des caractères qu’elles ne retrouveront jamais par la suite : un soutien mutuel dans une sérénité quasi-absolue. L’Église possède le message évangélique mais doit construire ses structures d’autorité et son droit. Elle trouve dans l’empire, un gouvernement, une administration, des instances judiciaires et un droit étonnamment construits et affinés. En conséquence, elle emprunte à l’empire tout ce qui peut être utile à son organisation, dès lors que cela ne contrarie pas le message évangélique qui reste naturellement sa Loi supérieure. Dans ce contexte, la justice ecclésiastique s’épanouit, dans une parfaite collaboration entre les deux pouvoirs. La législation impériale règlemente l’audientia episcopalis, le tribunal de l’évêque : les chrétiens soumettent leurs différends à l’évêque ; les juges séculiers ont obligation de reconnaître les sentences épiscopales et de veiller à leur exécution. L’audientia episcopalis prend place au sein de l’ensemble du système procédural de l’empire chrétien. Les constitutions impériales favorisent considérablement le développement de sa compétence, ratione materiae et ratione personae, à tel point qu’Augustin en vient à déplorer le temps passé à juger, au détriment de l’exercice de sa charge pastorale. En outre, désormais, l’essor du christianisme permet à chacun de s’adresser à un juge séculier qui soit également chrétien. Il serait vain de rechercher, dans l’empire romain, les origines d’une justice ecclésiastique spécialisée dans les causes administratives. De cette période, retenons cette quasi parfaite entente entre les deux puissances, en particulier en matière d’organisation judiciaire ; une totale confiance accordée aux évêques par l’empereur ; un recours constant de l’Église à une législation séculière dont elle sait ne pas pouvoir se passer. Peut-être l’Église vit-elle alors la seule période de son histoire où les relations entre les deux pouvoirs ne s’analysent pas en termes de rivalité et de supériorité de l’un sur l’autre.

À partir de la chute de l’empire romain d’Occident (476), Orient et Occident connurent des évolutions bien distinctes et nous limitons notre propos à l’Occident où s’affirme la primauté pontificale. Au cours du Moyen-Âge, la justice d’Église prend une importance considérable. La société est chrétienne ; la justice ecclésiastique semble organisée et efficace, alors que les justices séculières (seigneuriales essentiellement) fonctionnent souvent mal car des juges peu compétents laissent trainer les procès en longueur.

Progressivement, les pouvoirs séculiers tentent d’affermir l’autorité de leurs propres officiers et de leurs propres tribunaux. Telle est la politique royale en France, notamment à partir du règne de saint Louis. Néanmoins, les causes jugées par l’Église demeurent nombreuses : ratione personae, l’Église et les clercs défendent le privilège du for permettant aux clercs (et à d’autres catégories protégées par l’Église) de n’être jugés que par la justice ecclésiastique ; dans un même mouvement, clercs et canonistes s’entendent pour lutter contre les tribunaux séculiers tendant à réduire leurs compétences ratione materiae. Le xii° et davantage le xiii° siècle, période de l’apogée du droit canonique classique, correspondent à la toute-puissance des officialités, tranchant les litiges selon la procédure romano-canonique du droit savant.

Parallèlement, l’autorité pontificale évolue, passant de la primauté pontificale à la plenitudo potestatis. Cette mutation a des conséquences sur l’organisation de la justice dans l’Église. La doctrine de primauté pontificale s’était élaborée dès la fin du iv° siècle et atteint sans doute son apogée à partir de la Réforme grégorienne. Elle s’exprime notamment par les Dictatus Papae, recueil datant de 1075. Cette primauté implique de reconnaître l’autorité suprême du pontife romain dans l’Église, donc sur l’ensemble des clercs, de la discipline et des structures ecclésiastiques. La doctrine de la plenitudo potestatis accompagne, quant à elle, l’affirmation de la théocratie pontificale qui atteint son apogée au xiii° siècle ; il s’agit ici de proclamer la toute-puissance du pape, au temporel comme au spirituel ; Rome tend à exercer le dominium mundi. Dès lors, le pape doit développer les instances de gouvernement de ce « monde ». La chancellerie pontificale s’étoffe et, pour ce qui nous intéresse ici, des tribunaux romains structurés voient le jour : le tribunal de la Pénitencerie pour le for interne, et celui de la Rote pour le for externe. Si, théoriquement, ces instances demeurent sous l’autorité immédiate du pape et si elles jugent au nom du pape, toutefois, en pratique, la question du degré d’indépendance de ces tribunaux se pose, interrogation qui demeurera constante dans les siècles suivants : la justice pontificale, rendue par des juges délégués agissant au nom du pape au sein des tribunaux romains, est-elle toujours conforme à la décision du pontife lui-même ? Juridiquement, l’interrogation est essentielle ; pratiquement, elle est tout aussi fondamentale pour le justiciable.

La tendance à la centralisation romaine est dès lors établie et ne cessera de croître : des officialités locales jugent de la plupart des litiges et des tribunaux pontificaux statuent, parfois en première instance mais le plus souvent en appel. Le schéma demeure. À côté de la Pénitencerie et de la Rote, la Signature apostolique est progressivement mise en place. Le pape signe des suppliques, puis confie cette mission à son chancelier ou à son vice-chancelier, tout en se réservant la possibilité d’intervenir personnellement dans diverses hypothèses. Dans la seconde moitié du xv° siècle, la Signature papale se distingue de la Signature commune, embryon d’une Signature apostolique qui évoluera encore dans ce processus général de centralisation romaine.

Inutile de nous appesantir ici sur diverses crises que traverse l’Église et qui, parfois, semblent remettre en cause cette centralisation pontificale (en particulier le Grand Schisme d’Occident et la crise conciliaire).

Dans ce schéma historique retracé à très grands traits, la justice administrative ne semble pas avoir revêtu, au cours des siècles, des caractères particuliers : pas de tribunaux spécifiques, suivant une procédure elle aussi spécifique, pour un certain nombre de catégories de litiges.

Pour compléter cette perspective historique, au cours de ces mêmes siècles, on peut se poser une question : l’organisation judiciaire séculière possédait-elle une justice administrative ? Les historiens du droit en débattent. Dès l’époque médiévale, un plaideur peut se plaindre en justice d’un acte de la puissance publique, émanant le plus souvent d’un seigneur à l’époque féodale. Jean-Louis Mestre en déduit qu’il existe une justice administrative. Toutefois, François Burdeau soutient la thèse inverse, estimant qu’il n’y a pas « justice administrative » tant qu’il n’existe pas deux ordres de juridictions distincts ; or cette distinction entre juridiction civile et juridiction administrative n’est pas concevable dans l’ancienne France qui n’envisage aucune séparation des pouvoirs. Sans doute ces deux thèses ne se contredisent pas totalement, mais sont partiellement conciliables ; pourtant, notre objectif n’est pas l’analyse de cet ordre judiciaire séculier.

Sur un point, peut-être, peut-on voir une relative similitude, dans l’histoire, entre le système ecclésiastique et le système séculier. Dans l’un et l’autre cas, des actes de nature administrative peuvent faire l’objet de recours : recours judiciaire, extra-judiciaire, peut-être recours gracieux. Peu importe. Dans cette étude, retenons seulement que l’Église pour sa part, les pouvoirs séculiers pour leur compte, admettaient d’examiner un acte administratif, et ceci depuis l’époque médiévale pour le moins. Dans une organisation qui ne comptait pas un « pouvoir administratif », distinct des autres autorités, il ne pouvait guère être question de confier l’examen de ces actes à une instance spécifique, détenant une compétence pour statuer sur les litiges administratifs.

En ce qui concerne l’État en France, des instances particulières se mettent progressivement en place au début du xix° siècle (conseils de préfecture et conseil d’État) ; elles n’acquièrent que progressivement leur indépendance par rapport au pouvoir exécutif et au gouvernement (1871).

Qu’en est-il pour l’Église ? La Signature apostolique connaît plusieurs réformes au cours de son histoire. Deux sont fondamentales : celle opérée par Sixte Quint en 1588, dans la constitution Immensa Aeterni, puis celle de Pie X en 1908 par la constitution Sapienti consilio. Ni l’une ni l’autre ne créent un tribunal administratif. En 1908, l’Église et le gouvernement de la curie romaine sont marqués par la doctrine dite de la Société Parfaite ; l’un des points essentiels de cette théorie consiste à souligner que l’Église possède tous les attributs d’un État et d’un gouvernement étatique. Les rédacteurs du Code de 1917 construisirent leur système en fonction de la Societas Perfecta. Toutefois, ils n’instituent pas une juridiction administrative, à l’instar de ce que connaissaient les États. Tout juste peut-on déceler, dans le Code de 1917, une ébauche d’organisation d’une telle juridiction, qui n’est pas encore réalité[6]. Il faut attendre 1967 pour que le bienheureux Paul VI crée un tribunal, ou plus exactement une section à l’intérieur du tribunal qu’est la Signature apostolique, chargée de régler le contentieux né de l’exercice d’un pouvoir administratif dans l’Église.

En 2017, l’Église célèbre donc le jubilé de tribunal !

  1. Quelques exemples significatifs

Pour entrer dans le concret, illustrons les propos ci-dessus, par quelques exemples de ce que nous appelons aujourd’hui justice administrative, en nous attachant en particulier aux épisodes qui ont marqué la mémoire collective.

2.1. La justice des premiers temps

Dans les premiers temps de l’Église, de nombreux textes du Nouveau Testament évoquent une situation où l’autorité religieuse adopte ou envisage d’adopter une décision contestable, voire injuste, qu’une autre autorité religieuse invite à rectifier. En voici un exemple :

Jean, l’un des Douze, disait à Jésus : « Maître, nous avons vu quelqu’un expulser les démons en ton nom ; nous l’en avons empêché, car il n’est pas de ceux qui nous suivent. »     Jésus répondit : « Ne l’en empêchez pas, car celui qui fait un miracle en mon nom ne peut pas, aussitôt après, mal parler de moi ; celui qui n’est pas contre nous est pour nous »[7]

A cette époque, il existe déjà des controverses et aussi des divisions[8] que les premières communautés chrétiennes cherchent à résoudre en leur sein. Ainsi, une veuve qui s’estime lésée par un diacre peut demander à être entendue par un prêtre, un évêque ou un apôtre[9]. La justice ecclésiastique s’applique à résoudre les tensions à l’intérieur de l’Église, comme l’illustrent Eusèbe de Césarée[10], Kevin Matthews[11] ou Charles-Henri Hefele :

Si un prêtre a un conflit avec son évêque ou avec un autre évêque, il doit porter la dispute devant le synode de l’Eparchie (province). Si par contre un évêque ou un clerc a un conflit avec le Métropolitain de la province lui-même, il doit choisir l’exarque du diocèse ou le Siège de Constantinople, et porter l’affaire devant lui[12].

Il en résulte une activité juridique ecclésiastique intense, au point que :

Certains évêques, dont saint Augustin, se plaignirent d’être surchargés de procès, qui les détournaient de leur vraie mission[13].

Méditons un de ses sermons à propos de la justice :

L’ivraie est partout. Où l’ennemi n’a-t-il pas semé l’ivraie ? […] En a-t-il semé parmi les laïcs sans en semer parmi les clercs, et parmi les évêques ? […] Parfois d’ailleurs le jugement humain pense que tels sont du froment, et ils sont de l’ivraie ; et on pense que tels sont de l’ivraie, mais au vrai, ils sont du froment. […] A cause de ces destinées cachées, l’Apôtre dit : « Ne jugez pas avant le temps jusqu’à ce que vienne le Seigneur, et il illuminera les secrets des ténèbres et manifestera les pensées des cœurs ; alors chacun recevra de Dieu la louange » (1 Cor. 4, 5-6) La louange de l’homme passe ; souvent l’homme loue ce qui est mal, et il ne le sait pas ; parfois l’homme accuse un saint, et il ne le sait pas. Que Dieu pardonne à celui qui ne sait pas et qu’il vienne en aide à celui qui souffre. [14]

2.2. L’Inquisition

A l’approche de l’an mille, et au XIème siècle, l’hérésie constitue une menace grave qu’il fallait éliminer par le signe de la croix et, en cas de besoin, par le glaive et le feu[15]. Des bûchers apparaissent en 1022 à Orléans, sous l’instigation du Roi Robert II :

Le roi Robert a fait brûler vives plus de quatorze personnes d’entre les meilleurs clercs et les premiers laïcs de la ville[16].

Il semble s’être agi d’une innovation, encore que la décision du souverain ait été légitimée par le consentement de cinq évêques et des grands laïcs présents.[17].

Certains ecclésiastiques essayent de tempérer la sévérité du pouvoir séculier et la vindicte populaire.

_ Ce verdict sévère et, semble-t-il, inouï[18], suscita d’ailleurs des réactions mitigées dans les milieux ecclésiastiques[19].

_ Dans certains cas, on vit même des prélats s’opposer de façon très ferme contre l’usage de la violence contre les hérétiques.

_ Wazon de Liège condamne la praecipitam Francorum rabiem qui, dans beaucoup de cas, avait abouti à massacrer des suspects sans même les avoir jugés[20].

_ En 1135, l’évêque Albéron II de Liège et son clergé s’opposèrent avec un certain succès au massacre des premiers cathares arrêtés dans le diocèse, et réussirent à arracher la plupart d’entre eux à la fureur populaire[21].

Rome joue également un rôle croissant d’arbitre judiciaire en matière de discipline ecclésiastique[22] :

Après la victoire de la réforme grégorienne et la fin du schisme de 1130[23], l’Église romaine était devenue une véritable haute cour de justice vers laquelle affluaient de plus en plus fréquemment des appels de toute sorte. […] Bien que l’initiative ne partît jamais de Rome, les appels venus de l’extérieur incitèrent la Curie romaine à assumer le rôle d’arbitre[24].

Après avoir tenté en vain de raisonner les responsables cathares, l’Église et l’Etat adoptent une triple réponse : pastorale avec les frères prêcheurs, militaire avec la croisade contre les Albigeois, et juridique avec l’Inquisition.

Les faits sont en tout état de cause incontestables : après avoir longtemps hésité et fluctué, la papauté a choisi, à partir de la fin du XIIème siècle et surtout du XIIIème siècle, d’utiliser la manière forte contre toutes les formes de dissidence religieuse, qu’il s’agisse de la croisade contre les Albigeois lancée par Innocent III en 1209, ou des sanctions extrêmement rigoureuses qui furent prises contre les hérétiques dans les années 1215-1230[25].

Formellement, l’Inquisition médiévale[26] est introduite devant les tribunaux diocésains ecclésiastiques par le pape Innocent III en 1199, tandis que Grégoire IX l’organise en février 1231 avec la constitution Excommunicamus qui prescrit la détention à vie pour les hérétiques repentis, et la peine de mort pour les hérétiques obstinés[27]. Son histoire est porteuse de nombreux préjugés, qu’il convient d’objectiver.

On a fait courir sur l’Inquisition de si fantastiques légendes que le simple rétablissement d’une perspective adéquate, avalisée par l’accord unanime de ceux que la communauté scientifique reconnaît comme les meilleurs spécialistes, peut ressembler à un plaidoyer. [28]

En 1542, le pape Paul II a institué une commission de six cardinaux ayant pour mission de veiller aux questions de foi, pour la préserver des erreurs et de fausses interprétations. Cette commission, connue somme Sainte inquisition romaine et universelle, avait au début le caractère exclusif de tribunal pour les causes d’hérésie et de schisme[29].

En 1998, l’Église a fait un retour historique sur l’Inquisition, lors d’un colloque international tenu à Rome du 29 au 31 octobre 1998, dont les actes ont été publiés en 2003[30]. Le côté négatif de l’Inquisition y est reconnu :

Nous admettons aujourd’hui d’un commun accord que ce combat implacable [de l’inquisition] n’a connu que des victoires amères dont le christianisme catholique paie encore le prix : encore faut-il, à distance prudente d’une apologétique à courte vue comme d’une culpabilité anachronique, saisir sur le vif, en toute lucidité historique et doctrinale, l’évolution pluriséculaire des rapports complexes entre fides e mores, entre foi et hérésie, entre orthodoxie et hétérodoxie. [31]

A l’inverse,

Il faut cependant dire que l’inquisition a été un progrès, car plus personne ne pouvait être jugé sans un inquisitio, c’est-à-dire sans qu’il y ait eu un examen, une enquête[32].

En effet, le volet positif de l’Inquisition n’a pas été assez mis en valeur car, à tout prendre, il vaut mieux une justice entachée d’irrégularités[33] qu’une expédition militaire[34] caractérisée par ce dicton « Tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens », formulé au cours de la croisade contre les Albigeois[35]. Il semble également que l’Inquisition ait permis de limiter le nombre des exécutions, dans un contexte où tout le monde était suspect :

Aux XIVème et XVème siècles, les accusations d’hérésie se multiplient et visent désormais tous ceux qui désobéissent à l’Église ou s’opposent à son autorité, y compris dans le domaine temporel. Le cercle des poursuites ne cesse de s’élargir, et l’on finit par considérer comme des hérétiques des hommes et des femmes dont le seul tort était de dénoncer publiquement les abus du clergé et les dérives autoritaires de la hiérarchie ecclésiastique[36].

Un cas célèbre de la justice ecclésiastique de l’époque est celui des Templiers.

Entre 1307 et 1312, une série de bulles pontificales régissent l’ordre des Templiers à la suite d’un procès en hérésie sur fond de rivalités entre le pape Clément V et le roi de France Philippe Le Bel. Voici quelques points de repère dans cette affaire complexe. Au matin du 13 octobre 1307, Philippe Le Bel fait arrêter les Templiers en France et demande aux autres souverains européens de faire de même. En 1307, le pape Clément V publie la bulle Pastoralis præminentiæ, qui ordonne aux souverains européens d’arrêter les Templiers qui résident chez eux et de mettre leurs biens sous la gestion de l’Église. En 1308, la bulle Subit assidue prévoit deux procédures distinctes dans le cadre du procès de l’ordre du Temple : l’une concerne les personnes physiques et l’autre l’Ordre en tant que personne morale. Plus tard, la bulle Faciens misericordiam définit les accusations portées contre l’Ordre du Temple. La même année, le pape Clément V absout secrètement Jacques de Molay et les autres responsables de l’ordre du Temple des péchés que l’Inquisition leur avait reprochés[37]. En 1312, la bulle Vox in excelso supprime l’Ordre du Temple, puis la bulle Ad providam transfère les biens du Temple à l’Ordre de l’Hôpital, tandis que la bulle Considerantes dudum établit la situation juridique des anciens Templiers en trois catégories.

 

En général, l’opinion publique considère l’Inquisition comme un tribunal pénal, pourtant les archives du Saint Office ouvertes en 1998, montrent que le droit administratif y était majoritaire :

Il suffit de feuilleter un des volumes de décrets de la congrégation [romaine et universelle de l’Inquisition] pour constater le très faible nombre d’examens doctrinaux par rapport au grand nombre de causes administratives.[38] … /… La gamme de procès administratifs était au contraire très vaste : elle allait des hérésies formelles ou suspectées, qui relevaient plus spécifiquement de la compétence du Saint-Office, à ceux d’apostasie, de bestialité, magie, sortilèges, polygamie, et tant d’autres qui n’étaient qu’indirectement de sa compétence. Les procès les plus nombreux consistaient à résoudre les cas qui lui étaient soumis par les instances inférieures : nonces, évêques et inquisiteurs. Il y avait un contact régulier, étonnamment rapide, avec les instances précitées, et une grande masse de travail [39]» […] pouvant inclure huit réunions des cardinaux dans le cas de Cristoforo Sapone[40].

2.3. Les saints juristes

Au XIIIème siècle, la justice du Moyen-Âge se situe dans une culture bien différente de celles de nos jours, aussi convient-il d’en donner une autre vision, comme le recommande le cardinal Kasper :

Au cours de l’histoire de l’Église, il n’a cessé d’y avoir des sursauts et des mouvements charismatiques qui l’ont secouée, lui évitant le danger et la tentation de l’embourgeoisement. C’est pourquoi on ne peut pas écrire l’histoire de l’Église seulement comme l’histoire d’une institution et encore moins comme une histoire des crimes de l’Église. Elle est avant tout une histoire des saints et une histoire des mouvements de sanctification et de renouveau.[41]

Arrêtons-nous donc sur la vie de deux saints qui ont eu une influence importante sur la justice du Moyen-Âge français, à savoir un laïc, saint Louis (1214-1270) et un clerc, saint Yves (1253-1303).

Selon Jean Foyer[42],

il faut en effet attendre Saint Louis, au milieu du XIIIe siècle, pour qu’un retour s’amorce vers les preuves rationnelles, qui n’étaient demeurées en vigueur que devant les tribunaux ecclésiastiques.

Louis IX, qui règne en France de 1226 à 1270, entreprend une vaste réforme des institutions judiciaires à partir de 1254, avec l’aide des enquêteurs royaux assurant le lien avec la Curia in parliamento, qui jouent le rôle de juridiction d’appel des décisions des tribunaux de bailliage[43]. Il renouvelle la « Quarantaine-le-roi[44] », ordonne la présomption d’innocence, interdit l’ordalie[45] et institue une forme civile de supplicatio[46], permettant de faire appel au roi en cas de litige entre un responsable féodal et un de ses assujettis. Il fait porter sur la justice ses recommandations à son fils[47].

Saint Yves est le saint patron des avocats et de toutes les professions de justice et de droit[48]. De son procès de canonisation[49], mené en 1330 à Tréguier en Bretagne et présenté au pape Jean XXII le 4 juin 1331[50], il ressort qu’Yves Hélory de Kermartin (1253-1303)[51] est un homme honnête et de bonne vie[52], chaste et humble, assidu à la prière, d’une grande austérité et d’une grande bonté envers les pauvres. La plupart des témoins soulignent son grand amour de la justice et de la paix. Voici quelques extraits des témoignages figurant dans l’enquête de canonisation :

Dom Yves […] plaidait en justice gratuitement pour les pauvres, les mineurs, les veuves, les orphelins et toutes les autres personnes malheureuses ; il soutenait leurs causes ; même sans être demandé il s’offrait à les défendre, si bien qu’on l’appelait partout l’avocat des pauvres et des malheureux. … /… Je l’ai vu Official de l’Archidiacre de Rennes et par la suite Official de l’évêque de Tréguier. Il s’est comporté dans ses fonctions d’une manière sainte et juste, rendant à chacun la justice rapidement sans faire de choix ni de différence entre les personnes.[53]

Il était un homme d’un grand esprit de justice, car il s’efforçait d’amener la paix entre les gens en désaccord, respectant leurs droits autant qu’il le pouvait, et quand il ne pouvait pas les amener à faire la paix entre eux, étant official de Tréguier, il leur rendait une justice rapide.[54]

A l’époque en effet où il occupait la charge d’official, il encourageait tous ses collaborateurs à être justes, comme on le disait publiquement, et, quand il le pouvait, il faisait tous ses efforts pour ramener la paix chez les parties adverses. J’ai vu bien des fois dom Yves en personne établir la paix entre beaucoup de gens en désaccord et en procès[55].

Comme elle n’avait pas de quoi payer les mémoires dont elle avait besoin, il demandait aux notaires de la cour en question d’établir leurs mémoires pour l’amour de Dieu, et il les y engageait.[56]

Un chevalier pauvre, nommé Richard Le Roux, de la paroisse de Trédez, diocèse de Tréguier, était en procès contre l’abbé de la Bienheureuse Marie du Relecq, diocèse de Quimper, et n’avait pas de quoi poursuivre son action. Sa pauvreté lui aurait au contraire fait perdre tout son procès, si Dom Yves n’était intervenu pour favoriser et soutenir son action gratuitement et par bonté, et il obtint gain de cause. Cependant, maître Yves Hélory n’accepta de prendre en main l’affaire de ce pauvre que ce dernier n’ait juré sur les Saints Evangiles qu’il se croyait dans son bon droit. Il se fit aussi une obligation d’entendre les témoignages de ceux qui savaient sa cause juste. Dans ces régions-là, ces faits sont de notoriété publique[57].

Il défendait les causes des pauvres, des veuves et des autres personnes malheureuses dans la mesure de ses moyens[58].

Il jouissait d’une grande autorité et d’un si grand respect qu’il remettait d’accord les gens en contestation. C’était d’ailleurs à cela qu’il s’appliquait beaucoup et souvent. Ceux qui étaient en désaccord avaient beau ne pas faire confiance à d’autres, ils se fiaient à lui et il arrivait à les mettre en paix.[59]

S’agissant des peines médicinales, saint Yves n’en administre pas seulement dans ses procès canoniques :

Quand il [Dom Yves] est arrivé dans cette paroisse [de Louannec], l’incurie du recteur précédent, peu ou pas préoccupé du progrès des âmes, avait fait que bon nombre de gens aux mœurs dépravées s’y trouvaient. Dès son arrivée, Dom Yves se mit à prêcher à ses paroissiens la parole de Dieu, et sa prédication fut suivie d’effet au point que les gens honnêtes et bons s’améliorèrent et que les paroissiens mauvais, dépravés ou malhonnêtes, furent remis dans la voie du salut grâce à ses prédications saintes et bonnes, et il amena aussi à faire pénitence ceux qui s’adonnaient publiquement à la luxure ou à l’usure ; ils s’amendèrent grâce à lui, il les fit jeûner au pain et à l’eau certains jours et à certaines époques, à se déplacer sans chemise, à faire des pèlerinages.[60]

Voici comment il se comporte :

Entre moi d’un côté et de l’autre côté Geoffroy de l’Ile et ma mère, il y avait un différend et un procès important concernant des biens meubles et immeubles. Dom Yves insistait auprès des parties pour qu’elles fissent entre elles la paix par arrangement amiable. Mais le plus souvent, Geoffroy n’en voulait pas. Enfin un jour, dom Yves dit aux plaignants qu’il voulait célébrer la messe, qu’ils devaient attendre que la messe fût achevée, car il avait dans le Seigneur espoir et confiance qu’ils aboutiraient après la messe à la paix et la concorde. Enfin la messe dite, dom Yves revint aux plaignants ; et notre Geoffroy qui s’opposait beaucoup avant la messe à la paix et à la concorde, y fut amené par les saintes prières de Dom Yves, c’est ce que je crois, et il offrit de s’en tenir, sur les points litigieux, à l’arbitrage et à la décision de dom Yves, quelle qu’elle fût. Par la suite, dom Yves mit entre les parties bonne paix et concorde et donna à ce procès une fin qui donna satisfaction à chacune des parties.[61]

Enfin, l’évocation de Saint Yves, après sa mort, est à l’origine de très nombreux fait miraculeux et guérisons inexplicables, ainsi que de la résurrection de plus de dix personnes[62].

2.4. L’index et la condamnation des livres

Au XVIème siècle, après l’émergence du protestantisme, un nouvel épisode marque la justice de l’Église, à savoir la publication de l’Index librorum prohibitorum, l’Index des livres interdits, créé en 1559 et actualisé jusqu’à la suppression en 1966[63], par ajout du pape ou de la Sacrée Congrégation de l’Inquisition romaine et universelle. De très nombreuses décisions administratives sont prises à l’encontre d’écrivains, clercs ou non, avec un droit de défense plus ou moins important accordé aux auteurs concernés.

A titre d’exemple, Galilée est convoqué par le Saint Office à propos de son livre à succès Dialogue sur les deux grands systèmes du monde de Ptolémée et de Copernic qui a reçu l’imprimatur, mais qui rallie la théorie de l’héliocentrisme de Copernic condamnée quinze ans plus tôt. Le 22 juin 1633, au couvent dominicain de Santa-Maria, une sentence est rendue contre le Galilée[64] qui, sous la menace de la torture, prononce alors la formule d’abjuration que le Saint Office a préparée[65]. Le 31 octobre 1992, il est réhabilité par saint Jean-Paul II à l’occasion de son discours de l’Académie pontificale des sciences, où il reconnaît les erreurs de certains théologiens des siècles passés, sans d’ailleurs fustiger la justice ecclésiastique de l’époque qui avait assigné Galilée à résidence, plutôt que de l’envoyer en prison.[66].

2.5. Les procès en sorcellerie

Le 5 décembre 1484, le pape Innocent VIII promulgue la bulle Summis desiderantes affectibus qui conduit les deux inquisiteurs dominicains Heinrich Kramer et Jacob Sprenger à mener en Allemagne, une chasse aux sorcières cruelle. En 1486, à Strasbourg, les inquisiteurs publient Malleus Maleficarum, c’est-à-dire le Marteau des Sorcières, en essayant notamment d’expliquer pourquoi les femmes sont plus concernées par la sorcellerie que les hommes. Ce livre, qui fait l’objet de vingt-sept éditions entre 1487 et 1669, est un manuel destiné au combat contre le démon, écrit à l’usage d’inquisiteurs et de magistrats participant à la lutte contre la sorcellerie. Michelet note en 1862 :

Aux anciens pénitentiaires, aux manuels des confesseurs pour l’inquisition des péchés succédèrent les Directoria pour l’inquisition de l’hérésie qui est le plus grand péché. Mais pour la plus grande hérésie qui est la sorcellerie, on fit des Directoria ou manuels spéciaux, des marteaux pour les sorcières. Ces manuels ont atteint leur perfection dans le Malleus de Sprenger[67]

Juridiquement, les affaires de sorcellerie relèvent des tribunaux civils et non de l’Inquisition, mais cela n’empêche pas certains inquisiteurs de pouvoir faire partie des magistrats. En effet, dans les anciens Pays-Bas et dans les principautés de Liège et de Stavelot-Malmédy, la Nemesis Carolina[68] de Charles Quint autorise les cours de justice locales à arrêter, interroger et punir par le feu ceux et celles qui sont suspectés de s’adonner à la sorcellerie. Un peu partout en Europe, la justice civile sévit contre les sorcières, en collaboration plus ou moins étroite avec l’Église[69], avec un apogée entre 1550 et 1650. En Allemagne, dans les années 1620 à 1630, les bûchers de sorciers et de sorcières s’allument par centaines, tandis que :

Les réserves exprimées en 1631 par le jésuite rhénan Frédéric Spee à l’égard des procédures judiciaires qui mènent au bûcher tant de prétendues sorcières n’ont pas été entendues[70].

A cette époque, le mécanisme des procès civils est loin de respecter les droits de la défense :

Quelle que soit la juridiction devant laquelle ils se déroulent, le mécanisme des procès en sorcellerie est pratiquement toujours le même. Les choses commencent par le « commun bruit », la rumeur qui désigne un homme ou une femme. […] La rumeur se fait accusation, cet homme ou cette femme est un ou une sorcière ; un juge intervient, qui fait arrêter le ou la suspecte ; le procès s’engage. Dès lors, le but principal du juge va être d’obtenir l’aveu du prévenu. Qu’il avoue quoi ? Non pas des maléfices : le commun bruit, confirmé par les dépositions de quelques témoins, suffisent pour l’établir. Mais qu’il avoue ses relations avec le diable, car ce sont elles qui, juridiquement, le qualifient comme sorcier. […] La plupart des procès font état d’aveux de cette sorte. […] Au reste, pour confirmer ou suppléer les aveux, le juge a aussi le moyen d’administrer la preuve que l’accusé s’est livré au démon. Cette preuve, c’est la marque du diable, un point du corps insensible, qu’un chirurgien s’emploie à rechercher en piquant partout le malheureux avec une aiguille. Et s’il réagit à toutes les piqûres ? La réponse du juge est prête : le démon vient au secours de sa créature en dissimulant la fameuse marque. […] Puisque, en fait, le mécanisme est monté pour que toute personne qu’il saisit soit presque immanquablement vouée à la condamnation, la torture, finalement, sert moins à accabler le sorcier qu’à lui faire avouer ses complices. […] Il est certain qu’on a brûlé beaucoup plus de sorciers durant ce demi-siècle, que d’hérétiques durant le demi-siècle précédent[71].

Ainsi, l’Inquisition tant critiquée, n’a pas à rougir face à la cruauté des tribunaux civils. Signalons en outre que des procès concernent aussi les animaux[72], avec des condamnations à mort pour avoir tué des personnes ou abîmé des récoltes[73], mais aussi pour crime de sorcellerie[74] ! Les dernières condamnations à mort pour crime de sorcellerie sont notées vers 1679 en France.

2.6. La justice pour les « indigènes »

Dans les colonies, des voix se font entendre dès le début du XVIe siècle, comme celle d’Antonio Montesinos, pour dénoncer les exactions commises par des colons chrétiens contre les populations d’Amérique du Sud.

En 1537, le pape Paul III condamne officiellement l’esclavage des Indiens « ou de tout autre peuple qui viendrait à être découvert ». Cette interdiction est respectée quelque temps par l’Espagne, mais non pas par le Portugal.

Treize ans plus tard, la controverse de Valladolid, tenue en 1550-1551 à la demande de Charles Quint et des autorités ecclésiastiques, est l’une des étapes du débat juridique de l’époque, qui conduit finalement à protéger les Sud-Américains, alors que les Noirs d’Afrique et les Indiens d’Amérique du Nord sont réduits en esclavage ou décimés.

Quant à la mise en pratique du droit positif en faveur des esclaves, elle ne va pas de soi :

Ainsi au Mexique, il est, par exemple, du devoir des citoyens de dénoncer à l’Inquisition et à l’Audienca tout comportement illégal, mais cette protection juridique n’a guère d’impact réel sur l’institution de l’esclavage. L’esclave demeure entièrement à la merci de son maître[75].

A plusieurs reprises, des religieux qui protestent contre l’esclavage au sein de leur ordre sont rappelés en métropole, comme les jésuites Marcia Garcia et Gonçalo Leite, ou excommuniés, comme les capucins Francisco José de Jaca et Epifanio de Moirans, dès lors qu’ils dépassent la simple dénonciation des mauvais traitements faits aux esclaves, en remettant en cause l’injustice de l’institution[76].

2.7. La justice pendant les guerres de religion

Après la Réforme[77] et le Concile de Trente[78] ainsi que son adoption progressive par les synodes provinciaux, la France est secouée par les guerres de religion, avec des épisodes sanglants, comme la conjuration d’Amboise (1560), la Saint-Barthélemy (1572), les dragonnades[79] et la guerre des Cévennes ou guerre des Camisards[80], malgré la trêve entre l’édit de Nantes (1598) et l’édit de Fontainebleau (1685). A cette époque la justice royale a pris le pas sur la justice religieuse. Parmi d’autres, une affaire a défrayé la chronique, à savoir l’affaire Calas, que Voltaire a qualifiée de « procès de l’intolérance et du fanatisme religieux »[81].

Diplômé en droit, Marc-Antoine Calas veut devenir avocat mais il se heurte à la législation antiprotestante qui interdit cette profession aux « prétendus réformés ». Il travaille alors dans la boutique de son père à Toulouse, où il est retrouvé mort le 13 octobre 1761. L’enquête ne permet pas de trouver le meurtrier, et son père, Jean Calas, soumis deux fois à la question ordinaire et extraordinaire, confirme qu’il est innocent ainsi que son entourage, et ne confesse rien au Père Bourges près de lui, excepté qu’il veut mourir protestant. Il prend Dieu à témoin et le conjure de pardonner à ses juges. En 1762, le Parlement de Toulouse le condamne cependant à la peine de mort. Deux ans plus tard, une assemblée de quatre-vingt juges casse l’arrêt du Parlement de Toulouse et ordonne la révision entière du procès. En février 1765, le capitoul David de Beaudrigue est destitué, et le 9 mars 1765, Jean Calas et sa famille sont définitivement réhabilités à l’unanimité par la Chambre des requêtes de l’hôtel[82].

 

Un autre sujet évoqué au XVIIème siècle concerne l’habitude de certaines familles de disposer de leurs enfants, en les mariant ou en les mettant au couvent, y compris contre leur gré.

Quoiqu’il n’y ait dans les couvents que trop de ces victimes qui aient été forcées d’embrasser l’état religieux, aucun auteur n’a encore écrit sur cette matière que l’intérêt a rendue commune[83].

S’agissant du recours à la justice ecclésiastique, la mémoire collective a conservé le cas de Marguerite Delamarre, qui aurait inspiré le roman anticlérical « La religieuse » que Diderot a écrit en 1760 et 1780 et qui a été publié à titre posthume en 1796.

L’histoire est inspirée de celle d’une religieuse française de l’abbaye de Longchamp nommée Marguerite Delamarre, née en 1717 et décédée après 1790. Elle a fait parler d’elle en 1758 pour avoir vainement demandé à la justice ecclésiastique d’être libérée du cloître où ses parents l’avaient enfermée.

2.8. La justice française après la Révolution

Alors que le Siècle des Lumières cherchait à s’affranchir de la tutelle ecclésiastique, des philosophes comme Locke ou Montesquieu proposent la théorie de la séparation des pouvoirs législatif, exécutif[84] et judiciaire[85]. Par ailleurs,

La revendication d’une séparation de l’administration et de la justice apparaît dans les cahiers de doléance, lorsqu’ils évoquent la suppression des intendants[86].

Ainsi, la loi du 16-24 août 1790 sépare les autorités administratives et judiciaires et, dans la logique de séparation des pouvoirs, elle défend aux tribunaux de prendre part à l’exercice des pouvoirs législatif et exécutif.

Le juge ordinaire ne peut pas intervenir dans l’activité de l’administration, sous peine de forfaiture (art. 13)[87].

En matière de jurisprudence, son application est notamment marquée par l’arrêt Blanco[88], où le Tribunal des conflits[89] consacre à la fois la responsabilité de l’État pour les dommages causés à des citoyens par des services publics, et la compétence de la juridiction administrative pour trancher le litige :

Considérant que l’action intentée par le sieur Blanco contre le préfet du département de la Gironde, représentant l’État, a pour objet de faire déclarer l’État civilement responsable, par application des articles 1382, 1383 et 1384 du Code civil, du dommage résultant de la blessure que sa fille aurait éprouvée par le fait d’ouvriers employés par l’administration des tabacs ; considérant que la responsabilité, qui peut incomber à l’État, pour les dommages causés aux particuliers par le fait des personnes qu’il emploie dans le service public, ne peut être régie par les principes qui sont établis dans le Code civil, pour les rapports de particulier à particulier ; que cette responsabilité n’est ni générale, ni absolue ; qu’elle a ses règles spéciales qui varient suivant les besoins du service et la nécessité de concilier les droits de l’État avec les droits privés ; que, dès lors, aux termes des lois ci-dessus visées, l’autorité administrative est seule compétente pour en connaître.

Il convient de lire les travaux des historiens du droit, comme Jean-Louis Mestre[90] ou François Burdeau[91] pour approfondir la manière dont le droit et la justice administratifs se sont mis en place après la Révolution, avec des règles exorbitantes du droit commun.

2.9. La justice ecclésiastique après 1917

L’histoire du Tribunal suprême de la Signature apostolique, qui hébergera plus tard le tribunal administratif de l’Église, fait l’objet de nombreux travaux, comme ceux de P. Santini[92], J.D. Mc Clunn[93], H Schmitz[94], C. Lefebvre, K. Matthews[95], Frederico D’Ostilio[96], Gianfranco Ghirlanda[97], Edouardo Labanderia[98], John J. Coughlin[99], Ignatius Gordon[100], Niccolo del Re[101].

En 1917, cette mesure est reprise dans des termes très voisins, au canon 1601 du code de 1917[102]  qui, avec les canons 1552 §2 et 1667, donne une base à la justice administrative de l’Église.

Voici un exemple de recours hiérarchique datant de 1927, contre un refus d’imprimatur pour un livre évoquant la mystique stigmatisée bavaroise, Thérèse Neumann.

En 1926, Thérèse Neumann fait l’objet d’un discours bienveillant de l’archevêque de Munich, futur cardinal Faulhaber, mais en 1927, le livre Das Leid einer Glückseligen[103] qui parle d’elle, reçoit un refus d’imprimatur de la part de l’évêque de Ratisbonne. Cette décision fait l’objet d’un recours hiérarchique auprès de la Curie romaine[104] mais il n’a pas de résultat positif car, d’après Agnès Demazière[105], « L’appel adressé à Rome par Witt reflète également une contestation de l’autorité épiscopale. Traditionnellement, le Saint-Office préfère laisser à l’évêque le soin de se prononcer sur la naturalité ou la surnaturalité des phénomènes mystiques et évite d’intervenir. Quand elle intervient, la Congrégation vise avant tout à restaurer l’autorité de l’évêque mise en cause. Le refus d’imprimatur de l’évêque est ainsi confirmé. » Par la suite, le Saint-Siège, et le pape Pie XI en personne, cherchent à conserver une neutralité pontificale sur ce dossier, en laissant se dérouler des enquêtes diocésaines et une libre discussion entre la médecine psychiatrique et la psychologie religieuse catholique à propos des stigmates et l’inédie de Thérèse Neumann. En fin 1937, la Congrégation romaine demande cependant le transfert dans une autre paroisse du curé de Konnersreuth, directeur spirituel de Thérèse, car elle craint une capacité inconsciente de suggestion réciproque[106]. Le 13 février 2005, Gerhard Ludwig Müller, évêque de Ratisbonne, ouvre une procédure de béatification, qui n’est pas conclue à ce jour.

 

Pour revenir en France, trois tensions avec Rome ont marqué l’histoire du début du XXème siècle, à propos de Marc Sangnier, de l’Action française et des prêtres ouvriers. Sans vouloir remuer le passé, évoquons-les rapidement pour nous souvenir de la situation de la justice ecclésiastique avant la période que nous nous proposons d’étudier.

 

A gauche de l’échiquier politique français, Marc Sangnier, est co-fondateur du Sillon.

Le Sillon a pour but de réaliser en France la république démocratique. Ce n’est donc pas un mouvement catholique, en ce sens que ce n’est pas une œuvre dont le but particulier est de se mettre à la disposition des évêques et des curés pour les aider dans leur ministère propre. Le Sillon est donc un mouvement laïc, ce qui n’empêche pas qu’il soit aussi un mouvement profondément religieux.

Ce projet reçoit tout d’abord un satisfecit du pape Léon XIII car il permet de rallier de nombreux ouvriers à l’Église catholique :

Il m’est agréable de vous faire savoir que le but et les tendances du Sillon ont hautement plu à Sa Sainteté[107].

Cependant, la trop grande proximité du Sillon avec les partis anticléricaux de la gauche française aboutit en 1910 à une condamnation du mouvement par le pape Pie X. Protestant de son attachement à l’Église, Marc Sangnier dissout alors le mouvement et arrête la publication de sa revue.

Un scénario voisin se produit à droite de l’échiquier politique, après que Charles Maurras a donné une impulsion monarchique et antisémitique à l’Action française fondée en 1898 lors de l’affaire Deyfus. Dans les années 1910, il reçoit la bénédiction du pape Pie X en raison « d’immenses services rendus à l’Église ». En 1926, le mouvement est condamné par le cardinal Andrieux puis par le pape Pie XI et, le 29 décembre 1926, plusieurs livres de l’Action française sont mis à l’index. Le 18 juin 1939, l’Action française signe un document de compromis dans laquelle elle reconnaît ses erreurs passées et proteste de son attachement à l’Église. Le pape Pie XII lui accorde son pardon en juillet 1939[108].

Une troisième tension concerne l’épisode des prêtres ouvriers, créés en réponse à la lettre encyclique Rerum novarum du pape Léon XIII :

Nous sommes persuadé, et tout le monde en convient, qu’il faut, par des mesures promptes et efficaces, venir en aide aux hommes des classes inférieures, attendu qu’ils sont pour la plupart dans une situation d’infortune et de misère imméritées.

A partir de 1942, plusieurs prêtres deviennent ouvriers et, bien souvent, ils dénoncent leurs conditions de vie mais leur attitude ne convient pas au patronat catholique français qui les dénonce aux évêques et à la Curie romaine[109]. Le 7 mars 1953, les cardinaux Liénard et Feltin demandent au maître général des frères prêcheurs d’éloigner le RP. Maurice Montuclard, et le 16 mars 1953, son article « l’événement de la foi » est mis à l’index. Le 27 mai 1953, les prêtres-ouvriers A. Piet (O.P), A. Gauche et C. Monnier (S.J.) doivent quitter leur diocèse. Le 27 juillet 1953, le cardinal Pizzardo interdit les stages en usine pour tous les séminaristes. Les 30 et 31 juillet 1953, les RP. Avril et Liégé sont convoqués par la Curie généralice de l’ordre des frères prêcheurs à Rome. Le 29 août 1953, la Curie envoie une circulaire sur le retrait progressif des prêtres-ouvriers religieux. Le 6 septembre 1953, le séminaire de la mission de France est fermé. Le 11 novembre 1953, le père Feret est traduit devant le Saint Office. Le 26 décembre 1953, le cardinal Feltin reçoit les prêtres-ouvriers jésuites, et ceux-ci quittent le travail le surlendemain. Le 7 février 1954, le Père Avril, prieur provincial des Dominicains, démissionne. Le 8 février 1954, le père Chenu est exilé à Rouen et perd ses privilèges de maître en théologie, le Père Feret interrompt son enseignement à Paris, le Père Boisselot quitte Paris et cesse d’être le directeur du Cerf, le père Congar s’exile. Le 1er mars 1954, le Vatican met fin aux prêtres-ouvriers. Le 27 avril 1954, l’Assemblée plénière de l’épiscopat publie une déclaration pastorale en matière sociale à l’usage du clergé.

 

Ces positions de l’Église face aux prêtres-ouvriers sont relayées par la presse[110], et donnent lieu à des incompréhensions relatées par de nombreuses publications[111]. Au plan dogmatique et ecclésiologique, la position très dure de l’Église doit être interprétée à la lumière du contexte historico-politique de l’époque, marqué par la guerre froide et par l’encyclique Quadragesimo anno (1931), où Pie XI condamnait la doctrine socialiste dans des termes abrupts : « Personne ne peut être en même temps bon catholique et vrai socialiste », que Jean-Paul II a expliqués plus tard dans Centesimus Annus (1991).

C’est l’erreur fondamentale du socialisme qui est de nature anthropologique, c’est-à-dire que le socialisme considère que l’individu est un simple élément, une molécule de l’organisme social, de sorte que le bien de chacun est tout entier subordonné au fonctionnement du mécanisme économique et social.

Au plan canonique, les publications relatives aux prêtres-ouvriers mettent en évidence les limites des recours hiérarchiques de l’époque[112]. Elles ont peut-être contribué au changement majeur apporté par le Concile Vatican II, pour une meilleure prise en compte des droits des fidèles.

Indépendamment de l’aspect politique, l’ecclésiologie préconciliaire pose des problèmes comme le raconte le cardinal Robert Sarah lui-même lorsqu’en 1966, il était séminariste en France :

Pendant les vacances, nous travaillions dans des fermes ou des ateliers pour gagner un peu d’argent. [Notre évêque] se montrait intransigeant dans la gestion des sommes que nous gagnions. Il ne voulait pas que nous puissions garder un centime de nos salaires. Un jour, le plus âgé d’entre nous n’a pas respecté la consigne et a gardé l’argent pour s’acheter une moto. […] Notre évêque s’est mis en colère contre tout le groupe, y compris ceux qui s’étaient conformés à ses consignes comme moi.  […] J’ai alors traversé une période de doutes. Dans une profonde confusion, j’ai vaguement envisagé de quitter le séminaire. J’ai été voir mon père spirituel, le père Denis pour lui exprimer ma déception. Il m’a déclaré : « écoute-moi bien Robert. J’ai connu quatre évêques à Nancy, avec leurs défauts, parfois difficiles et leurs qualités, très édifiantes. Tu ne seras pas prêtre pour l’évêque mais pour le Christ, malgré ou avec ton évêque. Certes c’est lui qui t’appellera au sacerdoce mais tu seras prêtre pour l’Eglise. Aujourd’hui, tu dois composer avec Mgr. Tchidimbo, et demain, tu devras apprendre à apprivoiser le caractère de son successeur. La seule surprise fut que le successeur de Mgr. Tchidimbo [archevêque de Conakry] par une mystérieuse volonté de Dieu, s’avéra être moi…[113].

 

Laissons maintenant le survol historique pour approfondir la période retenue pour notre recherche, à savoir les années 1967 à 2017.

 

[1] Bruguès (Mgr Jean-Louis op.) Archiviste et bibliothécaire de la Sainte Église romaine, depuis 2012 Église et mémoire – Conférence donnée à Albi le 14 novembre 2015, http://catholique-tarn.cef.fr/Église-et-memoire-Conference

[2] Vigano (Mgr Dario Edoardo), propos rapportés par l’agence catholique italienne SIR le 19 juillet 2017.

[3] Ce chapitre est principalement constitué d’apports d’historiens du droit actuels, qui ont souhaité préserver leur anonymat.

[4] François (pape), La correction fraternelle s’exerce avec amour et humilité, homélie à Sainte Marthe du 12 septembre 2014.

[5] Gaudemet (Jean), L’Église dans l’empire romain (iv°-v° siècles), Paris, Sirey, 1989, coll. Histoire du Droit et des Institutions de l’Église en Occident, 818 p. ; sur l’organisation judiciaire, voir notamment p. 229 et sq.

[6] Pour le Code de 1917 et la suite des évolutions historiques, voir l’article de P. Valdrini, dans Pouvoirs, 1981.

[7] Marc, 9, 38-39.

[8] Kasper (Card. Walter), L’Église catholique. Son être, sa réalisation, sa mission, Paris 2014, Cerf, p. 230.

[9] Cf. Actes 6, 1-3 ; 1. Tim. 5, 16 ; Jacques 1, 27.

[10] Emefu (Clément Chimaobi), CSSp, « La déontologie du juge ecclésiastique », mémoire de master 2 de recherche en histoire du droit canonique, soutenu le 7 septembre 2016 à l’Université Paris-Sud et à l’Institut catholique de Paris.

[11] Matthews (Kevin), « The Development and Future of the Administrative Tribunal », Studia Canonica, XVIII, (1984), p. 3-233. Voir notamment le chapitre 3 sur l’appel extrajudiciaire et le recours hiérarchique.

[12] Hefele (Charles Joseph) A history of the Christian Councils (Trans W.T. Clark), 2nd ed. revised, Edinburgh, T. & T. Clark, 1894-1896, vol. 3, p. 395, traduit de l’anglais par l’auteur.

[13] Gaudemet (Jean), Église et cité, histoire du droit canonique, Paris, Cerf, Montchrestien, 1994, p. 112.

[14] Augustin (Saint) Sermon à Caillau, 11, 5 ; M. A. 250-251 dans Saint Augustin, Le visage de l’Église, p. 311-312.

[15] Vauchez (André), Les Hérétiques au Moyen Âge. Suppôts de Satan ou chrétiens dissidents ? Paris, CNRS éditions, 2014, p. 35.

[16] Ripoll (Jean de), lettre à l’abbé-évêque Oliba, citée par André de Fleury, in Vie de Gauzlin, abbé de Fleury, R. H. Bautier & G. Labory (éd), Paris 1969, p. 18, cité par André Vauchez, op. cit.  p. 35  note 66.

[17] Vauchez (André), op. cit.  p. 35.

[18] Celui du roi Robert à propos des hérétiques d’Orléans.

[19] Vauchez (André), op. cit. p. 36.

[20] Idem, p. 39.

[21] Idem, p. 40.

[22] Il s’agit notamment des cas de simonie (trafic de biens spirituels), nicolaïsme (« incontinence » du clergé) ou d’investiture des clercs par les laïcs.

[23] Anaclet II devient antipape après l’élection contestée d’Innocent II. Le schisme s’éteint en 1238 lorsque Victor IV, successeur de Roger de Sicile défenseur d’Anaclet II, se range du côté d’Innocent II.

[24] Paravicini Bagliani (Agostino,) « L’Église romaine de Latran I à la fin du XIIème siècle », in Histoire du Christianisme : Apogée de la papauté et expansion de la chrétienté, sous la direction de J-M Mayeur et al. Paris, Desclée, 1993, Volume 5, 973 p. (p. 201).

[25] Idem, p. 61 et note 42.

[26] Il ne faut pas la confondre avec l’Inquisition espagnole qui était en fait un tribunal du roi d’Espagne, contre lequel les papes ne manquèrent pas de protester.

[27] Corpus iuris canonici X, 5, 7, 14.

[28] Dedieu (Jean-Pierre), L’inquisition, Paris, Cerf, 1987, p. 8/126.

[29] Amato (Mgr Angelo), alors secrétaire de la Congrégation pour la dioctrine de la foi, « La Congrégation pour la doctrine de la foi a toujours été un tribunal » in Zenit, 1er avril 2004, traduit par Anne Kurian.

[30] Comitato del grande jubile dell’anno 2000, Commissione teologico-storiale, L’Inquisizione, Atti del simposio internazionale, Biblioteca apostolica vaticana, 2003, coll Studi e testi, n° 417, 783 p.

[31] Veneu (Bruno), « Y a-t-il une hérésie inquisitoriale ? »,  in « L’Inquisizione, Atti del simposio internazionale. », Rome, Biblioteca apostolica vaticana, 2003, coll Studi e testi, n° 417, p. 491/788.

[32] Ratzinger (Cardinal Joseph) Déclaration dans l’émission Contrastes du 03/03/2005 sur la chaîne de télévision allemande ARD, à propos de son titre de « Grand Inquisiteur moderne ».

[33] Palès-Gobilliard (Annette), « Pénalités inquisitoriales au XIVe siècle », in Crises et Réformes dans l’Église (Actes du 115e congrès national des sociétés savantes, Avignon, 1990), Paris, 1991, p. 143-154 : « l’analyse des archives de Bernard Gui a montré qu’en seize ans (1307-1323) d’exercice à Toulouse, l’Inquisition a prononcé 501 peines et 243 remises de peine, la plupart du temps pour mettre fin à une détention. Plus précisément, il ordonne 29 sentences capitales, 80 condamnations au bûcher concernant des cadavres exhumés, 13 peines de mur étroit (prison ferme), 231 peines de mur large (assignation à résidence) et 107 peines infamantes. Le plus important bûcher, ordonné le 5 avril 1310, fait 17 victimes. »

[34] La prise de Bézier aurait fait entre 5 000 et 10 000 morts.

[35] Berlioz (Jacques), Tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens : la croisade contre les Albigeois vue par Césaire de Heisterbach, Toulouse, Loubatières, 1994, 135 p.

[36] Vauchez (André), Les Hérétiques au Moyen Âge. Suppôts de Satan ou chrétiens dissidents ? Paris, CNRS éditions, 2014, 309 p.

[37] Cette information résulte du parchemin de Chinon conservé aux archives secrètes du Vatican, et étudié par l’historienne italienne Barbara Frale, puis publié par le Vatican en 2007. De ce fait, la condamnation et mise à mort des Templiers sur le bûcher résulte principalement de la responsabilité du roi Philippe le Bel et non de celle du pape ou de l’Église.

[38] Garuti (Adriano), « La santa romana e universale inquisizione : strutture e procedure », in: L’inquisizione. Atti del Simposio Internazionale Rome, Biblioteca apostolica vaticana, 2003, coll Studi e testi, n° 417, p. 383, traduit de l’italien par l’auteur.

[39] Garuti (Adriano), op. cit.  p. 388.

[40] Idem, note 33. Cf. Archivio della Congregazione della Dottrina della Fede. (ACDF)

[41] Kasper (Card. Walter), L’Église catholique. Son être, sa réalisation, sa mission, Paris 2014, Cerf, p. 245.

[42] Foyer (Jean), Histoire de la justice, PUF, 1996

[43]  Collectif, Encyclopédie Larousse (version en ligne www.larousse.fr/encyclopedie/personnage/Louis_IX/130421  consultée le 7 janvier 2016) Louis IX.

[44] La quarantaine-le-roi est un délai de quarante jours institué par Philippe Auguste ou Philippe le Hardi et renouvelée par Louis IX en 1245. Elle permettait d’éviter des guerres privées, en instituant un temps de réflexion obligatoire, on demandait et exigeait des deux clans d’attendre pendant 40 jours avant de régler un conflit.

[45] L’ordalie est une forme de procédure en justice, d’origine religieuse, aussi appelée jugement de Dieu. Elle consiste en une épreuve judiciaire employée au Moyen-Âge pour établir l’innocence ou la culpabilité de l’accusé.

[46] Enregistrées à partir de 1342, les suppliques, demandes de toute sorte, adressées au pape, forment l’un des fonds les plus anciens des Archives du Vatican. […] il est essentiel de ne pas isoler les sources pontificales des requêtes adressées aux autres puissances souveraines de l’Europe médiévale, cités italiennes ou royaumes de France, d’Espagne ou d’Angleterre. La comparaison des archives exprimant les demandes des sujets face à leur prince dans l’Occident de la fin du Moyen-Âge montre l’existence d’une forme particulière d’exercice de la souveraineté, qu’on peut qualifier de « gouvernement par la grâce » Cf. Millet (Hélène) Suppliques et requêtes : le gouvernement par la grâce en Occident : 12e-15e siècle, Roma : École française de Rome, 2003, Collection de l’École française de Rome 310, 435 p.

[47] Louis IX : S’il advient que tu deviennes roi, prends soin d’avoir les qualités qui conviennent à un roi ; c’est-à-dire que tu sois juste, que, quoi qu’il arrive, tu ne t’écartes pas de la justice. […] Soutiens de préférence le pauvre contre le riche jusqu’à ce que tu saches la vérité ; et quand tu la connaîtras, fais justice. […] Si tu apprends que tu possèdes quelque chose à tort, rends-le tout de suite, quelque grande soit cette chose, terre, deniers ou autres biens.

[48] Les canonistes ont choisi comme saint patron Raymond de Penyafort qui, en 1234, compila les cinq livres des Décrétales, par ordre de Grégoire IX.

[49] En breton, Zant Erwan.

[50] Le Guillou (Jean-Paul), traduction française de l’enquête qui fut faite à Tréguier « sur la vie, les mœurs et les miracles d’Yves Hélory de Kermartin en vue de sa canonisation », et qui fut présentée le 4 juin 1331 au pape Jean XXII. Saint Yves, ceux qui l’ont connu témoignent, ceux qu’il a guéris témoignent, 2ème édition française, Saint Brieuc, Teck impressions, avril 2003, 160 p.

[51] Né au Minihy de Tréguier en 1253, sous le règne de Saint Louis ; mort là, à deux kilomètres de Tréguier, le 19 mai 1303.

[52] Fuit homo bone vita, fuit homo honeste.

[53] de Kerc’hoz (Jean), clerc et jurisconsulte, paroissien de Pleubian, diocèse de Tréguier, âgé de 90 ans. Témoin n° 1, p. 15-16.

[54] Jaquet, fils de feu Rivallon, de la paroisse de Saint Pierre de Louannec âgé de 50 ans, témoin n° 43, p. 63.

[55] de Trégroin (Darien), recteur du diocèse de Tréguier, âgé de 50 ans et plus, témoin 47, p. 68.

[56] Le frère Pierre, religieux, abbé du monastère de Bégard, de l’ordre de Cîteaux, au diocèse de Tréguier, âgé de 50 ans, témoin n° 19, p. 37-38.

[57] Thomas de Ploulec’h (Alain), diocèse de Tréguier, âgé de 70 ans. Témoin n° 31, p. 49, 50.

[58] de Croyfrooc (Jean), écuyer, paroisse de Ploubezre, diocèse de Tréguier, témoins n° 34, p. 53.

[59] Toulefflam (Hamon), de la paroisse de Plestin au diocèse de Tréguier, ermite de bonne réputation, témoin n° 20, p. 40.

[60] Menguy (Yves), de la paroisse de Louanec, diocèse de Tréguier, témoin n° 35, p. 63.

[61] Portier (Raoul), clerc de Lanmeur, diocèse de Dol, témoin n° 12, p. 30 et témoin n° 13, p. 31.

[62] Il s’agit des personnes suivantes, pour lesquelles plusieurs témoins ont témoigné :

  1. Alain Guigon, fils d’Alain et Adénoro Guidon (témoins 53 à 55)
  2. Yves Rivallon Cohozer, natif de Plouguiel, et mort à Angers (témoins 56 et 57),
  3. Théophanie, fille d’Alain et Mobilia de Roscnezne, de la paroisse de Ploelan, (témoins 58 à 60)
  4. Guenutera, fille de Rivalon Maguet, de la paroisse de saint Scilien (diocèse de Léon), (témoin 61)
  5. Amicie, fille d’Agnès et J. Brancie, de la paroisse de Pommerit le Vicomte (diocèse de Tréguier), (témoin 62)
  6. Henri Olivier ou de Mostier de Léon, paroissien de Plouvenez (diocèse de Quimper) (témoins 63 et 64)
  7. Alain, fils de Cadioc Scalart, paroissien de Pleubian (témoins 65 à 67)
  8. Raymond, fils d’Alain Le Roux, paroissien de Saint Briac (Bourbiac) diocèse de Tréguier, (témoins 68 à 70)
  9. Rolland, fils de Geoffroy, de la paroisse de Pédernec, diocèse de Tréguier, (témoins 71 et 72)
  10. Aymeri, fils de Hamon Gogeesay, de la paroisse de Lannion, diocèse de Tréguier, (témoins 73 à 75),
  11. Guillaume, fils d’Alain Guidomar, de la paroisse de Gazvallon, (Plouescat-Guerrand), diocèse de Tréguier, (témoins 76 à 78)

[63] Le dernier livre mis à l’Index l’a été, en 1961, sous le pontificat de Jean XXIII.

[64]  Il est paru à Florence un livre intitulé Dialogue des deux systèmes du monde de Ptolémée et de Copernic dans lequel tu défends l’opinion de Copernic. Par sentence, nous déclarons que toi, Galilée, t’es rendu fort suspect d’hérésie, pour avoir tenu cette fausse doctrine du mouvement de la Terre et repos du Soleil. Conséquemment, avec un cœur sincère, il faut que tu abjures et maudisses devant nous ces erreurs et ces hérésies contraires à l’Église. Et afin que ta grande faute ne demeure impunie, nous ordonnons que ce Dialogue soit interdit par édit public, et que tu sois emprisonné dans les prisons du Saint-Office.

[65]  Moi, Galiléo, fils de feu Vincenzio Galilei de Florence, âgé de soixante-dix ans, ici traduit pour y être jugé, agenouillé devant les très éminents et révérés cardinaux inquisiteurs généraux contre toute hérésie dans la chrétienté, ayant devant les yeux et touchant de ma main les Saints Évangiles, jure que j’ai toujours tenu pour vrai, et tiens encore pour vrai, et avec l’aide de Dieu tiendrai pour vrai dans le futur, tout ce que la Sainte Église catholique et apostolique affirme, présente et enseigne. Cependant, alors que j’avais été condamné par injonction du Saint-Office d’abandonner complètement la croyance fausse que le Soleil est au centre du monde et ne se déplace pas, et que la Terre n’est pas au centre du monde et se déplace, et de ne pas défendre ni enseigner cette doctrine erronée de quelque manière que ce soit, par oral ou par écrit ; et après avoir été averti que cette doctrine n’est pas conforme à ce que disent les Saintes Écritures, j’ai écrit et publié un livre dans lequel je traite de cette doctrine condamnée et la présente par des arguments très pressants, sans la réfuter en aucune manière ; ce pour quoi j’ai été tenu pour hautement suspect d’hérésie, pour avoir professé et cru que le Soleil est le centre du monde, et est sans mouvement, et que la Terre n’est pas le centre, et se meut. J’abjure et maudis d’un cœur sincère et d’une foi non feinte mes erreurs.

[66]  Ainsi la science nouvelle, avec ses méthodes et la liberté de recherche qu’elle suppose, obligeait les théologiens à s’interroger sur leurs propres critères d’interprétation de l’Écriture. La plupart n’ont pas su le faire. …/… Galilée, croyant sincère, s’est montré plus perspicace sur ce point que ses adversaires théologiens.

[67] Michelet (Jules), Histoire de France – tome 7 Renaissance

[68] Code de justice criminelle promulgué par Charles Quint en 1532

[69] Bennasar (B), L’inquisition espagnole XVème-XIXème siècles, Paris, 1979, p. 233-234 : l’Espagne de l’Inquisition a échappé à la grande chasse aux sorcières.

[70]  Vénard (Marc), « La fin d’une époque » in Histoire du Christianisme : l’Âge de raison (1620-1750), volume 9, sous la direction de J-M ; Mayeur et al. DESCLEE, 1997, p. 1149/1214.

[71] Vénard (Marc), « La hantise du diable », in Histoire du Christianisme, le temps des confessions (1530-1620), volume 8, sous la direction de J-M ; Mayeur et al., Paris, Desclée, 1992, p. 1038-1039/1236.

[72] Chauvet (David), La personnalité juridique des animaux jugés au Moyen Âge XIIIe-XVIe siècles, L’Harmattan, 2012.

[73] Les procès intentés aux animaux étaient des procès dans lesquels l’accusé était un animal qui se voyait reprocher un délit, un crime ou un dommage comme il l’aurait été à un être humain, en principe seul sujet de droit ou justiciable. Ainsi, au Moyen Âge et bien après, on condamna à la potence ou au bûcher des vaches, ou des truies. De même, l’Église étendit ses excommunications des hommes aux animaux : rats, mouches, sauterelles, taupes, poissons ; tout membre de la faune pouvait y succomber.

[74] Voltaire raconte qu’un procès fut intenté en 1610 à un cheval et à son maître, accusés tous deux de sortilèges. Siècle de Louis XVI, chapitre II.

[75]  Deslandres (Dominique), « Le christianisme dans les Amériques », in Histoire du Christianisme : l’Âge de raison (1620-1750), volume 9, sous la direction de J-M ; Mayeur et al, DESCLEE, 1997, p. 711/1214.

[76]  Deslandres (Dominique), op. cit. p. 714/1214.

[77]  Luther (Martin) publie ses 95 thèses en 1517.

[78] Convoqué en 1542 il se déroule entre le 13 décembre 1545 et le 3 décembre 1563.

[79]   Arnaud (Florent), Le Grand Livre de l’Histoire du Monde des Hommes. Tome IV, Paris, 2010, Lulu.com 276 p. (p. 231) : Après l’Edit de Fontainebleau qui révoquait l’édit de Nantes, Louvois a écrit aux intendants du Limousin et du Poitou d’accabler d’impôts les protestants : « Si, suivant une répartition où ils en devraient porter dix, vous pouvez leur en faire donner vingt. ». Il fut notamment obéi par René de Marillac, intendant du Poitou, qui ordonna de faire le rôle des tailles et de marquer les réformés à la marge pour les grever, tant pour l’impôt que pour le logement des gens de guerre. Les nouveaux convertis étaient, au contraire, exempts de l’un et de l’autre. Tous les excès étant encouragés, l’effet de ce genre de persécution au sein de chaque famille dépassa l’espérance de Louvois. Des milliers de protestants se déclarèrent catholiques, tandis que ceux de l’Aunis et de Saintonge émigraient en foule.

[80]  Soulèvement de paysans protestants dans les Cévennes et Bas-Languedoc sous le règne de Louis XIV.

[81] Voltaire, « Traité sur la tolérance » Paris, 1763.

[82] Portail de la justice : www.justice.gouv.fr/histoire-et-patrimoine-10050/proces-historiques-10411/laffaire-calas-22774.html

[83] Brunet de Brou, La religieuse malgré elle. Amsterdam 1720, Préface, p. 7.

[84] Montesquieu, L’esprit des lois, XI, 6 ; e. XIX, 27.

[85] Labandeira observe que Montesquieu ne fait pas référence à la fonction administrative ou exécutive telle qu’on l’entend aujourd’hui.

[86] Mestre (Jean-Louis), « L’histoire du droit administratif » in Traité de droit administratif, sous la direction de Pascale Gonod, Fabrice Melleray et Philippe Yolka, Paris, Dalloz, 2011, tome 1, 841 p. (p. 13)

[87] La loi des 16-24 août 1790 (articles 13) et le décret du 16 fructidor an III  (2 septembre 1795) proscrivent aux tribunaux judiciaires de « troubler, de quelque manière que ce soit, les opérations des corps administratifs ».

[88] Un enfant, qui passait sur la voie publique devant l’entrepôt des tabacs de Bordeaux, a été renversé par un wagon que les employés de l’Etat ont poussé de l’intérieur de l’établissement et il a dû subir une amputation. Le père de l’enfant a intenté une action en dommages-intérêts contre lesdits employés et contre l’Etat solidairement comme civilement responsable du fait de ses agents par application des articles 1382, 1383, 1384 du Code civil. Le conflit fut élevé et le Tribunal des conflits attribua à la juridiction administrative la compétence pour connaître du litige.

[89] Tribunal des conflits statuant au contentieux N° 00012 Publié au Recueil Lebon.

[90] Mestre (Jean-Louis), Introduction historique au droit administratif français ; Paris : Presses universitaires de France, 1985 ; in-8°, 294 pages [Collection Droit fondamental].

[91] Burdeau (François), Histoire du droit administratif : de la Révolution au début des années 1970, Paris, PUF, 1998, 512 p.

[92] Santini (P.), De referendariorum ac Signaturae historico-iuridica evolutione, Romae, 1945.

[93] Mc Clunn (J . D.), Administrative Recourse: A Commentary With Historical Notes, Washington, 1946.

[94] Schmitz (H.) « Appelatio extraiudicialis, Entwicklungslinien einer kirchlichen Gerichtsarbeit über die Verwaltung im Zeitalter der klassischen Kanonistik » in Münchener theologische studien, III Kanonistische Abteilung, 28 Band, München 1970.

[95] Matthews (K.), « the Development and Future of the Administrative Tribunal », Studia Canonica 18 (1984) 1-233.

[96] Ostilio (Frederico D’), Il diritto amministrativi della chiesa, Rome, Libreria Editrice Vaticana, 1995, 580 p.

[97] Ghirlanda Gianfranco, Introduzione al diritto ecclesiale, Roma, GBP ed. 2013, p. 72-86/223.

[98] Labandeira, (Edouardo) « La Signatura apostolica y los Tribunales Administrativos », in « IC » 42, 1981, p. 665-772.

[99] Coughlin, (J.J.) ofm, « The historical development and current procedural norms of administrative recourse to the Apostolic Signatura”, in Periodica 90 (2001) p. 455-496; 661-690.

[100] Gordon (Ignatius S.I.), « Normae speciales supremi tribunalis signaturae apostolicae: editio aucta introductione, fontibus et notis», in Periodica V. 59, fasc. 1, 1970, p. 75-113. Dans son article publié en 1970, Gordon introduit une publication des normes spéciales du Tribunal de la Signature apostolique, précédemment approuvées le 23 mars 1968, mais pas promulguées officiellement. Il distingue les étapes suivantes :

La création initiale :

  1. les référendaires au XIIIème siècle,
  2. l’office de la signature au XVème siècle,
  3. La double Signature du XVIème au XXème siècle, qui introduit une double histoire :

S’agissant de la Signature de la justice, les principales étapes sont les suivantes :

  • sa création par la constitution Cum nuper nos de Pie IV, le 1er juillet 1562, publiée dans le Bullarium Romanorum, t. VII, p. 224-226,
  • son développement au cours des XVIème et XVIIème siècles, raconté par différents auteurs,
  • sa suppression en 1809 par Napoléon, quand il a envahi les Etats pontificaux et les a intégrés dans l’Empire napoléonien, régi par le code éponyme,
  • son rétablissement provisoire en 1814, lorsque le Latium et l’Ombrie ont été restitués au pape,
  • ses différentes réformes dans la période 1814-1870,
  • sa suppression définitive en 1870

S’agissant de la Signature des grâces, les principales étapes sont les suivantes :

  • sa création en 1588 par Sixte V,
  • ses développements plus ou moins marqués jusqu’en 1839

La Signature Apostolique, réunifiée par la constitution Sapienti consilio  de Pie X en 1908.

[101] Del Re (Niccolo) La Curia romana. Lineameti storico-giuridici, Libreria Editrice Vaticana (collana Diritto canonico), 1998, 708 p.

[102] Ce canon, repris à l’article 16 de la loi propre de la Rote romaine, a fait l’objet d’une interprétation authentique

[103]  Witt (Leopold), Das Leid einer Glückseligen, Waldsassen 1927.

[104]  Angerer (A.), lettre à Pie X du 1er juin 1927 (ACDF, SO, Dev. V. 1927 7, 1).

[105]  Desmazières (Agnès), « La gestion ecclésiale des phénomènes mystiques sous Pie XI. Le cas Thérèse Neumann », version préliminaire d’un passage tiré de : Pie XI et la France : L’apport des archives du pontificat de Pie XI à la connaissance des rapports entre le Saint-Siège et la France, Rome, Jacques Prévotat ed., Collection de l’Ecole française de Rome, 2011, 481-493.

[106]   S.S.Congregazione del S. Offizio, « Intorno al caso di Teresa Neumann. Relazione di una visita a Konnersreuth », mars 1938 (ACDF, SO, Dev. V. 1927 7, 125), cité par Agnès Demazières, in op. cit.

[107] Rampolla (Cardinal) www.civitas-institut.com/content/view/305/28/

[108] Cf. Sérant (Paul), Les déchirements des catholiques français, Paris 1989, Librairie Perrin, p. 94-116/283.

[109] Loew (Jacques) : N’oublions pas la très grande influence des grands patrons intelligents, organisés et imbattables au point de vue économique. Ils se défendent [contre les grèves auxquelles participent des prêtres-ouvriers…] Ils viennent à Rome. […] Il faut nous méfier terriblement de nos imprudences apostoliques, sociales ou doctrinales. Des Français semblent n’avoir pour fonction que de venir les raconter ici. C’est sans doute écœurant, mais sachons au moins que tout se sait (et même un peu plus que tout).

[110] Le 17 février 1954, après avoir appris le limogeage du 8 février, le Canard enchaîné publiait un article intitulé «   Rappel à l’Ordre de saint Dominique » où l’on pouvait lire  «   Il suffit que «   Rivarol   » ou «  Aspects de la France   » écrive un libelle contre tel ou tel catholique vaguement libéral pour que l’article soit pris pour argent comptant, versé au dossier et serve de pièce à conviction. Tout accusé, pourvu qu’il soit libéral, est déclaré un coupable. Comme sous l’Inquisition. Et on attend maintenant que les foudres apostoliques tombent sur les laïcs. Contrairement à ce que l’on croit, l’épiscopat français ne serait pas tout-à fait innocent non plus dans l’histoire des Dominicains. Les mesures disciplinaires qui ont atteint lesdits auraient été dénoncés en partie à la suite d’une pétition dont aurait pris l’initiative Mgr Richaud, archevêque de Bordeaux.

[111] Cesbron (Gilbert), les saints vont en enfer, Collonge (André), alias Gardey (Bernard), prêtreouvrier dominicain, Le scandale du xxe siècle et le drame des prêtresouvriers, Paris, Olivier Perrin, 1957, Poulat Emile,   Les prêtres ouvriers, naissance et fin.  ; Leprieur  (Francis), Quand Rome condamne    Keck (Thierry) Jeunesse de l’Église: 1936-1955, aux sources de la crise progressiste en France ; Suaud (Charles) et Viet-Depaule (Nathalie),  Prêtres et ouvriers. Une double fidélité mise à l’épreuve 1944-1969. 

[112] Valet (Paul) A l’époque, j’avais employé le terme de marâtre pour qualifier le comportement de l’Église envers les prêtres-ouvriers. Le terme était inapproprié car en l’occurrence, les prêtres-ouvriers n’ont pas été seulement privés de l’amour maternel, ils ont été maltraités. Certains furent même écrasés : même ceux qui se sont soumis en ont gardé des cicatrices. Le procès qui leur était fait était un procès à charge. Les avocats qui auraient pu les défendre, les pères Féret, Liégé, Chenu, que j’ai eu le privilège de rencontrer, furent réduits au silence et mis à l’écart.  » (Valet p. 75)

[113] Sarah (Cardinal Robert), Dieu ou rien, Propos recueillis par Nicolas Piat, Paris 2016, ed Pluriel, p. 58/420.

Préface et introduction

La justice administrative dans l’Église catholique

 Vue de la France et de l’Afrique

 par Yves Alain Ducass

(2ème édition augmentée et corrigée)

+ Imprimatur

11 octobre 2017

Par S.E. Mgr. Laurent Dabiré, Evêque de Dori (Burkina Faso), Docteur en droit canonique, Président de la commission tribunaux, de la formation et des questions canoniques à la Conférence épiscopale Burkina-Niger

Préface

Depuis la création en 1967 de la seconde section du Tribunal Suprême de la Signature Apostolique, de nombreux ouvrages ont traité du droit administratif de l’Église, « décrivant en détail les procédures et la jurisprudence applicable » comme l’écrit l’auteur, mais, ajoute-t-il, – et l’on ne peut qu’approuver son jugement, surtout après avoir lu les très nombreuses notes et références bibliographiques des bas de page – « Il n’existe cependant pas, à notre connaissance, de livre français récent sur le sujet, qui ferait le point de la jurisprudence administrative de l’Église et qui mettrait les bases du droit canonique administratif à la portée des fidèles catholiques. »

Cet ouvrage est fait et c’est celui de M. Ducass.

Bien sûr le livre qu’il nous présente suppose une connaissance certaine du droit de l’Église et, je dirais même, du droit séculier, mais nous avons enfin, non pas un traité abstrait, mais un ouvrage-guide, reposant sur une base de données exceptionnelle, rigoureusement et clairement bâti, exposant de très nombreux exemples vécus et les soumettant à une critique toujours constructive.

Il serait malvenu de redire de façon médiocre ce que l’auteur a écrit de façon magistrale. Lisez vous-mêmes « l’Éclairage historique » (pp. 21-48), et vous découvrirez la méthode de l’auteur, avec les faits rapportés et la remarquable bibliographie qui accompagne ce chapitre. Lisez avec attention le chapitre 3 (pp. 87-97) sur les sources de la jurisprudence et découvrez une base de données qui vous donnera une idée du travail et de la maîtrise de l’auteur, et qui vous permettra d’approfondir le sujet.

Laissez-vous guider par l’ouvrage.

Il est indispensable, par ailleurs, que vous lisiez attentivement le chapitre 11 (pp. 305-330) sur les « Perspectives d’évolutions ». Alors que trop de discussions canoniques, de colloques, de congrès, pour intéressants qu’ils soient, n’aboutissent qu’à la publication d’un volume, destiné le plus souvent à un rayon de bibliothèque, l’ouvrage de M. Ducass ouvre de nombreuses perspectives, pratiques, raisonnées, souhaitables. Ce livre est là encore un guide pour l’action.

Certes ces « perspectives d’évolutions » entraîneront des critiques et des réticences. Il est si difficile en effet d’accepter les changements dans nos habitudes de penser et d’agir. Un grand connaisseur des hommes et de leurs lois écrivait à ce sujet :

Nous qui régnons, combien de choses inutiles

Nous disons, sans savoir le mal que nous faisons !

Quand la vérité vient, nous lui sommes hostiles,

Et contre la raison nous avons des raisons.

Dans le domaine de la justice administrative de l’Eglise, nous pouvons et nous devons donner tort à Victor Hugo[2]

 

Photo de l’abbé Jacques Gressier toujours actif à l’âge de 90 ans

avec sa collaboratrice, Mme Elisabeth Dieu

Saint Yves, tant que tu as vécu parmi nous,
 tu as été l’avocat des pauvres,
le défenseur des veuves et des orphelins,
la Providence de tous les nécessiteux.
Écoute aujourd’hui notre prière.
Obtiens-nous d’aimer la justice comme tu l’as aimée.
Fais que nous sachions défendre nos droits,
sans porter préjudice aux autres,
en cherchant avant tout la réconciliation et la paix.
Suscite des défenseurs qui plaident la cause de l’opprimé
pour que justice soit rendue dans l’amour.

 

Introduction

Fidèle à l’exemple et à l’enseignement du Christ, l’Église, lumière des nations, lutte contre tout ce qui entrave le développement intégral de l’homme, et en particulier la culture de l’athéisme qui fait parfois obstacle au « libre exercice de la religion dans la société[4] ». C’est ainsi que l’Église, au fil des siècles, s’attache à défendre les droits de Dieu et à combattre toutes les formes d’hérésies qui peuvent couper les fidèles de la grâce et du salut des âmes.  Or,

Même si certains, par la volonté du Christ, sont institués docteurs, dispensateurs des mystères et pasteurs pour le bien des autres, cependant, quant à la dignité et à l’activité commune à tous les fidèles dans l’édification du Corps du Christ, il règne entre tous une véritable égalité[5].

Pourtant,

L’Église, elle, renferme des pécheurs dans son propre sein, elle est donc à la fois sainte et toujours appelée à se purifier, poursuivant constamment son effort de pénitence et de renouvellement[6].

Ainsi, malgré la sainteté de l’Église, il existe encore de nos jours des situations dans lesquelles des pasteurs de l’Église se comportent en « mercenaires » (Jean 10, 12), ainsi que des légistes qui « font peser des fardeaux impossibles à porter » (Luc 11, 48) sur les épaules de certains fidèles.

Fort malheureusement, très souvent certaines Curies [diocésaines] du Sud, sont tributaires de la structure de l’Eglise préconciliaire et sont immergées dans le culte de l’autorité propre azux cultures du tiers monde et sont influencées par la manière dont les autorités civiles dirigent les Etats du Tiers-monde. Elles ont transmis l’idée que la Curie est un centre de pouvoir et de décision où l’Evêque dirige avec autoritarisme son diocèse. On n’est pas sans s’étonner d’observer, dans certains cas, l’inexistence de structures de consultations pastorales et les fidèles ignorent qu’il relève de leur droit de s’adresser à leur Evêque comme à un père de famille. De manière encore plusé tonnante, cette praxis se retrouve aussi dans les vieilles Eglises dont on dit que certains s’affranchissent à peine du cuklte du pouvoir[7].

Ce type de situation crée des dommages pour l’Eglise comme l’indique Jean-Paul Betegne :

il n’est pas rare de constater dans les Eglises des abus de droit et d’autorité du côté de la hiérarchie à qui il revient pourtant le devoir de promouvoir le droit de l’Eglise. […] On ne mesure pas assez l’étendue des dommages causés au sein de la communauté des fidèles et aux yeux du monde par de telles attitudes. C’est en effet l’image de l’Eglise qui est écornée, ce sont de nombreux fidèles qui dédaignent l’enseignement social de l’Eglise, ce sont des hommes et des femmes qui relativisent la pertinence du message évangélique, c’est la fréquentation des sacrements qui est négligée, etc[8].

Conscient de ces difficultés, le Concile Vatican II affirme les droits et obligations des fidèles et, pour les faire respecter, le bienheureux Paul VI crée le 15 août 1967 la seconde section du Tribunal Suprême de la Signature Apostolique, chargée de trancher :

Les contestations nées de l’exercice du pouvoir administratif ecclésiastique, ainsi que celles qui lui sont soumises en appel contre une décision d’un dicastère compétent, lorsqu’il lui est reproché d’avoir violé la loi[9].

« Combien de fidèles ont eu le sentiment de n’être pas compris, qu’ils étaient parfois rejetés ? » interroge le cardinal Sarah[10]. Une enquête menée en 2017 à Dakar montre que de plus de la moitié des fidèles interrogés[11] se souviennent d’une situation de controverse due au pouvoir ecclésiastique, tandis qu’aucun d’entre eux ne connaît l’existence du Tribunal administratif de l’Eglise ni les procédures graduées de recours gracieux, hiérarchique et contentieux-administratif mise en place il y a 50 ans.

Au cours de ces cinquante années, des canonistes ont publié des traités de droit administratif ecclésiastique et des articles scientifiques en italien, espagnol, anglais, allemand et latin, décrivant en détail les procédures et la jurisprudence applicables. Il n’existe cependant pas, à notre connaissance, de livre français récent sur ce sujet[12], qui ferait le point de la jurisprudence administrative de l’Église et qui mettrait les bases du droit canonique administratif à la portée des fidèles catholiques.

Le présent ouvrage vise à combler ces deux lacunes, à partir du regard d’un fidèle catholique français licencié en droit canonique[13] travaillant régulièrement en Afrique, avec la révérence due aux pasteurs[14], et en tenant compte de l’utilité commune et de la dignité des personnes.

Dresser le bilan de cinquante années de justice administrative est cependant tâche impossible pour qui n’est pas canoniste expérimenté, plongé dans le sérail du Tribunal Suprême de la Signature apostolique.

Sans prétendre y parvenir, nous proposons ces quelques pages de témoignage et de recherche qui reposent sur cinq fondements :

  • un cadre universitaire, avant et après l’obtention d’une licence de droit canonique ;
  • des contacts réguliers avec les fidèles catholiques sur le réseau « Canonistes sans frontières», qui permettent à l’auteur de recueillir de nombreux témoignages inédits et de dialoguer avec leurs auteurs comme le fait par ailleurs Cathy Caridi[15] dans le monde anglophone ;
  • une base de données portant sur 994 causes contentieuses-administratives et 1123 sentences du Tribunal suprême, constituée par la collation de 2005 publications canoniques[16], et structurée par les techniques de l’ingénieur[17];
  • une expérience professionnelle riche et variée en France et en Afrique permettant de prendre du recul par rapport à une institution ;
  • les commentaires reçus et les recherches effectuées après la 1ère édition française du livre.

Ecrits en quatre années de travail à temps partiel, le livre et sa base de données en ligne sont destinés à quatre catégories de public :

  • les fidèles catholiques, laïques, religieux ou prêtres, rencontrant des problèmes administratifs dans l’Église, et voulant éviter le double écueil, ou bien de cautionner par leur silence des pratiques qu’ils estiment déviantes, ou bien de mettre l’Église en difficulté, en s’adressant aux tribunaux civils ou aux moyens de communication sociale, sans faire confiance à la justice ecclésiastique ;
  • les juristes et les personnes curieuses, qui veulent découvrir le droit canonique, voire entreprendre des études dans ce domaine[18];
  • les canonistes qui pourront accéder à de nombreuses informations inédites sur la jurisprudence administrative canonique ;
  • les responsables de l’Église, qui trouveront dans ces pages matière à réflexion pour leurs futures décisions.

La première partie de l’ouvrage présente le contexte de la justice ecclésiastique, avec un rappel de son rôle dans l’histoire de l’Église[19], l’analyse de ses fondements théologiques, une présentation simplifiée de la procédure, et la description de la base de données en ligne, le tout illustré par de nombreux schémas inédits, qui sont expliqués au fil de l’ouvrage, tels que ceux des procédures de recours rappelés ci-après.

Une deuxième partie présente la justice administrative de l’Église dans sa réalité quotidienne, avec un rappel rapide du droit, des difficultés rencontrées et des solutions apportées depuis 1967 car, selon Sergio Aumenta,

L’introduction de formes de vérification de l’action administrative (et en particulier l’institution d’un contrôle juridictionnel par le Tribunal suprême) a constitué un progrès substantiel pour la sauvegarde des droits juridiques subjectifs[20].

Cinq chapitres présentent les difficultés et les recours concernant les fidèles laïcs (chap. 4), les clercs (chap. 5), les consacrés (chap. 6), ou bien face aux charismes (chap. 7) et aux dicastères (chap. 8), le tout illustré par de nombreux cas de jurisprudence, portant notamment sur les domaines ci-après :

Laïcs Clercs Consacrés
Regroupements de paroisses ; réductions d’églises à usage profane. Mutations de curés

 

Refus d’admission

Exclaustrations

Démissions

Non-reconnaissance et/ou suppression d’associations Révocation de curés Suppressions de maisons religieuses
Retrait de missions ecclésiastiques Pertes de l’état clérical et sanctions administratives Paiement des salaires et pensions de retraite
Face aux charismes
(révélations privées)
Face aux dicastères Droits de propriété

A la lumière de cinquante années de pratique, la troisième partie du livre permet de revisiter les procédures de recours et de proposer quelques pistes d’évolutions à l’occasion du jubilé.

L’ouvrage privilégie systématiquement les sources premières que sont les documents approuvés par le Saint-Père et les sentences de la deuxième section du Tribunal suprême. Sachant que ces sources ne sont pas toujours accessibles au public, du fait notamment de leur caractère nominatif, il est fait largement appel aux travaux des canonistes proches de la Signature apostolique, dont une grande partie n’a jamais été traduite en français. L’absence de sources officielles disponibles oblige l’auteur à proposer des estimations statistiques, mais celles-ci restent incertaines tant qu’elles ne sont pas confrontées aux véritables données de la Seconde section du Tribunal suprême, à qui le présent travail est naturellement soumis.

Outre l’indisponibilité des sources, le champ très vaste du droit administratif ecclésiastique et le temps limité par l’échéance du jubilé, les limites de cet ouvrage sont principalement celles de son auteur qu’il convient de présenter.

Il s’agit d’un fidèle catholique français d’une soixantaine d’années, marié, père et grand-père. Son métier d’ingénieur au service de l’Etat français, puis de consultant auprès des gouvernements africains lui a conféré une expérience pratique du droit administratif. Il l’a complétée par une solide formation de droit canonique[21], par trois années de recherche en bibliothèque et par une expérience de terrain avec « Canonistes sans frontières », incluant la préparation et le suivi de plusieurs recours hiérarchiques et contentieux-administratif.

Sa réussite professionnelle et l’appui de son entreprise energeTIC lui confèrent une indépendance morale et financière, conditions indispensables à la liberté de parole. Il voudrait en user avec la modération qu’apportent la crainte de Dieu, l’amour de l’Église et l’honnêteté scientifique, qui libèrent des trois esclavages inverses que sont l’égocentrisme, la pensée unique et le mensonge[22].

 

[1] Membre de l’association des écrivains catholiques francophones.

[2] L‘art d’être grand-père IV, 4

[3] http://droit.regiminal.free.fr/

[4] Dignitatis humanae, n° 1.

[5] Lumen Gentium, n° 32.

[6] Lumen Gentium, n° 8.

[7] Kitambala (Hilaire Iwaka) L’office de chancelier dans le Code de droit canonique de 1983, l’Harmattan, Paris 2017, p. 38-39 / 245.

[8] Betengne (Jean-Paul) Université Catholique d’Afrique Centrale / Institut Catholique de Yaoundé « Culture canonique et cultures juridiques en Afrique » conférence du 6 octobre 2017 au congrès international de la Conociatio.

[9] Regimini Ecclesiae Universae, article 106.

[10] Sarah (Cardinal Robert), Dieu ou rien, Propos recueillis par Nicolas Piat, Paris 2016, ed Pluriel, p. 223/420.

[11] L’échantillon était constitué de 25 participants d’âge mûr participant au colloque international organisé par le Centre Saint Augustin de Dakar à l’occasion de ses 30 ans.

[12] Une exception notoire est à signaler, avec la thèse de doctorat de Mgr Patrick Valdrini, pro-recteur et professeur de droit canonique de l’Université pontificale du Latran à Rome, à l’origine de deux livres publiés à Strasbourg : Conflits et recours dans l’Église, Cerdic 1978 ; Injustices et protection des droits dans l’Église, Cerdic, 1984.

[13] Ce diplôme a été décerné par l’Archevêque de Strasbourg correspond au vu du master 2 de droit canonique de l’université de Strasbourg et du diplôme de propédeutique de théologie de l’Institut catholique de Paris.

[14] Au cours de son travail en Officialités, les tribunaux (inter)diocésains de l’Église, l’auteur a pu apprécier le professionnalisme, le sérieux et la générosité des pasteurs en charge de la justice ecclésiastique pour les reconnaissances de nullité de mariage, et le dévouement des bénévoles qui les aident. Il ne saurait trop recommander à d’autres fidèles catholiques d’entreprendre des études sur le droit canonique du mariage pour travailler en Officialité ou dans leur paroisse, pour venir en aide aux personnes en souffrance qui cherchent à discerner si le mariage religieux qu’elles ont contracté est valide et indissoluble, ou bien entaché de nullité, en vue de démarrer une autre étape de leur vie.

[15] Caridi (Cathy), Canon made easy, http://canonlawmadeeasy.com/

[16] Situation de la base au 1er janvier 2017.

[17] La base de données sur laquelle repose l’ouvrage est présentée du chapitre trois du présent ouvrage

[18] L’Institut catholique de Paris (ICP) met en ligne une formation gratuite dédiée au droit canonique intitulée « la loi des hommes et la loi de Dieu » Cf. www.droitcanonique.icp.fr

[19] Lors d’un pèlerinage à pied vers Compostelle, l’auteur fut interpellé par une pèlerine allemande qui disait avoir pris ses distances avec l’Église catholique, à cause du comportement de celle-ci durant l’épisode de la chasse aux sorcières.

[20] Aumenta (Sergio Felice), La tutela dei diritti dei fedeli nel processo contenzioso amministrativo canonico, Pontifica università lateranese, Mursia, p. 173.

[21] Trois années d’études à l’Institut de droit canonique de Strasbourg, deux années de théologie à l’Institut catholique de Paris, suivie d’une expérience de notaire, avocat, et défenseur du lien dans les officialités de Paris, Versailles, Cotonou et Dakar.

[22] Je suis Yahvé ton Dieu, qui t’ai fait sortir du pays d’Égypte, de la maison de servitude. Dt. 5, 6.

La justice dans l’Eglise

Après que le Concile précise les droits et obligations des fidèles catholiques, le pape Paul VI crée la seconde section du Tribunal suprême de la Signature apostolique le 15 août 1967, en vue de « trancher les contestations nées de l’exercice du pouvoir administratif ecclésiastique ». L’année 2017 marque donc le jubilé de la justice administrative de l’Église catholique, mais qui la connaît ?

Par l’ouvrage d’Yves-Alain Ducass, (imprimatur du 11 octobre 2017), et par le site www.canonistes.org qui l’accompagne, l’auteur vise cinq objectifs :

  1. rappeler à la hiérarchie de l’Église et aux fidèles catholiques leurs droits et obligations respectifs, ainsi que les moyens de les défendre ;
  2. évoquer les progrès accomplis par la justice de l’Église catholique en cinquante années d’exercice ;
  3. illustrer sa mise en œuvre pratique par une centaine d’exemples de conflits, de résolutions amiables et de jurisprudence ;
  4. apporter une contribution scientifique au monde des canonistes, à partir d’une base de données inédite sur la jurisprudence administrative ;
  5. contribuer à la justice sociale en promouvant la justice administrative de l’Église, en aidant les personnes en difficulté et en proposant des pistes d’améliorations.

Le livre fait l’objet de deux éditions françaises par l’Harmattan (janvier et novembre 2017) et d‘une édition italienne par energeTIC. Une édition anglaise est en préparation.

En accord avec l’éditeur, certaines  parties du livre sont totalement ou partiellement accessibles en ligne pour tous, d’autres sont réservées aux canonistes, et, pour d’autres enfin, seule  la table des matières est publiée.

NB pour citer la deuxième édition française, indiquer : Ducass (Yves-Alain), « La justice administrative dans l’Eglise catholique. Vue de France et d’Afrique » L’Harmattan, Paris 2017, 374 p.

La justice de l’Eglise face aux charismes

Voici un extrait du livre « La justice administrative de l’Eglise catholique » qui a reçu l’imprimatur le 4 octobre 2011 par S.E. Mgr. Laurent Dabiré, évêque de Dori (Burkina Faso), Docteur en droit canonique, et Président de la commission tribunaux, de la formation et des questions canoniques à la Conférence épiscopale Burkina-Niger.

Chapitre 7 :
La justice administrative face aux charismes

Le présent chapitre diffère des précédents, dans la mesure où il s’attache peu à la jurisprudence des recours hiérarchiques ou contentieux-administratifs[1], mais plutôt aux pratiques administratives ecclésiastiques face aux charismes.

Dans une première partie, l’analyse porte sur le phénomène des révélations privées, avec le droit applicable, les épreuves et les sanctions imposées à l’encontre des voyants et de leurs amis, et finalement sur les recours contentieux-administratifs, auprès de la justice ecclésiastique et de la justice civile.

Une deuxième partie porte sur la justice face aux nouveaux mouvements religieux et aux sectes présumées, avec le droit applicable, les sanctions imposées et les recours possibles.

  1. Les révélations privées

Du temps de Jésus, son oncle Zacharie, sa mère Marie et son père Joseph ont reçu la visite de l’Ange, tandis que ses apôtres ont reçu la visite de Jésus ressuscité[2]. Par la suite, un grand nombre de saints ont reçu des révélations privées[3]. En effet,

Apparitions et signes surnaturels scandent l’histoire, elles entrent dans le vif des vicissitudes humaines et accompagnent le chemin du monde, surprenant croyants et non-croyants.[4]

De nos jours encore, il y a beaucoup plus de révélations privées qu’on ne le croit, mais la plupart d’entre elles restent secrètes. Tel est généralement le cas lorsqu’elles s’adressent à une personne pour l’encourager ou l’aider à accomplir sa vocation. Parfois la confidence d’un ami ou la lecture d’un livre permet d’en prendre connaissance comme, par exemple, dans le cas de S.E. Jean-Pierre Kutwa, cardinal archevêque d’Abidjan :

Tu sais, Francesco, (c’est ainsi qu’il aime appeler l’auteur) pendant ce passage à l’hôpital, j’ai été visité par celui que j’avais choisi de servir : Jésus-Christ. Un jour, j’ai vécu plusieurs minutes de douleurs atroces, je souffrais terriblement et tout d’un coup, tout s’est arrêté et je me suis endormi. C’est à ce moment-là que j’ai vu Jésus. Il était très lumineux et moi, dans un geste spontané, je me suis immédiatement couché à ses pieds et je les ai serrés dans mes bras. Jésus m’a demandé : « Pourquoi as-tu si peur ? N’aie pas peur. Ta mission n’est pas terminée. Retourne. »[5]

Nous qualifierons ces révélations de « privées à caractère personnel ».

A l’inverse, d’autres révélations privées comportent des messages que le bénéficiaire est invité à faire connaître. Ces révélations, que nous qualifierons de « privées à finalité publique » posent un problème culturel dans le monde occidental, marqué par le matérialisme et rejetant jusqu’à l’idée même de Dieu. Il pose aussi un grave problème de discernement à l’Église quant à la nature et au contenu des apparitions présumées, et quant aux manifestations qui les accompagnent. C’est exactement ce que dit la Congrégation pour la doctrine de la foi dans sa lettre sur la hiérarchie et les charismes :

  1. Parmi les dons charismatiques, distribués librement par l’Esprit, très nombreux sont ceux qui, accueillis et vécus par la personne à l’intérieur de la communauté chrétienne, ne nécessitent pas de règlementations particulières. En revanche, quand un don charismatique se présente comme « charisme originaire » ou « fondateur », il a besoin d’une reconnaissance spécifique afin qu’une telle richesse s’articule adéquatement dans la communion ecclésiale et se transmette fidèlement dans le temps. Ici apparaît la tâche décisive de discernement qui appartient à l’autorité ecclésiastique. Reconnaître l’authenticité du charisme n’est pas toujours une tâche facile, mais c’est un service nécessaire que les pasteurs sont tenus d’effectuer[6].

Le site américain « Miracle hunter[7] » dénombre près de 700 révélations privées[8], avec une forte accélération au fil du temps : il y en a en moyenne une par an dans les années 1900 à 1925, puis environ 35 en moyenne par an dans les années 1970 à 2000[9], avec un total de 410 apparitions dans la période 1967 à 2016. L’abbé Laurentin[10] explique cette subite augmentation non pas par une plus grande fréquence des révélations privées mais par l’évolution du droit canonique en vigueur :

Cela tient à l’abolition du Canon 1399, § 5 de l’ancien Code de droit Canonique qui « interdisait les livres et libelles qui racontent de nouvelles apparitions, révélations, visions, prophéties et miracles, ou lancent de nouvelles dévotions, même sous le prétexte qu’elles sont privées » (et du Canon 2318 qui excommuniait les contrevenants)[11].

                         Nombre d’apparitions par décade recensées par Miracle hunters

Sans compter celle de Lipa, que nous évoquerons plus loin, l’Église a reconnu 16 apparitions mariales, dont 5 pendant la période de notre étude[12]. La piété populaire qui les accompagne est l’une des expressions du « sensus fidei », mais celle-ci va à contre-courant de la société rationnelle actuelle :

Les apparitions, honorées par la piété populaire dans nos sanctuaires, sont méprisées dans le milieu théologique, y compris laïc.[13]

Cette hypothèse peut notamment être illustrée par les propos de l’évêque de Quimper et Léon à propos de Kérizinen :

La foi chrétienne n’est pas de l’ordre du sentiment : elle est accueil de Jésus-Christ, de son Evangile, de son Église. […] Puissent ceux qui se sont laissé égarer par ces prétendues révélations ouvrir les yeux à la seule vérité de Jésus-Christ, qui n’écarte pas la Vierge mais la situe à sa place, au lieu de s’enfermer dans un ghetto sans ouverture ou sans issue ! Qu’ils méditent donc toutes ces fortes paroles de saint Jean de la Croix, mystique authentique et de plus Docteur de l’Église : « En nous donnant son Fils ainsi qu’il l’a fait, lui qui est sa parole dernière et définitive, Dieu a dit tout ensemble et en une seule fois et il n’a plus rien à dire. »[14]

Certes, la Révélation est close avec la mort du dernier Apôtre, ainsi que l’écrit Saint Jean de la Croix en commentant He 1, 1-2, mais le catéchisme ajoute :

Cependant, même si la Révélation est achevée, elle n’est pas complètement explicitée ; il restera à la foi chrétienne d’en saisir graduellement toute la portée. Au fil des siècles, il y a eu des révélations dites « privées », dont certaines ont été reconnues par l’autorité de l’Église. […] Leur rôle n’est pas […] de « compléter » la Révélation définitive du Christ, mais d’aider à en vivre plus pleinement à une certaine époque de l’histoire.[15]

Puisqu’il y a tension entre la foi populaire et la rationalité de certains théologiens[16], examinons maintenant le droit canonique applicable.

1.1. Le droit des révélations privées

Lorsqu’un prophète parle au nom de Dieu ou lorsqu’une personne évoque ou fait connaître une révélation privée à caractère public, il en résulte immanquablement une tension entre lui-même et l’autorité de l’Église, car tous les deux pensent agir et parler au nom de Dieu. Cette situation pose un problème majeur de discernement, pour l’Ordinaire du lieu confronté aux paroles de Saint Paul :

N’éteignez pas l’Esprit, ne méprisez pas les prophéties, mais discernez la valeur de toute chose, ce qui est bien, gardez-le » (1 Thessaloniciens 5, 19-21)

mais aussi de Saint Matthieu :

Vous allez entendre parler de guerres et de rumeurs de guerre. Faites attention ! Ne vous laissez pas effrayer, car il faut que cela arrive, mais ce n’est pas encore la fin. […] Beaucoup de faux prophètes se lèveront, et ils égareront bien des gens. (Matthieu 24, 6-11)

Trois régimes de droit positif ont régi la méthode de discernement au cours de la période étudiée :

  • le 29 décembre 1966, peu avant le début de notre période d’étude, la Congrégation pour la doctrine de la foi publie un décret[17] approuvé par le pape Paul VI le 14 octobre 1966, abrogeant les canons 1399 et 2318[18] du Code de 1917 sur l’imprimatur et les livres religieux, et assouplissant la discipline ecclésiastique relative aux apparitions, reconnues ou non[19]. Par contre, il n’existe pas, à ce moment-là, de normes procédurales particulières sur la conduite à tenir, en dehors des principes généraux du droit ;
  • en novembre 1974, la session plénière annuelle de la Congrégation pour la doctrine de la foi travaille sur les apparitions privées, et ses conclusions sont adressées aux évêques, mais non pas publiées[20];
  • le 14 décembre 2011, la Congrégation pour la doctrine de la foi publie les critères de discernement, permettant aux personnes concernées de savoir quelle est la loi applicable[21]. Dans la préface de cette publication, le cardinal-préfet indique :

Cette Congrégation espère vivement que la publication officielle des normes procédurales pour le discernement des apparitions et révélations présumées pourra aider les Pasteurs de l’Église catholique dans la tâche exigeante de discernement des apparitions, des révélations, des messages et des locutions présumés ou, plus généralement, des phénomènes extraordinaires ou d’origine surnaturelle présumée.[22]

Ces normes procédurales invitent l’Autorité ecclésiastique à agir avec prudence, en trois étapes

  1. juger d’abord du fait selon des critères positifs et négatifs[23];
  2. ensuite, si cet examen aboutit à une conclusion favorable, permettre certaines manifestations publiques de culte ou de dévotion, tout en les observant avec la plus grande prudence (ce qui équivaut à la formule : « pro nunc nihil obstare ») ;
  3. enfin, à la lumière du temps et de l’expérience (en particulier l’abondance des fruits spirituels procurés par la nouvelle dévotion), porter, le cas échéant, un jugement sur l’authenticité et le caractère surnaturel.

Pour la réalisation de la première étape, la Congrégation invite les autorités à réaliser une enquête sérieuse sur les faits, ce qui pose la question de savoir dans quelle mesure cette recommandation crée ou non un droit pour les fidèles concernés.

Espérons que ces nouveaux éléments de procédures seront respectés dans l’avenir et que l’on n’assistera pas à des batailles d’arguments ad hominem cachant des jeux de pouvoir, comme ce fut par exemple le cas dans les apparitions de Tilly-sur-Seulles, en Normandie, dont l’archevêque de Paris bloqua la reconnaissance, alors qu’elle était en bonne voie à Rome[24].

1.2. Les difficultés rencontrées

Dans le passé, l’enquête sérieuse prévue actuellement pour obtenir un discernement positif sur le caractère des faits était très souvent écartée au profit d’une application hâtive des critères négatifs, interprétés de façon unilatérale, sans parfois même interroger les personnes concernées :

  • à Garabandal, Monseigneur Juan Antonio del Val Gallo institua une nouvelle enquête (achevée en 1986) compte tenu des défauts considérables qu’il aurait observés dans le travail de la première commission[25];
  • à Kérizinen en Bretagne (France), un double interdit fut posé par l’évêque de Quimper et Léon, les 12 octobre 1956 et le 24 mars 1961, interdisant aux fidèles de construire un oratoire privé et d’aller prier le rosaire sur les lieux des apparitions présumées, alors qu’aucune enquête n’a eu lieu[26].
  • A Montichiari en Italie, Mgr. Abate Francesco Rossi, alors curé de la paroisse, aurait dit en privé qu’il était absolument convaincu de l’authenticité des apparitions de « Rosa mystica » [27], et que l’enquête canonique était biaisée : L’évêque Giacinto Tredici désigna une commission d’enquête. Mais à mon avis, celle-ci se mit au travail avec un préjugé absolument négatif et ne remplit d’aucune façon son devoir car 1. Aucun miracle n’a été examiné, 2. Aucun témoin n’a été entendu, 3 un médecin déclara Pierina Gilli morphinomane, une calomnie absolument malveillante. »
  • à Dozulé en France, le Père Curty critique sévèrement le sérieux de l’enquête canonique réalisée avant 1998[28], tandis que le refus du message semble provenir de considérations fallacieuses[29].
  • à Lipa, aux Philippines, ni l’évêque en place au moment des apparitions, ni son coadjuteur n’ont été interrogés lors de l’enquête effectuée par leurs successeurs en 1950. A son arrivée en 2003, le nouvel archevêque, Mgr. Ramon Argüelles, ne trouva aucun dossier dans les archives du diocèse. La nouvelle enquête qu’il fit réaliser en 1991 a abouti à un résultat contraire qui lui a permis de reconnaître la surnaturalité de l’apparition et de la pluie de roses qui lui a succédé. Lui-même écrit dans le décret de reconnaissance : le décret de 1951 qui niait le caractère surnaturel des faits en était « dès le  début »  entaché d’une « ombre de doute »,  du fait que les évêques signataires du décret qui étaient contreont fini par déclarer, à la fin de leur vie, qu’ils croyaient en la véracité des apparitions[30]. Selon Rafael M. Villongco[31], les membres de la Commission d’enquête auraient été obligés de signer le décret sous menace d’excommunication.

Conscient des difficultés résultant du choc des charismes et de l’autorité, le pape François a approuvé la lettre « Iuvenescit Ecclesia » de la Congrégation pour la doctrine de la Foi, en date du 14 mars 2016, sur la relation entre les dons hiérarchiques et charismatiques pour la vie et la mission de l’Église :

Différents charismes n’ont jamais cessé de naître au long de l’histoire de l’Église ; pourtant, c’est seulement à une époque récente que s’est développée une réflexion systématique sur ces thèmes. Ce fait est dû historiquement au schisme montaniste, venu de l’antiquité chrétienne, et ensuite aux doctrines apocalyptiques médiévales qui ont laissé une trace négative durable sur toute prétention charismatique, associée à une époque fantomatique de l’Esprit-Saint. Lumen Gentium dépasse totalement cet héritage problématique, distinguant entre dons hiérarchiques et charismatiques et soulignant « leur différence dans l’unité ». Ces grâces, des plus éclatantes aux plus simples et aux plus largement diffusées, doivent être reçues avec action de grâce et apporter consolation[32].

Le document de la Congrégation précise les critères de discernements des charismes, dont un consiste dans l’acceptation des moments d’épreuve que leurs bénéficiaires ont à subir de la part de la hiérarchie ecclésiastique

  1. f) Acceptation des moments d’épreuve dans le discernement des charismes. Étant donné que le don charismatique peut posséder « une certaine dose de vraie nouveauté, dans la vie spirituelle de l’Église, et d’initiative dans l’action, qui peut parfois sembler incommode », un critère d’authenticité se manifeste dans l’humilité pour supporter les contretemps ; le juste rapport entre charisme véritable, prospective de nouveauté et souffrance comporte une constante historique : c’est la liaison entre le charisme et la croix. La naissance de tensions éventuelles exige de la part de tous la pratique d’une charité plus grande, en vue d’une communion et d’une unité ecclésiale toujours plus profonde[33].

La question se pose alors de savoir si l’acceptation passive, qui constitue un des critères de discernement, est compatible ou non avec la possibilité canonique offerte aux fidèles de revendiquer leurs droits en tenant compte du bien commun de l’Église.

Pour tenter d’y répondre, examinons quels types d’épreuves sont imposés aux prophètes de notre temps et quelles réponses y sont apportées.

1.3. Les épreuves imposées

Une fois l’enquête « sérieuse » réalisée, la Congrégation pour la doctrine de la foi préconise aux autorités compétentes une démarche appropriée, dépendant des types de situations rencontrées[34]. Il peut s’agir de :

corriger ou prévenir des abus dans l’exercice du culte ou de la dévotion, condamner des doctrines erronées ou éviter les dangers d’un mysticisme faux ou inconvenant, etc.

Le doyen Philippe Greiner éclaire cette notion d’abus dans sa thèse sur l’encadrement juridique du prosélytisme, en distinguant le prosélytisme de bon et de mauvais aloi :

Suivant les circonstances, la pratique du prosélytisme de mauvais aloi peut être considérée comme une faute et justifier des mesures disciplinaires ou correspondre à un délit puni par la loi canonique et entraîner l’application d’une peine à des personnes physiques.[35]

Ses propos peuvent s’appliquer aux révélations privées, dont les bénéficiaires s’appliquent à eux-mêmes les paroles des apôtres : « nous ne pouvons pas ne pas parler de ce que nous avons vu et entendu » (Actes 4,20), et a fortiori : « Il faut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes » (Actes 5,29). Philippe Greiner décrit ensuite deux principales mesures disciplinaires prévues par le droit canonique à l’égard de personnes qui seraient rendues coupables de prosélytisme de mauvais aloi, ou du moins jugé comme tel, à savoir le retrait d’une charge pastorale et la suppression d‘une association. Nous élargirons le débat, en distinguant trois types de personnes sanctionnées :

  • les bénéficiaires des révélations présumées, et leurs amis,
  • les curés et les religieux qui les accompagnent,
  • les pèlerins qui pratiquent une forme particulière de dévotion liée à ces révélations.

Nous examinerons ensuite les voies de recours, et la manière dont les obligations et les droits des fidèles sont pris en compte.

1.3.1. Les sanctions envers les « voyants » et amis

L’abondante littérature relative aux révélations privées fournit de nombreux témoignages sur les mesures disciplinaires que l’Église a imposées aux fidèles bénéficiant de révélations privées et à leurs amis.

La mesure la plus simple consiste à laisser dans l’ombre le voyant, et à recueillir les fruits de la révélation au sein de la paroisse :

Dans les années 1980, au cœur du quartier musulman d’Anoumambo à Abidjan, Gabriel, un immigré burkinabè, a été sollicité par ses voisins pour enterrer un chrétien laissé sans sépulture. L’ayant fait, il réalise que les chrétiens du quartier ne se connaissent pas. Il dit le chapelet avec ceux qui se présentent et leur nombre augmente, si bien qu’il se met à avoir peur des musulmans qui les entourent. Il fait alors un songe : la Vierge Marie l’invite à ne pas avoir peur et à construire une chapelle à cet endroit. Aujourd’hui, la chapelle « Sainte Marie Bangtaba [36]» est rattachée à la paroisse saint-Pierre d’Anoumambo et va se transformer en paroisse autonome dédiée à sainte Marie mère de Dieu. Le songe est oublié et Gabriel est désormais seul et grabataire.

 

Voici un autre exemple où « la voyante » a été soumise à rude épreuve avant que l’Evêque ne reconnaisse l’apparition :

Elisabeth Ravasio devenue sœur puis mère Eugenia[37], dans la congrégation Notre Dame des Apôtres, vit en France une série d’extases et d’expériences mystiques. Elle converse avec le Père, implorant Sa miséricorde sur le monde et recevant les stigmates, conformément à son désir de souffrir avec Jésus. Le 1er juillet 1932, elle reçoit son premier message du Père pour les hommes[38], et son cas est soumis à Mgr. Caillot, évêque de Grenoble. En septembre 1933, ce dernier nomme une commission d’enquête sur les faits. Les examinateurs n’y croient pas de prime abord et augmentent leurs tracasseries jusqu’à la faire enfermer à l’hôpital psychiatrique saint Jean de Dieu en expliquant à sa supérieure : « C’est ici la maison de santé des femmes, et elle y restera jusqu’à ce qu’elle dise la vérité. On lui enlèvera l’habit et le voile, elle ne fera plus la communion ni la méditation ni le chemin de croix : elle pourra assister à la sainte messe. Ensuite, nous la renverrons en Italie où elle sera mise en prison pour le mal qu’elle a fait à l’Église de France par ses interventions du Père. » La sœur supérieure l’en fait sortir et, le 28 décembre, on lui ordonne de laisser le noviciat et d’aller dans une autre maison, comme sanction canonique. Par ordre de l’évêque, elle part à Pommiers… pour 8 jours. Puis l’enquête reprend, et voici que l’opinion des théologiens évolue favorablement. Vers 1935, la Commission d’enquête rend une opinion favorable, et vers 1943, Mgr. Caillot conclut 1° aux vertus solides de sœur Eugenia, 2° au caractère précis, légitime et opportun de sa mission [contenue dans les messages] du point de vue doctrinal 3° à l’intervention surnaturelle et divine comme seule explication logique et satisfaisante aux faits constatés, 4° à la présence du doigt de Dieu.

 

Dans cet épisode, qui se passe avant le Concile mais qui n’est pas réglé aujourd’hui, nous retiendrons le caractère surprenant de la peine canonique officieuse (l’enfermement à l’hôpital psychiatrique) et officielle (la mutation à Pommiers), au titre des sanctions qui ont été infligées à sœur Eugenia « pour le mal qu’elle a fait à l’Église de France ». De quel mal s’agit-il, puisque le caractère surnaturel des révélations a été officiellement reconnu par l’Ordinaire du lieu ? Venons-en donc au second épisode de sa vie, à partir de son élection comme supérieure générale de sa congrégation :

Mère Eugenia. Le 7 août 1935, lors du chapitre général de la congrégation ND des apôtres, Elisabeth est élue supérieure générale puis elle est réélue le 7 août 1947. Sa fécondité est importante, au point que le nombre de maisons passe de 50 en 1932 à 144 en 1944 et qu’elle est l’inspiratrice de l’œuvre de Raoul Follereau en faveur des lépreux, et à l’origine du centre mondial des lépreux d’Adzopé en Côte d’Ivoire. De ce fait, sa congrégation reçoit la couronne civique des mains du président de la République française, le 4 juin 1950 à Paris. A cette date, mère Eugenia est écartée à la demande de la Congrégation de la propagande de la foi, qui lui a fait signer un courrier de démission « pour motif d’incapacité ». Qu’a-t-elle fait de mal ? Nous savons qu’elle a été dénoncée à Rome par une sœur jalouse qui voulait être nommée secrétaire, pour pouvoir voyager avec elle. Apparemment, elle n’a pas su ce qui lui était reproché et n’a pas pu, ni peut-être voulu, se défendre. Elle a ensuite vécu des tribulations importantes en se faisant plusieurs fois retirer, puis remettre l’habit religieux. Elle crée diverses œuvres pour les pauvres et l’Unitas cattolica créée en 1953 et reconnue comme pieuse union en 1964. A plusieurs reprises, des décisions administratives lui imposent de fermer les maisons qu’elle a créées, et de changer de ville. Chaque fois elle obéit, en s‘attirant l’incompréhension des sœurs qui l’ont suivie « Nous renvoyer ? Mais qu’est-ce que nous avons fait ? »  Mère Eugenia témoigne : « L’archevêque de Reggio a mis comme supérieure et Directrice générale trois personnes sans que ces nominations aient été approuvées par les maisons. J’étais considérée comme une simple pensionnaire, n’ayant aucune voix, avec prohibition d’aller chez les autorités religieuses et civiles. Interdiction d’agir pour l’Unité Catholique […] Pendant 11 ans, de 1957 à 1968, j’ai vécu dans la contradiction ! Dès que j’entreprenais quelque-chose pour l’œuvre, on me mettait dans l’impossibilité de continuer… »  Bien que le Saint-Siège soit intervenu en sa faveur en 1966, la mémoire de mère Eugenia est aujourd’hui ternie par un dossier à charge, qui est tenu secret à la maison-mère des sœurs ND des apôtres, et par le procès civil intenté par ses détractrices. Actuellement, un nombre croissant de fidèles catholiques voudrait que la lumière soit faite sur cette affaire, y compris parmi les sœurs de la congrégation ND des apôtres.

 

Nous sommes ici témoins de sanctions canoniques qui consistent en la révocation de charges pastorales des trois supérieures des maisons de l’Union Catholique, l’empêchement des droits de vote de Mère Eugenia au sein de sa propre congrégation. Quant au motif qui fonde ces sanctions, elles ne sont pas connues, mais elles ont sans doute un lien avec une révélation privée, dont le caractère surnaturel a pourtant été reconnu[39]. Même si le cas de mère Eugenia est ancien, il concerne notre étude, car l’affaire n’est pas close aujourd’hui. En effet, le chancelier du diocèse de Grenoble continue à prendre des décisions administratives relatives à mère Eugenia, en refusant par exemple, le 26 août 2014, d’ouvrir ses archives pour le présent travail de recherche :

Nous ne communiquons pas sur le dossier de mère Eugenia Ravasio.

Peu après, le pape Benoît XVI répond à une compatriote bavaroise qui s’adresse à lui pour demander l’institution d’une fête de Dieu le Père au mois d’août, comme demandé dans les messages du Père à Mère Eugenia. Il lui répond que le cas a déjà été tranché négativement dans la lettre encyclique Divinum Illud Munus de Léon XIII, le 9 mai 1897[40]. Outre le fait que cette information soit peu connue, il semble que les théologiens puissent trouver facilement une solution, en instituant par exemple la fête du Père miséricordieux, à l’occasion de l’année de la miséricorde.

Revenons au cas de Lipa, aux Philippines :

Les sœurs reçurent l’ordre de détruire toutes les preuves relatives à l’apparition, l’évêque et son coadjuteur furent mutés, de même que la supérieure du Carmel. Tous ceux qui étaient directement liés à l’apparition eurent à souffrir. Le Carmel fut mis en quarantaine. Un psychiatre, le Dr. Pardon, menaça Teresina d’être internée si elle maintenait son témoignage. Plus tard, son admission au Carmel fut refusée du fait des apparitions, sous le prétexte qu’elle s’était éloignée quelque temps du Carmel, alors qu’on le lui avait demandé[41].

 

Examinons un cas actuel, survenu au Burundi, relaté ci-dessous à partir de plusieurs témoignages[42], concordants dans les faits, mais pas dans leur interprétation[43],

A partir de 1990, une paysanne du nom d’Eusébie Ngendakumana (Zebiya en Kirundi), déclare avoir bénéficié de révélations privées qui viendraient de la Très Sainte Vierge Marie se présentant sous le nom « Reine de l’Afrique ». Les apparitions se déroulent d’abord dans sa propriété au lieu appelé Businde, dans la paroisse de Rukago, au Nord du Burundi, puis à la capitale, Bujumbura. Peu à peu, des personnes s’associent à elle, et témoignent de grâces et de conversions reçues en abondance. Irrités par les fréquentes veillées de prière, des voisins portent plainte auprès des autorités civiles qui arrêtent la voyante et son entourage, et bastonnent certains jusqu’à évanouissement. Le 21 octobre 2012, une altercation se produit entre les amis de Zébiya qui veulent entrer dans l’église de Rukago et le curé qui veut les en empêcher[44], si bien que l’autorité civile est appelée pour mettre de l’ordre. En novembre 2012, l’évêque de Ngozi interdit formellement tout culte à Businde et demande à Mme Eusébie et à « ses adeptes » d’arrêter toute activité qui porte préjudice à l’unité et à la communion de l’Église. En janvier 2013, des étudiants sont renvoyés de l’université de Ngozi parce qu’ils ont diffusé une publication « prophétique » jugée « mensongère » par les autorités de l’Université. Ils portent plainte et ont gain de cause auprès du Tribunal de grande instance de Ngozi, cependant l’université refuse de les réintégrer, car elle dépend de l’évêque. En mars et avril 2013, la police tire à balles sur les adeptes, tue entre cinq et dix personnes, arrête plus de deux cents d’entre eux et condamne certains à des peines de cinq mois à six ans de prison ferme. En juillet 2013, le site de Businde est transformé en terrain militaire, tandis que l’orphelinat qui y avait été construit par Zebiya et ses amis est démoli[45].

 

Dans cette affaire, les décisions administratives ecclésiastiques à l’encontre de Zebiya et ses amis sont assez peu contestables[46]. On peut cependant déplorer un manque évident de dialogue qui leur aurait peut-être permis de respecter le discernement de l’évêque, au vu notamment du sérieux de l’enquête prévue par les normes. On peut également s’interroger sur le degré de connivence entre l’Église et l’Etat, qui a conduit à l’arrestation, à des blessures ou à la mort de nombreux fidèles catholiques.

En reprenant notre question sur le lien entre l’acceptation passive, et le fait de revendiquer ses droits en tenant compte du bien commun de l’Église, nous constatons que dans tous les cas évoqués, les bénéficiaires d’apparitions privées ont subi avec patience les épreuves, souvent illégales, que l’autorité hiérarchique leur a fait subir. Ainsi par exemple, l’archevêque actuel de Lipa estime que les souffrances et humiliations que la voyante a vécues confèrent une crédibilité solide à ses visions et à ses déclarations. La Vierge avait prévenu la jeune carmélite « Tu vas souffrir, on te tournera en dérision, mais ne crains pas, car ta foi te mènera au Ciel ».

Citons pour finir le cas de Jeanne-Louise Ramonet en Bretagne :

Jeanne-Louise Ramonet, une paysanne de Plounévez-Lochrist en Bretagne, prétend que la Vierge Marie et le Christ lui sont apparus au lieu-dit Kérizinen dans le Nord-Finistère, entre 1938 et 1968. Depuis, le Rosaire y est récité chaque jour et les pèlerins sont nombreux à venir demander à Notre Dame du Très Saint Rosaire d’intercéder pour la guérison des esprits et des corps. Pourtant, le magnifique sanctuaire privé édifié à cet endroit le 17 septembre 1978 n’est toujours pas autorisé à abriter la présence réelle du Christ malgré plus de trente années de prières de la part de milliers de pèlerins[47] et une enquête canonique bâclée[48].

 

 

Teresita Castillo de Lipa (1927-)  

Mère Eugenia Ravasio

France, Italie, Côte d’Ivoire

 

Madeleine Aumont de Dozulé

(1925-2016)

 

Examinons maintenant les sanctions appliquées aux autorités ecclésiastiques proches des voyants.

1.3.2. Les sanctions envers les curés et les religieux favorables

La mesure disciplinaire la plus facile à prendre pour un évêque confronté à un cas de révélation privée consiste à muter le curé qui soutient les bénéficiaires d’une apparition présumée, ainsi que les religieux qui les accompagnent.

Comme nous l’avons vu, la révocation d’une charge pastorale est fixée par le canon 184 §1, tandis que la procédure est précisée aux canons 1740[49], 1741 et 1742 lorsqu’il s’agit d’un curé. Elle débute par une demande de renonciation théoriquement précédée par une phase de discussion avec deux prêtres, et théoriquement écrite et motivée. Le premier des motifs de mutation du curé évoqué par le canon 1741 est « une manière d’agir qui cause un grave détriment ou un trouble grave dans la communion ecclésiale. »

En pratique, lorsqu’un groupe de fidèles se met à croire à une révélation privée, ou, du moins à une révélation présumée, il se produit en général une division entre le groupe des pèlerins qui y croient et le groupe des paroissiens qui n’y croient pas. Quand bien même les deux groupes resteraient prudents, dans l’attente du discernement de l’évêque, il est vraisemblable qu’il se produise une division et, quelle que soit l’attitude du curé, il peut en être tenu pour responsable, ce qui entraîne, de facto, un motif de mutation. Pourtant, il est normal qu’un tel trouble se produise dans la vie de l’Église dès lors que l’Esprit saint intervient : « mes pensées ne sont pas vos pensées » (Isaïe, 55, 9), a dit l’Eternel, tandis que Jésus, prince de la paix, a confirmé :

Pensez-vous que je sois apparu pour établir la paix sur la terre ? Non, je vous le dis, mais la division. N’allez pas croire que je sois venu apporter la paix sur la terre. Je ne suis pas venu apporter la paix, mais le glaive. Désormais, en effet, dans une maison de cinq personnes, on sera divisé, trois contre deux et deux contre trois : on sera divisé, père contre fils et fils contre père, mère contre fille et fille contre mère, belle-mère contre bru et bru contre belle-mère. Car je suis venu opposer l’homme à son père, la fille à sa mère et la bru à sa belle-mère. On aura pour ennemis les gens de sa famille. (Matthieu 10, 34-36).

En l’occurrence, voici quelques-unes des sanctions régulièrement appliquées aux curés, religieux et religieuses qui fréquentent des lieux de révélations privées présumées, non reconnus, et/ou soutiennent ceux qui les fréquentent :

  • interdiction de se rendre sur les lieux, comme c’est le cas à Kérizinen[50], ou à Lipa[51],
  • mutations de curés[52], de religieuses[53] et d’évêques[54],
  • renvois de religieux[55],
  • interdits (c. 1332) et suspenses, (c. 1333), voire menace d’excommunication[56],
  • dénonciation ou neutralité face au pouvoir séculier[57].

En France, Mgr. René Laurentin, que nous avons rencontré, a consacré sa thèse de doctorat en théologie au sacerdoce de la Vierge et, tout au long de sa vie, il a étudié les révélations privées. Voici des extraits de ses mémoires :

J’avais accepté d’entrer dans le sombre domaine [des apparitions] à la demande des autorités de l’Église, y compris du cardinal Seper, prédécesseur du cardinal Ratzinger, qui me consulta avant d’établir ses normes des apparitions (1978). Mais l’autorité qu’on attachait à mon nom en la matière a gêné : trop de gens l’utilisaient indûment, comme si dialogue ou enquête équivalait à authentification. […] La suite allait voir ma lente descente aux enfers, mais sans drame ni éclat, car j’en ai limité les dégâts en ne me battant contre personne et en obéissant à l’ordre établi. Ainsi ai-je perdu, sans bruit, une bonne partie des libertés que j’avais tant appréciées dans l’Église, jusqu’à mes quatre-vingts ans, et vérifié la prédiction de Jésus à son disciple Pierre : « Dans ta jeunesse, tu mettais toi-même ta ceinture… » (Jn 21, 18). Toute notoriété fait de son bénéficiaire un homme à abattre, et mon double souci d’élucider les questions en souffrance et de réhabiliter des réputations diffamées aggrava considérablement mon cas. […]  Certes, les répressions sont moins rigoureuses et moins énigmatiques qu’au temps du père Congar, mais les méthodes variées sont analogues pour réduire les libertés humaines, chrétiennes, sacerdotales, médiatiques, universitaires ou autres, qui interfèrent avec les actions en cours à l’abri des secrets officiels. [58]

 

1.3.3. Les sanctions envers les pèlerins

Une autre sanction, ou du moins une « mesure disciplinaire » que Philippe Greiner évoque à propos du prosélytisme de mauvais aloi, est la suppression d’une association. Lui-même cite par exemple la suppression de l’association publique « Arche de Marie » par le cardinal-archevêque de Québec, le 4 mai 1987, alors qu’elle avait été érigée par son prédécesseur en 1975[59].

D’autres types de sanctions sont couramment appliquées, et notamment :

  • l’interdiction de construire un sanctuaire, y compris privé, ou d’ay autoriser la célébration du culte[60];
  • l’interdiction aux pèlerins de se rendre sur les lieux de la présumée révélation[61];
  • l’interdiction de parler et de témoigner, comme par exemple à Dozulé[62].
  • l’interdiction de publier des ouvrages[63],
  • des interdictions vestimentaires, comme à Businde,
  • l’atteinte à la réputation des pèlerins, considérés comme gogos à Dozulé, voire des ennemis de l’Église[64]
  • l’abandon au bras séculier[65].

On peut s’interroger sur la légalité de ces décisions, et sur leur caractère d’acte administratif permettant de déposer un recours.

 

1.4. Les voies de recours et la justice

Les chapitres 4 à 6 présentent un large panorama des recours administratifs hiérarchiques et contentieux couvrant l’ensemble du droit canonique, mais nous n’en avons pas rencontré concernant des litiges relatifs à des révélations privées. Est-ce à dire que la justice administrative de l’Église n’est pas applicable dans ce domaine, que l’intervention de la justice est méconnue parce que gardée secrète, ou y a-t-il des raisons pour que les fidèles catholiques victimes de décisions administratives ne déposent pas de recours ?

Nous avons vu que Mgr. Laurentin a été témoin de ce qu’il appelle les « méthodes variées » de la hiérarchie ecclésiastique pour étouffer certaines révélations privées. Dans ses mémoires, il précise que les révélations privées à caractère public confèrent immanquablement une certaine notoriété à leurs auteurs, faisant d’eux « des hommes à abattre ». Face à ces attitudes de la hiérarchie, lui-même a choisi la voie du silence et de la soumission où il préserve pour lui un minimum de liberté d’écrire en sacrifiant le reste. Par ce choix, il pourrait s’être fait complice de violations des droits des fidèles par l’autorité ecclésiastique. Il laisse entendre qu’il a usé de la voie diplomatique et médiatique pour soutenir discrètement certains « voyants », mais il n’a visiblement pas utilisé la voie juridique. La raison de ce choix tient-elle à sa volonté de ne pas déposer de recours pour ne pas envenimer les situations, ou à une impossibilité d’agir efficacement du fait des « secrets officiels », qui, d’après lui, constituent « un abri » contre les recours contentieux ? Nous l’ignorons.

Dans le cas de Garabandal[66], l’évêque de Santander a continué à appliquer en 1968 le canon 1399 du code de 1917 alors que celui-ci avait été abrogé. Les paroissiens n’ont fait aucun recours, car ils ignoraient sans doute leurs droits[67].

Dans le cas de Kérizinen, des recours gracieux ont été formulés régulièrement par l’association des Amis de Kérizinen auprès de l’ordinaire du lieu, avec des résultats plus ou moins positifs en fonction de la personnalité des évêques successifs. L’association a toujours cherché à maintenir le dialogue en renonçant à la soumission aveugle et à la voie contentieuse. Il en résulte parfois d’une certaine ouverture :

Vous trouverez ci-joint une note […] qui […] prend acte du positif, et indique en même temps les étapes qui seront encore à franchir. […] Il est absolument nécessaire que [dans la brochure] soit indiqué clairement que Jeanne-Louise a dit avoir eu, entre 1938 et 1965, plus de 70 apparitions de la Vierge Marie et/ou du Seigneur Jésus, et avoir reçu, au cours de ces apparitions, des messages qu’elle a transcrits dans ses cahiers : que ces apparitions et ces messages n’ont jamais été reconnus comme ayant une origine surnaturelle…[68]

Dans le cas de Zebiya au Burundi, on notera une mention de la justice canonique de la part de l’ordinaire de Ngozi, dans un courrier du 2 avril 2013 à l’avocat Segatwa Fabien, qui en appelait à lui pour faire sortir de prison les adeptes de Zebiya :

… au cas où il vous semblerait que l’évêque de Ngozi a violé une loi canonique dans les dispositions prises pour demander aux fidèles qui sont confiés à sa charge de se comporter en chrétiens catholiques, sachez qu’il aimerait mieux répondre devant la juridiction d’Églises compétentes en ce domaine…

On peut se demander si la perspective de recours évoquée par l’évêque est crédible, dans la mesure où l’avocat Segatwa ne disposait d’aucun acte administratif écrit de l’évêque qu’il aurait pu contester, ni des compétences canoniques qui lui auraient permis de porter l’affaire devant le Conseil des laïcs, passage obligé vers la Signature apostolique. Il semble d’ailleurs que l’impossibilité pratique, pour Zebiya et ses amis, de dialoguer sainement avec le curé et l’évêque, ait été une des sources de la violence qui s’est déclenchée. Quant au père Hermann, il a préféré la fuite au recours.

Un certain dialogue a existé dans d’autres lieux comme à Dozulé, où une habitante a déposé un recours gracieux auprès de l’évêque de Bayeux-Lisieux, après avoir reçu le courrier du 2 mars 2006 ci-après :

Mon prédécesseur, Monseigneur Badré, en décembre 1985, moi-même, à diverses reprises et surtout à Lourdes, en septembre 1989, le Cardinal Ratzinger, actuellement pape sous le nom de Benoît XVI, en octobre 1985, avait interdit : Toute publication de livres, de brochures, de cassettes. Et toute propagande et collecte de fonds en vue de la construction d’un sanctuaire ou d’une croix gigantesque de 738 mètres. Tout déplacement à Dozulé. Inutile de se rassembler sur cette prétendue butte aux prodiges. Nous ne pouvons déclarer authentiques les apparitions de Dozulé. Il faut, donc, chère Madame, vous conformer aux décisions de l’Église[69].

Ce courrier aurait pu faire l’objet de contestations[70], mais la destinataire n’a pas déposé de recours hiérarchique ni contentieux. L’attitude de dialogue respectueux produit un minimum de fruits, puisque le dimanche 29 mai 2011, en présence de l’évêque et d’une foule de fidèles, le curé de Dozulé impose ses deux mains sur la tête d’une paroissienne et prononce ces paroles :

Madame M., au nom de l’Église, je vous nomme la responsable de l’accueil des pèlerins sur la Haute Butte à Dozulé. Dans les difficultés, je serai là pour vous aider[71].

 

Depuis la parution du livre français, le 3 janvier 2017, des pèlerins de Dozulé ont été informés, de source fiable, que l’évêque du lieu a entrepris un complément d’enquête canonique sur les apparitions présumées de Dozulé mais que la Congrégation pour la doctrine de la foi lui aurait demandé d’arrêter l’enquête avant son terme, ce qu’il a fait. Les fidèles du lieu restent perplexes devant cette situation qui apparaît invraisemblable, puisque contraire aux recommandations de la même Congrégation.

 

Cette situation présente toutefois certaines similitudes avec les récents développements de Lipa aux Philippines. Après avoir mené une enquête approfondie, l’Évêque de Lipa a reconnu comme surnaturelles les révélations, en signalant le caractère « douteux » du décret d’interdiction de 1951[72]. Là aussi,  la Congrégation pour la doctrine de la foi est intervenue en exhumant  un document gardé secret pendant plus de cinquante ans, dans lequel le pape Pie XI aurait validé en forme spécifique l’enquête fortement entachée d’illégalité, concluant au caractère non-surnaturel des apparitions et des pluies de pétales de roses[73]. Tout en annonçant le décret de la Congrégation pour la doctrine de la foi annulant son propre décret[74], Mgr Argüelles a précisé qu’il ne ferait pas appel de cette décision. Sans que nous en connaissions les raisons, signalons que Mgr Argüelles a été invité à renoncer à sa charge d’évêque de Lipa le 2 février 2017, deux ans avant sa limite d’âge, et qu’un nouvel évêque a été nommé à sa place immédiatement.

Un éminent docteur en droit canonique a critiqué le choix de l’auteur d’évoquer les révélations privées dans le présent ouvrage :

Je suis surpris de lire par exemple le passage (avec photo !) où vous mentionnez les pseudo-révélations de Dozulé ou autres lieux… Attention à ne pas tomber alors dans un niveau journalistique qui détonne dans un ouvrage qui se veut de bonne tenue[75].

Il nous semble important de maintenir le sujet sensible car nous avons vu que les révélations présumées suscitaient de nombreux actes administratifs particuliers, portant à tort ou à raison atteinte aux droits de fidèles catholiques.  De plus, il nous semble que, s’il ne faut pas qualifier publiquement de révélation surnaturelle une révélation présumée, il ne faut pas non plus la qualifier de pseudo-apparition tant que l’ordinaire ne s’est pas prononcé officiellement au vu de l’enquête approfondie demandée par la Congrégation pour la doctrine de la foi.

 

Compte tenu de ces éléments, une enquête auprès des associations de pèlerins de plusieurs lieux d’apparitions non-reconnues a permis de comprendre pourquoi leurs membres ne recourent pas à la justice ecclésiastique, quand ils ont la conviction d’une profonde injustice par rapport aux voyants et aux messages :

  • la hiérarchie ecclésiastique est particulièrement sensible aux révélations présumées qui pourraient être source de division dans la communion ecclésiale,
  • les personnes concernées sont attachées à l’Église et ne veulent pas casser un dialogue avec leur évêque, aussi difficile et ténu soit-il,
  • aucune des associations de pèlerins n’a reçu la personnalité juridique qui lui permettrait d’agir,
  • leurs membres ne disposent pas de connaissances suffisantes en matière de droit canonique pour faire valoir leurs droits, et les prêtres qui pourraient disposer de cette connaissance sont soumis à l’interdiction de fréquenter les lieux concernés,
  • les décisions de l’évêque ne sont pas clairement des actes administratifs susceptibles de recours,
  • les décisions éventuelles de la Congrégation pour la doctrine de la foi ne sont communiquées qu’à l’évêque du lieu, et ne sont donc pas contestables par les fidèles catholiques concernés. De plus, celles-ci sont parfois approuvées par le pape sous forme spécifique, leur donnant ainsi un caractère définitif,
  • les pièces du dossier, et notamment l’enquête canonique, ne sont pas divulguées, si bien qu’il n’est pas possible de les contester.

Nous avons tout de même trouvé une exception avec un recours contentieux déposé auprès du Tribunal suprême pour une affaire liée à une révélation privée[76].

Le 10 mars 1975, l’association « L’Armée de Marie » est érigée canoniquement par l’archevêque de Québec selon le code de 1917. Par la suite, il apparaît que l’association se situe dans la mouvance de la communauté Notre Dame de Tous les Peuples qui s’appuie sur la vie mystique de sa fondatrice et sur les messages qu’elle a reçus entre 1940 et 1959. Or la dévotion à Marie mère de tous les peuples a été condamnée sous Pie XII. Aussi, le Cardinal-archevêque de Québec invite-t-il l’association à cesser de « s’engager sur des voies périlleuses et non complètement orthodoxes », puis il recueille l’avis suivant de la Congrégation pour la doctrine de la foi : « Après avoir étudié les écrits diffusés par l’Armée de Marie, cette congrégation […] approuve ces mises en garde et les confirme, en vous laissant toute latitude de prendre toutes les mesures que vous estimerez nécessaires, sans exclure la possibilité de supprimer l’association ad normam iuris ». Par décret du 4 mai 1987, l’Archevêque supprime alors la reconnaissance de l’association. Le décret fait l’objet d’un recours hiérarchique, puis contentieux-administratif, mais il n’est pas admis à la discussion par manque évident de fondement, conformément aux sentences du Congrès les 17 mars 1989 et 1er mars 1990, et du Collège le 20 avril 1991.

 

On observera que la décision du Tribunal ne porte aucunement sur le bien-fondé de la position de la Congrégation pour la doctrine de la foi, qui n’est pas considérée comme un décret administratif, mais sur le décret de suppression de l’association, validé par le Conseil pontifical pour les laïcs, basé sur la position de la Congrégation.

Cette décision de l’évêque par rapport à l’Armée de Marie nous amène à approfondir un deuxième sujet transversal, à savoir celui des nouveaux mouvements religieux et des sectes présumées.

  1. Les nouveaux mouvements religieux et les sectes présumées

Aux origines du christianisme, les chrétiens étaient, à juste raison, considérés comme une secte, puisque le mot secte vient du verbe latin sequor, sequeris, qui veut dire suivre, et que les chrétiens suivaient Jésus Christ. Au XXIème siècle, la compréhension du mot secte a évolué, avec une signification différente dans le monde civil et religieux et entre les différents pays France[77]. Il redevient d’actualité en France, à l’instar d’autres pays, du fait de l’actualité civile et religieuse.

La France s’est dotée le 12 juin 2001 d’une loi « tendant à renforcer la prévention et la répression des mouvements sectaires » […] Cette loi a immédiatement été attaquée par les Témoins de Jéhovah devant la Cour européenne des droits de l’homme ; mais leur recours a été rejeté le 6 novembre 2001. […] C’est principalement dans le catholicisme que cette notion de secte présente une connotation péjorative : le code de 1917 désignait ainsi négativement tous les groupements qu’elle considérait comme schismatiques ou hostiles, sectes « catholiques », maçonnique », etc. Les autres grandes religions ont une attitude plus positive ou du moins plus neutres vis-à-vis des groupes minoritaires ou des « nouveaux mouvements religieux », même si ceux-ci surprennent ou dérangent l’ordre religieux établi[78].

Le 29 avril 2016 à Dijon, lors de la conférence du monde séculier « Lutte « anti-sectes » : bilan et perspectives[79] », Thierry Bécourt confirme ses propos de 2002 :

Il est manifeste qu’un courant d’intolérance traverse la France et gagne l’Europe. Il nous rappelle les plus sombres périodes de notre histoire. Le spectre de Vichy nous guette… Cette intolérance étatisée que nous vivons aujourd’hui dans notre pays dit « des droits de l’Homme », marque le début de la réelle privation de la liberté, celle de la pensée… qui, si nous perdons notre vigilance, ouvrira la porte au totalitarisme[80].

Malgré le caractère subjectif et donc partial de ces propos, il est intéressant de savoir comment se comporte l’Église et sa justice dans ce que Thierry Bécourt appelle « une nouvelle chasse aux sorcières ».

2.1. Le droit applicable

En droit canonique, le code de 1917 évoque à plusieurs reprises les personnes qui ont donné leur soutien, ou qui ont adhéré publiquement à une secte hérétique ou schismatique ou à la secte maçonnique, ou aux sociétés du même genre[81], en leur interdisant de participer aux votes (canon 167), d’être admis au noviciat (canon 542), d’appartenir à une association (canon 693), d’être parrain (canon 765), de se marier religieusement (canon 1060), d’avoir une sépulture chrétienne (canon 1240). Ils doivent être déclarés infâmes et recevoir une peine d’excommunication (canons 1214 §1[82] et 2335). De même sont prohibés les livres qui traitent des sectes maçonniques et autres sociétés du même genre, soutiennent qu’elles sont utiles et qu’elles ne sont pas nuisibles à l’Église et à la société civile (canon 1399).

Actuellement, le code de 1983 reprend partiellement ces canons[83], sans utiliser le mot de secte, mais en conservant celui d’hérésie, en sachant que l’affiliation à une secte athée est assimilée à l’hérésie[84]. Outre le Code, plusieurs prises de position précisent la position du magistère.

En 1981, le Conseil permanent de l’Église de France crée le groupe « Pastorale et sectes » animé par Jean Vernette[85].

Le 3 mai 1986, la Curie romaine publie un document dit « document romain » intitulé « le phénomène des sectes ou nouveaux mouvements religieux : défi pastoral ». En tenant compte de la démarche œcuménique et du dialogue interreligieux, Philippe Le Vallois distingue trois cas :

  • les sectes d’origine chrétienne, à savoir des groupes qui ajoutent à la Bible d’autres livres, d’autres messages prophétiques ;
  • les groupes religieux ayant une vision du monde distinctive propre, dérivant des enseignements d’une des principales religions du monde
  • des groupes particuliers qui sont vus habituellement comme une menace pour la liberté des gens et pour la société en général.

Le 5 avril 1991, la IVème réunion plénière du consistoire des cardinaux a pour thème « les sectes ou nouveaux mouvements religieux », dans les cinq continents. Le cardinal Arinze, alors président du Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux, y expose « le défi des sectes ou des nouveaux mouvements religieux, approche pastorale[86] » en faisant évoluer le terme « secte » jugé trop polysémique et négatif vers l’expression « Nouveaux mouvements religieux » mieux adaptée pour couvrir les nouveaux mouvements d’origine protestante, les groupes dit sectaires qui ont un arrière-plan chrétien, les nouveaux mouvements orientaux ou africains, et ceux de type gnostiques ou ésotériques. Il invite les évêques au discernement, en jugeant excessives certaines de leurs réactions sur le terrain, et en les invitant à écarter les condamnations, discriminations, généralisations qui consistent à appliquer à tous les NMR les aspects négatifs de quelques-uns.

Le 15 novembre 1991, la Conférence des évêques de France publie « L’Église catholiques, les Sectes et Nouveaux mouvements religieux en France[87] »

En 1996, Mgr. Jean Vernette critique au nom des droits de l’homme le rapport sur les sectes adopté le 22 décembre 1995 par la Commission sur les sectes de l’Assemblée nationale[88] et publié le 10 janvier 1996, qui établit une liste de 173 « mouvements sectaires » à partir des travaux secrets des renseignements généraux et selon des critères qui, d’après lui, peuvent être appliqués à la quasi-totalité des religions installées[89].

En 1997, l’Opus Dei réagit contre le rapport sur les sectes des parlementaires belges, qui l’apparente à cette catégorie en le taxant de « catholicisme intégral et élitiste ».

En 2013, Yves Hamant, président d’Istina, ainsi que d’autres personnes, adressent aux Evêques de France « un appel vigoureux pour dénoncer des pratiques relevant de dérives sectaires à l’intérieur même d’institutions d’Église. » Le Président de la Conférence des Evêques de France leur répond en ces termes le 7 novembre :

Nous l’avons reçu comme le cri de personnes souffrant au cœur de l’Église en raison de ce qu’elles ont vécu personnellement ou de ce que leurs proches ont vécu ou vivent encore. Nous pensons à ceux et celles qui sont blessées, parfois de manière durable, par le comportement de certains membres de l‘Église. Comme Président de notre Conférence, je voudrais en notre nom à tous, vous dire que ces pratiques nous heurtent et nous choquent. Vous assurer de notre prière pour eux ne suffit pas ; nous voulons porter avec eux leur souffrance, les assurer de notre compassion, les aider dans leur reconstruction[90].

Il en résulte la mise en place d’une Cellule pour les dérives sectaires dans des communautés catholiques au sein de la Conférence des évêques de France[91] ainsi que la publication, en septembre 2014, de la liste de critères de discernement permettant de repérer des comportements de type sectaire[92]. Rien n’est dit cependant sur la procédure à suivre en cas de dérive sectaire présumée, et, en particulier, sur la protection des droits des fidèles catholiques membres des communautés incriminées.

2.2. Les difficultés et les sanctions

Sur fond de délation, d’exclusion et de peur qui ne va pas sans rappeler des périodes sombres de l’histoire, trois types distincts de difficultés apparaissent :

  • les violations des droits des victimes de procédés déviants au sein même de l’Église,
  • les amalgames entre des groupes déviants et des groupes religieux, engendrant des exclusions et des sanctions à l’encontre des membres de ces groupes,
  • la connivence de certains prêtres catholiques avec l’Etat français et avec les loges maçonniques, qui ont parfois instrumenté la peur des sectes pour mener une attaque contre les religions.

Personne n’est en effet à l’abri des phénomènes d’exclusions, résultant d’une stigmatisation de groupes déviants, comme en a témoigné le Saint-Père Benoît XVI lui-même quatre ans avant sa démission :

Parfois, on a l’impression que notre société a besoin d’un groupe, au moins, auquel ne réserver aucune tolérance, contre lequel pouvoir tranquillement se lancer avec haine. Et si quelqu’un ose s’en approcher, dans le cas présent le pape, il perd lui aussi le droit à la tolérance et peut lui aussi être traité avec haine, sans crainte ni réserve[93].

L’Opus Dei l’a appris à ses dépens lorsque Mgr. Jacques Trouslard, chanoine honoraire, délégué à la documentation sur les sectes, lui prêtait dix caractéristiques sectaires[94]. Il fut d’ailleurs récompensé par l’Etat français avec la haute distinction de Chevalier de la Légion d’honneur[95].

Certains évêques français ont été destinataires des rapports des Renseignements généraux qui sont à l’origine du rapport parlementaire sur les sectes de 1995 ou de ceux des groupes antisectes comme l’UNADFI, largement subventionnés par le gouvernement français. Ils prennent parfois prétexte de ces informations non vérifiées pour refuser des droits aux membres des mouvements considérés comme sectaires, ou pour attenter à leur réputation sans leur laisser de droits de défense.

En adoptant la forme de lettre ouverte, le président de la Conférence des évêques de France met le problème sur la place publique, laissant le soin à la presse de commenter ses propos, ce qu’elle n’a pas manqué de faire, en évoquant de possibles « abus spirituels » de la part des Béatitudes, de la Légion du Christ, des Points-Cœurs, de la Communauté Saint-Jean… Contrairement aux procédures canoniques protégeant la réputation des parties, il est à craindre que

Les mises en cause dans les médias portent souvent des atteintes irrémédiables à la réputation de personnes innocentes.[96]

2.3. Les recours possibles

Il arrive que des membres de groupes désignés comme sectaires fassent des recours contentieux-administratifs contre des prises de position de l’autorité administrative. Après les recours des membres de « L’Armée de Marie » et de l’association « Call to Action Nebraska », voici un troisième exemple :

 

Un membre d’une association privée de fidèles faisant l’objet d’une mise en garde affichée dans un monastère se plaint d’une atteinte à sa réputation du fait d’un courrier de l’autorité ecclésiastique adressé à une personne qui avait demandé des renseignements sur cette association. Le Tribunal suprême n’admet pas le recours à la discussion, considérant « qu’il n’a pas été démontré que la réponse contestée est un acte administratif, car la hiérarchie ne fit que répondre à une femme qui l’interrogeait à propos de l‘affiliation à l’Église de cette association, en reprenant le rapport d’un sénateur français et d’autres sources Internet[97].

 

 

Face à cette situation, le canoniste ne peut que s’interroger sur le bien-fondé des sources que la hiérarchie utilise, en citant le rapport parlementaire sur les sectes porté par des francs-maçons notoires et le site sos-dérive-sectaire, qui se réfère explicitement à « l’accusateur des frères » comme se nomme lui-même phonétiquement le webmestre du site[98].

Il s’interroge également sur la crédibilité des conseillers choisis par l’épiscopat français, à savoir Mgr. Trouslard qui se prétendait « obsédé sectuel[99] », et Mgr. Vernette, qui a contracté un mariage[100]. Il déplore enfin qu’aucun des trois recours déposés dont il a eu connaissance n’ait été admis à la discussion, ce qui pourrait révéler un problème structurel et pas seulement conjoncturel.

Quant à la réponse du Président de la Conférence des évêques de France sur les dérives sectaires au sein de l’Église, on peut s’étonner qu’elle envoie les victimes vers la justice de l’Etat français, sans évoquer aucunement les procédures canoniques en vigueur dans l’Église.

Nous voulons vous dire avec force que nous souhaitons continuer à agir pour que des situations se clarifient, pour que la vérité puisse apparaître lorsque c’est nécessaire et pour que ceux qui ont été victimes de procédés déviants trouvent auprès des évêques une oreille attentive et compréhensive. […] Certains comportements que vous dénoncez relèvent de la justice pénale. Personne n’est au-dessus de la loi. Il appartient aux victimes qui le souhaitent de porter plainte devant la justice lorsqu’il y a matière[101].

En omettant de citer la justice administrative ecclésiastique, il semble que les Evêques de France considèrent qu’elle ne joue pas son rôle pour identifier, limiter et résoudre les difficultés lies aux dérives sectaires supposées au sein de l’Église. Sans doute cela est-il dû en partie au manque de vigueur des organismes de concertation, comme les comités diocésains de médiation, que le pape François semble pourtant valoriser dans son exhortation Evangelii gaudium :

Dans sa mission de favoriser une communion dynamique, ouverte et missionnaire, il [l’évêque] devra stimuler et rechercher la maturation des organismes de participation proposés par le Code de droit Canonique et d’autres formes de dialogue pastoral, avec le désir d’écouter tout le monde, et non pas seulement quelques-uns, toujours prompts à lui faire des compliments.

En conclusion de ces pages, méditions ces paroles du pape François en les appliquant aux communautés ecclésiales rejetées par la hiérarchie :

Une Église sans martyrs… est une Église sans Jésus […]  la plus grande force de l’Église aujourd’hui est dans les petites Églises, toute petites, … persécutées[102].

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Mère Eugenia des lépreux

 

 

 

[1] La Congrégation compétente en matière de révélations privées est la Congrégation pour la doctrine de la foi. Or la base de données des publications évoquée au chapitre 3, ne relate que quatre recours par rapport à des décrets émanant de cette Congrégation, sur les quelques deux mille publications relatives à des recours contentieux. De plus, aucun des cas recensés ne fait explicitement référence à une révélation privée. Certes, il est possible qu’une jurisprudence existe pour la mutation de curés ou la suppression d’association, qui constitue une des mesures disciplinaires imposées par l’évêque en cas d’apparition présumée, mais dans ce cas, la jurisprudence est très abondante et la référence à la révélation privée n’est pas indiquée dans l’objet des recours.

[2] Cf. Ratzinger, (Cardinal Joseph), lieux théologiques des révélations privées, commentaire du troisième secret de Fatima, Fatima 13 mai 2000. Il distingue le temps de la révélation, dite publique, par opposition avec les « révélations privées » sachant qu’entre ces deux réalités, il y a une différence non seulement de degré, mais de nature.

[3] Pensons par exemple à saint Augustin, saint Martin, sainte Jeanne d’Arc, sainte Gertrude, saint François d’Assise, saint François de Sales, sainte Jeanne de Chantal, sainte Thérèse d’Avila, sainte Catherine Labouré, saint Jean de la Croix, Bernadette de Lourdes et les enfants de Fatima, sœur Faustine, Padre Pio…

[4] Bertone, (card. Tarcisio sdb), Archevêque émérite de Vercelli, Secrétaire de la Congrégation pour la doctrine de la foi : « le message de Fatima », Fatima 13 mai 2000.

[5] Lebry (Léon Francis), Jean-Pierre Kutwa, miraculé et cardinal, Abidjan NEI-CEDA, 2015, 262 p.

[6] Congrégation pour la doctrine de la foi, lettre du 15 mai 2016, à l’occasion de la fête de Pentecôte 2016, www.vatican.va/roman_curia/congregations/cfaith/documents/rc_con_cfaith_
doc_20160516_iuvenescit-ecclesia_fr.html

[7] Le site www.miraclehunter.com/ est développé par « Miracle Hunter » Michael O’Neill, diplômé de l’université de Stanford University, et membre de la Mariological Society of America. S.E. le Cardinal Seán O’Malley, Boston, MA. le commmente ainsi : « Thank you for sending me your site. It is excellent. »

[8] Il recense en fait plus de 1 000 miracles, ou du moins prétendus miracles, consistant en des images miraculeuses, stigmates, cadavres non corrompus, miracles eucharistiques et apparitions.

[9] Cet accroissement peut traduire un accroissement de leur nombre réel, mais il peut être aussi le fruit d’une meilleure connaissance des apparitions du fait d’une grande médiatisation.

[10] Monseigneur René Laurentin, prélat de sa Sainteté, est décédé dimanche 10 septembre 2017, dans sa 100ème année.

[11] Laurentin (Père René) « Multiplication des apparitions de la Vierge aujourd’hui » (Fayard 1995). L’abrogation a eu lieu par le bienheureux pape Paul VI, le 14 octobre 1966 (Décret de la Congrégation de la doctrine de la foi, Acta Apostolicae Sedis, 29 décembre 1966, Page 1186)

[12] Guadalupe (Mexique, 1531), Aparecida (Brésil, 1717), Rome (à Alphonse Ratisbonne en 1842), La Salette (France, 1846), Lourdes (France, 1858), Pontmain (France, 1871), Giertzwald (Pologne, 1877), Fatima (Portugal, 1917), Beauraing (Belgique, 1932), Banneux (Belgique, 1933), Amsterdam (Pays-Bas, 1945), Betania (Venezuela, 1976), Akita (Japon, 1973), Kibeho (Rwanda, 1981), Le Laus (France, 1664) et Champion (États-Unis, 1859).

[13] Laurentin, (Mgr. René), Mémoires. Chemin vers la lumière,  Paris, 2005, Fayard, p. 332/624.

[14] Barbu, (Mgr. Francis), « Que penser de Kerizinen ? Une réponse de Rome, la position de l’Evêque diocésain », Quimper, juin-juillet 1975, tiré des archives de l’association des amis de Kérizinen.

[15] Catéchisme de l’Église catholique, n° 66 et 67

[16] Cantalamessa (Père Raniero)  www.totus-tuus.fr/article-2220137.html

[17] AAS 58/16.

[18] Can. 2318 : § 1 Encourent par le fait même une excommunication spécialement réservée au Siège apostolique, après la publication de l’ouvrage, les éditeurs de livres apostats, d’hérétiques et de schismatiques, qui soutiennent l’apostasie, l’hérésie ou le schisme. Même peine pour ceux qui défendent ces livres ou d’autres ouvrages nommément condamnés par des lettres apostoliques, ou sciemment les lisent ou les retiennent sans la permission requise. § 2 Les auteurs et les éditeurs qui font imprimer, sans la permission requise, des livres des saintes Écritures, ou des notes et commentaires sur ces livres, encourent par le fait même, une excommunication non réservée

[19] Ottaviani (Cardinal). Extrait du décret de la Congrégation, traduit par l’auteur à partir de la version anglaise téléchargée le 20 mai 2016 du site www.lovingmother.org/misc/canonsofthechurcheng.htm :
Canon 1399 : En imposant des restrictions du droit de publication, ce canon interdit certains livres comme ceux qui traitent des révélations, des visions, des prophéties et des miracles. Ce canon a été abrogé le 29 mars 1967. Cela signifie qu’en ce qui concerne ces publications, l’interdiction résultant du droit ecclésiastique est levée. Désormais, les catholiques sont autorisés, sans avoir besoin d’imprimatur, nihil obstat, ou de toute autre permission, à publier des comptes-rendus des révélations, des visions, des prophéties et des miracles. Bien sûr, ces publications ne doivent pas mettre en danger la foi ou la morale. Telle est la règle générale, que chaque catholique doit suivre dans toutes ses actions, même, et en particulier, les journalistes. Il n’y a desormais plus d’interdictions concernant le récit de voyants, qu’ils soient reconnus ou non par l’autorité ecclésiastique. A plus forte raison, il est autorisé pour les catholiques de fréquenter les lieux des apparitions, même non reconnus par les Ordinaires de leurs dioceses ou par le Saint-Père, moyennant le fait que les visiteurs catholiques qui fréquentent ces lieux doivent respecter la foi et la morale. Cependant, ils ne sont soumis à aucune discipline ecclésiastique, pas même pour leurs prières publiques. L’autorisation est requise uniquement pour la célébration de la Sainte Messe ou tout autre service religieux.

Canon 2318 : Ce canon prévoit des sanctions contre ceux qui ont violé les lois de censure et d’interdiction. Ce canon a été abrogé [revoque] depuis 1966. Personne ne peut plus  subir une censure ecclésiastique pour fréquenter lieux d’apparitions, même ceux non reconnus par les Ordinaires de leurs diocèses ou par le Saint-Père. En outre, « ceux qui auraient encouru la censure prévue dans Canon 2318 seront également absous par les faits mêmes de l’abrogation [révocation] de ce Canon. »

[20] www.vatican.va/roman_curia/congregations/cfaith/documents/rc_con_cfaith_
doc_19780225_norme-apparizioni_fr.html

[21] Les critères ont été gardés secrets pendant trente-sept ans, puis rendus publics après que des versions officieuses aient circulé un peu partout dans le monde. En fait, la publication des normes procédurales n’est pas uniquement utile aux pasteurs, qui étaient déjà informés, mais aussi et surtout aux fidèles qui peuvent s’informer des lois qui leur sont applicables et, partant, chercher à discerner les révélations présumées et effectuer les recours qu’ils estimeraient opportuns, au cas où ils se sentiraient lésés par des décisions administratives jugées illégitimes.

[22] www.vatican.va/roman_curia/congregations/cfaith/documents/rc_con_cfaith_doc_20111214_prefazione-levada_fr.html

[23] A. Critères positifs :

  1. Quant à l’existence du fait, certitude morale ou, du moins, grande probabilité, acquise au terme d’une enquête sérieuse.
  2. Circonstances particulières relatives à l’existence et à la nature du fait :
  3. qualités personnelles du ou des sujets (notamment équilibre psychique, honnêteté et rectitude de la vie morale, sincérité et docilité habituelles envers l’Autorité ecclésiastique, aptitude à revenir au régime normal d’une vie de foi, etc.) ;
  4. Quant à la révélation, doctrine théologique et spirituelle vraie et exempte d’erreur ;
  5. saine dévotion et fruits spirituels abondants et constants (par ex. esprit d’oraison, conversions, témoignages de charité, etc.).
  6. Critères négatifs :
  7. Erreur manifeste sur le fait.
  8. Erreurs doctrinales attribuées à Dieu lui-même, à la Bienheureuse Vierge Marie ou à un saint dans leurs manifestations, compte tenu toutefois de la possibilité que le sujet ait ajouté – même inconsciemment – des éléments purement humains, voire quelque erreur d’ordre naturel, à une révélation vraiment surnaturelle (cf. saint Ignace, Exercices, n°336).
  9. Évidente recherche de lucre en relation étroite avec le fait lui-même.
  10. Actes gravement immoraux accomplis au moment ou à l’occasion du fait lui-même, par le sujet et par ses accompagnateurs.
  11. Maladies psychiques ou tendances psychopathiques du sujet, ayant exercé sur le fait présumé surnaturel une influence certaine, ou psychose, hystérie collective et choses du même genre.

Il faut noter que ces critères, positifs ou négatifs, sont indicatifs, et non limitatifs, et doivent être pris ensemble ou selon leur complémentarité.

[24] Lesserteur (R.P.), le 5 août 1909 : Déjà depuis longtemps le Saint-Office avait reconnu qu’il n’y avait rien de condamnable dans les apparitions de Tilly, et le Souverain Pontife, qui avait lu lui-même avec une vive émotion le journal des religieuses de l’école, avait donné l’ordre de terminer l’information et de prendre une décision. Mgr. Amette [cardinal de Paris] prévenu, accouru à Rome, et fit valoir des raisons d’opportunité, pour demander de surseoir à la proclamation d’une décision favorable. […] Dans les premiers mois de l’année dernière (1908), Pie X ordonna de nouveau de reprendre la cause. Mgr. Amette accourut encore une fois. […] Le pape se serait alors laissé toucher, et aurait commandé d’attendre. Pierre-Marie Grünneissen «  Présence mariale à Tilly sur Seulles » ed. Les amis de Tilly (1996) p. 104-105

[25] www.lesamisdegarabandal.com/l’eglise%20et%20garabandal.html

[26] Fauvel (Mgr. André) « Nous avions en outre interdit à tous prêtres, religieux et religieusesd’eller à Kérizinen ou de le conseiller à quiquonque. Apprenant que des fidèles continuent à s’y rendre, nous interdisions formellement toute forme de dévotion et de culte à Kérizinen » in La semaine religieuse de Quimper, 24 mars 1961.

[27] http://www.rosamisticafontanelle.it

[28] Curty (Père Christian) : L’enquete canonique de votre prédécesseur a-t-elle été conduite selon toutes les normes juridiques exigées par le Droit ? A-t-on vraiment et séparément interrogé chacun des témoins ? Puisque la dimension surnaturelle n’est pas retenue, quelle explication a-t-on trouvé concernant les 120 citations latines d’origine scripturaires ou liturgiques que manifestement Madeleine n’a pas pu improviser ni puiser dans la partie subconsciente de sa mémoire, et qu’elle n’a pu subir l’influence de son Curé également dépassé par les Faits ? A-t-on réellement étudié les ‘fruits’ de cet Arbre : les guérisons complètes et définitives reconnues ‘inexplicables’ par la Médecine, les conversions profondes et parfois étonnantes et durables soit obtenues de manière spontanée sur la Butte, à l’occasion d’un pèlerinage, soit reliées indirectement aux faits de Dozulé ? S’est-on intéressé au fait que de nombreuses vocations (séminaristes-consécration religieuse) ont connu à Dozulé, leur point de départ et d’éveil ? Telles sont quelques-unes des nombreuses questions, qui pour l’instant n’ont pas encore reçu de réponse et qui laissent perplexes beaucoup de nos frères chrétiens engagés dans la pastorale, alors que le Concile Vatican II leur demande de dépasser l’obeissance passive à laquelle ils étaient habitués pour exercer désormais une obeissance active et intelligente, donc eclairee et motivee. www.ressource.fr/devoilement/esprit_saint_devoile/E(p205-217).pdf

[29] Le message a été rejeté par l’évêque sous le prétexte que la demande présumée de Jésus à Madeleine Aumont, « Dites à l’Église d’élever une croix [de 738 m] et à ses pieds, un sanctuaire » lui semblait impossible. Pourtant, une étude approfondie prouvant sa faisabilité a été présentée aux élus locaux le 8 janvier 1997, et depuis lors, une tour de 828 m a été élevée à Dubaï en 2010.

[30] Argüelles (Mgr Ramón Cabrera) : extraits du décret de reconnaissance du 9 décembre 2015 ;  texte anglais tiré de www.splendorofthechurch.com.ph/2015/09/13/
lipa-apparition-of-our-lady-officially-declared-authentic-by-archbishop-arguelles/
  et traduction française tirée de http://fr.aleteia.org/2015/09/28/je-suis-marie-mediatrice-de-toutes-graces/ le 20 mai 2016.

[31] http://www.marianmessenger.ph/index.php/maian-feature

[32] Ouellet (Cardinal Marc), Présentation du document de la Congrégation pour la doctrine de la foi « L’Église rajeunit » https://fr.zenit.org/articles/importance-ecclesiale-des-charismes-par-le-card-ouellet/

[33] Congrégation pour la doctrine de la foi, lettre du 15 mai 2016. www.vatican.va/roman_curia/congregations/cfaith/documents/rc_con_cfaith
_doc_20160516_iuvenescit-ecclesia_fr.html

[34] 1. Si, à l’occasion du fait présumé surnaturel, un culte ou une forme quelconque de dévotion naît de façon quasi spontanée de la part des fidèles, l’Autorité ecclésiastique compétente a le grave devoir de s’informer sans retard et d’être particulièrement vigilante.

  1. Si des fidèles en font la demande légitime (c’est-à-dire en communion avec les pasteurs et sans être poussés par un esprit sectaire), l’Autorité ecclésiastique compétente peut intervenir, pour autoriser et promouvoir certaines formes de culte et de dévotion, à condition que rien ne les empêche au regard des critères précisés ci-dessus. On veillera néanmoins à ce que les fidèles ne tiennent pas cette façon d’agir pour une approbation par l’Église du caractère surnaturel du fait (cf. Note préliminaire c).
  2. En raison de sa charge doctrinale et pastorale, l’Autorité compétente peut intervenir de son propre chef et doit même le faire dans les circonstances graves, par exemple pour corriger ou prévenir des abus dans l’exercice du culte ou de la dévotion, condamner des doctrines erronées ou éviter les dangers d’un mysticisme faux ou inconvenant, etc.
  3. Dans les cas douteux qui ne portent nullement atteinte au bien de l’Église, l’Autorité ecclésiastique compétente s’abstiendra de tout jugement et de toute action directe (car il peut arriver qu’avec le temps l’événement qualifié de surnaturel tombe dans l’oubli) ; qu’elle n’en reste pas moins vigilante et prête à intervenir avec célérité et prudence, si c’est nécessaire.

[35] Greiner (Philippe), doyen de la faculté de droit canonique de Paris, « l’encadrement juridique du prosélytisme, en droit grec, français, européen (1950) et en droit canonique catholique romain. » Thèse présentée et soutenue le 19 février 2005, à l’Institut catholique de Paris, p. 455.

[36] En langue Moré, Bangtaba signifie : « Asseyons-nous et faisons connaissance »

[37] Bien que ce soit la même personne, nous distinguerons sœur Eugénia Ravasio pour la période 1931-1935 de mère Eugénia pour la période 1935-1990 qui concerne notre étude.

[38] Cet événement transforme la révélation privée de personnelle à publique.

[39] Les détractrices de Mère Eugénia ont intenté un procès au civil contre elle, et l’ont fait mettre en prison en 1972, puis l’ont fait condamner avec sursis en appel en 1977. Elle était principalement accusée par ses détractrices d’avoir créé l’Unitas Catholica par intérêt, et non pour honorer Dieu le Père par Jésus.

[40] Le danger, dans la foi ou dans le culte, est de confondre entre elles les personnes divines ou de diviser leur nature unique ; car la foi catholique vénère un seul Dieu dans la Trinité et la Trinité dans l’unité. Aussi, Innocent XII, Notre prédécesseur, refusa-t-il absolument, malgré de vives instances, d’autoriser une fête spéciale en l’honneur du Père. Que si on fête en particulier les mystères du Verbe incarné, il n’existe aucune fête honorant uniquement la nature divine du Verbe, et les solennités de la Pentecôte elles-mêmes ont été établies dès les premiers temps, non en vue d’honorer exclusivement l’Esprit-Saint pour lui-même, mais pour rappeler sa descente, c’est-à-dire sa mission extérieure.

[41] Cf. https://en.wikipedia.org/wiki/Teresita_Castillo et www.marianmessenger.php ainsi que les références qu’ils citent

[42] Une dizaine de médias relatent les événements. Parmi eux plusieurs médias burundais dont Iwacu, the Africa report, le bulletin de liaison et d’information des Salésiens des grands lacs, ainsi que ceux des ministères de l’intérieur burundais et du ministère de la justice canadien https://www.justice.gov/sites/default/files/
eoir/legacy/2014/09/04/BDI104471.E.pdf

[43] Les amis de Zébiya prétendent être des chrétiens comme les autres, empêchés de prier comme ils l’entendent. L’Etat les invite à fonder leur propre Église hors de l’Église catholique. Le curé prétend avoir échappé de justesse à des violences physiques. L’évêque estime que la désobéissance, l’arrogance, la rébellion, le mensonge, etc ; caractérisent le groupe.

[44] NSENGIYUMVA (P. Rémy, SDB), Curé de la Paroisse, « L’attaque des adeptes de Mlle Eusebie NGENDAKUMANA à la paroisse de Rukago »  in  Bulletin de liaison et d’information pour la Quasi-Province salésienne de l’Afrique de Grands Lacs (AGL),  AGL News, Mars 2013, http://www.sdbagl.org/PDF/aglnewsmars03.pdf   consulté le 5 mai 2016.

[45] Segatwa (avocat Fabien) : extrait d’un courrier du 10 mars 2013 à l’évêque de Ngozi : « Avec leurs maigres ressources, ils ont construit un orphelinat moderne qui avait accueilli dès le départ 50 orphelins de bas âge. »

[46] Le Conseil paroissial de Rukago a pris la décision d’interdire l’accès à l’église à toute fille ou femme portant des morceaux d’étoffe sur la tête. L’Ordinaire a interdit formellement tout culte à Businde et il a demandé à Mme Eusébie et à « ses adeptes » d’arrêter toute activité qui porte préjudice à l’unité et à la communion de l’Église.

[47] Plus de 12 000 personnes ont participé à l’inauguration.

[48] La voyante a été reçue trois quart d’heures par l’évêque le 28 décembre 1974, après un troisème interdit de sa part le 20 mai 1973 et avant un quatrième interdit du 12 juillet 1975.

[49] Can. 1740 — Quand pour une raison quelconque et même sans faute grave de l’intéressé, le ministère d’un curé devient nuisible ou au moins inefficace, ce curé peut être révoqué de sa paroisse par l’Évêque diocésain.

[50] Le vendredi 12 octobre 1956, Monseigneur Fauvel, évêque de Quimper et Léon, lance un premier Interdit sur Kérizinen qui fut publié dans la Semaine Religieuse de Quimper : « A propos des prétendues apparitions de Kérizinen en Plounévez-Lochrist, nous précisons les points suivants : 1.- L’édifice qui s’y trouve a été construit malgré notre défense expresse, exprimée par écrit et notifiée à l’intéressée. Aucun prêtre n’a reçu de nous pouvoir de bénir cet édifice. 2.- Nous interdisons à tous, prêtres, religieux et religieuses de se rendre à Kérizinen ou de conseiller à quiconque de s’y rendre. (Cette note sera lue en chaire dimanche prochain 14 octobre, à toutes les messes des églises et chapelles). A cet interdit, l’association des amis de Kérizinen répond que l’interdit fut lancé sans enquête canonique et sans avertissement et que, contrairement à l’affirmation de l’évêque, Jeanne-Louise n’a jamais reçu de défense expresse concernant la construction d’un édifice mais qu’au contraire, elle avait reçu une autorisation verbale du Vicaire Général de construire un oratoire dans sa propriété.

[51] A Lipa, le Carmel a été mis en quarantaine avec interdiction à toute personne d’entrer et aux sœurs de sortir (sauf une pour les courses)

[52] L’abbé L’Horset, curé de Dozulé, a été muté dès lors qu’il a écrit un livre à ce sujet.

[53] A Lipa, la mère supérieure du Carmel fut mutée.

[54] A Lipa (Philippines), les deux évêques du lieu favorables aux événements de 1948 sont mutés pour laisser place à un évêque qui décrète en 1951 le caractère non-surnaturel des événements. Après son départ, on apprend le 2 février 2017 « la « renonciation » de l’archevêque Mgr Ramon C. Argüelles, peu après qu’il ait reconnu le caractère surnaturel des apparitions..

[55] Le Père Herman Harakandila fut le supérieur de la congrégation missionnaire des apôtres du Bon Pasteur, érigée en 1989 par Mgr. Ruhuna l’archevêque de Gitega au Burundi, dans le but d’encourager les vocations sacerdotales et la mission, au moment où le gouvernement burundais expulsait massivement les religieux étrangers. Ayant soutenu l’apparition mariale de « Notre dame reine de l’Afrique », il fut interdit de célébrer la messe, tandis que l’Etat le menait en prison. D’après un témoin, l’Etat lui aurait proposé de sortir de prison à condition de ne plus promouvoir l’apparition. Il aurait refusé. Plus tard les évêques obtinrent sa libération et l’envoyèrent près d’un prêtre devant qui il signa finalement un engagement par lequel il renonçait à l’apparition. Quinze jours plus tard, il se rétracta et disparut dans l’anonymat, si bien que son ordre religieux dut prendre un décret d’exclaustration. Suite à la disparition de ses deux fondateurs, Mgr. Ruhuna, assassiné en 1996, et le père Herman, le nouveau supérieur général de la jeune congrégation fit appel à l’Aide à l’Église en Détresse pour survivre. Sources : Pères Blancs de Gitega, Église en détresse,

www.youtube.com/watch?v=sJ1ktdUzieA consulté le 21 septembre 2014, etc…

[56] A Lipa, Sur son lit de mort, un des évêques concernés aurait dit qu’on avait forcé les membres de la commission de 1951 à reconnaître le caractère non-surnaturel des apparitions sous menace d’excommunication.

http://www.marianmessenger.ph/index.php/maian-feature

[57] En Italie, mère Eugénia n’a pas reçu de soutien de l’Église lorsqu’elle a été emprisonnée par l’Etat italien, sur dénonciation, probablement fallacieuse, de religieuses de la congrégation qu’elle avait dirigée. Au Burundi, le Père Hermann a été emprisonné par le pouvoir civil et l’Église l’en a fait sortir au prix de son renoncement à sa foi dans les apparitions du Businde.

[58] Laurentin (Mgr René), Mémoires, chemin vers la lumière, Paris 2005, Fayard, p. 351, 558, 559.

[59] Vachon (cardinal Louis-André), Décret de suppression de l’association publique « Arche de Marie » 4 mai 1987, in La Documentation catholique, t 84, n° 1946, 6-20 septembre 1987, p. 864.

[60] A Kerizinen, une lettre supplique du 7 octobre 1956 à l’adresse de Monseigneur Fauvel, Evêque de Quimper et Léon, et contresignée par 356 personnes, est conservée aux archives, (elle demandait la messe au lieu des apparitions). Elle ne fut pas envoyée, en raison de l’interdit survenu 5 jours plus tard. http://kerizinen.free.fr/messagef2.htm

[61] Les 24 mars 1961, Monseigneur Fauvel, évêque de Quimper et Léon, fait paraître dans la Semaine Religieuse de Quimper un deuxième Interdit sur Kérizinen : « Dans une note parue dans la Semaine Religieuse du 12 octobre 1956 et lue dans toutes les églises et chapelles du diocèse le dimanche suivant 14 octobre, nous avions précisé qu’un édifice avait été construit à Kérizinen malgré notre défense expresse. Nous avions, en outre, interdit à tous prêtres, religieux et religieuses d’aller à Kérizinen ou de le conseiller à quiconque. Apprenant que des fidèles continuent à s’y rendre, nous interdisons formellement toute forme de dévotion et de culte à Kérizinen. Nous espérons que cette défense sera observée et que nous n’aurons pas à recourir à des mesures plus graves. » A cet interdit, l’association des amis de Kérizinen répond qu’à sa connaissance, ce deuxième interdit fut lancé sans enquête canonique et sans avertissement.

[62] Le 28 mars 1975, après la célébration de la Passion de 20h 30, le prêtre recommanda vivement à la cinquantaine d’assistants de se taire sur ce qu’ils avaient vu et entendu et qu’ils ne comprenaient pas.

http://www.ressource.fr/francais/messages/messages21a30.html

[63] Cf message de Mgr Pican, supra.

[64] L’évêque de Quimper et Léon publie la décision de la Congrégation pour la doctrine de la foi du 21 juin 1975[64] qu’il commente ainsi : « … La dévotion entretenue en ce lieu et le culte qu’on veut y instaurer ne sont pas en harmonie avec la foi catholique, et ne doivent pas être favorisés par les responsables de l’Église. […]  ceux qui propagent ces messages et s’emploient à promouvoir un culte fondé sur eux accomplissent-ils –peut-être de bonne foi, et c’est leur excuse- une œuvre néfaste au sein du peuple de Dieu. »

[65] Au Moyen-âge, l’Église livrait les « criminels de la foi » au pouvoir séculier. Aujourd’hui, on observe que l’Église dénonce au pouvoir séculier, ou du moins s’abstient de défendre des fidèles catholiques bénéficiaires d’apparitions, comme Mme Madeleine Aumont, mise sous tutelle et placée contre son gré dans une maison de retraite de Livarot.

[66] De 1961 à 1965, de très nombreuses personnes ont été témoins d’événements inexplicables, qui ont alors défrayé la chronique et ont donné lieu à une commission d’enquête ayant travaillé dans des conditions pour le moins contestées : « Le 22 août 1961, les Membres de la Commission, nommés par l’évêque arrivèrent à Garabandal avec la mission d’étudier ces étranges phénomènes. Ils étaient deux ou trois prêtres, un médecin et un photographe. Leur conduite au cours de cette soirée ne semble pas pouvoir être citée en exemple : que ce soit en ce qui concerne l’observation des événements eux-mêmes, leurs dispositions d’impartialité, la mesure de leurs gestes, leur sans-gêne. […] Pour cette dernière [Conchita], commença le jour même [le 27 juillet 1961] la mise à l’épreuve programmée par les membres de la Commission, le médecin Don José Luis Pinal et le prêtre Francisco Odriozola. Aux épreuves plus ou moins psychiques ou psychologiques s’ajouta un changement d’ambiance : présence à la plage, aux spectacles, aux divertissements, etc. […] Avec ce traitement intensif de mondanité, utilisant lors des entrevues avec la fillette certains procédés : mélange de flatterie et de menaces, ceux qui agissaient au nom de la Commission arrivèrent finalement à ce qu’apparemment ils souhaitaient, arracher à Conchita des « preuves » contre la véracité de tout ce qui arrivait. » (Cf. Eusebio Garcia de Pesquera, « Garabandal, faits et dates » Résiac 2008, p. 31/152 p.)

[67] Le 9 octobre 1968, le secrétariat de l’évêché de Santander publie une note dans le bulletin officiel du diocèse (Boletin O. del Obispado, noviembre 1968 p. 496-498.) à propos des prétendues apparitions de Garabandal, en rappelant le canon 1399 n° 5 du Code de 1917, alors que celui-ci est abrogé. D’après le père Eusebio Garcia de Pesquera, « Garabandal, faits et dates » Résiac 2008, p. 103-104/152 p., « il ne s’agissait pas d’une condamnation canonique, puisqu’aucun procès canonique, aucune étude digne de ce nom n’avait précédé cette note. » par contre, il rappelle « qu’en Espagne, à cette époque-là, la parole d’un évêque était considérée comme indiscutable. (Cf. Eusebio Garcia de Pesquera, « Garabandal, faits et dates » Résiac 2008, p. 103-104/152 p.)

[68] Guillon (Mgr. Clément), extraits du courrier et de la note du 16 novembre 2007 adressée au Président de l’Association des Amis de Kérizinen. (Archives de l’association)

[69] www.ressource.fr/fdn/Dossier/Classeur2/BEElementsDeReponse_MgrPican_190306.htm

[70] Nous avons vu, notamment que l’imprimatur avait été levé pour la publication de livres relatifs à des apparitions.

[71] http://apotres.amour.free.fr/page33/DOZULE.htm

[72] En 1951, aucun recours contentieux-administratif n’était possible puisque la Seconde section du Tribunal suprême n’était pas encore créée. Quand bien même elle aurait été créée, un recours administratif contentieux aurait été impossible à gagner, puisque les éléments de preuve d’une éventuelle violation de la loi n’étaient pas connus de la voyante ni de ses amis.

[73] Cf. Zulueta, Lito (June 1, 2016). « Vatican overrules Batangas bishop; declares 1948 Marian apparitions not genuine ». The Philippine Daily Inquirer. Retrieved 6 June 2016.  Eugenio, Damiana L. (1996). Philippine folk literature: the legends. University of the Philippines. p. 109. ISBN 978-971-8729-05-2. ; « Vatican reverses ruling on Lipa Marian apparition ». GMA News. June 3, 2016. Retrieved June 6, 2016.

[74] Hoyeau (Céline), in La Croix urbi & orbi du le 13/06/2016 : C’est ce décret que la Congrégation pour la doctrine de la foi a déclaré « nul et vide », « à la lumière du fait que la déclaration de 1951 était une décision confirmée par le souverain pontife et par conséquent définitive ». « Le sujet du phénomène de Lipa ne relève pas de l’autorité de l’évêque diocésain local », a précisé le décret de la CDF.

[75] Courriel adressé à l’auteur le 3 février 2017.

[76] Prot 18881/87/CA, Studia Canonica, 25 (1991), p 403-415. Traduction française du jugement et commentaire de l’abbé Roch Pagé          .

[77] Védrine (Hubert) ministre français des Affaires étrangères, lettre du 6 décembre 1999 à M. Albright, rompant le dialogue diplomatique de la France avec  les Etats-Unis sur le thème de la liberté religieuse, citée par Etienne Ollion, in Raison d’Etat, histoire de la lutte cotnre les sectes en France, édition La découverte, 2017, Avril 2017, 360 p.

[78] Werckmeister (Jean), « les sectes », in Revue de droit canonique, 51/1, 2001,
p. 3-4. On signalera que, dans la même revue (p. 44), Le Vallois (Philippe) s’oppose à l’appréciation d’intolérance pour les seuls catholiques, en rappelant combien les protestants se sont montrés intransigeants  vis-à-vis de la secte anabaptiste.

[79] http://www.coordiap.com/press3012-conference-lutte-anti-sectes-bilan-et-perspectives.htm

[80] Bécourt (Thierry), La nouvelle chasse aux sorcières, Paris, Omnium éditions, 1992, 111 p.

[81] Avant 1954, il s’agissait principalement des francs-maçons, des socialistes, des vieux catholiques, des communistes et de la ligue de l’enseignement de Jean Macé, puis en 1954, deux frères prêcheurs ont précisé le contexte, à savoir H. CH. Chary L’offensive des sectes, Paris Cerf et M. B. Lavaud Sectes modernes et foi catholique, (Paris Aubier), en s’attirant les foudres d’auteurs protestants comme Jean Seguy, Les sectes protestantes dans la France contemporaine, Paris 1956, Beauchesne & Fils.

Messner (Francis), Les Nouvelles religions, cours reprographié, Strasbourg, USHS, 1988, p. 33 cité par Le Vallois (Philippe) « Définition de la secte et attitudes envers les sectes dans l’Église catholique romaine »  in Revue de droit canonique, 51/1, 2001, p. 53-73.

[82] Can. 2314 § 1 Tous les apostats de la foi chrétienne, tous les hérétiques ou schismatiques et chacun d’eux :

 1° Encourent par le fait même une excommunication ;

 2° Si après monition, ils ne viennent pas à résipiscence, qu’on les prive de tout bénéfice, dignité, pension, office ou autre charge, s’ils en avaient dans l’Église, et qu’on les déclare infâmes ; après deux monitions, ceux qui sont clercs doivent être déposés.

 3° S’ils ont donné leur nom à une secte non catholique ou y ont publiquement adhéré, ils sont infâmes par le fait même ; en tenant compte de la prescription du Can. 188 n4, que les clercs, après une monition inefficace, soient dégradés.

[83] Cf. c. 316 pour l’adhésion à une association publique, c. 1041 pour recevoir validement le sacrement de l’ordre, c. 1124 pour le mariage, c. 1184 pour l’admission aux funérailles ecclésiastiques,

[84] Réponse de la CPI/17-67 du 30-07-1934 (AAS 26 [1934] 494 ; DC 32 [1934] col. 901-902).

[85] Vernette (Jean Maurice), né le 26 février 1929 à Port Vendres, ordonné prêtre du diocèse de Montauban le 30 mars 1952, docteur en théologie, licencié en philosophie et droit canon, il était connu pour sa grande connaissance des sectes. En 1973, le Conseil permanent de la Conférence des évêques de France le nomme délégué de l’épiscopat pour les questions sur les sectes et les nouveaux courants religieux. Il publie de nombreux livres sur les sectes entre 1976 et 2001, parmi lesquels : Sectes et réveil religieux Quand l’occident s’éveille, Salvator, Mulhouse, 1976 et Les sectes, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Que sais-je ? », n° 2519, 1990 ou Dictionnaire des groupes religieux aujourd’hui, avec Claire Moncelon, Presses universitaires de France, 2001.

[86] Arinze (Cardinal Francis), Le défi des sectes ou des nouveaux mouvements religieux, approche pastorale, in DC 19 mai 1991, n° 2028, p. 483-499.

[87] Document-Episcopat n° 15, novembre 1991, p. 3, col 2.

[88] Le rapport a été approuvé le 22 décembre 1995 par les sept députés présents, huit jours après le massacre du Temple solaire, dont des proches des victimes et le cinéaste Yves Boisset ont déclaré a posteriori qu’il s’agissait d’un assassinat perpétré avec un lance-flammes. http://www.assemblee-nationale.fr/rap-enq/r2468.asp

[89] Hors de France, le rapport parlementaire a fait l’objet de violentes critiques dont celle de Massimo Introvigne et J. Gordon Melton « Pour en finir avec les sectes le débat sur le rapport de la commission parlementaire ».

[90] http://ec.cef.fr/wp-content/uploads/sites/2/2014/05/pontier_reponse_hamant.pdf

[91] http://www.eglise.catholique.fr/structure/cellule-pour-les-derives-sectaires-dans-des-communautes-catholiques/

[92] Sorlin (Soeur Chantal-Marie), responsable du Bureau des Dérives Sectaires http://www.eglise.catholique.fr/wp-content/uploads/sites/2/2015/03/CRIT%C3%88RES-sep.-2014.pdf

[93] Benoit XVI, « Lettre contre la levée de 4 excommunications », Vatican, 10 mars 2009 publiée par la conférence des évêques de France

[94] Trouslard (Jacques), communication aux chefs d’Établissement de l’Enseignement Catholique. Ce document mis en ligne par l’Eglise de Scientologie le 18 octobre 2002 a été retiré le 11 juin 2006, sur la demande du Nonce apostolique. http://scientologie.fraude.free.fr/12/opus-dosnon.htm On en trouve par contre des traces sur d’autres sites comme www.prevensectes.com/opus11.htm consulté le 17 décebre 2016.

[95] Décret du 13 juillet 2001 portant promotion et nomination à la légion d’honneur, JORF n°162 du 14 juillet 2001 p. 11337.

[96] Cotton (Marc-André) « L’Etat inquisiteur », Editions des 3 monts, 3ème édition, Auxerre 2010, p. 14.

[97] Prot 49737/14 CA, cas soumis à canonistes sans frontières.

[98] http://www.sos-derive-sectaire.fr/AIcourrier.htm consulté le 22 septembre 2013.

[99] http://opuslibre.free.fr/v/spip.php?article22

[100] Vernette Mgr. Jean-Maurice s’est marié le 24 juillet 2002 à Toulouse avec Mme Liliane Josette Moncelon, qui se prénomme en réalité Claire, Liliane, Josette, comme l’a rappelé en date du  20 décembre 2002 le juge des affaires familiales du TGI de Tours.

[101] http://ec.cef.fr/wp-content/uploads/sites/2/2014/05/pontier_reponse_hamant.pdf

[102] François (pape) homélie du 30 janvier 2017, lors de la messe matinale en la chapelle de la Maison Sainte-Marthe au Vatican

La justice pour les consacrés

Voici un extrait du livre « La justice administrative de l’Eglise catholique » qui a reçu l’imprimatur le 4 octobre 2011 par S.E. Mgr. Laurent Dabiré, évêque de Dori (Burkina Faso), Docteur en droit canonique, et Président de la commission tribunaux, de la formation et des questions canoniques à la Conférence épiscopale Burkina-Niger.

Chapitre 6 : La justice pour les consacrés

En toute rigueur, le titre devrait s’appeler « la justice pour les instituts de vie consacrée par la profession des conseils évangéliques, les sociétés de vie apostolique ainsi que leurs membres » mais ce titre est long et ne couvre d’ailleurs pas toute la variété des charismes et des droits, puisqu’il existe des instituts religieux et séculiers, des religieux actifs et contemplatifs, des ermites etc. De ce fait, nous emploierons les termes génériques de « religieux » pour les membres des instituts religieux, et de « consacré » entendu au sens large, pour l’ensemble des personnes visées par le titre ci-dessus.

En premier lieu, exprimons notre profonde reconnaissance envers ceux de nos contemporains qui consacrent leur vie à l’intercession et à l’action désintéressées pour le monde et pour nous même, dans la vie consacrée au sein de l‘Eglise. Ils sont nombreux :

En 2014, les religieux profès non prêtres sont au nombre de 54 559 dans le monde, tandis que les religieuses professes sont 682.729, pour près de [270 000] (39 %) en Europe, 177 000 en Amérique et 170 000 en Asie[1].

Et voici leur répartition en France :

  • 23 527 religieuses de vie apostolique[2], réparties dans 315 instituts, dont 2 413 religieuses étrangères en France et 1 463 religieuses françaises à l’étranger ;
  • 5 741 religieux répartis dans 86 instituts et monastères, dont 1 081 moines dans 59 monastères ;
  • 3 131 moniales réparties en 228 monastères[3].

 

 

  1. Le droit et son application

Le droit des consacrés est fortement marqué par le conseil évangélique d’obéissance.

1.1. Droit et obéissance

Après le décret du Concile Perfectæ caritatis sur la rénovation et l’adaptation de la vie religieuse, le magistère leur consacre régulièrement des textes spécifiques[4], tandis que le Pape François tient à rappeler ceci à ses collaborateurs :

Ceux qui sont désobéissants doivent apprendre la beauté et la nécessité de l’obéissance, la tranquillité de l’âme qu’elle procure […] En fait, comme l’enseignent les saints et les Docteurs de l’Eglise, c’est l’obéissance qui constitue véritablement le religieux.[5]

Le Code de droit canonique consacre aux religieux la troisième partie de son livre II, avec 158 canons relatifs aux Instituts de vie consacrée (c. 573 à 730) et 19 canons relatifs aux Sociétés de vie apostoliques (c. 731 à 749). Des auteurs comme Jean Beyer ont publié plusieurs ouvrages pour commenter ces canons, sans toutefois traiter de la jurisprudence applicable aux 177 canons correspondants.

Les droits et obligations des religieux résultent en fait de la combinaison de cinq droits différents, et de plusieurs tribunaux dont les compétences respectives sont précisées au canon 1427 :

  1. les droits et obligations des fidèles catholiques ;
  2. suivant leur état, les droits et obligations des laïcs ou des clercs ;
  3. les droits et obligations des membres des instituts de vie consacrée et des sociétés de vie apostolique, suivant leur état ;
  4. le droit particulier du diocèse dont ils dépendent ou de la Congrégation romaine à laquelle ils sont rattachés ;
  5. les droits et obligations figurant dans les statuts et règlements intérieurs propres à leur institut, société ou congrégation.

Par rapport aux simples fidèles, les religieux qui ont fait vœu d’obéissance sont soumis à des privations de liberté supplémentaires, comme le sont d’ailleurs les employés d’une entreprise. En voici un exemple :

A son retour de Suède, le pape François répond aux journalistes à propos du renouveau charismatique. Il se souvient de ses propres réticences lors de la naissance de ce mouvement, lorsqu’il imposa des règles spécifiques aux jésuites qu’il dirigeait : « Un des premiers opposants en Argentine a été moi-même – parce que j’étais Provincial des jésuites à cette époque (…) et j’ai interdit aux jésuites d’avoir des liens avec eux. Et j’ai dit publiquement que quand on faisait une célébration liturgique il fallait faire une chose liturgique et non une “école de samba” (escuela do samba). C’est ce que j’ai dit. Et aujourd’hui je pense le contraire »[6].

 

En général, les religieux admettent les restrictions imposées par leur supérieur comme une marque d’amour, mais parfois, à tort ou à raison, ils ne comprennent pas ou n’admettent pas ces restrictions. Elisabeth Mc Donough[7] fait une synthèse de leurs droits, tels que prévus par le Code de droit canonique :

Le Code de droit canonique exprime directement ou indirectement très peu de droits pour les membres des instituts religieux ; d’un autre côté, de nombreux droits leur sont limités comme conséquence de leur profession religieuse. Ainsi, les trois seuls droits clairement identifiés pour les religieux semblent être :

  • le droit de ne pas révéler leur conscience à leur supérieur[8];
  • le droit de vivre la vie religieuse[9]
  • le droit aux moyens de subsistance pour accomplir leur vocation[10].

Lorsqu’il se produit des tensions à l’intérieur d’une communauté religieuse, les religieux concernés doivent respecter leur vœu d’obéissance, sachant toutefois qu’ils ne sont pas tenus à obéir à un ordre si celui-ci est illégal ou contraire à l’esprit et au charisme de l’institut, comme l’indique notamment l’exhortation apostolique Evangelica testificato sur le renouveau de la vie religieuse[11] :

N’y a-t-il pas pourtant des conflits possibles entre l’autorité du supérieur et la conscience du religieux, « ce sanctuaire où l’homme est seul avec Dieu et où sa voix se fait entendre » (GS16) ? Est-il besoin de le redire : la conscience n’est pas à elle seule l’arbitre de la valeur morale des actions qu’elle suggère, elle doit se référer à des normes objectives, et s’il le faut, se réformer, se rectifier. À l’exception d’un ordre qui serait manifestement contraire aux lois de Dieu ou aux constitutions de l’institut, ou qui entraînerait un mal grave et certain, auquel cas l’obligation d’obéir n’existe pas, les décisions du supérieur concernent un domaine où l’appréciation du meilleur bien peut varier selon les points de vue. Conclure, dès qu’un ordre donné apparaît objectivement moins bon, qu’il est de ce fait illégitime et contraire à la conscience, serait méconnaître d’une manière peu réaliste l’obscurité et l’ambivalence de nombre de réalités humaines. De plus, le refus d’obéissance entraîne une atteinte souvent grave au bien commun. Un religieux ne saurait facilement accepter qu’il y ait contradiction entre le jugement de sa conscience et celui de son supérieur. Cette situation exceptionnelle entraînera parfois une authentique souffrance intérieure, à l’imitation du Christ lui-même, « qui apprit par la souffrance ce que c’est qu’obéir » (He 5, 8).

La suite de l’exhortation apostolique évoque la souffrance salutaire entre le point de vue du religieux et celui de sa hiérarchie, qui doit maintenir la communion ecclésiale par des sanctions appropriées, dans le respect des règles de droit. Normalement, les droits et obligations des consacrés sont respectés au sein des instituts religieux séculiers ou de vie apostolique eux-mêmes, par le fait que les supérieurs exercent leur autorité avec « fermeté sans rigueur et douceur sans faiblesse », dans le respect du droit et des personnes humaines, conformément aux canons 617[12] et 618[13]. La question se pose néanmoins de savoir ce qui se passe lorsque le droit n’est pas respecté par le religieux ou par son supérieur.

1.2. La protection des droits et obligations

Dans sa thèse de doctorat, Scholastique Empela Ankonelle[14] évoque des situations où une communauté religieuse devient un lieu étouffant, de souffrance et de désespoir :

« La vie communautaire est visiblement marquée par des comportements contraires à ce qu’on entend par une communauté unie au nom du Seineur  […] où les responsables ou les autorités ont tendance à favoriser leur ethnie au détriment de l’intérêt général, […]  L’indifférence des uns et des autres, le dénigrement, les critiques négatives, l’oisiveté et la jalousie, la diffamation  et le manque de confiance font de la fraternité un joug difficile à porter.

Elle considère que :

La crise de l’autorité influence celle du vœu d’obéissance par le manque de conscience des droits et des obligations propres de l’une et de l’autre.

En citant Josu Mirena Alday[15], elle évoque six manières différentes de vivre l’appartenance à des Institut religieux marqués par des problèmes d’autorité et de vie fraternelle :

  1. appartenance rénovée, à partir de la vocation ;
  2. fidélité et silence, faisant confiance aux supérieurs tels qu’ils sont ;
  3. critique et tension, avec un sentiment d’appartenance fort et critique ;
  4. affliction et nostalgie, avec une attitude fataliste ;
  5. évasion, avec un abandon progressif des pratiques de l’institut ;
  6. inexistante, avec un lien totalement distendu.

A aucun moment elle n’évoque le recours à un tiers ou à la justice de l’Eglise dans l’histoire des sœurs de saint Thérèse de l’Enfant-Jésus de Lisala (Congo RDC), ou dans ses propositions pour renforcer leur identité de consacrées, rappeler le droit, faire justice et ramener la paix.

Il existe pourtant de nombreux cas de religieux qui, à tort ou à raison, se sentent harcelés dans leur propre communauté religieuse, et font appel à leur hiérarchie ou à un canoniste pour trouver un appui afin d’objectiver leur situation.

Voici tout d’abord un cas intéressant où l’on voit un supérieur, avant qu’il ne devienne pape, appliquer des sanctions pour protéger le bien commun de la communauté, en respectant le droit de défense des religieux concernés.

Lorsqu’il était supérieur provincial des Jésuites d’Argentine, Jorge Mario Bergoglio a imposé des sanctions à la fin des années 1970, à l’encontre des pères jésuites Orlando Y. et Francisco J. qui expérimentaient une forme jugée inacceptable de théologie de la libération. Il les a formellement rappelés, en leur ordonnant de s’installer ailleurs et de dissoudre la communauté qu’ils ont créée. Devant leur refus, il a réitéré son ordre mais ils ont fait objection de conscience, si bien que Bergolio s’est adressé au préposé général des Jésuites à Rome, Pedro Arrupe, lequel a répondu que tous deux doivent obéir[16].

 

Dans cet exemple, on a presque l’impression que c’est le supérieur provincial qui fait un recours hiérarchique contre l’objection de conscience de religieux jésuites. Pourtant le cas le plus fréquent provient de recours de religieux contre des décisions de leur supérieur qu’ils jugent illégales ou, pour le moins, illégitimes. Il existe en effet des cas où un religieux subit un harcèlement, théoriquement réprimé par la loi française[17], mais il le supporte le plus souvent à cause de son vœu d’obéissance. Dans de telles situations, les recours sont rares, puisqu’en général, le conflit se termine par une soumission ou un accord amiable, une démission du religieux, ou par sa mutation dans un autre lieu, comme dans les deux exemples ci-après rapportés par Marco Politi :

Depuis les années 1970, le 152 via Ostensie est le siège de la communauté saint Paul, formée après la destitution de l’ancien abbé-évêque du vieux monastère Saint-Paul hors les murs, Giovanni F., pour avoir dénoncé la responsabilité de la hiérarchie ecclésiastique dans des spéculations immobilières à Rome[18].

En 1995, la Congrégation pour la doctrine de la foi impose deux ans de silence à la sœur Ivone G., ex-professeur de théologie à l’université de Sao Polo au Brésil : interdiction d’enseigner, de publier, de parler en public et d’accorder des interviews. Elle est actuellement exilée en Belgique[19].

 

Nous ne disposons pas de l’information ni de l’expérience nécessaires pour évoquer sérieusement la justice à l’intérieur des instituts religieux, et tel n’est d’ailleurs pas notre sujet. Evoquons cependant l’importance des mesures de prévention pour éviter les conflits :

L’évêque de Nouakchott (Mauritanie) célèbre tous les jours sa messe dans une communauté paroissiale ou religieuse différente, si bien qu’il fréquente régulièrement les communautés religieuses de sa ville épiscopale.  De ce fait, il les connaît suffisamment pour ressentir une éventuelle tension entre les membres. Dans pareil cas, il prend le temps de s’asseoir pour identifier le problème avec les personnes concernées et le résoudre avant qu’il ne s’envenime. Quant aux maisons religieuses réparties dans son diocèse étendu sur plus d’un million de km², il se tient informé de ce qui se passe, en accueillant les visiteurs de toute nature qui en reviennent.

Dans d’autres cas, les supérieurs ne sont pas aussi vigilants et des situations s’enveniment, si bien que des religieux font appel aux instances supérieures :

En Afrique, un moine contemplatif découvre un commerce illicite entre le supérieur du couvent et des dames de la ville, associé à des transgressions de lois ecclésiastiques relativement à l’administration temporelle des biens et à la pédopornographie. Siégeant comme membre du conseil du supérieur, conformément au suffrage de la communauté, il demande des clarifications et le respect des constitutions, mais ses demandes sont ignorées. Il se désolidarise alors explicitement de ces pratiques impliquant plusieurs membres de la communauté, puis il saisit le modérateur suprême qui l’invite à la patience. En mars 2016, l’Abbé général effectue une visite canonique, mais les plaintes du moine sont apparemment ignorées, tandis que celui-ci est exilé dans une autre communauté de l’ordre religieux, au motif de « trouble à la paix ». Avec l’aide de « Canonistes sans frontières » le religieux retrouve la santé et objective la situation sur la base du droit de l’Eglise, et de l’instruction sur l’autorité et l’obéissance[20].

Si les mesures de prévention ne sont pas mises en œuvre ou sont pas suffisantes, et que des tensions ne se résolvent pas à l’intérieur de l’institut, voyons quel est le rôle de la justice ecclésiastique lorsque des consacrés font appel à d’autres instances de l’Église. Cette situation se produit généralement lorsqu’un consacré n’a plus d’espoir de régler le conflit par le dialogue, par exemple, lorsqu’après des années de vie consacrée, où il a tout donné de lui-même, on le menace de renvoi temporaire (exclaustration) ou définitif et que l’on commence à mettre cette menace à exécution.

Une des difficultés résulte alors du fait qu’en général les religieux connaissent mal leurs droits et encore moins les moyens de les défendre. De plus, les supérieurs empêchent parfois les religieux de prendre des contacts extérieurs lorsqu’ils ont l’impression qu’une situation d’injustice est installée dans leur communauté, comme le montre la monition de renvoi d’un religieux brésilien, comportant la clause suivante interdisant au religieux de poursuivre ses contacts avec des canonistes sans autorisation[21] :

Je vous demande de solliciter les autorisations normales (sorties, déplacements, contacts extérieurs…) du Père…

En cas de difficultés insurmontables par le dialogue, un premier niveau de médiation devrait alors permettre de résoudre des tensions internes. A cet effet, plusieurs organismes susceptibles agissent en faveur des instituts religieux et/ou de leurs membres.

 

Les premiers agissent notamment en faveur des religieux, mais l’absence de procédure contradictoire avec leurs instituts peut engendrer un favoritisme en faveur des demandeurs :

  • l’Avref, association d’aide aux victimes des dérives de mouvements religieux en Europe et à leurs familles[22] joue un rôle important de dialogue et de discernement, en permettant notamment aux victimes de prendre du recul par rapport à ce qu’elles vivent[23];
  • l’ICSA, International Cultic Studies Association[24], qui est le partenaire international de l’AVREF ;
  • le Service diocésain « Pastorale, nouvelles croyances et dérives sectaires[25] » créé en lien avec la Cellule pour les dérives sectaires dans des communautés catholiques de la Conférence des Evêques de France[26]

Les deux suivants agissent en faveur des instituts, en cherchant à les protéger juridiquement, sans nécessairement remettre en cause certains de leurs agissements :

  • La Corref, conférence des religieux et religieuses de France[27], regroupe les supérieurs majeurs qui prévoit explicitement d’apporter « aide et soutien aux Instituts » à défaut d’en apporter aux religieux et religieuses.
  • Au plan international, le Conseil International des Canonistes[28], fondé le 9 mai 2016 par l’Union internationale des supérieures générales (UISG) pour offrir une consultance juridique à ses membres. Malheureusement, cet organisme n’envisage pas actuellement d’aider des juridiquement les consacrés, mais seulement les supérieures générales. Ainsi, malgré sa faible compétence, « Canonistes sans frontières»[29] reste nécessaire pour renseigner les consacrés qui font appel à lui sur le droit qui leur est applicable et sur les moyens de le faire respecter.

Il existe en outre un organisme agissant contradictoirement, respectant le droit de défense des deux parties, à savoir le « Service Accueil-Médiation pour la Vie religieuse et Communautaire » (SAM), créé sous l’autorité du Comité de coordination de la Commission Épiscopale de la vie consacrée et des Conférences des Supérieur(e)s Majeur(e)s au sein de la Conférence des évêques de France. Son but est le suivant :

… accueillir et écouter des personnes (parents, membres de communautés anciennes ou nouvelles, anciens membres) s’estimant lésées par les agissements d’une communauté catholique et/ou dénonçant ses dysfonctionnements (abus de pouvoir, mauvaise gestion des biens, manipulations…)[30]

Son origine et son fonctionnement sont précisés dans une note de 2006[31]. Quant aux résultats, Christelle Javary[32] précise :

Le SAM conduit un faible volume de médiations, mais joue un rôle essentiel pour écouter et pacifier les personnes qui prennent contact avec [Lui]. Le fruit le plus important est sans doute d’avoir tiré profit de son expérience pour inspirer des recommandations qui visent à prévenir de futurs conflits. Il est probable aussi que la discrétion (qu’on peut juger excessive) du SAM limite le nombre de recours qui lui sont adressés. […] Le SAM est une innovation de l’Église de France, qui n’a apparemment pas d’équivalent ailleurs. Le SAM a partagé les fruits de son expérience de manière très intéressante et utile en publiant deux notes sur des points d’attention à respecter : l’une, en avril 2005, sur « Des rapports du psychologique et du spirituel dans les communautés. Des confusions à éviter » ; l’autre, en septembre 2008, sur les « Points de vigilance à propos de la vie religieuse ou communautaire ». […] L’Église n’est donc pas dépourvue de moyens pour assurer la protection des fidèles qui s’engagent dans la vie religieuse.

Ayant reçu des demandes de religieux, Canonistes sans frontières leur a parfois conseillé de s’adresser au SAM. Parfois, les tentatives n’ont pas été concluantes :

Le 11 mai 2016, une religieuse du Niger apprend qu’elle n’est pas autorisée à faire ses vœux définitifs après cinq années de vœux temporaires. Comme elle insiste, la supérieure du couvent la jette dehors avec ses bagages mais, ne sachant où aller, elle reste assise devant le couvent jusqu’à ce que, deux jours plus tard, les fidèles s’en émeuvent, et en informent l’évêque qui la recueille dans les locaux de la cathédrale. A première vue, la décision de non-admission porte trois irrégularités puisqu’elle émane de la vice-provinciale et non de la supérieure générale, qu’elle n’a été précédée d’aucune des monitions prévues au canon 697, et qu’elle ne porte pas d’éléments précis de griefs qui permettraient à la religieuse d’exercer son droit de défense. La sœur fait alors un recours gracieux auprès de la supérieure générale qui l’appelle plusieurs fois au téléphone en lui annonçant une réponse écrite, mais rien ne vient. Elle saisit alors le service accueil et médiation de la Conférence des évêques de France, qui répond le 8 décembre 2016 sans même l’avoir interrogée : « La supérieure générale est responsable des étapes de la vie religieuse, [la sœur] doit donc accepter cette décision. Le délai de recours est de 10 jours, dépassé depuis longtemps. Le SAM ne peut donc lui venir en aide. ». Interrogé sur ce refus, le SAM répond officieusement à Canonistes sans frontières que pour une médiation, il faut être deux, ce qui laisse entendre que la congrégation de la sœur a été contactée par le SAM, et qu’elle a refusé le principe d’une médiation. Le 21 décembre 2016, sa Congrégation lui envoie une lettre de renvoi datée du 8 novembre 2016, lui demandant de quitter l’habit religieux.

 

Parfois, au contraire l’intervention est bénéfique :

Ayant été écarté de sa congrégation, dont les responsables se comportaient de manière totalitaire, et n’ayant plus aucun moyen de subsistance, l’état de santé d’un religieux s’était profondément dégradé quand il a fait appel à « Canonistes sans frontières ». Il reçut le conseil de maintenir sa confiance en Dieu, évitant les deux écueils de la honte et de la haine, et de défendre ses droits en contactant le SAM. Celui-ci fit alors une médiation qui lui permit peu à peu d’obtenir un indult d’exclaustration dans des conditions satisfaisantes.

Le second niveau d’appel à la justice est celui des recours hiérarchiques administratifs classiques, en vertu du canon 1732 et sq. A partir de son enquête dans les diocèses américains, James Provost constate que le nombre de recours hiérarchiques de la part de consacrés est peu élevé, puisqu’il ne compte que deux recours pour 141 diocèses pendant 16 ans. Voici deux hypothèses pour tenter d’expliquer ce résultat étonnamment faible :

  • soit la protection des droits à l’intérieur des communautés religieuses est suffisamment efficace pour que les consacrés n’aient pas besoin de s’adresser à l’extérieur ;
  • soit la difficulté pour les consacrés de faire un recours hiérarchique est telle qu’ils préfèrent quitter leur communauté de leur plein gré[33] ou qu’ils sont exclus par celle-ci, avant de faire appel à la justice ecclésiastique.

Voici un premier exemple de recours infructueux :

Ayant reçu une notification de non acceptation de sa profession religieuse, une religieuse africaine ayant passé dix ans dans une congrégation adresse un recours hiérarchique à la Congrégation romaine chargée des religieux. Elle reçoit une réponse négative par courrier électronique précisant que le refus de renouvellement des vœux n’est pas assimilable à une procédure de renvoi, et lui enjoignant d’obéir. La sœur demande alors le bénéfice d’un nouvel examen, en joignant le passage des statuts propres de la Congrégation qui n’a pas été respecté dans la procédure de non acceptation des vœux. Pour une raison qu’elle n’a pas comprise, la Congrégation ne relève pas l’irrégularité, si bien que la religieuse, qui renonce à déposer un recours contentieux-administratif doit repartir à zéro dans la vie civile, sans famille et sans appui autre que celui de « canonistes sans frontières » qui lui a permis d’acheter une machine à broder pour lui permettre de gagner sa vie.

 

Et voici un exemple de recours fructueux :

Ayant reçu deux monitions de renvoi de la part son supérieur général, un religieux a contacté la « Cellule pour les dérives sectaires dans des communautés catholiques[34] » de la Conférence des évêques de France, qui a relevé dix irrégularités juridiques dans le comportement du supérieur général. Sur conseil de la cellule, le religieux déposa un recours hiérarchique demandant l’annulation du chapitre général de sa congrégation, qui s’était tenu illégalement, puisque lui-même n’avait pas été convoqué. Informé ce recours hiérarchique qui le gênait, le supérieur général est intervenu auprès du dicastère compétent de la Curie romaine, à savoir la Commission Ecclesisa dei[35], et cette Commission a enfin répondu au religieux qui lui avait écrit plusieurs courriers restés sans réponse. Une solution de compromis a été trouvée et mise en œuvre.

 

Le troisième niveau est celui des recours contentieux-administratifs, dont le nombre est relativement important. En effet, la consultation de notre base de données montre que :

  • les religieux sont à l’origine de 162 recours, représentants 22 % des 742 recours dont le demandeur est renseigné[36];
  • les décrets de la Congrégation pour les instituts de vie consacrée et les sociétés de vie apostolique font l’objet de 270 recours, représentant 31 % des 857 recours dont le dicastère est renseigné.

En fait, les recours couvrent deux grands domaines qui structureront notre chapitre. Le premier concerne la justice pour les consacrés et autres personnes physiques, tandis que le second concerne la justice pour les personnes juridiques que sont les instituts de vie consacrée et les sociétés de vie apostolique.

La suite de ce chapitre va tenter d’éclairer la situation à partir de la jurisprudence contentieuse-administrative relative aux consacrés. Nous nous baserons en particulier sur l’analyse effectuée en 1986 par Francesco d’Ostilio[37] sur 90 recours contentieux-administratifs présentés par des religieux ou par leurs instituts.

  1. La justice pour les consacrés

Le rapport d’activité du Saint-Siège pour l’année 1978 précisait que, parmi les trois types d’actes administratifs qui font le plus souvent l’objet d’un recours administratif auprès du Tribunal suprême, deux concernaient les religieux, à savoir les cas d’exclaustration et les cas de démission[38].

Plus précisément, F. d’Ostilio[39] classe les recours selon les principales rubriques suivantes :

  1. les conflits avec les supérieurs et les chapitres (c. 596, 617) ;
  2. l’admission (c. 597, 641-658, 720-723, 735), la formation (c. 659-661, c. 724, c. 735), l’exclusion géographique (c. 679), l’exclaustration temporaire (c. 686, 745) et la sortie définitive d’un membre (c. 686-704 ; c. 729 ; c. 742-743) ;
  3. l’élection et la révocation des supérieurs (c. 623 & sq.) ou des offices (c. 682) ;
  4. la visite pastorale ou apostolique (c. 628).

A partir des travaux d’Ostilio, Javier Canosa[40] a recherché les “grands arrêts” favorables aux religieux, qui ont marquées les 40 premières années de jurisprudence administrative. Il évoque :

  1. la reconnaissance du droit de défense, reconnu par la seconde section dès 1973, à partir du droit naturel et non d’un canon particulier (Prot 2973/72 CA).
  2. Le rappel des principes (la charité) et de la fonction du droit (soigner et non punir) en tenant compte de la situation des personnes, en l’occurrence une soeur qui avait vécu et travaillé de nombreuses années dans sa congrégation (Prot 10460/78 CA)[41].
  3. La possibilité offerte par le Secrétariat d’Etat au Tribunal de juger un cas sur le mérite, ce qui a permis de poser les bases de la réparation des dommages dans le cas d’un professeur écarté injustement (Prot 10977/76 CA)[42]
  4. Le refus d’accepter une décision de renvoi sur la base d’une certitude morale et non de faits objectifs étayant cette certitude (Prot 17156/85 CA)

Sans les aborder tous, commençons par les sorties des instituts, avant d’aborder les autres actes administratifs.

2.1. La sortie des instituts

Le rapport d’activité de la Congrégation[43] fait état pour 2015 de :

  • 369 demandes d’exclaustrations accordées ;
  • 8 exclaustrations imposées ;
  • 2 073 indults de sortie concédés ;
  • 213 décrets de démission confirmés.

Voici une tentative d’explication :

Une des réalités qui ne tarde pas à frapper tout nouvel arrivant parmi les employés du Dicastère [La Congrégation pour les instituts de vie consacrée et les Sociétés de vie apostolique] est la croissance continue du nombre de sortie des instituts de vie consacrée et des instituts religieux en particulier. Nos services traitent jusqu’à 3 000 demandes par an de sortie d’institut ! […] D’après les statistiques, les motifs invoqués à l’appui des demandes de sortie sont majoritairement liés à une crise de la foi, puis à des difficultés dans la vie fraternelle et enfin, dans une moindre mesure, à un manque affectif. […] Néanmoins, bien que les sorties soient nombreuses, il faut garder en mémoire qu’un arbre qui tombe fait plus de bruit qu’une forêt qui pousse. S’il y a des infidélités, souvenons-nous qu’il y a surtout beaucoup de sainteté dans la vie religieuse.[44]

En droit, la sortie de leur communauté par des membres consacrés (au sens large) est régie par les canons 686 et 687 pour les instituts religieux, 726 à 727 pour les instituts séculiers et 742 à 745 pour les sociétés de vie apostolique, ainsi que par les statuts de leur communauté.  Les situations sont variées, comme l’indique Yuji Sugawara[45] à l’occasion d’une soirée d’études sur la vie consacrée[46] :

  • la sortie d’un novice (c. 653 §1) ;
  • les exclaustrations imposées par le Saint-Siège (c. 686 §3) ;
  • La sortie imposée d’un profès temporaire (c. 689) ;
  • les sorties volontaires des instituts (c. 691-3) ;
  • les démissions « ipso facto » des membres (c. 694-700) ;
  • les démissions obligatoires (c. 695) ;
  • les démissions facultatives ordinaires, qui sont en fait des renvois à la discrétion des supérieurs (c. 696-700) ;
  • les renvois immédiats suite à une faute très grave (c. 703).

Sans entrer dans tous les cas possibles, examinons quelques cas parmi ceux qui entraînent le plus fréquemment des litiges.

Sans entrer dans tous les cas possibles, examinons quelques cas parmi les plus fréquents.

2.1.1. La sortie volontaire d’un institut

Les motifs de sortie des instituts sont multiples[47]. Certains religieux quittent leur institut suite au non-renouvellement de leurs vœux provisoires, soit de leur plein gré[48], soit par décision des supérieurs. D’autres cherchent à prendre du recul et demandent à s’absenter de leur institut, ce qui nécessite une autorisation d’absence pour une durée maximale d’un an en vertu du c. 665[49] ; un indult d’exclaustration pour une durée maximale de trois ans en vertu du c. 686 §1 ; des autorisations de passage dans un autre institut en vertu des c. 684 et sq., voire un indult de sortie en vertu du canon 691[50].

Les autorisations et indults correspondants sont considérés comme des grâces, lesquelles peuvent être refusées. Le cas échéant, celui qui est débouté peut alors déposer un recours qui est accepté[51], refusé, non-admis à la discussion ou réglé par transaction, suivant les cas.

2.1.2. Les exclaustrations imposées

Parfois, le religieux ne souhaite pas s’absenter ou sortir de l’institut mais ce sont ses supérieurs qui souhaitent s’en séparer. Une des solutions qui s’offre alors aux supérieurs consiste à imposer au religieux une exclaustration provisoire ou définitive en vertu du c. 686 §3, pour une cause grave telle que, par exemple, l’incapacité à vivre en commun, l’absence prolongée de la maison religieuse, le non-respect réitéré des vœux d’obéissance et de pauvreté.

  1. 686 § 3. À la demande du Modérateur suprême, avec le consentement de son conseil, l’exclaustration peut être imposée par le Saint-Siège à un membre appartenant à un institut de droit pontifical ou par l’Évêque diocésain à un membre d’un institut de droit diocésain, pour des causes graves, tout en observant l’équité et la charité.

Sans entrer dans le détail, retenons que le religieux concerné est alors exempté des obligations incompatibles avec sa nouvelle condition, mais il continue à dépendre de ses supérieurs. Certains déposent alors des recours qui sont acceptés[52], refusés[53], non-admis à discussion[54], abandonnés ou réglés par transaction[55], suivant les cas. Voici un exemple de jurisprudence :

Dans le cas Prot 18061/86 CA[56], la jurisprudence rappelle que l’exclaustration imposée pour trois ans en vertu du c. 686 ne nécessite pas une faute grave mais une raison grave.

 

Renvoyons aux travaux de Madeleine Ruessmann[57] et de Delfina Moral Carvajal[58] le lecteur qui veut approfondir la question, en précisant néanmoins que l’exclaustration définitive imposée en cas de faute grave est réservée au Saint-Siège pour les instituts de droit pontifical et à l’Evêque diocésain pour les instituts de droit diocésains, « tout en observant l’équité et la charité. »

2.1.3. Les renvois

Parfois, les supérieurs souhaitent le départ d’un membre de leur institut, et ils le renvoient en vertu des canons 696 à 701[59], pour une raison « grave, extérieure, imputable et juridiquement prouvée ». Javier Hervada commente ainsi l’évolution du droit applicable :

Désormais, tout renvoi légitime — c’est-à-dire provoqué par une cause suffisante et effectué selon la procédure prévue — entraîne ipso facto la cessation des vœux et des autres droits et obligations. Les procédures diffèrent suivant les causes du renvoi, et non en fonction de la situation juridique du religieux. Ce sont :

  1. le renvoi automatique lorsque les circonstances du c.694 sont réunies ;
  2. le renvoi obligatoire lorsque certains délits ont été commis, suivant la procédure prévue au c.695 ;
  3. le renvoi pour d’autres causes qui ne constituent pas nécessairement un délit, déterminées au c.696 ;
  4. le renvoi dans ce que l’on appelle un « cas urgent », c’est-à-dire lorsqu’il y a un grave scandale extérieur ou un très grave dommage imminent pour la communauté, selon le c.703. 4).

En ce qui concerne les causes possibles de renvoi, la liste (seulement indicative, non exhaustive) que donne le c. 696, §1 constitue une nouveauté importante. Le législateur n’a pas voulu que cette matière délicate soit déterminée de manière exclusive par le droit propre, mais il a posé des jalons concrets pour que, les droits du religieux étant toujours saufs, le bien commun de l’institut et, en définitive, de l’Église soit aussi sauvegardé[60].

Souvent, la raison invoquée par le supérieur est le refus de l’obéissance prévue au canon 601 :

Can. 601 — Le conseil évangélique d’obéissance, assumé en esprit de foi et d’amour à la suite du Christ obéissant jusqu’à la mort, oblige à la soumission de la volonté aux Supérieurs légitimes qui tiennent la place de Dieu, lorsqu’ils commandent suivant leurs propres constitutions.

Observons que le refus d’obéissance ne constitue pas toujours une raison de renvoi, car :

un religieux est tenu d’obéir à son supérieur mais celui-ci n’a pas le pouvoir absolu d’ordonner n’importe quoi à n’importe qui[61].

Ainsi, un religieux n’est pas tenu d’obéir à un ordre illégal ou contraire à l’esprit et au charisme de l’institut. Le canon 618 précise les obligations incombant au supérieur :

Can. 618 — Les Supérieurs exerceront dans un esprit de service le pouvoir qu’ils ont reçu de Dieu par le ministère de l’Église. Que, par conséquent, dociles à la volonté de Dieu dans l’exercice de leur charge, ils gouvernent leurs sujets comme des enfants de Dieu et, pour promouvoir leur obéissance volontaire dans le respect de la personne humaine, ils les écoutent volontiers et favorisent ainsi leur coopération au bien de l’institut et de l’Église, restant sauve cependant leur autorité de décider et d’ordonner ce qu’il y a à faire.

Les trois textes précédents visent à prévenir et éviter les abus qui pourraient découler d’une protection insuffisante du principe d’autorité ou des droits des fidèles[62]. Leur interprétation fait l’objet de commentaires des canonistes, parmi lesquels ceux de Christian Begus, basés sur deux cas de jurisprudence[63], dont nous retiendrons la conclusion :

  • le manque de caractère absolu de l’obéissance comporte la possibilité pour le religieux de procéder à une évaluation de la légitimité de l’ordre reçu, formellement ou substantiellement. […]
  • dans le cas de désobéissance du religieux, en plus du critère d’imputation qui fait référence à un élément de faute, il apparaît possible d’en identifier un autre, en considérant l’importance accordée au lien de causalité entre la conduite du religieux, les faits et la désobéissance, en absence d’évaluation de sa propre négligence ;
  • la protection des droits de défense a une valeur absolue, et elle fait l’objet d’une attention particulière dans la démission facultative, en prenant en considération ses multiples aspects, même non explicites, qui portent sur tout le cheminement de la procédure : admonition initiale, moment probatoire, et possibilité de présenter une défense appropriée. Inversement, cette protection n’inclut pas nécessairement la présence d’un défenseur canoniquement compétent. Le religieux peut en désigner un mais il ne peut pas prétendre à la nomination d’un avocat d’office[64].

Dans la réalité, la situation est parfois moins limpide, comme nous l’avons vu avec la religieuse du Niger et le religieux brésilien (Cf. infra).

Hormis les cas de renvoi ipso iure pour mariage[65] ou abandon notoire de la foi catholique de droit ou de fait (ex. passage au protestantisme ou à l’orthodoxie), le décret de renvoi devient exécutoire dans un délai de 10 jours, pour laisser éventuellement le temps au religieux de déposer un recours, qui est alors suspensif. En effet, une sentence du 24 février 1973[66] a fait jurisprudence en la matière et a inspiré le canon 700, précisant que le recours a un effet suspensif.

Puisque l’intervention de la Curie est requise pour la démission forcée, la question s’est posée de savoir si un religieux révoqué doit déposer un recours hiérarchique avant ou après la décision de la Curie. Suite à la promulgation du Code, la Commission pour l’interprétation des textes législatifs[67] a répondu à cette question en précisant, le 21 mars 1986, que la démission des religieux, des membres des sociétés de vie apostolique et des instituts séculiers doit être notifiée à la personne concernée seulement après avoir été confirmée par le Saint-Siège. Celle-ci peut alors déposer un recours hiérarchique auprès de la Congrégation romaine, mais non pas tout de suite au Tribunal suprême[68].

En pratique, des religieux renvoyés déposent chaque année des recours hiérarchiques et contentieux-administratifs. Suivant les cas, ces recours sont jugés irrecevables[69], non-admis à discussion[70], abandonnés en cours de procédure[71], refusés[72] ou acceptés[73], ce qui prouve que la justice joue son rôle. A titre d’illustration, voici un premier exemple de recours accepté :

Dans le cas Prot 31290[74], le Tribunal a estimé que l’obligation de donner à l’accusé le droit de se défendre nécessite que lui soient communiquées les affirmations des témoins et que, dans le cas d’espèce, ce droit n’a pas été respecté, si bien que sa démission a été considérée comme illégale à la fois sur la procédure et sur le fond.

 

Voici un exemple de recours rejeté :

Dans le cas Prot 37163[75], un religieux qui demeurait hors de sa province estimait avoir été lésé car le décret de renvoi pris à son encontre en application du canon 697 ne lui laissait pas le choix entre la repentance ou le renvoi, mais proposait seulement la solution du renvoi. La Signature apostolique a estimé que la repentance lui avait été proposée, et elle a rejeté le recours.

 

Et voici un second exemple de rejet :

Dans le cas Prot 18061[76], la sœur Monica s’est plainte de ce que les motifs de son exclaustration forcée ne lui ont pas été communiqués et qu’ainsi, elle n’a pu faire valoir correctement son droit à la défense. Le Tribunal en a jugé autrement en considérant que, même si les motivations de l’exclaustration ne lui ont pas été communiquées par écrit, elle savait suffisamment de quoi il s’agissait. Certes, le canon 51 précise que « le décret sera donné par écrit, avec exposé des motifs s’il s’agit d’une décision » mais le Tribunal a estimé qu’une explication vague était suffisante dans la mesure où des documents antérieurement transmis apportaient des précisions et pouvaient être considérés comme des décrets au sens du canon 49.

 

Les renvois ont des conséquences sur les personnes qui quittent les instituts et leur situation fait parfois l’objet de contentieux en droit séculier.

2.1.4. Les conséquences des renvois

Un des litiges qui accompagne parfois le départ d’un religieux concerne les droits sociaux qu’il s’est acquis pendant qu’il était au service de sa congrégation[77].

En France, la loi du 9 décembre 1905, sur la séparation des Églises et de l’Etat, a renvoyé les vœux religieux dans la sphère des activités privées, sous le contrôle des tribunaux[78]. Ces derniers tiennent cependant compte du vœu d’obéissance de certains religieux, en distinguant leur activité spirituelle et leurs relations de travail. Il en résulte une jurisprudence séculière hésitante, donc complexe, rapportée par Patrick Boinot[79] à partir d’arrêts nuancés de la Cour de Cassation, dont voici quelques exemples :

A propos d’une religieuse qui avait exercé comme infirmière chez les petites sœurs de l’Assomption, l’assemblée plénière a arrêté le 8 janvier 1993   que Mme… n’avait exercé son activité que pour le compte et au bénéfice de sa congrégation, ce qui excluait l’existence d’un contrat de travail.

 

A l’inverse,

A propos de deux époux membres d’une communauté nouvelle qui n’a pas le statut de congrégation religieuse, la chambre sociale de la Cour de Cassation a jugé le 29 octobre 2008 qu’« indépendamment de la nature spirituelle de leur engagement », ces deux personnes ont « travaillé pour le compte de l‘association dans un rapport de subordination caractérisant un contrat de travail. »

 

Finalement,

A propos de Mme…, engagée par les vœux religieux dans la communauté de la Croix Glorieuse, puis ayant quitté cette communauté, la chambre sociale de la Cour de Cassation a jugé le 29 octobre 2008 que « l’existence d’une relation de travail salariée ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination qu’elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles s’est exercée l’activité des travailleurs ; l’engagement religieux d’une personne n’est susceptible d’exclure l’existence d’un contrat de travail que pour des activités qu’elle accomplit pour le compte et au bénéfice d’une congrégation ou d’une association cultuelle légalement établie. ». En l’occurrence elle a reconnu l’existence d’un contrat de travail avec les conséquences qui s’en suivent.

 

Quant au bénéfice de la retraite, Patrick Boinot nous apprend que, depuis le 1er juillet 2006, la caisse (CAVIMAC) prend désormais en compte les années de postulat et de noviciat pour le calcul des retraites, pour tenir compte de la jurisprudence de la Cour de Cassation, qui s’est ensuite traduite dans la loi n° 2011-1026 de financement de la sécurité sociale pour 2012 et l’article L. 382-29-1 du code de la sécurité sociale.

 

2.2. Les autres recours pour les consacrés

  1. D’Ostillo signale l’existence de recours contentieux-administratifs pour des consacrés autour de sujets variés tels que :
  • le refus d’admission à la profession temporaire ou définitive ;
  • le retrait d’un office d’enseignement en application du c. 192-5[80];
  • le retrait de la faculté d’écouter les confessions[81];
  • mutation dans une autre maison ;
  • la privation de voix active et passive ;
  • l’expulsion du diocèse par décret de l’évêque ;
  • le refus de la faculté de se dédier aux études.
  1. La justice pour les institutions de consacrés

L’annuaire pontifical de l’année 2001 fait état de 1 992 instituts de vie consacrée et sociétés de vie apostolique répartis comme suit :

Instituts masculins Instituts féminins Total
Instituts religieux 193 1641 1834
Instituts séculiers 16 95 111
Sociétés de vie apostolique 35 12 47
Total 244 1748 1992

Parmi eux, les instituts religieux sont largement majoritaires, aussi traiterons-nous principalement leur situation, non sans quelques digressions pour les instituts séculiers et les sociétés de vie apostolique.

Le rapport d’activité de la Congrégation pour 2015 fait état de 136 autorisations d’érection de maisons religieuses[82]. Outre les recours de la part des religieux et consacrés, il existe aussi des recours de la part des instituts de vie consacrée et des sociétés de vie apostoliques ou de leur supérieur. Ils concernent les trois types de difficultés ci-après :

  • les suppressions de maisons religieuses ;
  • les revendications de droits de propriété ;
  • les interventions dans la gestion des instituts.

3.1. La création et la suppression

Le droit relatif aux maisons religieuses est défini par les canons suivants :

  • l’approbation (c. 576, 579, 587, 595, 605) ; le regroupement
    (c. 580) ; la division (c. 581) ; la fusion (c 582) ; la modification (c. 583, 595) ; la suppression (c. 584, 585) ; l’exemption (c. 591), l’érection de maisons (c. 609 et sq.  ; 733) ;
  • la gestion des biens matériels des instituts (c. 634-640 ; c. 718, 741) et de leurs membres (c. 668-670).

Ce droit s’enrichit régulièrement, comme le montre par exemple l’interprétation du Conseil Pontifical pour les textes législatifs, qui a statué le 14 juillet 2016 que les supérieurs majeurs des instituts cléricaux de droit pontifical n’ont pas compétence pour ériger des fondations pieuses au sens du canon 312 §2[83].

L’annuaire pontifical indique la date de fondation des instituts de vie consacrée et des sociétés de vie apostolique ainsi que la date de leur reconnaissance canonique, si bien qu’il est possible de mesurer la durée moyenne de reconnaissance. En effectuant ce travail sur l’annuaire de l’année 2011, il apparaît une répartition presque uniforme avec des délais de reconnaissance compris entre quelques mois et plus de 50 ans, mettant en évidence le fait qu’il ne s’agit pas d’un droit mais d’une grâce :

 

 

De ce fait, nous n’avons pas trouvé de recours contre des non-reconnaissances d’institut religieux ou séculiers. Il en va autrement pour des décisions de suppressions de monastères[84] ou lors de division (Prot 39257/06 CA) ou d’unions (Prot 40608/07 CA) d’instituts religieux. Voici, parmi d’autres, un exemple de recours :

Après accord préalable de la Congrégation pour les religieux et les instituts séculiers, un évêque diocésain supprime une maison religieuse, par décret du 29 juillet 1970, à cause notamment de l’âge avancé des religieuses. Après délibération dans leur chapitre, les religieuses déposent un recours hiérarchique puis un recours contentieux-administratif auprès de la Seconde section et le Pape lui-même mandate une commission pontificale pour examiner la cause sur le fond et non seulement sur la légalité. Le 24 février 1973, le Collège du Tribunal casse la décision et impose la restitution du monastère en considérant sur la base des c. 493 et 498 du CIC/17 que l’évêque n’était pas habilité à prendre une telle décision, du ressort de Rome. (Prot 896/70 CA)

3.2. Les droits de propriété

La question des droits de propriété est parfois délicate en cas de regroupements ou de suppressions d’instituts si bien qu’il en résulte des recours se résolvant parfois par transactions après que la CIVCSVA ou le Tribunal suprême rappelle le droit (ex. : Prot 384/68 CA).

Les droits de propriété sont aussi l’occasion de litiges entre l’évêque diocésain ou une paroisse et un institut religieux, ainsi qu’il en est question à plusieurs reprises dans le rapport d’activité de l’année 1987[85]. En voici un exemple datant de 1972 :

Un immeuble conventuel ayant appartenu à un institut religieux était devenu propriété d’une paroisse suite au Concordat de 1818 avec le Royaume de Naples. 150 ans plus tard, l’institut a revendiqué ses droits et il a obtenu gain de cause auprès de la Congrégation du Concile (actuellement pour le clergé), mais la paroisse a fait un recours contentieux-administratif auprès du Tribunal suprême. Le 12 décembre 1972, le Collège des Pères a cassé la décision du Dicastère, qui comportait un vice de forme[86].

 

Il existe d’autres cas où les conflits de propriété se terminent par une transaction entre les parties pendant le temps d’instruction d’un recours contentieux-administratif (ex Prot. 384/68 CA) ; Voici enfin un litige entre un institut religieux et un fidèle catholique, qui s’est résolu grâce à la justice ecclésiastique :

Dans les années 1950, un particulier avait prêté une somme d’argent à une congrégation religieuse française. La supérieure a remboursé les premières annuités mais son successeur n’a pas poursuivi. Le particulier a saisi le Tribunal diocésain, qui lui a donné raison. La province religieuse a déposé un recours à la Rote qui a confirmé la décision de l’Officialité, et lui a donné mandat pour calculer les intérêts des sommes prêtées. Contestant cette décision, la supérieure s’est finalement adressée à la Signature apostolique qui n’a pas admis son recours (Prot n° 923/70 C.G.)

 

Sans entrer dans le détail, on pourrait encore citer :

  • une requête à la Congrégation pour les instituts de vie consacrée et les sociétés de vie apostolique pour un plafond de la dette[87];
  • d’autres types de recours concernent les droits de propriété des instituts sur des biens résultant de pieuses volontés (ex : Prot 11876/79 CA).

3.3. La gestion des instituts

Frederico d’Ostilio recense cinq recours contentieux-administratifs contre une décision de la Congrégation pour les religieux et les instituts séculiers, relatifs à la gestion interne des instituts. Les décisions du Tribunal sont parfois en faveur des requérants :

La supérieure générale d’un institut séculier lyonnais a été écartée avant la fin de son mandat par une décision de la Congrégation pour les religieux et les instituts séculiers, provoquant des élections anticipées. L’ancienne et la nouvelle supérieure générale ont saisi le Tribunal suprême, qui a cassé la décision du Dicastère par sentence du 26 juin 1976. (Prot 6508/75 CA)

 

et parfois en faveur du Dicastère :

Ayant été invitée par la Congrégation pour les religieux et les instituts séculiers à remettre sa démission suite à de graves irrégularités dans la gestion d’un institut, une supérieure générale refuse l’invitation et elle est déposée par l’évêque diocésain. Elle fait recours contre la décision et son recours est admis à la discussion, mais le Collège juge finalement le 14 décembre 1964 que la déposition était conforme au droit.

 

D’autres cas de ce type se terminent par un accord entre les parties pendant l’instruction d’un recours contentieux-administratif contre une décision de la Congrégation pour les religieux et les instituts séculiers, (Prot. 5868/74 CA).

Un tel accord est actuellement recherché avec une association de religieux :

En 2012, la Congrégation pour la doctrine de la foi publie un rapport très dur sur la LCWR, qui regroupe près de 80 % des quelques 50 000 religieuses des Etats-Unis, en l’accusant de « féminisme radical », d’imprécisions doctrinales, d’avoir perdu le sens de l’Église, de tenir des positions inacceptables en matière de sexualité et de risquer de « distordre la foi en Jésus et Notre Père aimant »[88]. Les religieuses répliquent qu’il s’agit d’accusations sans fondement, potentiellement destructrices pour la poursuite de leur mission. Depuis, les négociations se poursuivent entre le délégué du Vatican, l’archevêque Peter Sartain et les instances de l’association[89].

 

En conclusion, nous retiendrons que les recours hiérarchiques et contentieux-administratifs constituent une réalité qui contribue effectivement au respect et/ou au rétablissement de la justice par rapport aux religieux. Cette justice interne à l’Église est particulièrement importante à notre époque où, au moins en Europe, la société civile a du mal à accepter le conseil évangélique d’obéissance. Ainsi, quelques plaintes fondées ou non de religieux ou de leur famille, l’amènent parfois à considérer qu’un institut religieux a un comportement sectaire. Nous aborderons cette question au chapitre suivant, après avoir évoqué la situation transversale des sanctions relatives aux personnes détentrices de charismes.

 


[1]Cf.  www.viereligieuse.fr/La-vie-religieuse-en-chiffres-dans-le-monde

[2] Par opposition aux religieuses de vie contemplative, appelées moniales.

[3] On citera notamment les instructions ci-après :

  • le 15 août 1969, l’instruction Venite seorsum sur la vie contemplative et la clôture des moniales de la Congrégation pour les religieux et les instituts séculiers,
  • le 2 février 1990, l’instruction Potissimum institutioni, de la Congrégation pour les instituts de vie consacrée et les Sociétés de vie apostolique,
  • le 2 février 1994, l’instruction « Congregavit nos in unum Christi amor » (la vie fraternelle en communauté)
  • le 25 mars 1996, l’exhortation apostolique post synodale « Vita consacrata»
  • le 13 mai 1999, l’instruction sur la vie contemplative et la clôture des moniales Verbi sponsa de la Congrégation pour les instituts de vie consacrée et les Sociétés de vie apostolique[4].
  • le 29 juin 2016, la constitution apostolique Vultum Dei quaerere (La recherche du Visage de Dieu)
  • le 11 mai 2008, l’instruction Faciem tuam, Domine, requiram (le service de l’autorité et l’obéissance)

[5] Acquaviva (Claudio S.I.) Industriae pro Superioribus eiusdem Societatis ad curandos animae morbos, Rome, 16 avril 1600, cité par le pape François le 22 décembre 2016 (Zenit ,www.ignaziana.org/accorgimenti.pdf

[6] Zenit, 1er novembre 2016.

[7] Donough (Elizabeth Mc), « The protection of rights in Religious institutes », The Jurist, (1986) 164-204.

[8] Cf. c. 630 Les supérieurs reconnaîtront aux membres la liberté qui leur est due pour ce qui concerne le sacrement de pénitence et la direction de conscience, restant sauve la discipline de l’institut.

[9] Cf. c. 654 Par la profession religieuse, les membres s’engagent par vœu public à observer les trois conseils évangéliques ; ils sont consacrés à Dieu par le ministère de l’Église, et ils sont incorporés à l’institut avec les droits et les devoirs définis par le droit.

[10] Cf. c. 740 L’Institut doit fournir à ses membres tout ce qui est nécessaire selon les constitutions, pour atteindre le but de leur vocation.

[11] Paul VI, Evangelica testificato, AAS, LXIII (1971), p. 512-513, n° 28 : conscience et obéissance.

[12] Can. 617 — Les Supérieurs accompliront leur charge et exerceront leur pouvoir selon le droit universel et le droit propre.

[13] Can. 618 — Les Supérieurs exerceront dans un esprit de service le pouvoir qu’ils ont reçu de Dieu par le ministère de l’Église. Que, par conséquent, dociles à la volonté de Dieu dans l’exercice de leur charge, ils gouvernent leurs sujets comme des enfants de Dieu et, pour promouvoir leur obéissance volontaire dans le respect de la personne humaine, ils les écoutent volontiers et favorisent ainsi leur coopération au bien de l’institut et de l’Église, restant sauve cependant leur autorité de décider et d’ordonner ce qu’il y a à faire.

[14] Empela Ankonelle (Scholastique), L’identité de la vie consacrée face aux actuelles mutations socioculturelles en Afrique, Université du Latran, Corona Lateranensis 47, Rome 2011, p. 267 et 272 / 406 p.

[15] Alday (Josu Mirena) « Il senso di appartenensa al proprio istituto », in Vitcons 37 (2002) 166-179.

[16] Politi (Marco), François parmi les loups, version française, ed Philippe Rey, Paris 2015, p. 141-142/284.

[17] Le harcèlement peut se définir comme la répétition de propos et de comportements ayant pour but ou effet une dégradation des conditions de vie de la victime. En droit français, le harcèlement moral au travail est un délit répréhensible dans le secteur privé comme dans le secteur public, sachant que la loi organise la protection des salariés, des agents publics et des stagiaires.

[18] Politi (Marco), François parmi les loups, version française, ed Philippe Rey, Paris 2015, p. 122/284.

[19] Politi (Marco), François parmi les loups, version française, ed Philippe Rey, Paris 2015, p. 117/284.

[20] Congrégation pour les instituts de vie consacrée et les sociétés de vie apostolique : Instruction du 11 mai 2008, Faciem tuam, Domine, requiram (le service de l’autorité et l’obéissance)

[21] Des canonistes interrogés estiment que l’interdiction de contacts extérieurs sans autorisation est illégale. Néanmoins Canonistes sans frontières a recommandé au religieux de la respecter tant qu’une lettre de renvoi ne lui a pas été formellement adressée, auquel cas, le droit de se défendre semble prévaloir sur le devoir d’obéissance.

[22] https://www.avref.fr/

[23] Voici un propos trouvé le 30 juin 2017 sur le site de l’Avref : Vous êtes victime d’une Communauté, d’un Mouvement, ou d’une personne qui a pris autorité sur vous :

  1. Vous qui aviez prononcé le vœu de Chasteté : Vous avez connu l’isolement, la rupture affective avec des êtres chers;
  2. vous qui aviez prononcé le vœu de Pauvreté : Vous avez connu l’extorsion, l’abandon, la misère intellectuelle et spirituelle;
  3. vous qui aviez prononcé le vœu d’Obéissance : Vous avez connu la soumission, le harcèlement, l’abus de pouvoir,

Alors réagissez. Rien n’est perdu.

  • Si vous y êtes encore, prenez la fuite sans regarder en arrière, recouvrez votre liberté.
  • Si vous avez quitté, vous avez fait le plus dur, vous pouvez vous reconstruire, vous devez le faire.

 L’AVREF vous accueille et vous aide : manifestez-vous ! Soutien confidentiel assuré par des familles et d’anciens membres de Communautés.

[24] www.icsahome.com

[25] http://gamaliel21suite.pagesperso-orange.fr

[26] http://www.eglise.catholique.fr/conference-des-eveques-de-france/cef/autres-services-et-instances/418017-derives-sectaires-dans-des-communautes-catholiques/

[27] www.viereligieuse.fr

[28] www.crc-canada.org/fr/conseil-international-canonistes-IUSG

[29] Voir présentation en annexe.

[30] Note publiée par le diocèse d’Evry : http://evry.catholique.fr/Service-Accueil-Mediation-pour-la et consulté le 3 mars 2015 ;

[31] Il se compose à ce jour de 9 membres (2 laïcs, père et mère de famille, un prêtre séculier, 2 religieux, 4 religieuses) nommés par le Conseil permanent de l’Episcopat pour un mandat de trois ans. Ils sont liés par le secret professionnel. […] Les personnes estimant être, pour elles-mêmes ou pour un proche, dans une situation relevant du SAM peuvent adresser une demande d’intervention au […] Secrétaire général adjoint de la CEF […qui…] confiera le dossier à un et souvent deux membres du SAM. Il revient aux membres du SAM à qui a été confié un dossier :

  • de prendre la mesure de la situation en entendant toutes les personnes impliquées dans le conflit (plaignant, supérieurs, responsables de communauté),
  • d’ouvrir, quand cela est possible par la voie de la médiation, des chemins de compréhension et de réconciliation,
  • d’informer dès le début l’évêque concerné et de lui transmettre, au terme de la démarche, un rapport sur ce qui a pu être entrepris comme médiation, ou de lui dire que celle-ci n’a pas pu aboutir.

Dès le départ, les évêques ont tenu à ce que soient entendues les personnes qui s’interrogent sur ce qu’elles perçoivent, de l’intérieur ou de l’extérieur, comme déviances dans telle ou telle communauté déterminée. Servir le dynamisme de l’Évangile demande toujours, si nécessaire, de signaler et de corriger ce qui fait obstacle.

[32] Javary (Christelle), « La médiation dans l’Église catholique de France : l’exemple du SAM (Service Accueil Médiation pour la vie religieuse et communautaire), mémoire d’IFOMENE 2008-2009.

[33] Selon ASS (2915), p. 745, 2073 indults de sortie ont été concédés en 2015

[34] http://www.eglise.catholique.fr/structure/cellule-pour-les-derives-sectaires-dans-des-communautes-catholiques/

[35] La Commission pontificale « Ecclesia Dei » a été instituée par Jean-Paul II avec le Motu proprio du 2 juillet 1988 avec la « la mission de collaborer avec les évêques, les dicastères de la Curie romaine et les milieux intéressés, dans le but de faciliter la pleine communion ecclésiale des prêtres, des séminaristes, des communautés religieuses ou des religieux individuels ayant eu jusqu’à présent des liens avec la Fraternité fondée par Mgr Lefebvre et qui désirent rester unis au successeur de Pierre dans l’Église catholique ».

[36] Les prêtres-religieux peuvent être comptés soit parmi les clercs soit parmi les religieux.

[37] Ostilio (Francesco D’), Segnatura Apostolica in Dizionario degli Istituti di perfezione, volume VIII, Saba-Spirituali, sous la direction de Pelliccia (Guerrino) et Rocca (Giancarlo), Rome, Edizioni Paoline, p. 1236-249.

[38] ASS (1978), p. 625

[39] Ostilio (Francesco D’),  Segnatura Apostolica in Dizionario degli Istituti di perfezione, volume VIII, Saba-Spirituali, sous la direction de Pelliccia (Guerrino) et Rocca (Giancarlo), Rome, Edizioni Paoline, p. 1236-249.

[40] Canosa (Javier), « Giustizia amministrativa eclésiastica e giurisprudenza », in Ius ecclesiae XXIII, 2011, p. 563-582.

[41] Aegrotans non dimittimur sed curatur […] id exigit iustitia si soror N plures annos in commodum Instituti lavoravit: id exigit maxime caritas.

[42] Javier Canosa indique la référence Prot 10997/76 CA tandis que JP Montini indique les références Prot 10977/79 CA pour les sentences des 27 octobre 1984 et du 1er juillet 1985 coram Ratzinger. Pour assurer une bonne cohérence avec les causes enregistrées à la même période, nous estimons que la référence la plus probable est Prot 10977/79 CA.

[43] ASS (2015), p. 745.

[44] Carballo (Mgr. José Rodriguez, ofm), « Les vœux religieux aujourd’hui » in Revue de Droit canonique, Strasbourg 2015, tome 65/1, p. 237.

[45] Sugawara (Prof. Yuji), « Separazione imposta ai membri dell’istituto religioso », Periodica 106 (2017), p. 177-189.

[46] Soirée organisée le 4 décembre 2015 à l’université pontificale grégorienne sur le thème « séparation imposée aux membes des instituts religieux »

[47] Cf. Hervada (Javier), Code de droit canonique bilingue et annoté, op. cit. p.886.

[48] Dans le cas Prot. 14997/83 CA, la religieuse n’avait pas renouvelé ses vœux et se considérait comme sortie de l’institut mais sa congrégation en a jugé autrement, si bien qu’il en est résulté un recours de l’ex-religieuse.

[49] Voir aussi c. 740 pour les membres d’une société de vie apostolique

[50] Ou c. 727-728 pour le membre d’une société de vie apostolique

[51] Prot 3671/72 CA ; Prot 7607/76 CA.

[52] Prot 10896/79 CA comme indiqué par F D’Ostilio (Dizionario, op. cit. p. 1245) ou Prot 10896/75 CA plus probablement.

[53] Prot 7084/75 CA

[54] Prot 227/69 CA ; Prot 3356/72 CA ; Prot 10218/78 CA ; 16616/84 CA

[55] Dans le cas Prot 4064/73 CA, le religieux a été réadmis dans son monastère. Dans le cas Prot 6277/75 CA, la Congrégation romaine a admis une exclaustration provisoire de trois ans et la religieuse a retiré son recours.

[56] Ministerium Justitiae, op. cit. p. 255-274.

[57] Ruessmann (Madeleine), Exclaustrations, its nature and use according to the current law, Roma 1995, Editrice Pontifica Universita Gregoriana, 550 p.

[58] Carvajal (Prof. Delfina Moral), « Esclaustrazione imposta di un religioso. Applicazione pratica ». Periodica 106 (2017), p. 190-216.

[59] A titre d’exemple, le code de 1983 a aboli les différences de droit entre religieux et religieuses, qui prévalaient entre 1917 et 1983.

[60] Cf. Hervada (Javier), Code de droit canonique bilingue et annoté, op. cit. p. 621-622.

[61] Huels (John M.), « Unlawful Command by a Major Superior”, Roman Replies (1997), p. 53.

[62] cf. Comm 9 [1977] 53-61). Cf. VC 43.

[63] Prot. 30199/99 CA et Prot. 33358/02 CA

[64] Begus (Christian), Adnotationes in decreta, Apollinaris 2011 (44/2), p. 501, traduit de l’italien par l’auteur.

[65] Le droit considère comme mariage un mariage civil mais pas un autre type d’union comme un PACS en France ou un partenariat enregistré en Belgique.

[66] Prot 150/70 CA, citée par Lobina, ME (1973) 1-4, p. 313

[67]Le 2 janvier 1984, elle a remplacé la Commission pour l’interprétation des décrets du Concile.

[68]AAS 78 (1986), p. 1323.

[69] Prot 8031/76 CA ; 9690/77 CA ; 10218/78 CA ; 14997/83 CA ; 15721/83 CA…

[70] Prot 150/70 CA ; 2089/71 CA ; 2848/72 CA ; 8474/76 CA ; 9242/77 CA ; 12618/80 CA ; 13557/81 CA…

[71] Prot. 9993/78 CA.

[72] Prot 9498/77 CA ; 8984/77 CA

[73] Prot 3671/72 CA ; 10460/78 CA ; 11390/79 CA ; 11391/79 CA ; 15721/83 CA ; coram Sabattani, 23/1/88, n° d’enregistrement non indiqué, Cf. ASS (1988), p. 1405.

[74] Ministerium Justitiae, op. cit. p. 314.

[75] The Jurist, 73 (2013):1, p. 222-227

[76] Ministerium Justitiae, op. cit. p. 255-274.

[77] Exclaustration et sécurité sociale. Régime de pension, Roman Replies (2006), p. 56-57.

[78] Cf. Coulombel, (P.) Le droit privé français devant le fait religieux depuis la séparation des Églises et de l’Etat, Rev. trim. dr. civil 1956, p. 1, n° 3 et 15.

[79] Boinot (Patrick), « Vœux religieux et relations de travail », » in Revue de Droit canonique, Strasbourg 2015, tome 65/1, p. 143-163.

[80] Le recours a été accepté dans la cause Prot 10997/79 CA, contre une décision de retrait d’un office d’enseignant dans une faculté pontificale pour immaturité scientifique présumée. Par décision du 27 octobre 1984, c’est-à-dire cinq ans après le dépôt du recours, le religieux a été réintégré dans son poste d’enseignant.

[81] Le recours Prot 1063/69 CA a été refusé, tandis que le recours Prot. 2207/71 CA a été abandonné par le demandeur.

[82] ASS (2015), p. 745.

[83] Conseil Pontifical pour les textes législatifs, Prot 15389/2016 in Archiv für Latolisches Kirchenrecht n° 184/1 (2015), p. 155-156.

[84] Prot 3672/72 CA ; 27406/96 CA ; 33121/02 CA ; 37162/05 CA

[85] ASS (1987), p. 1292 et 1293.

[86] Prot 324/69 CA cité par D’Ostilio, op. cit. p. 1239.

[87] Roman Replies (2012) 21

[88] Congrégation pour la doctrine de la foi, Doctrinal Assesment of the Leadership Conference of Women Religious, 18/04/2012.

[89] Politi (Marco), François parmi les loups, version française, ed Philippe Rey, Paris 2015, p. 121/284.

La justice pour les clercs

Voici un extrait du livre « La justice administrative de l’Eglise catholique » qui a reçu l’imprimatur le 4 octobre 2011 par S.E. Mgr. Laurent Dabiré, évêque de Dori (Burkina Faso), Docteur en droit canonique, et Président de la commission tribunaux, de la formation et des questions canoniques à la Conférence épiscopale Burkina-Niger.

Chapitre 5 : La justice pour les clercs

 

D’après les chiffres arrêtés au 31 décembre 2012 et publiés dans l’Annuaire des statistiques de l’Église[1], il apparaît que :

  • les évêques sont au nombre de 5 033, dont 3 917 diocésains ;
  • les prêtres sont au nombre de 414 313, avec une légère augmentation par rapport à l’année précédente, provenant majoritairement d’Afrique, d’Amérique du Sud et d’Asie[2]. En Europe, les prêtres sont âgés[3].
  • les diacres permanents sont au nombre de 42 104, avec une augmentation provenant majoritairement d’Europe et d’Amérique du Nord.
  • les séminaristes étaient environ 118 000 en 2009.

Les clercs donnent leur vie à Dieu et à l’Église, en faisant de nombreux sacrifices, dont celui d’une vie de famille du fait du célibat. C’est un grand don que les fidèles accueillent en général avec reconnaissance. Ainsi, de nombreux fidèles catholiques travaillent avec bonheur au sein des structures ecclésiales, et la plupart des situations conflictuelles se résolvent par le dialogue et la prière.

Parfois, cependant, il survient des tensions impliquant des clercs et leurs supérieurs. Pour les éclairer, des canonistes comme R.G. Huysmans[4] ou Rik Torfs[5] ont approfondi les droits et obligations des clercs, en distinguant :

  • les droits des clercs, tels que les droits communs des fidèles (c. 208-221), le droit d’association (c. 278), le droit à une juste rémunération (c. 281), le droit aux vacances (c 283 §2), etc.
  • les attentes légitimes des clercs, telles que la sollicitude de l’évêque, le droit d’être écouté (c. 384), la possibilité d’une excardination (c. 271), l’obtention d’un office correspondant à ses facultés (c .274), le départ à la retraite (c. 538), etc.
  • les attentes légitimes vis-à-vis des clercs, telles que la simplicité de vie et les œuvres de charité (c. 282), une certaine pratique de la vie commune (c. 280), la formation continue (c. 279), etc.
  • les obligations des clercs, telles que le port d’un habit convenable (c. 284) ou l’abstention des comportements interdits (c. 285)

En cas de non-respect de ces droits et obligations formelles ou légitimement attendus, le dialogue est la règle, mais il peut survenir des situations où le dialogue ne suffit pas et où il est fait appel à la justice de l’Église. Nous ne disposons pas d’informations précises sur la manière dont cette justice intervient dans la pratique, mais nous en avons une image grossière à partir de trois travaux complémentaires :

  • pour les recours gracieux, une enquête d’Etienne Rozé sur les conflits survenant dans un diocèse[6];
  • pour les recours hiérarchiques, une enquête de James H. Provost auprès des diocèses américains[7],
  • pour les recours contentieux-administratifs, une enquête de Michael Landau[8] auprès de la Seconde section du Tribunal suprême.

S’agissant des difficultés rencontrées, Etienne Rozé a effectué une enquête en 2014 dans le diocèse catholique de Nancy-Toul, où il a recueilli une cinquantaine de témoignages, dont il présente une typologie que nous résumons ci-après avec nos mots.

  • 60 % des difficultés concernent les relations d’une personne détenant l’autorité avec un groupe. C’est le cas notamment lorsqu’une personne cherche à imposer un fonctionnement différent à un groupe, ou bien lorsqu’une personne voit ses propositions systématiquement rejetées par un groupe et se sent exclue. Les femmes, en particulier, se sentent souvent utilisées, malmenées et non reconnues. Les groupes d’animation se plaignent que leur travail est inutile car, lorsqu’il y a des décisions à prendre, c’est souvent le curé seul qui décide : « Tout le monde s’écrase, c’est lui le curé. »
  • 20 % des difficultés concernent les relations entre deux prêtres ou entre un prêtre et son évêque ou le vicaire épiscopal, sachant qu’il y a parfois non-respect de l’autorité de l’évêque, par exemple lorsque certains prêtres refusent volontairement de se rendre à la réunion de rentrée ;
  • 20 % des difficultés recensées concernent les relations entre des personnes juridiques, sachant que les relations entre structures diocésaines et paroissiales sont rapportées comme non évidentes et parfois difficiles.

Une particularité propre à l’Église est la réunion entre les mains de l’Evêque des pouvoirs de gouvernement, judiciaires et aussi législatifs d’un diocèse, ce qui ne facilite peut-être pas la clarté des choses pour distinguer auquel des niveaux on se situe… « Mais il faut faire avec ! », rapporte Etienne Rozé.

Il arrive que les relations s’enveniment, par exemple à cause d’une « charité guimauve » qui fait que l’on n’ose pas dire à quelqu’un qu’il n’est pas à sa place[9]. Une autre cause évoquée est la mauvaise compréhension des notions d’autorité, d’obéissance et de pouvoir à la fois par ceux qui détiennent l’autorité et par la majorité silencieuse qui a parfois tendance à idolâtrer le prêtre, en confondant le sacrement de l’ordre et le pouvoir de gouvernement. S’agissant des recours gracieux, hiérarchiques et contentieux-administratifs, voici ce que l’on peut retenir des travaux d’Etienne Rozé :

  • le recours au Conseil de médiation s’est avéré positif. En effet, dans beaucoup de conflits évoqués, un des protagonistes est lui-même garant, aux yeux de la hiérarchie, de l’ordre canonique dans son secteur, alors que beaucoup de laïcs n’ont qu’une idée très vague de ces droits. Cela peut éventuellement introduire un déséquilibre dans le dialogue. Le médiateur peut inviter les parties à objectiver les règles invoquées pour éviter tout argument d’autorité et à déceler les fausses interprétations de ces règles, de bonne ou de mauvaise foi ;
  • un appel à une autorité supérieure ne change souvent rien, voire parfois conforte la position du curé. L’intervention hiérarchique […] quand elle est mise en œuvre, ne satisfait guère, car même si la situation est plus claire ensuite, cette intervention ne sauvegarde que rarement la relation ;
  • même si seules quelques-unes des situations rapportées relèvent, en première analyse, d’un recours juridique canonique, à aucun moment cette voie de résolution des conflits n’est évoquée, même pour l’écarter. Cet oubli peut être motivé par l’ignorance, ou bien il peut provenir d’une répugnance à l’égard du recours canonique qui est souvent considéré, non pas comme une solution, mais comme « une déclaration de guerre ».

Toujours à propos de la médiation, deux prêtres d’Afrique de l’Ouest ont signalé l’importance de la fraternité vécue au sein du corps sacerdotal. Ils précisent tout d’abord qu’en Afrique, la famille constitue une valeur particulièrement importante, car il n’y a ni sécurité sociale ni retraite, si bien que le prêtre et famille demeurent fortement liés jusqu’à la mort. En pratique, deux cas extrêmes se présentent :

  • soit la famille est heureuse qu’un de ses membres soit prêtre, et alors elle n’hésite pas à l’aider et/ou à le solliciter à temps et à contretemps ;
  • soit la famille porte des valeurs incompatibles avec la vie chrétienne, et le prêtre doit rompre avec sa famille, au moins provisoirement, pour pourvoir exercer sa vocation.

Dans les deux cas, le prêtre a besoin du soutien de ses confrères, aussi les prêtres d’Afrique de l’ouest se regroupent-ils au sein de confréries diocésaines, nationales[10] et régionales[11], pour retrouver une nouvelle famille. Comme dans une famille traditionnelle africaine, l’union et la concorde doivent être préservées entre les membres, si bien que les confréries se dotent de moyens de médiation lorsque des tensions se produisent. Voici un exemple :

Un prêtre se plaint au délégué diocésain de l’UCB du fait que son évêque lui impose de retourner dans sa maison, au motif qu’il a refusé d’obéir en se présentant avec retard à sa nouvelle affectation. Le délégué de l’UCB rencontre l’évêque et découvre que la situation est plus complexe qu’il n’y paraît, car le prêtre avait quitté le diocèse sans autorisation, en cachant ce fait à l’évêque qui en a été informé par ailleurs. Le délégué peut alors retourner voir le prêtre en l’invitant à obéir à son évêque, lui expliquant que celui-ci a des raisons de se fâcher contre lui.

 

Il arrive aussi que des évêques évoquent officieusement leurs difficultés avec certains prêtres du diocèse devant le délégué de l’UCB. Celui-ci va en général trouver les prêtres en question pour les écouter et leur prodiguer des conseils en ayant entendu les deux points de vue, puis en plaidant si nécessaire leur cause auprès de l’évêque. Ces associations nationales, dont l’Europe pourrait utilement s’inspirer, sont importantes au point qu’elles se dotent parfois d’un secrétaire à plein temps ou qu’elles mandatent officiellement un de leurs membres pour veiller à la communion ecclésiale. Leur présence peut expliquer pour une part, le plus faible nombre de recours venant d’Afrique, sans toutefois qu’elles parviennent à les prévenir tous[12].

S’agissant des recours hiérarchiques, le rapport annuel de la Congrégation pour le clergé de 2014 indique qu’il est intervenu pour des recours hiérarchiques, sans précisions quant à leur nombre, ni sur la part de ses décisions faisant l’objet d’un recours contentieux-administratif[13].  James Provost[14] permet d’y voir plus clair à partir de deux enquêtes effectuées aux Etats-Unis auprès de l’ensemble des diocèses, à propos des recours hiérarchiques effectués au cours des années 1969 à 1984. Il en résulte les résultats suivants :

  • 36 recours hiérarchiques ont été déposés auprès de la Curie romaine dans les 141 des diocèses ayant répondu à l’enquête ;
  • 28 de ces recours concernent les prêtres, dont 14 pour des révocations et transferts de curés, 5 pour des réaffectations de prêtres paroissiaux, 5 pour les retraites des prêtres, et un pour le salaire d’un administrateur paroissial ; 2 pour refus d’incardination, 1 pour refus d’ordination d’un diacre,
  • 8 autres recours concernent des religieux, les paroisses, l’enseignement religieux, le changement de parrains.
  • 3 cas sur les 36 ont donné lieu à un recours contentieux-administratifs

S’agissant des recours contentieux-administratifs de la part des prêtres et des clercs, interrogeons tout d’abord notre base de données qui, au 15 octobre 2016, fait état de 384 recours contentieux-administratifs émanant de clercs dont :

  • deux recours déposés par un diacre permanent[15],
  • 44 recours déposés par des évêques, portant généralement contre des décisions de la Curie, qui ont donné raison à un recours hiérarchique de leur subordonné[16],
  • 338 recours émanant de prêtres contre des décisions de leur évêque qu’ils jugent défavorables et injustes.

Les recours des clercs portent majoritairement contre des décrets de la Congrégation pour le clergé, mais pas tous :

  • 236 portent sur des décisions de la Congrégation pour le clergé,
  • 68 concernent la Congrégation pour les instituts de vie consacrée et des sociétés de vie apostolique[17],
  • 17 concernent la Congrégation pour l’évangélisation des peuples,
  • 13 concernent la Congrégation pour les Églises orientales,
  • 10 concernent la Congrégation pour l’éducation,
  • 4 concernent la Congrégation pour la doctrine de la foi,
  • 28 sont répartis entre les autres dicastères,
  • 8 portent sur un dicastère non identifié.

Outre les regroupements de paroisses et la réduction d’églises à usage profane, les recours portent majoritairement sur les mutations et révocations de curés, auxquelles nous consacrerons la première partie de ce chapitre. Nous aborderons ensuite les recours contre les autres types de décisions administratives, et enfin à propos des cas les plus graves, qui font l’objet de procès pénaux mais qui peuvent aussi faire l’objet de sanctions administratives susceptibles de faire l’objet de recours.

  1. Les révocations et mutations de curés

Dans toute entreprise humaine, publique ou privée disposant de plusieurs implantations territoriales, le contrat de travail des responsables régionaux et locaux prévoit généralement des clauses de révocation et de mutation au gré de la hiérarchie. Dans l’Église, ces procédures sont bien codifiées, et elles semblent d’ailleurs plus protectrices des droits que dans bon nombre d’entreprises publiques et privées. Il n’en demeure pas moins vrai qu’une mutation entraîne des changements à propos desquels il n’est pas toujours facile de concilier le bien commun avec les intérêts particuliers.

S’agissant des révocations et mutations de curés, les canons 1740 à 1752, qui concluent le code de droit canonique de 1983, sont inclus dans le livre VII relatif aux procès, comme si elles devaient être nécessairement litigieuses. Labanderia explique cette particularité en invitant à comprendre le titre latin du livre VII « de processibus » au sens de procédure et non au sens de procès :

Le terme est alors applicable à n’importe quel procédé formel in contradictorio, judiciaire ou administratif, établi par la loi pour protéger certains droits ou intérêts généraux ou particuliers.

En droit particulier, la Conférence des Evêques français, ainsi que celles d’autres pays[18], a décidé que « chaque évêque pourra nommer les curés pour six ans avec possibilité de prorogation[19] », ce qui donne une certaine prévisibilité à tous et permet d’éviter une partie des conflits. Quant à la justice dans ce domaine, nous l’évoquerons à partir des travaux déjà cités de James Provost et Michael Landau, auxquels nous renvoyons les lecteurs polyglottes pour un approfondissement.

1.1. Les révocations de curés

En droit, la procédure de révocation prévue aux canons 1740 à 1747 ne vise pas tant à sanctionner une conduite coupable[20] qu’à permettre à l’Evêque une plus grande efficacité dans l’exercice correct du ministère paroissial au sein de son diocèse. En effet, le c. 1740[21] n’impose pas de faute grave de la part du curé pour sa révocation, mais lorsque celle-ci intervient avant le temps fixé, contre le gré du titulaire, l’autorité qui le décide doit invoquer une cause grave[22], ce qui ne va pas toujours sans difficultés. Les motifs susceptibles de conduire à une révocation[23] ainsi que la procédure à suivre par l’Evêque sont décrits précisément dans le Code. Voici un cas relaté par la presse :

En mai 2013, le curé de Megève s’est vu démettre de ses fonctions à titre « médicinal », au motif qu’il a refusé de quitter sa loge maçonnique. Ayant perdu ipso facto son logement et sa rémunération, il fait appel à sa loge qui constitue un comité de soutien, et plutôt que de faire un recours hiérarchique, il demande audience au pape puis il publie un livre « Être frère, rester père[24] » dont voici un extrait : L’injustice dont j’ai été victime me donne des ailes. […]  L’évêque, avant de me foutre à la porte, m’a suggéré de me retirer dans un monastère pour prier et réfléchir. Prier, je veux bien. Réfléchir, c’est tout réfléchi. Je n’abdiquerai pas ma liberté de conscience. […] J’ai voulu me faire entendre. J’ai frappé aux portes. J’ai écrit des lettres. J’ai donné des interviews. J’ai plaidé ma cause. Rien. Pas un mot. Pas une réaction. J’ai fait valoir qu’un accusé a le droit [de] se défendre. Rien. J’ai donc décidé d’aller à Rome pour demander audience au Saint-Père. […] Je souhaite demander la levée de la sanction qui me frappe. […] Finalement, j’ai rendez-vous à la Congrégation pour la Doctrine de la foi, le lieu crucial. […] Inconciliable, inconciliable. […] C’est fini, on me montre la sortie.

 

En droit, les décrets de révocations de curés doivent notamment être précédés d’une concertation préalable et de la consultation de deux curés[25]. Si l’Evêque maintient la décision de révocation, le décret doit indiquer le droit de recours du curé contre ce décret, en précisant d’ailleurs que celui-ci est suspensif[26]. Dans la pratique plusieurs auteurs signalent la nécessité pour les Evêques de respecter scrupuleusement la procédure, faute de quoi un recours administratif du prêtre a de fortes chances d’aboutir à un gain de cause au niveau de la Congrégation pour le clergé, voire du Tribunal suprême. Ce gain n’est d’ailleurs que provisoire car, en général, l’Evêque reprend alors la procédure et promulgue un nouveau décret identique ou voisin du premier, mais, cette fois-ci, inattaquable sur la forme. Il en résulte surtout une confusion préjudiciable à la communion ecclésiale dans la paroisse d’où le curé est révoqué puis rétabli, puis à nouveau révoqué.

Un point de jurisprudence mérite en outre d’être souligné à propos de la limite d’âge pour un curé. Lorsqu’un évêque impose une règle de départ des curés à la retraite à un âge fixé, par exemple 75 ans, la majeure partie des curés accepte la règle, mais pas nécessairement tous. La limite d’âge n’étant pas un motif évoqué aux canons 1740 et 1741, plusieurs curés révoqués à l’âge fatidique, remportent leur recours hiérarchique contre la décision de leur révocation. De ce fait la Congrégation pour le clergé incite les Évêque à trouver un autre motif de révocation plus conforme au canon 1740, ou à maintenir le curé en place s’il n’y en a pas.

 

Dans plusieurs cas évoqués par James Provost[27], l’Évêque révoque un curé pour limite d’âge. Celui-ci dépose un recours hiérarchique. La Congrégation convainc l’Evêque de revenir sur sa décision. Dans les deux cas, le curé meurt dans les deux ans, et l’on peut d’ailleurs se demander si la tension provoquée par le recours hiérarchique n’y est pas pour quelque chose.

 

En 1994, Dominique Letourneau estime que la justice ecclésiastique en matière de révocation de curés avait encore beaucoup de chemin à accomplir :

Si les voies et moyens juridiques prévus pour protéger les droits fondamentaux sont en bonne partie laissés à la discrétion de l’autorité ecclésiastique, il n’est plus possible de parler de protection réelle. Si par exemple, un conflit surgit à propos de la révocation d’un curé, peut-on considérer que les droits de l’intéressé sont véritablement protégés par la procédure prévue (« l’évêque en débattra avec deux curés choisis dans le groupe prévu à cet effet d’une manière stable par le conseil presbytéral sur proposition de l’évêque »[28]) ? Il est permis d’en douter. […] Les recours manquent et la sensibilité fait défaut chez les juges[29]. De plus, le c. 221 §2 n’est pas rédigé de façon satisfaisante. Le droit fondamental en question est le droit à être entendu en jugement dans un délai raisonnable par un tribunal impartial[30].

Des développements circonstanciés sont présentés par Michael Landau, mais la taille même de son ouvrage (416 pages) et la langue employée (l’allemand), font renoncer à les exposer en détail, en renvoyant les lecteurs intéressés à le lire, ou à poser des questions ponctuelles en ligne à partir de la partie professionnelle du site www.canonistes.org.

1.2. Les mutations

Mutatis mutandis, la procédure de mutation ou de transfert des curés est traitée aux canons 1748[31] à 1752. La jurisprudence a précisé entre autres, les points suivants :

  • conformément au c. 1747 § 3, un contentieux-administratif suspend effectivement la nomination d’un nouveau curé[32],
  • à partir de 1981, le Tribunal Suprême a admis à la discussion[33] différentes causes où des évêques avaient déposé des recours contre des décisions de la Congrégation pour le clergé qui avaient invalidé leurs propres décrets portant notamment sur des mutations de prêtres. Selon Zénon Grocholewski[34], de telles situations seraient inconcevables dans la justice civile mais elles sont possibles dans l’Église ? car les Ordinaires ont un pouvoir propre qui les rend responsables devant Dieu et ne les fait pas dépendre des Congrégations[35].

Observons que la procédure n’évoque pas le transfert des prêtres qui ne sont que vicaires, ni le transfert des évêques. Pour ces derniers, signalons le fait « qu’entre avril 2005 et octobre 2012, Benoît XVI a “accepté” 78 démissions d’évêques, pas loin de un par mois », en application du canon (can. 401 § 2) :

L’Évêque diocésain qui, pour une raison de santé ou pour toute autre cause grave, ne pourrait plus remplir convenablement son office, est instamment prié de présenter la renonciation à cet office[36].

La procédure de révocation des évêques n’est pas précisée, mais elle donne aussi parfois lieu à des litiges que la presse commente abondamment du fait de leur rôle public[37].

Le 13 janvier 1995, un communiqué du Saint-Siège annonce que le Saint-Père Jean-Paul II a relevé du gouvernement pastoral du diocèse d’Evreux (France) son Excellence Mgr. Jacques Gaillot[38], le transférant au siège titulaire de Parténia[39]. Le même jour un second communiqué du Saint-Siège affirme que « le prélat ne s’est pas montré apte à exercer le ministère d’unité qui est le premier devoir d’un évêque[40] ». Le décret de transfert émanant de la Congrégation des évêques n’a pas été rendu public, cependant, d’après Francis Mesner et Jean Werkmeister, il ne s’agit pas d’une renonciation puisque Mgr. Gaillot a été reçu le 12 février 1995 par le préfet de la Congrégation des évêques, et qu’il a refusé de remettre sa démission, après en avoir reçu la demande. Il ne s’agit pas d’une sanction pénale, puisqu’il n’y a pas eu procès, ni de révocation ipso iure. Il ne s’agit pas non plus d’un transfert contre le gré du titulaire puisqu’il s’agit d’un siège et non d’un office. Reste la révocation par décret administratif de la Congrégation, qui est sans doute la décision retenue, probablement motivée par un manquement à la communion ecclésiale. Le décret n’étant sans doute pas approuvé en forme spécifique par le pape, un recours contentieux-administratif aurait été possible, mais il n’a apparemment pas eu lieu.

Quant aux transferts des prêtres-religieux, il comporte des particularités supplémentaires qui sont évoquées au chapitre suivant.

  1. Les sanctions administratives

Outre les mutations et révocations de curés qui font l’objet d’une procédure particulière, il existe d’autres types de sanctions qui relèvent de la procédure normale des recours (c. 1742-1739). Heureusement, de nombreux cas se résolvent par le dialogue, comme on peut le constater dans un cas particulièrement intéressant, rapporté par Rik Torfs[41] :

En 1992, Rik D. curé de Buizingen, dans le diocèse de Malines-Bruxelles, publie un livre intitulé De laaste dictatuur[42], qui rencontre un vif succès en Belgique, alors qu’il critique ouvertement le Saint-Siège et le Pape. Mgr. Daneels, Archevêque en titre, le rencontre à deux reprises, et tous deux s’accordent pour publier un communiqué de presse conjoint, dans lequel l’Archevêque défend le pape, en soulignant quelques erreurs historiques du livre, tandis que le curé défend sa liberté d’expression en tant que fidèle catholique, tout en réitérant sa soumission au Pape et à l’Archevêque pour la conduite de sa paroisse. L’affaire en reste là.

Cette procédure est conforme à celle que le cardinal Ratzinger évoquait en 1985[43], malheureusement, les choses ne se passent pas toujours ainsi.

2.1. Incardination et excardination

Sans entrer dans le détail des publications spécialisées[44], rappelons qu’une fois ordonné, le nouveau clerc est incardiné à une Église particulière ou à un institut qui possède cette faculté, conformément au canon 265 :

Tout clerc doit être incardiné […] de sorte qu’il n’y ait absolument pas de clercs acéphales ou sans rattachement.

Conformément au canon 267[45], cette incardination dite d’origine, peut être modifiée par une incardination dite dérivée, qui nécessite un acte administratif comportant une lettre d’excardination de l’évêque du diocèse d’origine dit a quo et une lettre d’incardination de l’évêque du diocèse d’arrivée dit ad quem. Lorsqu’un des deux évêques ne veut pas signer l’autorisation nécessaire il en résulte souvent des difficultés qu’une jurisprudence du Tribunal suprême[46] à l’origine du canon 268 permet de régler en partie :

Can. 268 — §1. Le clerc légitimement passé de sa propre Église particulière à une autre est incardiné de plein droit dans cette Église particulière, au bout de cinq ans révolus, s’il a manifesté par écrit cette volonté tant à l’Évêque diocésain de l’Église qui l’accueille qu’à son propre Évêque

Des conflits continuent cependant à se produire :

Le père xxx, docteur en théologie, est incardiné dans un diocèse d’Afrique. Il est actuellement en France sans ministère et sans revenu, du fait d’un litige qui l’a opposé à son évêque trois ans auparavant. Il est actuellement prêtre acéphale et cherche à rétablir le dialogue avec le nouvel évêque de son diocèse qui ne répond pas à sa demande d’excardination en France, sans doute en partie à cause du ton de ses demandes[47].

 

Voici un second cas émanant également d’Afrique :

Un prêtre assume pendant longtemps une charge de curé de paroisse ainsi que des responsabilités auprès de la Conférence des évêques dans un pays d’Afrique centrale. La situation se dégrade avec son nouvel évêque qui, d’après lui, mène grand train et ne se préoccupe pas du sort de ses prêtres et séminaristes, dont plusieurs quittent faute de moyens de subsistance. Une mission de la Curie romaine vient inspecter le diocèse, et l’évêque rend le prêtre responsable de ce qu’il considère comme une ingérence. Le prêtre est brimé au point que sa vie est en danger. Il part alors aux études avec l’accord tacite de son archevêque mais sans accord formel de son évêque. Après avoir fêté l’anniversaire de son ordination, en célébrant une messe à Montmartre, il téléphone à ses collègues africains, qui lui apprennent que son évêque a indiqué dans un sermon que lui-même a été suspendu pendant un an. Il n’a jamais reçu la moindre information écrite à ce sujet.

 

Dans les deux cas ci-dessus, les prêtres concernés n’ont pas choisi de faire des recours, mais en dehors d’Afrique, d’autres le font[48], en obtenant parfois gain de cause :

Ayant été incardiné de force dans un autre diocèse, un prêtre a fait recours au Tribunal suprême et a obtenu gain de cause[49].

A l’inverse, certains évêques se montrent compréhensifs et accueillent dans leur diocèse des prêtres non excardinés, préférant « le salut des âmes » à la lettre du droit.

2.2. Refus ou retraits d’autorisations

Comme pour les laïcs, il existe un certain nombre de recours de prêtres qui n’ont pas reçu l’office[50] qu’ils espéraient, ou qui se sont vus retirer celui qu’ils avaient reçu[51]. S’agissant de l’admission aux ordres sacrés, la hiérarchie estime parfois qu’un candidat ne possède pas les qualités requises, notamment dans le cas de comportements sexuels déviants, si bien que des recours sont parfois déposés pour la non-admission à l’exercice des ordres sacrés[52], ou pour un refus d’incardination[53]. Dans la plupart des cas, aucun recours n’est formul, mais un sentiment d’injustice demeure :

Un jeune séminariste s’est vu récemment refuser l’entrée en cycle de théologie par son séminaire, après 2 années de philosophie, 2 années de mission et une année de stage en paroisse. La raison supposée de ce refus tient au fait que ce jeune séminariste, bien intégré dans son diocèse, recueillant beaucoup d’avis positifs, avait adopté le rite de la communion dans la bouche, et à genoux, dans un séminaire réputé fortement opposé[54].

Une fois le prêtre ordonné, il reçoit normalement les autorisations et les offices qui correspondent à ses capacités et aux besoins du diocèse. En cas de problème, ces offices peuvent lui être retirés par un décret administratif singulier. Il peut alors en résulter des tensions donnant lieu à un recours gracieux ou à une médiation, puis, en cas d’échec, à un recours hiérarchique voire un recours contentieux-administratif. De ce fait la Signature apostolique est régulièrement amenée à connaître des recours contre des refus ou retraits d’autorisations de confesser[55], de prêcher[56], d’enseigner[57], de remplir un office[58], de se déplacer, etc.

Parfois ces refus et restrictions à l’exercice du ministère sacerdotal sont basés sur le canon 223 §2[59] qui permet à l’autorité de régler l’exercice des droits propres aux fidèles, en invoquant le bien commun. La jurisprudence du Tribunal suprême impose que ce principe général ne soit pas appliqué de façon arbitraire, mais que son application repose sur d’autres lois canoniques comme le canon 835 §1, confiant au Evêques le soin d’exercer mais aussi de  « modérer » la fonction de sanctification dans leur diocèse[60]. Voici un exemple de jurisprudence[61] :

Au cours d’un procès canonique pénal, un prêtre est assigné à résidence en vertu du canon 1722.  Le prêtre est acquitté mais un décret administratif maintient l’assignation à résidence et l’interdiction de célébrer les sacrements en dehors d’une abbaye, en vertu des canons 223 §2 ; 764 et 974. Le 22 juillet 2013, le prêtre dépose un recours hiérarchique contre ce décret et, le 9 septembre 2013, la Congrégation pour le clergé confirme l’assignation mais demande un salaire décent pour ce prêtre. Celui-ci dépose un recours contentieux-administratif, qui est rejeté par le Secrétaire du Tribunal suprême le 19 février 2014 pour manque évident de fondement.
C. Begus[62] précise que cette décision repose sur les canons 223 §2 et 835.

Voici un autre exemple :

Ayant commis des actes sexuels sur mineurs, un prêtre est envoyé dans une maison médicale à fin d’évaluation et de traitement. Les experts donnent un pronostic optimiste sur son comportement. Malgré cela, l’évêque du lieu le déclare inapte à exercer proprement l’exercice du prêtre, par analogie avec les canons 1041 et 1044 §2. Il en résulte un recours, où le Collège des pères confirme le 4 mai 1996 la légitimité de la décision de l’évêque, sans fermer la porte à une décision ultérieure contraire de sa part[63].

 

Le cas d’un prêtre canoniste montre que le droit canonique offre parfois des moyens de défense importants à ceux qui en maîtrisent les subtilités.

Le 5 juillet 2000, le prêtre catholique, professeur de droit canonique Mgr. R.G. W. Huysmans conclut un « partenariat enregistré[64] », avec une théologienne, Mme le Dr…, sans toutefois cohabiter avec elle ni rompre son vœu de célibat. Puisque cette situation n’est pas prévue par la loi canonique, l’évêque de Rotterdam ne peut pas recourir aux canons 1394 (mariage) ou 1395 (concubinage) pour le suspendre latae sententiae[65], ni procéder par analogie, puisque les canons 221 §3 et 18 prévoient une interprétation stricte du droit. Le 1er juin 2001, il publie un décret interdisant aux prêtres de contracter un « partenariat enregistré » mais la loi ne s’applique pas à lui car elle n’est pas rétroactive. Après une vaine négociation, l’évêque publie un nouveau décret le 1er décembre 2002, ordonnant aux prêtres ayant conclu un « partenariat enregistré » de le dissoudre avant le 1er mai 2003, sous peine de suspension latae sententiae, du fait d’une désobéissance caractérisée des contrevenants à l’évêque. Sa partenaire ne désirant pas de séparation à l’amiable, Mgr. Huysmans demande alors au Tribunal civil de rompre son « partenariat enregistré », au motif d’obéissance à son évêque, mais le tribunal refuse ce motif[66]. Réalisant que les conditions ne sont peut-être pas réunies pour une suspension latae sententiae, l’évêque introduit un procès pénal[67], qui aboutit au fait que les conditions d’imputabilité et de faute prévues par le c. 1321 §1 ne sont pas réunies si bien que le « partenariat enregistré » de Mgr. H. avec Mme N. reste en vigueur.

Dans le cas présent, on constate que l’évêque n’a pas promulgué de décret particulier, susceptible de recours contentieux-administratif, mais deux décrets généraux non susceptibles de recours.

2.3. Les pertes de l’état clérical

Le canon 290 précise dans quelles conditions un clerc, prêtre ou diacre peut perdre l’état clérical[68]. Nous nous attacherons aux cas où cette perte provient d’une décision administrative résultant des n° 1° ou 3° de ce canon, ou lorsque, l’ayant perdu, il l’a recouvré conformément au canon 293[69]. Pour en mesurer l’importance, voici quelques statistiques des dicastères compétents[70] :

  • en 2015, la Congrégation pour le clergé a enregistré 771 demandes de dispenses des obligations découlant de l’ordination sacerdotale, réparties comme suit :
Diocésains Religieux Total
Prêtres 400 (52 %) 264 (34 %) 664 (86 %)
Diacres 76 (10 %) 31 (4 %) 107 (14 %)
Total 476 (62 %) 295 (38 %) 771 (100 %)
  • en 2010, la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements, compétente au titre du canon 290 n°1[71], précise également la procédure qu’elle applique[72]. Elle fait état d’un total de 115 dispenses des obligations sacerdotales, dont 54 pour des prêtres âgés de plus de 40 ans, 25 pour des prêtres de moins de 40 ans et 2 pour des prêtres en péril de mort. Elle accorde également 34 dispenses pour des candidats aux ordres sacrés.
  • La Congrégation pour l’évangélisation des peuples dispose de compétences « dans les territoires placés sous sa surveillance[73], avec des facultés particulières pour les prêtres[74]
  • La Congrégation pour la doctrine de la foi, compétente dans les cas les plus graves, et notamment les cas de pédophilie, intervient également dans des conditions que nous évoquerons plus loin.

 

En matière de jurisprudence, le RP Mendonça[75], évoque quatre recours hiérarchiques dans lesquels la Congrégation pour le Clergé donne raison aux requérants contre des décisions administratives de perte de l’état clérical.

Le frère X, dépose un recours contre un acte administratif du 7 août 1998 par lequel son ordinaire lui retire l’état clérical, par décision administrative sans avoir respecté la procédure prévue aux canons 1720 à 1722. La Congrégation pour le clergé lui donne raison et impose à l’ordinaire de lui rendre immédiatement son ministère sacerdotal et de lui verser la rémunération qu’il aurait perçue s’il était resté en poste.

De même, Javier Canosa[76] évoque la sentence du 31 octobre 1992 (Prot. 22571/91 CA), dans laquelle le Tribunal su^pême invalide la décision administrative d’un évêque confirmée par la Congrégation pour le clergé, consistant à interdire à un prêtre l’exercice public du sacerdoce ministériel, en l’absence de procès pénal, tout en imposant un retour à la sitution antérieure.

Mendonça observe que la Congrégation pour le clergé examine les recours hiérarchiques sous l’angle canonique et non pastoral, si bien que de nombreuses décisions donnent raison aux requérants, pour faute de procédure. De ce fait, la Congrégation cherche à en éviter la multiplication, recommandant désormais aux évêques d’appliquer par analogie la procédure d’enquête préalable prévue en matière pénale au canon 1717, même si formellement, le Code ne l’impose pas pour des décisions administratives :

Can. 1717 — §1. Chaque fois que l’Ordinaire a connaissance, au moins vraisemblable, d’un délit, il fera par lui-même ou par une personne idoine, une enquête prudente portant sur les faits, les circonstances et l’imputabilité du délit, à moins que cette enquête ne paraisse totalement superflue.

 

Compte tenu de la pluralité des Congrégation concernées, il arrive que le Tribunal suprême soit sollicité pour préciser laquelle est compétente.

Dans la sentence Prot. 32108/01 CA du 18 mars 2006[77], la Signature apostolique juge que la Congrégation pour le clergé est incompétente pour décider si un Ordinaire a ou non le droit de retirer à un prêtre le droit de prêcher (c. 764) ou de confesser (c. 974). En cas de recours, le dicastère compétent est la Congrégation pour la doctrine de la foi, dès lors que le prêtre est impliqué dans un délit grave.

 

2.4. Les actes les plus graves

Ces dernières années, l’actualité est défrayée par des cas de pédophilie impliquant des prêtres.  La Conférence des évêques de France (CEF) a mis en place une cellule permanente de lutte contre la pédophilie dotée d’un site internet destiné aux victimes[78]. En 2017, la CEF publie des statistiques évoquant un nombre total de 222 victimes, sachant que plus de 60 % des témoignages concernent des faits survenus avant 1970, 35 % des faits survenus entre 1970 et 2000 et 4 % des agressions commises depuis les années 2000. Si l’on en croit ces chiffres, une amélioration salutaire s’est produite dans l’Eglise de France, et l’on peut se demander si le droit et la justice ecclésiastique y sont pour quelque-chose. Au début de la période étudiée, la loi en vigueur résulte du Code de 1917 et de l’instruction du Saint Office « Crimen sollicitationis » de 1922. En 1983, le canon 194 précise qui peut être révoqué de plein droit de tout office ecclésiastique. Le 25 juin 1988, l’article 52 de Pastor bonus confirme la compétence de la Congrégation pour la doctrine de la foi pour les délits contre la foi ou dans la célébration des Sacrements, et elle lui donne aussi des compétences pour les « délits les plus graves » :

Art. 52— Elle juge les délits contre la foi et les délits les plus graves, commis soit contre les mœurs soit dans la célébration des sacrements, qui lui sont signalés et, en l’occurrence, elle déclare ou inflige les sanctions canoniques selon les normes du droit commun ou du droit propre.

Tadig Fulup fournit une estimation de leur nombre dans le monde :

Entre 1975 et 1985, aucun cas de pédophilie ne fut signalé à Rome […] de 2001 à 2010, sur les 3000 accusations de prêtres ou de religieux pour des crimes commis ces cinquante dernières années, 60 % concernent une attraction pour des adolescents de même sexe (ébétophilie), 30 % d’attirance hétérosexuelle, 10 % concernent des garçons impubères, pédophiles au sens strict, c’est-à-dire 300 sur 400 000 prêtres diocésains et religieux dans le monde, soit 0,075 %.[79]

Pour les crimes de pédophilie et pour les autres délits les plus graves, l’article 52 de Pastor Bonus et l’article 8 des normes substantielles[80]  instituent la Congrégation pour la Doctrine de la foi comme tribunal suprême pour les délits les plus graves :

  • 1. La Congrégation pour la Doctrine de la Foi est le Tribunal Apostolique Suprême pour l’Église latine ainsi que pour les Églises orientales catholiques en matière de jugement des délits définis dans les articles précédents.

La Congrégation se comporte aussi comme un dicastère car l’article 21 des normes substantielles précitées prévoit deux procédures administratives, l’une par décret extraordinaire (art 21 §2 1°) et l’autre par soumission au Saint-Père (art 21 §2 2°) :

  • 1. Les délits graves réservés à la Congrégation pour la Doctrine de la Foi doivent être poursuivis par procès judiciaire.
  • 2. Toutefois, la Congrégation pour la Doctrine de la Foi peut légitimement :

1° dans des cas particuliers, décider d’office ou sur instance de l’Ordinaire ou de l’Hiérarque de procéder par le décret extrajudiciaire dont il s’agit au can. 1720 du Code de droit canonique et au can. 1486 du Code des Canons des Églises orientales, en tenant compte, toutefois, que les peines expiatoires perpétuelles ne sont infligées que par mandat de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi ;

2° déférer directement les cas les plus graves à la décision du Souverain Pontife, pour le renvoi de l’état clérical ou la déposition avec dispense de la loi du célibat, quand le délit est manifestement constaté et après avoir accordé au coupable la possibilité de se défendre[81].

Contrairement à ses décisions judiciaires, les décisions de la Congrégation prises en vertu de l’article 21 §2 1° sont susceptibles de recours contentieux-administratif, ce qui est nécessaire pour protéger les des personnes incriminées. Le 2 décembre 2010, Mgr. Arrieta, attire l’attention du Préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi sur les risques de débordement des procédures administratives au détriment du droit de défense des personnes incriminées ou simplement suspectes :

S’efforcer de simplifier davantage la procédure judiciaire pour infliger ou déclarer des sanctions aussi graves que la démission de l’état clérical, ou encore, modifier la norme actuelle du can. 1342 § 2, qui interdit dans ces cas de procéder par décret administratif extrajudiciaire (cf. can. 1720), ne semble pas du tout souhaitable. En effet, d’une part, le droit fondamental de défense serait alors mis en danger – dans des causes qui concernent l’état de la personne –, tandis que, d’autre part, serait favorisée ainsi la tendance néfaste – liée sans doute à une faible connaissance ou estime du droit – à un soi-disant gouvernement « pastoral » équivoque, qui au fond n’a rien de pastoral, car il conduit à négliger le nécessaire exercice de l’autorité au détriment du bien commun des fidèles.[82].

Il convient en priorité de protéger les victimes potentielles de récidives de la part de prêtres pédophiles. Il importe accessoirement de protéger les finances des diocèses, qui peuvent être appelées en dommages et intérêts[83] . Dans cette double perspective, de nombreux évêques demandent que les prêtres qui ont purgé des peines de prison pour des crimes de pédophilie ne puissent plus être admis à l’exercice du ministère sacerdotal, même s’ils n’ont pas fait de demande de dispense. En conséquence, la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements assouplit la procédure de dispense en pareil cas[84].

 

De plus, la Congrégation pour la doctrine de la foi, intervient dans divers recours touchant à la situation financière ou à la reprise du ministère sacerdotal par des prêtres anciennement condamnés.

Ainsi, en 2003, la CDF autorise un évêque à permettre un tel retour « sous réserve que cela ne constitue un risque pour les mineurs et que cela ne crée pas un scandale parmi les fidèles » [85].

 

Sous prétexte avoué de protéger les victimes, et accessoirement de protéger les finances de l’Eglise, il est des situations où le droit de défense des prêtres accusés est malmené :

Il y a des cas de prêtres qui, selon leurs dires, sont démis de l’état clérical contre leur volonté, sans avoir eu l’occasion de donner leur avis et sans même savoir qu’une procédure avait été entamée contre eux[86].

De telles situations ne sont pas limitées à l’Amérique.

Bien qu’il ait plaidé non coupable dans un procès civil, un prêtre est condamné pour pédophilie en 2005 par la justice française, et il purge la peine prévue par la loi civile. A sa sortie de prison, l’évêque adresse à la Congrégation pour la doctrine de la foi un avis favorable pour la poursuite de son ministère, ce qu’il fait dans un autre diocèse, non sans un accompagnement ecclésiastique mis en place par prudence. Tout se passe bien jusqu’en novembre 2009, où l’évêque lui transmet un courrier de la Congrégation pour la doctrine de la foi[87], l’interrogeant sur son désir éventuel d’abandonner le sacerdoce. Le 8 décembre 2009, il répond qu’à son avis, aucun argument canonique ne justifie son renvoi de l’état clérical. Le 18 décembre, il écrit au pape pour lui demander de vivre jusqu’au bout, dans un esprit de réparation, le bonheur d’être prêtre. Quelque temps après, l’évêque lui signifie la décision prise quelques semaines plus tôt par le pape Benoît XVI de le renvoyer de l’état ecclésiastique et de le libérer de toutes les obligations qui lui sont liées, dont le célibat[88]. Il dépose alors un recours au préfet du Tribunal suprême de la Signature Apostolique, protestant de n’avoir pas été entendu, ni su ce qui lui était reproché, ni avoir eu la possibilité de se défendre, et il reçoit une courte réponse du préfet fondée sur le canon 1404 [89] : « Ceci ne nous concerne pas ! ». Le lendemain, il quitte le diocèse[90] et, longtemps après, il se marie, alors que ce n’était pas son choix.

 

Ce type de cas n’est pas isolé, et il est même fréquent d’après les propos de l’évêque de Nice rapportés par Tadig[91] Fulup :

Chaque vendredi matin, la CDF faisait signer au Pape une série de décrets de reconduite à l’état laïc[92].

Pourtant diverses publications laissent penser que cette manière d’opérer n’est pas satisfaisante :

  • en 1983, le canon 1342 §2 précise qu’il n’est pas permis de prononcer une peine perpétuelle sans un procès pénal ;
  • en 1988, Rev. Bertram F. Griffin, J.C.D. soulève une difficulté d’appliquer le c. 1395 aux prêtres pédophiles du fait de la clause d’imputabilité nécessitant l’intervention d’experts, mais il conclut sur la possibilité de le faire si un procès civil s’est prononcé ;
  • en 1991, Thomas J. Green, JCD estime que les canons sur la démission imposée de l’état clérical visent à défendre le peuple de Dieu contre des attitudes offensantes de certains prêtres tandis que Gregory Ingels, J.C.D. insiste sur le fait que cette démission ne peut pas être imposée par un décret administratif mais : 1° par une dispense accordée par le Saint-Père sur demande du prêtre concerné, 2° par une peine expiatoire prononcée en vertu du c. 1336 §1 5°, et 3° par la reconnaissance de la nullité de l’ordination en vertu des canons 1708-1712

En conclusion, on peut se demander si l’on n’est pas en train d’évoluer d’une période de laisser-aller et de secret à une période de précaution, où l’on punit sans nécessairement s’assurer que les droits de la défense des prêtres ont été respectés. Heureusement, il existe des cas où le recours contentieux-administratif, associé à d’autres procédures, permet de rétablir les droits d’un prêtre injustement condamné.

Un prêtre du diocèse de Calgary a déposé deux recours devant le tribunal suprême, dont un recours contentieux-administratif classique et un recours contre une décision pénale de la Rote. Voici quelques points de repère sur cette épopée juridique :

  • le 2 mai 1889, le tribunal pénal séculier de Calgary condamne un prêtre à une peine de prison pour sévices présumés contre une jeune fille. Il est condamné en première instance et il fait appel de la décision.
  • Peu après, le nouvel archevêque de Calgary prive le prêtre des ministères de prédication, ainsi que de la célébration publique de la messe, et lui ordonne de s’éloigner du diocèse et de cesser tout contact avec un groupe de personnes. Le prêtre incriminé introduit un recours gracieux puis hiérarchique contre cet acte administratif particulier.
  • Le 8 novembre 1989, la Congrégation pour le clergé rejette le recours, du fait que l’archevêque lui a fait connaître son intention d’engager un procès pénal. Le prêtre présente un recours contentieux-administratif auprès du Tribunal suprême.
  • Le 30 janvier 1991, le Tribunal séculier d’appel acquitte le prêtre « pour inexistence de faits ».
  • Le 27 avril 1990, l’archevêque initie le procès pénal annoncé pour différentes fautes, dont un pêché contre le sixième commandement et une désobéissance à l’évêque.
  • Le 30 janvier 1991, le juge canonique pénal considère que la preuve n’est pas rapportée de l’existence des délits dont est accusé le père A. Le promoteur de la justice fait recours à la Rote contre cette sentence.
  • Le 14 novembre 1992, le Congrès du Tribunal suprême déclare la nullité de l’acte de la Congrégation pour le clergé du 8 novembre 1989, estimant qu’elle a violé la loi en prétendant qu’elle n’était pas compétente pour traiter du recours hiérarchique, du fait du procès pénal en projet,
  • Le 29 mars 1994, la Rote estime, sans complément d’instruction, que le jugement pénal du 30 janvier 1991 doit être en partie réformé, mais que sont maintenues les sanctions d’interdiction de demeurer sur le territoire du diocèse, d’enseigner, de prêcher et de célébrer publiquement la messe. Le prêtre dépose alors un recours contre cette décision.
  • Le 21 février 1996, le Collège confirme la décision du Congrès du tribunal suprême, considérant que la Rote est bien compétente et que le droit de défense a bien été respecté.
  • L’appel est ensuite poursuivi à la Rote devant un tour coram Burke puis coram Pinto, qui, le 21 février 1997 concorde le doute sous la formule suivante : « la sentence rotale du 29 mars 1994 doit-elle être confirmée ou informée ?» Une commission rogatoire est alors constituée par Mgr. Caberletti.
  • Finalement, la Rote déclare : « la preuve n’est pas rapportée de l’existence des délits dont était accusé le Père A. En conséquence, celui-ci est totalement absous. L’Archevêque de Cagliari est prié en conséquence d’employer les moyens appropriés pour rendre au Père A. ses anciennes fonctions et sa bonne réputation. »

 

2.5. Les autres litiges concernant des clercs

Il existe de nombreux autres cas de litiges administratifs concernant les prêtres. Un cas fréquent concerne les droits à la retraite des prêtres ayant quitté leur ministère sacerdotal volontairement ou non. En France, l’association pour une retraite convenable (APRC)[93], militant depuis 1979 pour que les assurés du régime des cultes bénéficient d’une protection sociale digne de ce nom, considère en 2017 qu’il y a encore un long chemin à parcourir.

Un autre type de cas à signaler est celui où les prêtres constatent une violation du droit par leur supérieur. En effet, du fait de leur position, les prêtres sont souvent les premiers à être informés des scandales internes à l’Église. Il importe alors que la justice les protège pour qu’ils choisissent de ne pas se taire, par peur d’entrer en conflit avec le supérieur dont ils dépendent, mais qu’ils osent dénoncer l’injustice dans un cadre approprié, pour que le scandale ne fasse pas fuir des fidèles, et que l’image de l’Église ne soit pas ternie par des affaires portées sur la place publique ou devant la justice séculière.

Parfois cependant, Dieu permet des procès publics comme ce fut le cas de saint Paul à Jérusalem et à Rome (Actes 23, 21),  et plus récemment de Don Lorenzo Milani (1923-1967) :

Don Lorenzo Milani, fondateur de l’École de Barbiana, près de Florence, y expérimente une méthode d’éducation pour les plus pauvres, basée sur l’amour des jeunes et l’objection de conscience face au système d’exploitation des pauvres par les riches. Ses détracteurs l’accusent de dérive communiste, de pédophilie et d’apologie de la violence. Il meurt le 26 juin 1967, entre le jugement de première instance d’un tribunal séculier qui l’acquitte, et la sentence d’appel qui prononce la fin du litige par mort de l’accusé. Le 20 juin 2017, le pape François se rend sur sa tombe, en reconnaissant ainsi son innocence, et en vantant son amour de l’Eglise, « avec la franchise et la vérité qui peuvent aussi créer des tensions, mais jamais des fractures, ni des abandons ».

 

 

[1] www.eglise.catholique.fr/vatican/statistiques-de-leglise-dans-le-monde/ consulté le 15 octobre 2016.

[2] En France en 2015, on compte environ 10 000 prêtres de moins de 75 ans dont près de 2000 venant de l’étranger.

[3] En 2017, le diocèse d’Autun compte 9 prêtres de moins de 40 ans, 47 entre 40 et 59 ans, 18 entre 60 et 69 ans, 66 entre 70 et 89 ans et 12 plus de 90 ans.

[4] Huysmans (R.G.W.) « De positie van de clerus in de nieuwe Codex » in R. Torfs (ed) ; Het nieuwe kerkelijk recht. Analyse van de Codex Iuris Canonici 1983, Louvain, Peeters, 1985, 206-208.

[5] Torfs (Rik), Rights and legitimate expectations of clercics, Cours donné à la faculté de droit canonique de Louvain et de Strasbourg, 2014.

[6] Rozé (Etienne) Structures diocésaines, paroisses et médiations – réflexions à partir de la situation du diocèse catholique de Nancy et Toul, mémoire de diplôme universitaire de médiateur, Institut Catholique de Paris, IFOMENE, promotion 2014-2015.

[7] Provost (James H.), “Recent experiences of administrative recourse to the Apostolic See”, in The Jurist, 46 (1986), p. 142-163.

[8] Landau (Michael), Amtsenthebung und Verzetzung von Pfarrern. Eine Untersuchung des geltenden Rechts unter besonderer Berücksichtigung des Rechtsprechung der Zweiten Sektion des Höchsten Gerichts der Apostolischen Signatur, Frankfurt, Peter Lang, 1999, 416 p.

[9] Gandhi lui-même disait que, s’il fallait absolument faire un choix entre la violence et la lâcheté, il conseillerait la violence.

[10] Ex ; l’Union du Clergé Béninois (UCB) ou l’Union fraternelle du clergé ivoirien (UFRACI).

[11] Ex : l’Union régionale des Prêtres d’Afrique de l’Ouest – URPAO

[12] Nous avons entendu parler d’un prêtre béninois, qui aurait poursuivi ses études en Europe sans l’accord de son évêque. Après les monitions canoniques prévues, l’évêque l’aurait suspendu et le prêtre aurait fait un recours hiérarchique contre cette décision et aurait écrit un livre, que nous n’avons pas retrouvé, pour partager son témoignage.

[13] La Congrégation précise en outre qu’elle a effectué un travail de vigilance sur la bonne administration des biens ecclésiastiques et instruit quelques demandes de réhabilitation au ministère de prêtre et diacre permanent,, ainsi que 708 demandes de dispenses des obligations résultant de l’ordination sacerdotale, dont 304 provenant de prêtres et 69 provenant de diacres diocésains, soit environ 60 %, et 208 provenant de prêtres et 27 provenant de diacres membres d’instituts de vie consacrée et de sociétés de vie apostolique, soit environ 40 %.

[14] Provost (James H.), “Recent experiences of administrative recourse to the Apostolic See”, in The Jurist, 46 (1986), p. 142-163.

[15] Parmi les 710 causes recensées au 15 septembre 2016, dont le demandeur est identifié une seule émane d’un diacre, à savoir la cause Prot. 48485/14 CA, signalée dans le rapport d’activité du saint siège pour l’année 2014. Nous savons seulement qu’elle a été examinée par le Congrès le 29 octobre 2014 et qu’elle a fait suite à une question préalable référencée 48421/13 VAR et que son objet concernait « Praecepti regrediendi in diocesim »

[16] Parmi les 714 causes recensées au 15 octobre 2016, dont le demandeur est identifié, 43 émanent d’un évêque. Elles portent sur des sujets très variés de réduction d’églises à usage profane, d’exercice du ministère sacerdotal, de questions de propriété, de révocation d’un office, de mutations de curés et de supérieurs généraux etc.

[17] Nous traiterons ce type de cas à propos des recours pour des religieux

[18] Australie, Canada, Gambie, Libéria, Sierra Leone, Irlande, Philippines, USA pour six ans ou l’Inde et le Nigéria pour une période déterminée laissée à la libre appréciation des Evêques. D’après Thomas Paprocki in New commentary on the Code of Canon Law, Beal, Coriden, Green, CSLA, p. 1845/ 1852.

[19] Décret général du 13 juin 1984, in Bulletin officiel de la Conférence épiscopale, 29, 1984, p. 444.

[20] La révocation et le transfert peuvent être accompagnés de censures et de peines expiatoires (c.1331-1338). De plus, la révocation se produit de plein droit par les causes énumérées au c.194.

[21] Can. 1740 — Quand pour une raison quelconque et même sans faute grave de l’intéressé, le ministère d’un curé devient nuisible ou au moins inefficace, ce curé peut être révoqué de sa paroisse par l’Évêque diocésain.

[22] Can. 193 — § 1. On ne peut être révoqué d’un office conféré pour un temps indéterminé, à moins que ce ne soit pour des causes graves et en respectant la manière de procéder définie par le droit. § 2. Cela vaut aussi pour la révocation de quelqu’un avant le temps fixé d’un office conféré pour un temps déterminé, restant sauves les dispositions du c. 624, § 3.

[23] Can. 1741 — Les motifs pour lesquels un curé peut être révoqué légitimement de sa paroisse sont principalement les suivants :

1° une manière d’agir qui cause un grave détriment ou un trouble grave dans la communion ecclésiale ;

2° l’incompétence ou une infirmité permanente de l’esprit ou du corps qui font que le curé n’est plus en état de s’acquitter efficacement de ses fonctions ;

3° la perte de la bonne estime chez les paroissiens probes et sérieux ou l’aversion envers le curé, dont on prévoit qu’elle ne cessera pas rapidement ;

4° une grave négligence ou la violation de ses devoirs de curé persistant après une monition ;

5° une mauvaise administration des biens temporels entraînant un grave dommage pour l’Église, chaque fois qu’aucun autre remède ne peut être apporté à ce mal.

[24] Vésin (Pascal) Être frère, rester père. Prêtre ou franc-maçon : pourquoi choisir ? Paris 2014, presses de la renaissance.

[25] Il s’agit d’une consultation à laquelle le curé impliqué n’est pas nécessairement invité. Il ne s’agit donc pas d’une médiation.

[26] C. 1747 §3 : Tant que le décret de révocation est pendant, l’Évêque ne peut pas nommer un nouveau curé, mais il pourvoiera entre-temps à la charge par un administrateur paroissial.

[27] Provost (James H.), “Recent experiences of administrative recourse to the Apostolic See”, in The Jurist, 46 (1986), p. 142-163.

[28] C. 1742 §1.

[29] Hervada (Javier), Pensamientos de un canonista en la hora presente, Navarra Gráfica Ediciones, Pamplona, 2004. p. 129.

[30] Letourneau (Mgr. Dominique c.s.), « Quelle protection pour les droits fondamentaux et les devoirs des fidèles dans l’Église ? », Studia canonica, 28 (1994), p. 59-83.

[31] Can. 1748 — Si le bien des âmes, les nécessités ou l’utilité pour l’Église réclament qu’un curé soit transféré de sa paroisse qu’il dirige avec fruit à une autre paroisse ou à un autre office, l’Évêque lui proposera par écrit ce transfert et l’invitera à l’accepter pour l’amour de Dieu et des âmes.

[32] Recursadversus amotionem a paroecia effectum habet suspensivum quoad nominationem novi parochi in declaratio Prot 193 periodica 60 (1971) n° 2, p. 348. Voir aussi Prot 193/70 ; Prot 3211/72.

[33] ASS (1981) p. 1139.

[34] Grocholewski (Zenon), « L’autorità amministrativa come ricorrente alla ectionaltera della Segnatura Apostolica », Appolinaris 55 [1982) 752-779.

[35] Lumen Gentium 21.

[36]  Bourdin (Anita), Rome, 1 août 2013 (Zenit.org)

[37] Hiebel (Jean-Luc), « L’affaire Gaillot, les médias et le droit » in RDC 45, 1995, p. 101-118.

[38] Revue de droit canonique (RDC), tome 45/1, Strasbourg 1995, p 74-162.

[39] Ancien diocèse d’Algérie, disparu sous les sables à la fin du Ve siècle.

[40] Mesner (Francis) et Werkmeister (Jean) « les aspects canoniques de l’affaire Gaillot, in RDC 45, 1995, p. 75-82.

[41] Torfs (Rik), « L’affaire Gaillot et la liberté d’expression » in RDC 45, 1995, p. 83-94.

[42] Devillé (Rik), De laaste dictatuur. Pleidooi voor een parochie zonder paus, Louvain, Kritak, 1992, 224 p; « La dernière dictature. Plaidoyer pour des paroisses sans pape », Anvers, Coda, 1992, 221 p.

[43] Cf. Chapitre 8 : recours relatifs à la Congrégation pour la doctrine de la foi.

[44] Reyes Vizcaino (Pedro Maria) « la excardinacion e incardinacion del clérigo » Ius canonicum, en ligne cosultée le 15 décembre 2016. Ciongo Kasangana (Augustin), « L’incardination des clercs, histoire et canonicité » mémoire de master soutenur à l’Insttut catholique de Paris le 8 septembre 2016.

[45] Can. 267 — § 1. Pour qu’un clerc déjà incardiné soit validement incardiné dans une autre Église particulière, il doit obtenir de l’Évêque diocésain une lettre d’excardination signée de cet Évêque ; et de même, il doit obtenir de l’Évêque diocésain de l’Église particulière dans laquelle il désire être incardiné une lettre d’incardination signée de cet Évêque.

[46] Prot 9375/77 CA, comunicationes 10 (1978) 152-158.

[47] Demande de médiation proposée à « Canonistes sans frontières » le 26 juillet 2016

[48] Prot. 9375/77 CA ; Prot. 22865/91 CA ; cause citée dans ASS (1991) p. 1303 ; Prot. 27338/96 CA ;

Prot. 41703/08 CA ; Prot. 47893/14 CA ; Prot. 48640/13 CA).

[49] Prot. 9375/77 CA Labandeira (Edouardo), IC 21/41 (1981) 393-417 ; Communicationes 10 (1978) 152-158

[50] Can. 145 — § 1. Un office ecclésiastique est toute charge constituée de façon stable par disposition divine ou ecclésiastique pour être exercée en vue d’une fin spirituelle.

[51] La perte d’un office peut notamment provenir de la fin du temps prévu lors de la nomination à cet office, de la limite d’âge du titulaire, de sa libre renonciation, du transfert à un autre office (c. 190-191) ou par révocation (c. 192-195).

[52] Prot. 34180/02 CA contre un refus d’admission aux ordres sacrés

[53] Prot 9375/77 CA.

[54] Riposte catholique, 29 août 2017.

[55] Prot. 1063/69 CA cite par D’Ostilio (Frederico), Dizionario degli Instituti di perfezione, V8, p 1247) ; Prot 2207/71 CA ou 36823/05 CA

[56] Prot 38098/06 CA

[57] Prot 10977/79 CA ou 15573/83 CA.

[58] Prot. 185/70 CA, concernant un office de doyen in ME (1973) 1-4, p. 303 ; Prot 6023/74 CA

[59] Can. 223 — §  2. En considération du bien commun, il revient à l’autorité ecclésiastique de régler l’exercice des droits propres aux fidèles. Ce canon fait l’objet d’une abondante jurisprudence.

[60] Conseil Pontifical pour les textes législatifs, « Note explicative. Eclaircissements pour l’application du canon 223 §2 », 8 décembre 2010, Communicationes, 42 [2010], 280-281.

[61] Prot. 48563/13 CA, in Monitor eccelsiasticus, CXXXI (2016), p 21-26

[62] Begus (Cristian), « Commento / Note – Decretum, 48563/2013 CA. Monitor ecclesiasticus, CXXXI (2016), p. 27-36.

[63] Prot 23737/92 CA, et note de Mgr Joseph Punderson, Ministerium iustitiae, op. cit. p. 383-387.

[64] Sorte de pacte civil de solidarité (Pacs) hollandais, utilisé par exemple entre personnes du même sexe ou entre frère et sœur exploitant conjointement une ferme.

[65] La situation est différente de celle de Mgr Vernette, en France, qui n’a pas conclu de PACS mais un mariage civil, célébré à Toulouse le 24 juillet 2002 avec Mme Liliane Josette Moncelon.

[66] La loi hollandaise prévoit deux cas de dissolution, à savoir le consentement mutuel, que la femme refusait en l’occurrence, et la rupture irrémédiable de la relation (irretrievable breakdown of the relationship) que Mgr. Huysmans refuse de plaider, car il estime que ce n’est pas le cas et qu’il n’a pas le droit de mentir.

[67] Torfs (Rik), “Rights and legitimate expectations of clercs”, Cours donné à la Faculteir kerkelijk recht de Leuven et en master de droit canonique à l’Institut de droit canonique de l’Université de Strasbourg en 2014.

[68] C. 290 : L’ordination sacrée, une fois validement reçue, n’est jamais annulée. « Un clerc perd cependant l’état clérical 1° par sentence judiciaire ou décret administratif qui déclare l’invalidité de l’ordination sacrée ; 2° Par la peine de renvoi légitimement infligée ; 3° par rescrit du Siège Apostolique ; mais ce rescrit n’est concédé par le Siège Apostolique aux diacres que pour des raisons graves et aux prêtres pour des raisons très graves. »

[69] C. 293 : Le clerc qui a perdu l’état clérical ne peut de nouveau être inscrit parmi les clercs, si ce n’est par rescrit du siège apostolique.

[70] Attivita della santa sede 2015, Libreria editrice vaticana, p. 725.

[71] C. 290, 1°, De regulis servandis ad nullitatem ordinationis declarandam, 16 octobre 2001, in Notitiae, 2002, vol. XXXVIII, pp. 15-26 ; AAS [XCIV, 2002, Vol. 1, pp. 292-300.

[72] Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements : « Lettre circulaire aux ordinaires diocésains et aux supérieurs généraux des instituts de vie consacrée et des sociétés de vie apostolique » in La documentation catholique, 94, 1997, p. 824-825.

[73] Cf Pastor Bonus, art 85-92.

[74] Lors de son Assemblée plénière de février 1997, la Congrégation pour l’Evangélisation des peuples a demandé au Saint-Père des facultés spéciales pour lui permettre d’intervenir, par voie administrative, dans des situations pénales précises, et ce, en marge des dispositions générales du Code. Ces « facultés » ont été mises à jour et élargies en 2008, et d’autres, de nature analogue, ont été concédées par la suite à la Congrégation pour le clergé. www.vatican.va/resources/resources_arrieta-20101202_fr.html

[75] Mendonça (R.P. Augustine), The Bishop as the Mirror of Justice and Equity in his Particular Church: Some Practical reflexions on Episcopal Ministry, intervention presentée à Halifax au colloque annuel (21-24 octobre 2002) de la Canadian Canon Law Society.

[76] Canosa (Javier), « Giustizia amministrativa eclésiastica e giurisprudenza », in Ius ecclesiae XXIII, 2011, p. 563-582.

[77]Tribunal suprême de la Signature Apostolique, Coram Cacciavillan, Exercizio del mistero sacerdotale (Ecc.mo Vescovo diocesano Cogregazione per il Clero), Prot. n° 320108/01 CA du 18 mars 2006, in Ius Ecclesiae, XXIII, 2011 n° 3, p. 651-668 ;

[78] http://luttercontrelapedophilie.catholique.fr/

[79] Fulup (Tadig), Tout est bien, Nantes 2014, ed. Les sentiers du livre, p. 157-158.

[80] Congrégation pour la Doctrine de la Foi Nouvelles Normes sur les délits les plus graves, article 8, 15 juillet 2010, www.vatican.va/resources/resources_norme_fr.html

[81] Ibidem.

[82] Arrieta (Mgr Juan Ignacio), Le cardinal Ratzinger et la révision du système pénal canonique : un rôle déterminant, www.vatican.va/resources/resources_arrieta-20101202_fr.html

[83] Aux États-Unis, un juge fédéral a approuvé, lundi 9 novembre 2015, un plan de faillite pour le diocèse de Milwaukee, qui lui permettra d’indemniser plusieurs centaines de victimes d’abus sexuels de la part de membres du clergé. En décembre 2015, le diocèse catholique de Duluth (Minnesota) s’est mis en faillite pour pouvoir payer les compensations dues à des victimes d’abus sexuels. C’est le quinzième diocèse américain dans cette situation. http://www.la-croix.com/Urbi-et-Orbi/Monde/Etats-Unis-un-nouveau-diocese-en-faillite-a-cause-des-abus-sexuels-2015-12-09-1390748

[84] Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements, lettre circulaire du 6 juin 1977, in Origins 27, (1997-1998), 169-172.

[85] Morrisey (Rev. Francis G.), « Penal Law in the Chirch today: Recent Jurisprudence and Instructions » in Advocacy Vademecum, édité par Patricia M. Dugan ed. Wilson & Lafleur, Collection Gratianus, Montréal 2006, p. 49-66.

[86] Morrisey (Rev. Francis G.), « Penal Law in the Church today: Recent Jurisprudence and Instructions » in Advocacy Vademecum, édité par Patricia M. Dugan ed. Wilson & Lafleur, Collection Gratianus, Montréal 2006, p. 59, traduit de l’anglais.

[87] CDC Prot 458/03-30624.

[88] CDC Prot n° 458/2003.

[89] Can. 1404 — Le Premier Siège n’est jugé par personne.

[90] Fulup (Tadig), Tout est bien, Nantes 2014, ed. Les sentiers du livre, p. 7, 164-167 ;

[91] En breton, Tadig veut dire papa.

[92] Fulup (Tadig), Tout est bien, Nantes 2014, ed. Les sentiers du livre, p. 166.

[93] www.aprc.asso.fr ; courriel à Canonistes sans frontières en janvier 2017.

La Justice pour les laïcs

Voici un extrait du livre « La justice administrative de l’Eglise catholique » qui a reçu l’imprimatur le 4 octobre 2011 par S.E. Mgr. Laurent Dabiré, évêque de Dori (Burkina Faso), Docteur en droit canonique, et Président de la commission tribunaux, de la formation et des questions canoniques à la Conférence épiscopale Burkina-Niger.

Chapitre 4 : La justice pour les laïcs

 

A la fin de l’année 2014, le nombre de catholiques dans le monde était estimé à 1,27 milliards[1]. A leur propos, la Constitution dogmatique de l’Église a rappelé le principe d’obéissance qui choque tant nos contemporains du monde occidental à la liberté individuelle exacerbée, qui a l’habitude d’opposer liberté individuelle et autorité[2].

Les laïcs, comme tous les fidèles, doivent embrasser, dans la promptitude de l’obéissance chrétienne, ce que les pasteurs sacrés représentant le Christ décident au nom de leur magistère et de leur autorité dans l’Église[3].

Pourtant, le Cardinal Kasper prétend que le Concile a opéré un retournement, en cessant de considérer les laïques « comme des mandatés et comme le bras prolongé du clergé [4]», dans la mesure où ils détiennent leur mission du Christ lui-même, en vertu du baptême et non pas d’un mandat du clergé[5]. Certains évêques font largement appel aux laïcs, comme celui de Dallas[6] :

Je les consultais sur toutes les décisions pastorales auxquelles j’étais confronté. (…) Je tenais à ce que les prêtres soient ce qu’ils sont supposés êtres : sacramentels, et enseignant la foi. Et à laisser l’administration à des personnes qui étaient plus compétentes qu’eux, les laïcs[7].

En 1983, le code a introduit un chapitre nouveau sur les droits et obligations des fidèles en général et des laïcs en particulier. Ses canons 208 à 231 constituent une nouveauté indéniable par rapport au code de 1917, et ils semblent avoir été relativement bien reçus tant par la hiérarchie que par les fidèles. Pourtant, la réception de ces dispositions n’est pas exempte de tensions, comme en témoigne le cardinal Kasper :

Je suis préoccupé surtout par […] la distance croissante entre la vision hiérarchique « en haut » et des parties de l’Église « en bas » et qui, pour une part, est presque déjà un schisme de fait.[8] […] La prise de conscience des laïques fait partie des fruits réjouissants du Concile ; mais elle est devenue également après le Concile la source de beaucoup de malentendus et de nouvelles controverses.[9]

Un témoignage recueilli à Dakar[10] montre que la plupart des fidèles catholiques, y compris les mieux formés, ne connaissent pas jusqu’à l’existence d’une justice administrative dans l’Eglise. En cas de conflit, beaucoup pensent que, s’ils s’adressent à la hiérarchie ecclésiastique plutôt qu’aux tribunaux civils, ils risquent d’être lésés car il n’y aura personne pour défendre leur point de vue.

Il n’en va pas toujours ainsi puisque nous avons extrait de notre base de données 153 recours contentieux émanant de laïcs[11], soit 27 % des 742 recours dont la nature du demandeur était précisée. En y ajoutant les 27 recours portant sur des décrets du Conseil pontifical pour les laïcs[12], il en a résulté un échantillon de 180 recours enregistrés par le Tribunal suprême concernant des laïcs, que nous analysons sommairement dans le présent chapitre, sans prétendre écrire un traité du droit et de la jurisprudence, lequel nécessiterait un millier de pages.

Contrairement à ce que l’on aurait pu attendre, ce n’est pas le Conseil pontifical pour les laïcs dont les décisions sont les plus contestées par des laïcs, mais la Congrégation pour le clergé[13].

Voici par ailleurs les principaux thèmes litigieux concernant les laïcs[14], faisant l’objet d’un recours contentieux-administratif.

 

En regroupant démissions et mutations dans une rubrique relative aux décrets particuliers pour les laïcs, il apparaît quatre grands domaines permettant d’aboutir au plan ci-après :

  1. les regroupements et suppressions de paroisses ;
  2. la réduction des églises à un usage profane non inconvenant ;
  3. les décrets particuliers concernant des laïcs ;
  4. les associations de fidèles ;
  5. les autres cas.

 

  1. Le remodelage des paroisses

L’urbanisation, la mobilité et la sécularisation de la société imposent à l’Eglise de s’adapter, en cessant de regarder le passé, mais en recherchant de manière synodale des nouvelles solutions incluant le remodelage des paroisses. Le droit applicable est décrit principalement dans les canons 515 à 520 sur « l’organisation interne des Églises particulières ».

 

Dans sa thèse[15], Elisabeth Abbal montre qu’entre 1980 et 2015, la totalité des diocèses de la France métropolitaine a remodelé son territoire, en créant, regroupant, modifiant ou supprimant des paroisses et regroupements paroissiaux. La situation est très variée d’un diocèse à un autre. Ainsi à Poitiers, de nombreuses paroisses ont été regroupées. A Strasbourg, aucune des 567 paroisses n’a été supprimée, mais il a été créé des communautés de paroisses, permettant à un curé d’être simultanément responsable de plusieurs paroisses. A Tulle, il n’y a pas eu d’ordination de jeunes prêtres depuis 20 ans, si bien que les paroisses sont regroupées en 22 groupements paroissiaux pour les adapter, dans le passé, au nombre des curés en capacité d’exercer une charge curiale, et dans le futur, au dynamisme des équipes d’animation pastorales et missionnaires, appuyées par des fraternités locales presbytérales.

A partir d’une enquête auprès de 53 fidèles catholiques pratiquants[16], Louisa Plouchart a constaté que 66 % des paroissiens ne sont pas du tout perturbés par les remodelages, et prennent part à la vie de la nouvelle paroisse. On peut aussi en déduire qu’un tiers des paroissiens sont tout de même un peu perturbés. Dans la mesure où les fidèles sont attachés à leur paroisse, il en résulte des tensions, dont certains aboutissent à des recours hiérarchiques et contentieux.

Outre les canons 50, 51, 120 à 123, 127 et 166, le droit applicable aux regroupements de paroisses résulte principalement du canon 515 § 2 :

Can. 515 — § 2. Il revient au seul Évêque diocésain d’ériger, de supprimer ou de modifier les paroisses ; il ne les érigera, ne les supprimera ni ne les modifiera pas de façon notable sans avoir entendu le conseil presbytéral.

Lorsqu’une paroisse est remodelée, il peut y avoir différents recours, émanant du curé (Cf. Prot 43915/10 CA) mais aussi des laïcs qui fréquentent la paroisse. Ils sont en général adressés à la Congrégation pour le clergé, qui constate « Des difficultés variées au cours des années écoulées ». Grâce à la jurisprudence qui en résulte, la Congrégation publie le 30 avril 2013, une série de recommandations aux évêques pour la modification des paroisses et la fermeture des églises paroissiales, dont voici quelques extraits :

Il est nécessaire de distinguer clairement les trois procédures canoniques : 1) de modification des paroisses, 2) de relégation d’églises à un usage profane et 3) d’aliénation des édifices. […] Chaque procédure a ses propres règles qui doivent être suivies correctement et avec soin.

Il n’existe pas de procédure pour fermer une église temporairement, par exemple pour des réparations. Il en va de même pour limiter son usage, par exemple en supprimant la messe du dimanche, dans la mesure où l’église reste ouverte aux fidèles.

Pour savoir s’il existe une juste cause pour modifier une paroisse (c. 515 §2), chaque cas doit être traité séparément et le décret doit être motivé.

Chaque type de décision (modification de paroisse, réduction d’une église à un usage profane, affectation des biens), doit faire l’objet d’un décret écrit séparé, dûment communiqué au moment de son adoption.[17]

Parfois la décision de la Congrégation pour le clergé rejette le recours, en considérant que l’évêque n’a pas violé de loi, ni au fond ni sur la procédure[18] et les demandeurs déposent parfois des recours contentieux-administratifs, qui sont rejetés in limine ; non-admis à discussion, ou admis à discussion puis acceptés ou rejetés.

Le 20 juin 1992, le Collège a examiné le recours de deux paroissiens, en considérant qu’ils étaient légitimes à le déposer, puisque le décret de la Congrégation du clergé ne respectait pas les canons 515-2 et 1222-2, et enfin que l’évêque devait redonner à l’église paroissiale son statut antérieur[19].

 

Parmi les litiges traités par la Signature apostolique, certains concernent des paroisses confiées à des religieux, dont le contour est modifié par l’évêque sans accord préalable avec les religieux en question. La Congrégation pour le clergé cite également des difficultés à propos de la propriété des biens des paroisses ou des diocèses modifiés.

Les diocèses de Barbastro-Monzon[20] et de Lerida[21] se sont opposés entre eux à propos de la propriété du patrimoine ecclésiastique de la Frange d’Aragon[22] sur fond de tensions nationalistes entre Catalans et Aragonais, suite aux modifications des frontières entre les diocèses. Plusieurs livres[23] et sites internet[24] décrivent l’épopée juridique civile et canonique qui en résulte[25].

Le plus grand nombre de recours concerne cependant le sort des églises situées dans des paroisses supprimées, ce qui invite à approfondir la question de la réduction des églises à usage profane non inconvenant.

 

  1. La réduction des églises à un usage profane

En Afrique, tout comme dans les banlieues des grandes villes, l’Eglise cherche à construire de nouvelles églises pour satisfaire aux besoins des fidèles, en forte augmentation tandis qu’en Europe, de nombreuses églises sont vides, notamment dans les campagnes.

En 2007, un article paraît dans la presse française[26] et provoque une prise de conscience sur le risque de destruction des églises. Il mobilise 25000 signatures, tandis que l’observatoire du patrimoine religieux[27] estime le patrimoine religieux français à environ 100 000 églises et monuments cultuels.

En France, une vingtaine d’églises paroissiales ou non, seraient détruites chaque année, telles que la chapelle Saint-Bernard de Clairmarais, (diocèse d’Arras), la chapelle funéraire des Comtes de la Hitte (Montfort, diocèse d’Auch) A Montfort, dans le Gers, (propriétaires du chateau d’Esclignac).

Quant aux usages actuels des églises réduites à l’usage profane, ils consistent en des entreprises sociales comme le Farlab de Lille[28] ou un centre pour handicapés à Oran, des columbariums ou columbariums (lieux de sépultures), des restaurants etc. Il existe également des églises réduites à usage profane, pour laquelle la clause d’usage non-inconvenant a été respectée par le premier acquéreur même si l’édifice a été transmis à un nouvel acheteur qui les affecte à un usage inconvenant tel qu’un bar ou un dancing.

2.1. Le droit applicable

Le Code de droit canonique donne la définition d’une église[29] en rappelant les rites de la dédicace ou de la bénédiction, qui interdisent désormais les usages profanes du bâtiment[30].

Mettant à part les cas de profanation qui nécessitent une nouvelle dédicace ou bénédiction, on distingue deux types de cas dans lesquels une église peut être réduite à un usage profane non inconvenant en perdant ainsi son caractère sacré[31].

Il s’agit en premier lieu du cas prévu par le canon 1222 §1, des églises qui auraient été détériorées et qu’il ne serait pas possible de réparer[32]. Dans de nombreux pays, le propriétaire de l’église est habituellement la paroisse, et la raison de la destruction est financière. Avant qu’une telle décision ne soit prise, l’évêque doit rechercher toutes les solutions possibles, par exemple en vendant des terres et d’autres bâtiments, en faisant appel aux sponsors, ou en mobilisant ses ressources propres. Pourtant, même si l’Église d’Allemagne dépense plus de 500 millions d’euros par an pour la réparation des églises, toutes ne peuvent pas être préservées et certaines sont vendues[33]. Il en va de même aux Etats-Unis[34].

Dans le cas de la France, il en va autrement puisqu’il y a environ 45 000 églises paroissiales, dont 35 % bâties au XIXe siècle[35] et que, dans leur immense majorité, leur propriété et leur entretien reviennent aux communes, si bien que la décision de destruction revient au maire dès lors que l’église n’est pas classée au patrimoine des monuments historiques, ce qui est le cas pour la majorité d’entre elles. Ainsi, compte tenu du coût de leur entretien croissant pour une affluence en diminution, les maires choisissent parfois de les abattre. Une trentaine d’églises auraient déjà été détruites en France et près de 10 000 églises seraient menacées de destruction. Les évêques sont naturellement sollicités, notamment pour prendre en charge une partie des travaux de restauration, mais bien souvent, ils déclinent cette possibilité qu’ils estiment incompatible avec leurs possibilités. Les nombreux litiges qui se produisent[36] sont alors majoritairement déférés devant les tribunaux administratifs civils, qui produisent une abondante jurisprudence et ont inspiré la circulaire du ministère de l’Intérieur du 29 juillet 2011[37] intégrant la décision du Conseil d’Etat du 19 juillet 2011. S’agissant de droit civil, nous écarterons cette problématique du champ de notre étude.

Il en va autrement pour les églises qui ne sont pas vouées à la destruction, et pour lesquelles la décision de les réduire à un usage profane provient de l’Ordinaire du lieu[38]. Ce type de cas, régi par le canon 1222 §2, est possible dès lors que cinq conditions cumulatives sont réunies :

  • des causes graves,
  • l’audition du Conseil presbytéral,
  • le consentement de ceux qui ont des droits légitimes sur l’édifice,
  • l’absence de dommages sur le bien des âmes,
  • un minimum de garanties sur l’usage futur, qui doit être convenable.

2.2. Les difficultés et les recours

La décision de l’évêque est une décision administrative, susceptible de recours administratif. Lorsqu’il se produit un litige[39], la Congrégation du clergé est compétente en vertu de l’article 98 de Pastor bonus[40], et elle accepte ou rejette parfois le recours des paroissiens, considérant ou non que l’évêque a violé une loi au fond ou sur la procédure[41].

Ses décisions sont susceptibles de recours auprès de la Signature Apostolique, et cette faculté n’est pas seulement théorique, puisque divers recours contentieux-administratifs sont présentés au Tribunal suprême. Celui-ci a publié quelques sentences concernant la démolition[42], la réparation[43], la réduction d’une église à usage profane, par exemple à l’occasion d’une suppression[44] ou d’un regroupement[45] de paroisses. Ces sentences ont fait l’objet d’analyses de la part de Mgr. Frans Daneels, en 1998[46] puis en 2010[47], ainsi que de Mgr. Gian-Paolo Montini en 2000[48] et de Nicholas Schöch en 2007[49] et de Javier Canosa en 2011[50].

Dans son analyse des “grands arrêts” de la jurisprudence administrative, Javier Canosa évoque en particulier la sentence du 20 juin 1992 qui reconnait pour la première fois aux fidèles membres d’une communauté paroisiale, la possibilité de déposer validement un recours relatif à une décision affectant la paroisse (Prot 22036/90 CA).

Le nombre de recours contentieux déposés au Tribunal de la Signature Apostolique, pour des réductions d’églises à usage profane, est en forte augmentation depuis l’année 2011, signe que des litiges se produisent de plus en plus fréquemment entre des fidèles qui désirent maintenir une église comme lieu de culte et un évêque qui s’y oppose. La raison tient au fait que le nombre d’églises réduites à usage profane augmente considérablement dans les régions développées, où le nombre de fidèles et de prêtres diminue.

Nombre de recours contentieux connus par année d’enregistrement :
Années 1990-1999 2000-2009 2010-2013
Nombre de contentieux 5 4 16
Source = base de données

Malheureusement, les sentences publiées sont peu nombreuses et anciennes, si bien qu’il est nécessaire de recourir à des commentaires des membres du Tribunal suprême pour présenter une vision actuelle du droit, éclairé par la jurisprudence, comme nous le proposons ci-dessous de manière synthétique :

  • un laïc doit faire la preuve qu’il subit un dommage pour que son recours puisse être accepté[51];
  • la fermeture définitive d’une église équivaut à sa réduction à usage profane, y compris si l’évêque n’a pas pris de décision définitive quant à son usage ultérieur[52];
  • l’application du c. 1222 §2, exige le cumul de toutes les conditions imposées[53]. En particulier, l’absence d’impact négatif sur le bien des âmes ne constitue pas, à elle seule, une raison suffisante[54];
  • le manque de prêtres ou la suppression d’une paroisse ne constitue pas une raison grave suffisante pour réduire une église à un usage profane, car il est déjà arrivé dans l’histoire qu’en l’absence de prêtre, des personnes laïques et pieuses préservent une église comme un bâtiment sacré et un témoignage de la foi catholique[55];
  • les raisons graves évoquées doivent être présentes au moment du décret et ne pas seulement constituer des craintes pour l’avenir ;
  • à l’inverse, le Tribunal suprême a accepté comme raison grave l’incapacité des paroissiens à entretenir une église ;
  • lorsqu’une église a subi des dommages et doit être réparée mais que des raisons financières justifient un choix différent, l’impossibilité morale ne peut pas être prouvée, aussi convient-il de recourir au c. 1222, § 2, sachant que l’évêque est habilité à décider si la difficulté financière constitue ou non une raison grave, après avoir entendu les conseils prévus à cet effet ;
  • le besoin financier d’un diocèse ne constitue pas une raison grave suffisante pour vendre une église qui appartiendrait à son patrimoine[56];
  • il est nécessaire de préparer la décision par des études appropriées sur l’état du bâtiment, le coût de la réparation, la possibilité de trouver des fonds, avant que l’évêque n’impose à une paroisse ou à un institut religieux de réparer une église qui n’est pas l’église paroissiale ;
  • concernant le Conseil presbytéral, son audition doit avoir porté explicitement sur la réduction à usage profane d’une église et pas seulement sur la suppression de paroisses, en distinguant bien les deux décisions[57];
  • l’autel et les objets pieux ne perdent pas leur caractère sacré avec la réduction de l’église à un usage profane non inconvenant. Ils doivent donc être transportés ailleurs.

Il existe également une jurisprudence à propos de la propriété des biens des églises réduites à un usage profane, sachant qu’un autel ou un tabernacle restent consacrés[58]. Nous nous bornerons à donner deux exemples.

Alors qu’une église avait été réduite à un usage profane, une des parties a signalé l’existence d’une donation antérieure du terrain sur lequel l’église était construite, avec une clause morale précisant que si l’église devait être vendue, le terrain devrait retourner à la famille et à ses descendants. La partie a perdu son recours, car ladite clause ne figurait pas explicitement dans le contrat, puisqu’il était écrit au contraire que le terrain était libre de servitudes[59].

Une autre jurisprudence précise qu’un titre de propriété ou une donation ne confère pas nécessairement des droits sur une église paroissiale, à moins qu’un acte juridique valide précise explicitement que le don ou la mise à disposition sont conditionnés à un certain usage de cette église[60].

 

Mgr. Daneels conclut son analyse de la jurisprudence en ces termes :

Il apparaît finalement que la Congrégation du Clergé a réformé en plusieurs occasions les décisions d’évêques diocésains qui réduisaient une paroisse à un usage profane non-inconvenant mais il n’est pas facile pour un évêque d’obtenir de la Signature une décision invalidant celle de la Congrégation. La suppression d’une paroisse n’entraîne donc pas automatiquement la réduction d’une église paroissiale à usage profane. Mais il apparaît également qu’il n’est pas facile pour des paroissiens de prouver devant la Signature l’illégitimité d’une décision de la Congrégation du Clergé concernant une décision de l’évêque[61].

Voici en tout cas une preuve de l’action du Tribunal suprême dans ce domaine.

Un groupe de paroissiens américains dépose un recours hiérarchique contre une décision de leur évêque du 12 juin 2007 concernant la réduction d’une église à un usage profane. La congrégation du clergé rejette tout d’abord le recours, en considérant qu’il émane d’un groupe de personnes n’ayant pas la personnalité juridique pour déposer un tel recours. Une fois le recours redéposé par des personnes intuitu personae, la Congrégation valide le décret de l’évêque et les paroissiens déposent un recours contentieux-administratif. Le 21 mai 2011, le tribunal suprême constate qu’il y a eu violation de la loi dans le décret de la Congrégation du clergé du 5 août 2008, parce que l’évêque n’avait pas invoqué de raison grave justifiant la réduction de cette église à usage profane[62].

 

Sous réserve que la décision soit appliquée, il s’agit là d’un exemple où la justice administrative de l’Église a joué son rôle de résolution d’un conflit, en faisant respecter le droit canonique. La procédure a duré quatre ans et demi, du fait d’un nouveau jugement du 18 novembre 2011.

  1. Les décrets particuliers pour les laïcs

L’Église emploie un nombre croissant de laïcs salariés ou bénévoles pour des tâches variées d’apostolat, d’enseignement et de service. Parfois, elle refuse des charges à des personnes compétentes qui ont postulé pour les assumer, ou bien elle retire des charges à des personnes qui les assumaient, ce qui peut produire des incompréhensions et des conflits.

Pour de nombreux enseignants [clercs ou laïcs] il demeure un sentiment général que leurs droits ne sont pas suffisamment protégés. Pour nombre d’entre eux, la possibilité qui leur est offerte de se défendre par un recours administratif ne leur semble pas satisfaisante. A cet égard, ils déplorent l’absence de tribunaux administratifs au niveau des pays[63].

 

Lorsque le Conseil pour les laïcs ne les a pas résolus, la Signature apostolique est amenée à instruire les recours correspondants, en donnant parfois raison aux demandeurs contre le Dicastère concerné. Ces recours portent principalement sur les sujets suivants :

  • retrait de charges d’enseignement ou de recteur d’université[64];
  • refus d’admission dans les ordres sacrés[65];
  • licenciement de la Fabrique de saint Pierre[66];
  • retrait de la charge de défenseur du lien[67];
  • expulsion d’une maison appartenant à l’Église[68];
  • suspension d’un diacre marié[69];
  • retrait d’une charge de professeur de séminaire[70];
  • expulsion d’une église paroissiale.

En voici un exemple :

Dans un cas traité en 1987, quatre laïcs des Etats-Unis sont expulsés de leur paroisse après avoir dénoncé des abus liturgiques et des erreurs doctrinales de leur curé. La Signature apostolique renvoie le recours aux dicastères qu’elle estime concernés, à savoir le Conseil des Laïcs, la Congrégation pour la doctrine de la foi[71]. S’il s’agit bien du même cas[72], le Tribunal n’accepte pas à la discussion le recours contre une décision de la Congrégation pour le Culte divin et la discipline des sacrements, parce que le dicastère justifie son refus par le fait que les paroissiens semaient le désordre, en manifestant bruyamment contre le style du nouveau curé, si bien que le recours apparaît sans fondement.

Dans un autre domaine, précisons que les recours relatifs au travail des salariés et anciens salariés du Saint-Siège, contre les actes commis par le service compétent, sont traitées par le Bureau du travail du Siège apostolique, qui rend des arbitrages non susceptibles de recours au Tribunal suprême[73].

  1. Les associations de fidèles

« Dans l’histoire de l’Église, les associations de fidèles ont constitué une ligne continue », nous rappelle saint Jean-Paul II[74], pourtant il a fallu un litige opposant un évêque d’Argentine à la société de Saint-Vincent-de-Paul pour qu’en 1921, la Sacrée congrégation du Concile dépasse une vision étroite du code de 1917 et reconnaisse

La légitimité de l’autonomie des laïcs dans la constitution et la direction des associations laïques, en distinguant clairement à cette occasion, les associations ecclésiastiques des associations laïques[75].

Le Concile cite en effet la resolutio Corrienten[76] dans le décret de 1965 sur l’apostolat des laïcs, lorsqu’il évoque en ces termes le droit les laïcs à fonder des associations, à les diriger et à adhérer à celles qui existent :

Le lien nécessaire avec l’autorité ecclésiastique étant assuré, les laïcs ont le droit de fonder des associations, de les diriger et d’adhérer à celles qui existent[77].

En 1983, le Code affirme ce droit des fidèles puis, en 1988, l’exhortation apostolique post-synodale Christifideles laici[78] se félicite du chemin parcouru. De même en 2011, le pape, Benoît XVI rappelle :

Les ouvertures limpides à la contribution des laïcs et l’énoncé des « critères d’ecclésialité » non équivoques par Christifideles laici, ont permis de faire mûrir une « profonde conscience de la dimension charismatique de l’Église, [ce qui a] conduit à apprécier et à valoriser aussi bien les charismes les plus simples que dispense la providence de Dieu aux personnes, que ceux qui engendrent une grande fécondité spirituelle, éducative et missionnaire[79].

Le pape François va dans le même sens :

Remercions donc le Seigneur pour les fruits abondants et pour les nombreux défis de ces années. Nous pouvons évoquer, par exemple, la nouvelle saison associative qui, à côté des autres associations laïques avec une longue et digne histoire, a vu apparaître tant de mouvements et nouvelles communautés ayant un grand élan missionnaire ; des mouvements que vous avez suivis dans leur développement, accompagnés avec attention et assistés dans la phase délicate de la reconnaissance juridique de leurs statuts[80].

Pourtant le nombre des associations de fidèles juridiquement reconnues est peu élevé, comme le rappelle Olivier Echappé :

L’observation de la réalité ecclésiale de notre pays [La France] repose sur le constat contradictoire de l’extraordinaire floraison du modèle associatif dans l’Église, comme d’ailleurs dans l’ensemble de la société, et du succès remarquable de la loi du 1er juillet 1901, alors que corrélativement les chancelleries épiscopales ne croulent pas sous le poids des demandes de recognitio ou de probatio.[81]

En 2011, l’auteur estime, à partir des publications du Conseil pontifical pour les laïcs[82] et de quelques diocèses, que le nombre d’associations de fidèles par catholique[83] est environ mille fois inférieur au nombre d’associations civiles par habitants[84].

Cath.

1

Ass
Can2.
Ass. / fid.

3

M.
hab.4.
Ass civ.

5

Ass /
M. hab.6
Ass can / Ass civ

7

Associations
internationales
1 000 122 0,12 60,00 9 910 165 1 354
France 36,00 78 2,17 60,00 983 803 16 397 7 568
Diocèse de Paris 1,33 11 8,29 2,21 71 222 32 208 3 885
New York / Etats Unis 0,45 19 41,85 312,00 1 900 000 6 090 146
Diocèse de Créteil 0,79 3 3,81 1,31 39 000 29 751 7 800
Diocèse de Saint Denis 0,90 1 1,11 1,51 45 000 29 871 27 000
Diocèse de Nancy 0,44 71 162,10 0,73 11 616 15 912 98

 

Même si les résultats sont à prendre avec circonspection, l’écart est énorme, et l’on peut se demander si le droit canonique ne constitue pas un frein à la création d’associations de fidèles. En 1985 le Cardinal Ratzinger témoignait en ce sens pour les nouveaux mouvements :

Il est certain que ces mouvements posent aussi quelques problèmes, recèlent dans une plus ou grande mesure des dangers, mais il en va de même pour tout ce qui est vivant. […] tout cela ne résulte pas de la planification émanant d’une administration pastorale mais a surgi de soi-même. De ce fait, les organismes administratifs – justement quand ils veulent être très ouverts au progrès – ne savent qu’en faire ; cela ne cadre pas avec leur concept. Ainsi se créent des tensions quand il s’agit d’insérer ces mouvements dans l’actuelle structure des institutions[85].

En 1983, le code de droit canonique reprend les principes posés par le décret du Concile sur l’apostolat des laïcs, et les structure juridiquement par les canons 215 et suivants :

Can. 215 — Les fidèles ont la liberté de fonder et de diriger librement des associations ayant pour but la charité ou la piété, ou encore destinées à promouvoir la vocation chrétienne dans le monde, ainsi que de se réunir afin de poursuivre ensemble ces mêmes fins[86].

Une fois constituées en vertu des canons 298 et 299 §1, ces associations deviennent des associations de fait, mais elles ne sont admises dans l’Église qu’en application de l’un des canons ci-après :

  1. canon 299 §3[87] pour les associations privées dont les statuts sont reconnus par l’autorité compétente, (recognitio) ;
  2. canon 322 pour les associations dotées de la personnalité juridique (probatio)[88];
  3. canons 298 §2[89] et 299 §2[90] pour les associations louées et recommandées par l’Église ;
  4. canon 300[91] pour les associations privées portant le nom de catholique ;
  5. canon 301§3[92] pour les associations publiques de fidèles ;
  6. canon 302[93] pour les associations cléricales[94].

A l’issue du synode ordinaire des évêques de 1987, le pape Jean-Paul II précise quels critères doivent respecter les associations pour être reconnues par l’Église, sans faire de distinction entre les six types de reconnaissance évoqués ci-dessus[95].

C’est toujours dans cette perspective de la communion et de la mission de l’Église, et non pas en opposition avec la liberté d’association, qu’il faut comprendre la nécessité de critères bien clairs et précis de discernement et de reconnaissance des associations de laïcs, qu’on nomme aussi « critères d’ecclésialité ». Comme critères fondamentaux pour le discernement de toute association de fidèles laïcs dans l’Église on peut retenir, en le prenant ensemble, les critères suivants :

  • le primat donné à la vocation de tout chrétien à la sainteté,
  • l’engagement à professer la foi catholique,
  • le témoignage d’une communion solide et forte dans sa conviction, en relation filiale avec le Pape,
  • l’accord et la coopération avec le but apostolique de l’Église,
  • l’engagement à être présents dans la société humaine pour le service de la dignité intégrale de l’homme.

Les critères fondamentaux que nous venons d’exposer trouvent une vérification dans les fruits concrets qui accompagnent la vie et les œuvres des diverses formes associatives, en particulier le goût renouvelé pour la prière, la contemplation, la vie liturgique et sacramentelle ; l’aide à la prise de conscience des vocations au mariage chrétien, au sacerdoce ministériel, à la vie consacrée ; la disponibilité à prendre part aux programmes et aux activités de l’Église tant sur le plan national que sur le plan international ; l’engagement dans la catéchèse et la capacité pédagogique pour la formation des chrétiens ; l’impulsion à assurer une présence chrétienne dans les différents milieux de la vie sociale ; la création et l’animation d’œuvres caritatives, culturelles et spirituelles ; l’esprit de détachement et de pauvreté évangélique en vue d’une plus généreuse charité envers tous ; la conversion à la vie chrétienne ou le retour à la communion de baptisés « lointains ».

 

Depuis lors le pape François a évoqué à plusieurs reprises les critères d’ecclésialité[96], et ses propos furent largement commentés[97]. Pourtant, une des principales difficultés rencontrées par les associations de fidèles concerne leur reconnaissance par l’Église et l’acquisition de la personnalité juridique. En l’absence de règles d’application des critères d’ecclésialité en fonction des différents niveaux de reconnaissance[98], on constate en effet une certaine hétérogénéité des interprétations qu’en font les canonistes :

  • d’un côté, le cardinal Lluis Martinez Sistach[99] considère que la reconnaissance des statuts inclut des critères subjectifs, comme l’utilité, pour éviter la dispersion des forces et la multiplication des associations ayant des buts voisins ;
  • sans aller si loin, L. Navarro[100], estime que la recognitio est liée à la vérification des statuts, mais aussi à l’analyse d’autres sources d’informations permettant de connaître la réalité effective de l’association. Il en va de même pour Roch Pagé[101];
  • à l’opposé, S. Pettinano parle d’un droit à la reconnaissance[102], tandis que Feliciani écrit : [….l’intervention ministérielle] peut être considérée non comme une décision discrétionnaire, mais comme un acte obligé, en ce sens qu’il se limite à la déclaration que, dans l’examen des structures de l’association, de ses moyens et de ses buts, il n’y a rien de contraire à la foi, à la discipline et à l’intégrité des coutumes. […] Quant aux raisons d’opportunité pastorales, il est difficile de les concilier avec le droit d’association reconnu aux fidèles[103];
  • finalement, des canonistes comme P.A. Bonnet[104] reconnaissent qu’il peut y avoir conflit et recours administratif.

Dans la pratique, on assiste parfois à des situations où un évêque diffère la reconnaissance, comme on peut le voir dans l’exemple ci-après :

Un an après avoir été élus, les modérateurs d’une association de fidèles forte de 8 000 membres demandent à être reçus par le nouvel évêque du diocèse où est situé leur siège, « pour témoigner de leur démarche pour aboutir au chemin vers la reconnaissance ». Le 13 juillet 2016, ils reçoivent un courrier du vicaire général : « Mgr. … me charge de vous faire savoir, qu’après réflexion, il ne lui semble pas opportun de vous accorder un rendez-vous car les conditions de reconnaissance ne sont pas réunies au vu d’informations qu’il a en sa possession. Il vous assure de sa prière. ». Le canoniste pourrait s’interroger sur le respect des droits des fidèles : droit à recevoir de l’aide des pasteurs (c. 203), droit à la reconnaissance de leur association (recognitio) et à sa personnalité juridique (probatio) (c. 299-3[105] et c.322-§1) dès lors qu’elle respecte les critères d’ecclésialité, droit à la bonne réputation et à celle de leurs membres (c.220) et droit de se défendre (c. 221), puisque les informations sont connues de l’évêque mais pas des modérateurs, et qu’elles peuvent très bien résulter de calomnies.

 

L’absence de reconnaissance canonique d’une association peut entraîner des procès devant les tribunaux séculiers, au lieu d’être résolus par la justice administrative canonique, comme on peut le voir dans l’exemple ci-dessous :

En 1980 à Paris, l’archevêché de Paris signe une convention de 17 ans avec  l’Association de bienfaisance culturelle de la mission croate (ABCMC), pour lui confier l’usage de l’église Saint-Cyrille-Saint-Méthode. Avec le temps, les tensions s’accumulent autour des questions matérielles si bien qu’en 2007, la convention n’est pas renouvelée mais l’association n’accepte pas cette décision et continue à occuper les lieux  en célébrant notamment des messes en croate et en catéchisant les enfants. L’Archevêché de Paris attaque l’association devant les tribunaux civils et obtient plusieurs décisions de la justice civile pour la faire partir. Cependant  une partie des paroissiens croates s’insurge et manifeste dans la rue en indiquant : « Nous sommes interloqués, déçus et choqués que des frères catholiques se comportent ainsi envers d’autres catholiques […] A l’heure où des églises se ferment faute de paroissiens, faute d’entretien, des catholiques qui ont reconstruit une église sur leurs propres deniers et l’ont entretenue, l’ont fait vivre, se font expulser comme des malpropres par leurs frères catholiques. C’est inadmissible. » Pour sa part, le curé de la paroisse où est située l’église se dit prêt à accepter les Croates catholiques mais pas leur association[106].

 

Même si l’association est reconnue, on peut assister à des interventions de l’évêque susceptibles d’entraîner des conflits :

Reconnue association privée de fidèles sous la responsabilité de l’Evêque du Puy, « l’Agapè[107] » anime des sessions de guérison intérieure auxquelles des dizaines de milliers de personnes participent avec grand fruit. D’une autre sensibilité que son prédécesseur, le nouvel évêque demande de refonder l’association sur de nouvelles bases. Un médecin, animateur et fondateur de sessions de formations, est mis en demeure de cesser ses activités avec interdiction de résidence dans la ville, « sans aucune raison », prétend la presse[108].

 

A Rome, le Conseil pontifical pour les laïcs confirme qu’il reçoit régulièrement des recours, sans préciser s’ils concernent les associations de fidèles ou de leurs membres, comme il l’indique chaque année de la manière suivante dans ses rapports d’activité :

Le Conseil pontifical pour les laïcs a résolu des controverses soumises à son examen, par des associations de fidèles avec des recours administratifs[109].

Toutes les controverses ne sont cependant pas résolues par le Conseil Pontifical, puisque le Tribunal suprême a aussi à connaître quelques recours contentieux-administratifs relatifs aux associations, portant notamment sur :

  • leur caractère public ou privé (Prot. 23966/93/CA) ;
  • la possibilité déposer des recours alors que la capacité juridique ne leur a pas été reconnue (Prot. 17445/ 85 CA et Prot. 17914/86 CA)[110]
  • leur constitution et la désignation de leurs modérateurs (Prot. 32943/01 CA, Prot. 35378/03 CA)
  • leur suppression (Prot. 20012/88, Prot. 37399/05 CA)

Il faut s’interroger sur le fait qu’aucun jugement publié ne porte sur l’application des critères d’ecclésialité pour la reconnaissance des associations. Peut-être existe-il des jugements non publiés, voire des jugements publiés insuffisamment détaillés pour que l’auteur puisse les rattacher à cet objet ? Peut-être que des recours ont été déposés et rejetés in limine avant même d’être enregistrés ?

Un recours a été rejeté par le Congrès pour un recours d’un groupe de fidèles des USA contre un décret du Conseil pour les laïcs, à cause du manque de légitimité du demandeur[111]. Le Conseil pontifical pour l’interprétation des textes législatifs a proposé une solution le 29 avril 1987, dans une interprétation du canon 299 §3 [112] :

  1. — Un groupe de fidèles qui ne possède pas la personnalité juridique, ni même la reconnaissance dont il est question au c. 299, § 3, peut-il légitimement introduire un recours hiérarchique contre un décret de son évêque diocésain ?
  2. — Non, en tant que groupe ; oui, en tant que fidèles, qu’ils agissent séparément ou en commun, pourvu qu’ils aient vraiment subi un dommage. Pour l’estimation de ce dommage, il est nécessaire que le juge jouisse d’un pouvoir discrétionnaire approprié.

 

Peut-être les recours ont-ils été déposés et rejetés in limine avant même d’être enregistrés, au motif que l’acte administratif empêchant la reconnaissance n’avait pas le caractère d’acte administratif particulier ?

Un des responsables de l’association « Call to Action Nebraska » a déposé un recours au Tribunal suprême contre un courrier du cardinal-préfet de la Congrégation des évêques, adressé à l’évêque de Lincoln, confirmant la légalité d’une décision de ce dernier portant, sous certaines conditions, un interdit se transformant en excommunication pour les membres de plusieurs associations diocésaines, dont l’association « Call to Action Nebraska ». L’évêque leur reprochait de tenir des propos contraires à la doctrine catholique, en appelant notamment de leurs vœux le mariage des prêtres et l’ordination des femmes. Le Secrétaire du Tribunal suprême a répondu que le Tribunal n’était pas compétent pour traiter un tel recours, dans la mesure où l’article 123 de Pastor bonus se réfère aux décrets particuliers promulgués ou confirmés par un dicastère de la Curie romaine, ce qui n’est pas le cas d’un décret diocésain général ni d’une mise au point d’un dicastère concernant la légalité de cet acte[113].

 

Sous réserve d’informations contraires, il ne semble donc pas que la justice administrative ecclésiastique ait joué pleinement son rôle pour clarifier la reconnaissance des associations privées de fidèles, comme ce fut le cas en 1921 avec la resolutio Corrientes.

  1. Les autres sujets à recours

Il existe de nombreux autres sujets de recours, moins fréquents, qu’il n’est pas possible de relater en détail.

Outre le cas des salariés d’associations catholiques, évoqué au chapitre introductif, on peut citer le cas des aumôniers hospitaliers ou militaires, ainsi que des employés des curies diocésaines qui sont parfois écartés.

Un militaire promu vice-chancelier d’un ordinariat militaire se voit retirer sa fonction suite à l’arrivée d’un nouveau chancelier. La Congrégation pour le clergé refuse son recours hiérarchique et le Tribunal suprême rejette son recours contentieux par manque de fondement, car l’arrivée d’un nouveau chancelier est une raison jugée suffisante en vertu du c. 485, que la cause renvoi n’est pas jugée diffamatoire et que la substance de l’intéressé n’est pas en cause, puisque son salaire continue à lui être versé par l’armée[114].

Un autre cas fréquent concerne la propriété des biens des associations, qui fait régulièrement l’objet de recours devant la justice civile, malgré l’importance du problème canonique souligné par Olivier Echappé :

Il ne s’agit pas ici d’une hypothèse théorique : chacun sait qu’en France, le patrimoine immobilier des écoles catholiques est entre les mains d’associations constituées à la hâte au lendemain de la séparation et de la spoliation de 1905, qui n’ont aucun statut canonique, alors même que leur objet (et la justification de leur existence) est bien d’enseigner la doctrine chrétienne au nom de l’Église, ce qui, canoniquement, leur imprime le caractère public et fait dès lors de leurs biens des biens ecclésiastiques[115].

On peut également citer le cas de fidèles qui estiment ne pas recevoir de leurs pasteurs l’aide qu’ils sont en droit d’espérer. Voici un exemple qui concerne la Congrégation pour le Culte Divin et la Discipline des Sacrements :

A New-Séville, aux Etats-Unis, plusieurs paroissiens sont choqués par les innovations liturgiques que leur nouveau prêtre a apportées. En signe de protestation, une paroissienne fait de l’esclandre à un point tel que le prêtre est obligé de recourir à la police et que l’archevêque lui ordonne de cesser de troubler la liturgie. Elle persiste au point que, le 1er décembre 1986, l’évêque promulgue à son encontre un décret pénal extrajudiciaire en application du canon 1336, lui interdisant de pénétrer dans l’église. Elle dépose alors un recours hiérarchique et, le 12 mai 1989, le décret est confirmé par la congrégation pour le Culte Divin et la Discipline des Sacrements. En avril 1989, la plaignante fait recours auprès de la deuxième section du Tribunal suprême de la Signature apostolique, estimant qu’elle a agi en état de légitime défense contre un agresseur qui l’attaquait injustement, tout en gardant la modération requise. (c. 1323 5° b). Le 30 octobre 1990, le Tribunal considère que l’archevêque avait le droit de prononcer une exclusion par décret extrajudiciaire en application des canons 1720 et 1731 2°; qu’il avait respecté les règles prévues à ce canon notamment en recevant la plaignante. De ce fait le recours n’est pas admis à la discussion du Tribunal. Le 24 novembre, la plaignante dépose un nouveau recours mais, là-encore, le Tribunal refuse de le mettre à discussion par manque de fondement, considérant qu’en continuant à troubler les célébrations liturgiques malgré la défense qui lui en a été faite, la plaignante n’a pas observé la modération qui lui aurait permis d’être exonérée de peine[116].

 

Dans le cas présent, le recours semble avoir été abusif, mais toutes les situations ne sont pas de ce type et il existe aussi des cas d’abus de la part du pouvoir ecclésiastique.

 

Après avoir examiné des séries de sujets qui ont fait l’objet de recours, nous pouvons légitimement nous demander s’il n’existe pas des domaines faisant l’objet de décisions administratives concernant les laïcs, et qui ne font pas l’objet de recours contentieux-administratifs.

 

En Afrique, les fidèles sont trop souvent confrontés à une mauvaise gestion de leur paroisse, comme le rapportent Achille Mbala-Kyé[117] et Emmanuel Bizogo[118] :

Selon le droit, le curé est gestionnaire des biens de l’Eglise (c. 532 et c. 1281-1288) mais souvent les caisses des paroisses sont vides lors des passations de service, c’est-à-dire quand le curé change. En fait il y a des difficultés à mettre en place les conseils pastoraux pour les affaires économiques et beaucoup de paroisses n’envoient pas leurs comptes à la Procure. Souvent, les comptes des paroisses sont morts : le curé n’utilise pas ce compte pour les mouvements des charges et produits dans sa paroisse. Il n’y dépose pas d’argent mais par contre, il est capable de laisser le compte en rouge pendant des années.

Suite à l’exposé du professeur Zalbidea lors du 16ème Congrès international de la Consociatio[119], la question est restée ouverte de savoir si un fidèle peut faire un recours administratif au cas où un curé quitte sa paroisse sans rendre les comptes de sa gestion comme le prévoit le c. 1287 §.2[120], avec des chances raisonnables d’obtenir une restitution à la paroisse des sommes emportées indûment. Un approfondissement serait utile dans ce domaine où nous n’avons pas trouvé de jurisprudence de la Signature apostolique.

 

Dans un autre domaine, voici trois témoignages canadiens portant sur la réception de la communion à genoux, où l’on peut regretter le fait que l’Église locale n’ait pas su régler les situations, si bien que l’on retrouve les deux premiers sur un site internet et le troisième à la Cour suprême du Canada.

La semaine passée, je suis allée à une messe dominicale avec mon mari dans une paroisse voisine. C’était la première fois que je m’y rendais. Au moment de la communion, nous nous sommes avancés, et je me suis mise à genoux devant le prêtre pour recevoir l’hostie. Le prêtre m’a dit « Non ! Debout ! » Je pensais avoir mal entendu. « Heu… pardon ? » « Debout ! Ici on donne la communion seulement debout ! » Alors je me lève, un peu perturbée, et le prêtre me donne l’Hostie sur la langue. Mon mari, derrière moi, fait la même chose, et le prêtre lui refuse la communion à genoux lui aussi[121].

J’ai vu une fois dans ma paroisse deux prêtres donnant la communion l’un à côté de l’autre. Le vicaire et un prêtre « de passage ». Le prêtre « de passage » a fait comme vous le décrivez, à savoir renâcler à donner la communion à une personne qui s’était agenouillée. Peu après, j’ai entendu le vicaire lui souffler « vous faites ça encore une fois et vous ne remettez plus jamais les pieds dans cette paroisse[122] ».

Un exemple de refus des sacrements qui a été traité par la Cour suprême du Canada est le « cas Stellerton », qui concerne le refus de donner l’Eucharistie à six fidèles catholiques parce qu’ils voulaient la recevoir en position agenouillée et non pas debout. La Cour a donné raison aux plaignants[123].

En réalité, il y a eu de nombreux recours hiérarchiques qui ont été résolus par la Curie romaine :

La Congrégation s’inquiète du grand nombre de plaintes… et considère que le refus de donner la Sainte Communion à un membre des fidèles, sous prétexte de sa position à genoux, constitue une violation grave d’un des droits les plus fondamentaux des fidèles chrétiens… Un tel refus ne devrait jamais avoir lieu… sauf dans des cas… de péché public sans repentance de la part de la personne ou de son obstination dans l’hérésie ou le schisme.   Lorsque la Congrégation a approuvé la législation concernant la station debout pour recevoir la Sainte Communion… elle l’a fait en stipulant que les communiants… qui s’agenouillent ne doivent pas se voir refuser la Sainte Communion… En fait, Son Éminence le Cardinal Joseph Ratzinger a récemment souligné… que s’agenouiller pour recevoir la Sainte Communion a en sa faveur une tradition séculaire tout à fait appropriée à la lumière de la présence réelle, véritable et substantielle de Notre Seigneur Jésus-Christ sous les espèces consacrées[124].

Dans un autre domaine, citons la contestation d’un évêque par ses diocésains, pour lequel Charles Wackenheim semble dire qu’un recours administratif ne s’appliquerait pas[125].

A la suite de nominations d’évêques fortement contestées, les diocésains concernés demandent comment ils peuvent se faire entendre, non par des individus ou des lettres anonymes, mais publiquement et collectivement. Le Code n’en dit rien. On aimerait également savoir ce que le droit prévoit lorsqu’un évêque a failli manifestement à sa mission. Le code envisage cette éventualité… dans le cas d’un curé (c. 1740)[126]

De tels cas ne sont pas si rares.

En 2015 en France, des diocésains été confrontés à une décision de leur évêque imposant aux parents de payer le denier du culte avant d’inscrire leurs enfants au catéchisme. Les diocésains s’adressent à « Canonistes sans frontières » pour s’enquérir du droit existant[127]. Il apparaît que cette décision provient du fait que l’évêque vient de déposer un permis de construire pour sa future résidence, mettant ainsi en péril les finances du diocèse. Après s’être enquis des procédures de recours hiérarchique et contentieux, les diocésains concernés décident de ne pas porter l’affaire sur la scène publique pour ne pas faire de tort à l’Église, ni d’ailleurs d’entamer un recours jugé trop complexe. L’évêque est écarté peu après, pour limite d’âge.

 

Après ce cas resté secret, en voici un autre, porté sur la place publique :

En 2002 aux Etats-Unis, le journal Boston Globe mène une enquête révélant publiquement la responsabilité personnelle du Cardinal-Archevêque, qui a couvert les agissements de plusieurs dizaines de prêtres pédophiles de son diocèse. Indépendamment de son caractère partisan, le film Spotlight[128] montre que la justice de l’Église a omis d’entendre sérieusement les victimes.

 

Dans le cas précédent, c’est la presse, et non la justice ecclésiastique, qui a permis de protéger les victimes. Il en a d’ailleurs résulté une récente évolution du droit sur la mutation et la démission d’un évêque, lorsqu’il commet une négligence mettant des mineurs en danger[129]. Voici un autre type de cas où la conférence épiscopale s’est rangée du côté de l’opinion publique après qu’un scandale financier a été révélé.

En 2013 en Allemagne, le président de la Conférence épiscopale s’est associé à une pétition des diocésains qui aboutissent à la mutation de l’évêque : Les fidèles du diocèse de Limbourg, outrés, ont demandé la démission de Mgr. T. Plus de 4 000 d’entre eux ont déjà signé une lettre ouverte contre lui. À Limburg, près de Francfort, la population est choquée. Dimanche, environ 200 opposants se sont rassemblés devant la cathédrale pour protester contre « l’évêque de luxe », comme l’a surnommé la presse, et sa « folie des grandeurs. »[130]

 

Dans d’autres cas la pétition des diocésains est jugée inacceptable :

En 2013, au Nigeria, la nomination de Mgr Okpaleke à la tête du diocèse d’Ahiara est refusée par une partie des catholiques pour des raisons ethniques. Le cardinal Onaiyekan est nommé administrateur apostolique d’Ahiara en attendant de parvenir à une solution. En 2017, une délégation du diocèse accompagnée par le président de la Conférence épiscopale du Nigeria se rend à Rome où elle est reçue par le pape François. Celui-ci écoute les membres de la délégation et juge le « caractère inacceptable de la situation à Ahiara » en se réservant de prendre les mesures opportunes[131].

 

Les développements précédents montrent que la justice ecclésiastique administrative intervient quelquefois dans des litiges opposant des laïcs avec la hiérarchie ecclésiastique, mais la fréquence de ces interventions est faible, ce qui incite à désirer une justice administrative plus proche des personnes, par exemple au niveau national.

 

 

 

[1] D’après l’annuaire pontifical 2016.

[2] Sarah (Card. Robert), Dieu ou rien, Propos recueillis par Nicolas Piat, Paris 2016, ed Pluriel, p. 249/420.

[3] Paul VI, Lumen Gentium, Constitution dogmatique de l’Église, n° 37.

[4] Cf. Kasper (Card. William), L’Église catholique, son être, sa réalisation, sa mission. Paris, Cerf, Collection Cogitatio Fidei  avril 2014, p. 300/592.

[5] Paul VI (bienheureux pape), Apostolicam actuositatem,

[6] Il a été promu préfet du dicastère pour les laïcs et la famille et la vie.

[7] Farrell (Mgr. Kevin) préfet du dicastère pour les laïcs, la famille et la vie, d’après Anne Kurian, Zénit, 16 novembre 2016.

[8] Kasper (Card. William), L’Église catholique, op. cit. p. 15.

[9] Kasper (Card. William), L’Église catholique, op. cit. p. 295.

[10] Centre saint Augustin de Dakar, colloque du 22-24 février 2017 sur le thème sur : « Le repentir : genèse (s) et actualité (s)».

[11] Extraction au 7 novembre 2016 : 88 recours ont été déposés par des hommes, 43 par des femmes, 32 par des hommes ou des femmes.

[12] Les 27 recours émanent d’associations (13 cas), d’évêques (3 cas), de prêtres (4 cas) ou de demandeurs non-identifiés (7 cas). A titre d’exemple, un recours provenant d’un évêque a été examiné le 13 juin 1987 par le Collège de la Seconde section, qui a constaté une violation de la procédure suivie par le Conseil pontifical pour les laïcs. Cf. ASS (1987), p. 1293.

[13] Voici la répartition par dicastère des 184 recours de notre échantillon concernant les laïcs :

  • Congrégation pour le clergé dans 110 cas
  • Conseil Pontifical pour les laïcs dans 35 cas
  • Congrégation chargée des consacrés dans 17 cas
  • Congrégation pour l’éducation catholique dans 7 cas
  • Congrégation pour le culte divin dans 3 cas
  • Congrégation pour les Églises orientales dans 3 cas
  • Congrégation pour l’évangélisation des peuples dans 3 cas,
  • Congrégation pour les évêques dans 3 cas
  • Conseil pontifical pour la famille dans un cas
  • Tribunal suprême de la Signature apostolique dans un cas (défenseur du lien)
  • Fabrique de saint Pierre dans un cas

[14] Des causes portant sur les mêmes objets sont également soumises par des clercs ou des religieux. Dans la mesure où elles sont traitées à propos des laïcs, nous n’y reviendrons pas dans les chapitres suivants.

[15] Abbal (Elisabeth), Paroisse et territorialité dans le contexte français, Paris, Cerf, 2016, 520 p.

[16] Plouchart (Louisa),, 2013, « Le diocèse de Rennes, Dol et Saint-Malo : maillage paroissial et pratiques religieuses », p. 19 à 63, In B. Merdrignac, D. Pichot, L. Plouchart, G. Provost (Dir.) La paroisse, communauté et territoire, Constitution et recomposition du maillage paroissial, Rennes,  Ed. PUR, Coll. Histoire, 541 P.

[17] Congrégation pour le clergé, « Procedural guidelines for the modification of parishes and closure of parish churches », Roman replies, (2013), 5-12, traduit et adapté de l’anglais par l’auteur.

[18] Tel est par exemple dans le cas cité par RR (2013), p. 13-17 à propos d’un litige sur l’usage inconvenant d’ue église. (c. 1210)

[19] Traduction de l’auteur d’après ASS 1992, p. 1117, concernant le recours n° 22036.

[20] Diocèse espagnol créé en 1995

[21] Lleida en espagnol.

[22] On désigne habituellement sous le nom de Frange d’Aragon (Franja de Aragón en castillan, Franja d’Aragó en catalan, Francha d’Aragón en aragonais) un territoire de la communauté autonome d’Aragon, en Espagne, limitrophe de la Catalogne et où la langue traditionnellement parlée est le catalan.

[23] Aznar (Gil, F. R.) y Sanchez (Roman, R). Los bienes artísticos de las parroquias de la Franja: El proceso canónico (1995-2008), Fundación Teresa de Jesús, Zaragoza, 2009.

[24] Par exemple le site d’histoire de l‘art d’Antonio Valm

as : www.antonionavalmas.net/spip.php?article56 consulté le 11 août 2015.

[25] Antonio Valmas relate 444 étapes sur le site précité.

[26] Ravinel (Sophie De), « Des maires sont contraints de détruire leur église. » Le Figaro, 18 mai 2007.

[27] www.patrimoine-religieux.fr/

[28] L’Eglise saint Louis de Lille a été transformeée en pôle de sauvegarde du patrimoine

[29] « Canon 1214 : Par église, on entend un édifice sacré destiné au culte divin où les fidèles ont le droit d’entrer pour l’exercice du culte divin, surtout quand il est public.

[30] Il existe des exceptions où tout ou partie d’une église peut être utilisé à des usages autres que le culte sans que l’église perde son caractère sacré. C’est le cas notamment si elle est fermée temporairement, ou prêtée pour un temps à une communauté chrétienne non-catholique qui la remet ensuite en l’état. Il en va de même si une partie de l’église est affectée à des usages autres que ceux du culte (administration, salle de rencontre, etc.) sous réserve que l’église ne  soit pas endommagée. Ainsi la pose d’antennes sur le toit ou de publicités sur les murs pendant des travaux sont possibles sans que l’église ne perde son usage sacré. Cf. Nicholas Schöch, OFM, « Relegation of churches to profane use (c. 1222, §2) : Reasons ad procedure », the Jurist, 67 (2007) 485-502

[31] Canon 1222 : § 1 « Si une église ne peut en aucune manière servir au culte divin et qu’il n’est pas possible de la réparer, elle peut être réduite par l’Evêque diocésain à un usage profane qui ne soit pas inconvenant. » § 2 : « Là où d’autres causes graves conseillent qu’une église ne serve plus au culte divin, l’Évêque diocésain, après avoir entendu le conseil presbytéral, avec le consentement de ceux qui revendiquent légitimement leurs droits sur cette église et pourvu que le bien des âmes n’en subisse aucun dommage, peut la réduire à un usage profane qui ne soit pas inconvenant. »

[32] De tels cas étaient déjà prévus par  le Concile de Trente, puis par le canon 1187 du code de 1917.

[33] Schöch Nicholas, “Deutsche Welle, Churches Profit from Foundation” Boom, 29 janvier 2006, www.dw/article/0,2122,1846722,00.html, p. 493, note 27.

[34] Provost (James H.), « Some Canonical Considerations on Closing Parishes », The Jurist, 53 (1993), 362.

[35] « Une vague de démolition d’églises menace le patrimoine » in Le Point.fr du 13 août 2013, consulté le 15 juillet 2015 sur www.lepoint.fr/culture/une-vague-de-demolition-d-eglises-menace-le-patrimoine-13-08-2013-1713609_3.php

[36] Massin Le Goff (Guy), Conservateur départemental des antiquités et objets d’art du Maine-et-Loire, Conseil général du Maine-et-Loire, écrit : « Les violentes réactions de certains habitants de cette commune face à ce projet ne sont que le reflet d’une émotion profonde qui génère souvent des dégâts d’ordre politique mais surtout sociologique. Les opinions s’affrontent, les brouilles surgissent, les recours en justice se multiplient, les fractures entre partisans et opposants se répercuteront pendant des décennies, faisant peser sur la commune un climat lourd de rancœurs. » in « Polémique autour de la démolition des églises : le cas du Maine-et-Loire mis en ligne le 03 novembre 2009, consulté le 15 juillet 2015. URL : http://insitu.revues.org/5563

[37] Circulaire du ministre de l’Intérieur, de l’Outre-mer, des collectivités territoriales  et de l’immigration, référencée NOR/IOC/D/11/21246C,  datée du 29 juillet 2011, adressée à M. le préfet de police et à Mesdames et Messieurs les préfets (métropole) sur les édifices du culte : propriété, construction, réparation et entretien, règles d’urbanisme, fiscalité, publiée au Journal Officiel et sur le site de Legifrance : http://circulaire.legifrance.gouv.fr/pdf/2011/08
/cir_33668.pdf

[38] Habert (Mgr. Jacques), « Ces églises qui font l’Église » Document de l’épiscopat,  Conférence des évêques de France, n° 6/7, Paris 2017.

[39] Voir par exemple « US Catholics win rare victories on church closings » in USA today, March 5, 2011.

[40] La Congrégation s’occupe de tout ce qui regarde le Saint-Siège pour l’administration des biens ecclésiastiques, et spécialement l’administration droite de ces biens, et elle concède les approbations ou les reconnaissances nécessaires ; en outre, elle veille à ce que soit assurée la subsistance et la prévoyance sociale des prêtres.

[41] Plusieurs cas sont décrits dans la revue « Roman replies and CLSA advisory Opinion », 2011, p. 5-14. et RR (2013), p. 13-17 à propos d’un litige sur l’usage inconvenant d’une église. (Canon 1210).

[42] Prot n° 17447/85 CA publié dans Ministerium Justitiae…, Montréal, 2011, 441-528.

[43] Prot n° 21024/89 CA, publié dans Notitiae 26 (1990) 142-144 et dans Ministerium Justitiae, op. cit. p. 461-466.

[44] Prot. N° 25500/94 CA publié dans Ministerium Justitiae, op. cit. p. 483-501.

[45] Prot. N° 24388/93 CA publié dans Ministerium Justitiae…, op. cit,. p. 502-528.

[46] Daneels (Mgr; Frans), « Soppressione, unione di parrochie e riduzione ad uso profano della chiesa parrochiale », Ius Ecclesiae 10 (1998) 111-148.

[47] Daneels (Mgr. Frans) « The reduction of a Former Parish Church to Profane use in the light of the Recent Jurisprudence of the Apostolic Signatura » in « Quod justum est et aequum. Scritti in onore del Cardinale Zenone Grocholewski per il cinquantesimo di sacerdocio », a cura di Mgr Marek Jedraszewski, Facoltà teologica dell’università di Poznan. 2013, (p. 165-169)

[48] Montini (Mgr Gian-Paolo), promoteur de la justice au tribunal suprême de la Signature apostolique  « La cessazione degli edifici di culto », Quaderni di diritto ecclesiale 13 (2000) 281-299.

[49] Schöch (Nicolas), Vice-défenseur du lien au tribunal de la Signature apostolique « Relegation of churches to Profane Use (c . 1222, §2) : Reasons and Procedures », The Jurist 67 (2007), 485-502.

[50] Canosa (Javier), « Giustizia amministrativa eclésiastica e giurisprudenza », in Ius ecclesiae XXIII, 2011, p. 563-582.

[51] Prot n° 21024/89 CA, Notitiae 26 (1990) 142-144 et Ministerium Justitiae, op. cit., p. 461-466.

[52] Daneels (Mgr Frans), « Soppressione, unione di parrochie e riduzione ad uso profano della chiesa parrochiale », Ius Ecclesiae 10 (1998) 111-148, cité par Nicholas Schöch, op. cit. p. 488 et note 12.

[53] Mgr Daneels s’appuie notamment sur la sentence coram Caffara du 21 mai 2011, prot. 41719/08 CA

[54] Mgr Daneels s’appuie notamment sur la sentence coram Burke du 21 mai 2011, prot. 41719/08 CA ainsi que prot. 45242/11 CA.

[55] Idem.

[56] Prot. 31208/00 CA, décision non publiée citée par Nicholas Schön (op. cit.. p. 502 note 59.)

[57] Mgr Daneels s’appuie sur trois sentences : coram Burke (Prot. 42278/09 CA) du 21 mai 2011 ; coram Caffara (Prot. 41719/08 CA) du 21 mai 2011,  ainsi que sur le décret du congrès du 11 mai 2012 (Prot. n° 45190B/11 CA).

[58] Cf. can. 1238 § 2.

[59] Coram Burke, 11 mai 2011, Prot41719/08 CA, The Jurist 73 (2013) 597-643 Traduit de l’anglais dans le texte de la décision latine « The said premises are free from encombrances that the said party of the first part will forever warrant the title to said premises. »

[60] Paprocki (Thomas J.), « Parish closings and administrative recourse to the apostolic see: recent experiences of the archdiocese of Chicago, The Jurist, 55 (1995), p. 894.

[61] Traduction par l’auteur du texte anglais de Mgr Daneels in op. cit. p. 168.

[62] Coram Burke, 11 mai 2011, Prot. 41719/08 CA, The Jurist 73 (2013) 597-643

[63] Rhode (Prof. Ulrich), « la funzione d’insegnare della chiesa in un contesto secularizzato » Conférence donnée à Rome le 6 octobre 2017 lors du 16ème colloque itnernational de la Consociatio.

[64] Prot 30266/99 CA cité par ASS (1999) p. 936.

[65] Prot 30677/99 CA et 30678/99CA cités par ASS (1990), p. 892.

[66] Cas non référencé, cité par ASS (1978) p. 625.

[67] Prot. 36007/04 CA non admis à la discussion par décision du Congrès le 01/06/06 puis du Collège le 28/04/2007.

[68] Prot. 23208/92 CA non admis à la discussion par décision du Congrès du 23/11/1992.

[69] Un diacre marié allemand a déposé un recours en 1987 pour avoir été suspendu mais sa demande n’a pas été admise à la discussion. (ASS (1988), p. 1405)

[70] Cf. ASS (1988), p. 1405Coram Stickler, le 28 janvier 1988. N° d’enregistrement (Prot) non indiqué,

[71] Cas cité par ASS (1987), p. 1292.

[72] Prot 18881/87 CA

[73] Cf. art 136 du Règlement général de la Curie romaine, 1999,

[74] Jean-Paul II, Exhortation apostolique Christifideles laici, n° 29.

[75] Miayoukou (Hervé), « L’émergence en droit canonique des associations privées de fidèles » L’année canonique, 52, 2010, p. 249-256.

[76] Cf. S.C. du Concile, résolution Corrienten., 13 novembre 1920 : AAS 13 (1921), p. 139.

[77] Paul VI, Apostolicam actuositatem, n° 19.

[78] Jean-Paul II (saint), Christifideles laici

[79] Site du Conseil pontifical des laïcs, www.laici.va, consulté le 27 novembre 2011 à la rubrique « vingt ans après »

[80] François (pape), Discours du 17 juin 2016 devant l’Assemblée du Conseil pontifical pour les laïcs.

[81] Echappé (Olivier), « Les biens des associations d’Église », L’année canonique, 47, 2005, p. 51-62.

[82] Ryłko (Cardinal Stanisław), Archevêque titulaire de Novica, Président du Conseil Pontifical pour les Laïcs,  « préface du répertoire des associations » consultée sur le site du Vatican le 17 novembre 2011 à l’adresse : http://www.laici.va/content/laici/fr/sezioni/associazione/repertorio/preface_du_card_stanisawryko.html

[83] Colonne 1 : millions de fidèles ; colonne 2 : nombre d’associations de fidèles reconnues ; colonne 3 : nombre d’associations de fidèles reconnues par million de catholiques = ratio col. 1 / col 2.

[84] Colonne 4 : nombre d’habitants ; colonne 5 nombre d’associations civiles ; colonne 6 nombre d’associations civiles reconnues par million d’habitants ; clonne 7 = colonne 1 / colonne 4.

[85] Ratzinger (Cardinal Joseph), « Entretiens sur la foi », propos rapportés par Vittorio Messori, Paris 1985, Fayard, p. 48/252.

[86] CIC/83 C 215

[87]. § 3. Aucune association privée de fidèles n’est admise dans l’Église à moins que ses statuts ne soient reconnus par l’autorité compétente.

[88] Les conditions pour obtenir la personnalité juridique sont précisées au canon 114 : il faut que les associations soient : 1) ordonnées à des fins (utiles, cf. §3) qui s’accordent avec la mission de l’Église (œuvres de piété, d’apostolat, de charité, cf. §2) ; 2) orientées sur un objet plus large que les intérêts des membres ; 3) pourvues de moyens suffisants pour assurer leur pérennité.

[89] § 2. Que les fidèles s’inscrivent de préférence aux associations érigées, louées ou recommandées par l’autorité ecclésiastique compétente.

[90] Can 299 § 2. De telles associations, même si elles sont louées ou recommandées par l’autorité ecclésiastique, sont appelées associations privées

[91] Can. 300 — Aucune association ne prendra le nom de « catholique » sans le consentement de l’autorité ecclésiastique compétente, selon le can. 312.

[92] § 3. Les associations de fidèles érigées par l’autorité ecclésiastique compétente sont appelées associations publiques.

[93] Can. 302 — Sont appelées associations cléricales celles qui, sous la direction des clercs, assument l’exercice de l’ordre sacré et sont admises comme telles par l’autorité compétente.

[94] En termes de compétences, le Tribunal suprême précise que les recours relatifs aux associations pieuses sont du ressort de la Congrégation pour le clergé et non du Conseil pour les laïcs (Prot. 13782/81 CA)

[95] JEAN-PAUL II, Exhortation post-synodale Christifideles laici du 30-12-1988 (AAS 81 [1989] 393-521 ; DC 86 [1989] 152-196

[96] François (Pape), Evangeli Gaudium, n° 130.

[97] Forestier (Luc) : « À propos des “critères d’ecclésialité” de Jean-Paul II au pape François », La Croix, 19 mars 2017.

[98] Il serait par exemple envisageable de prévoir une gradation dans la reconnaissance pour les associations privées simples :

  • un simple examen de l’existence des statuts pour les associations régies par le canon 299 §3 ;
  • un examen au fond des statuts pour s’assurer qu’ils respectent le droit de personnes et le droit de l’Église pour obtenir la personnalité juridique, conformément aux canons 322 ;
  • L’exigence de trois années d’existence et l’examen des critères d’ecclésialité pour les associations louées et recommandées par l’Église, conformément au canon 299-3.

[99] Martinez Sistach (cardinal Lluis), Associations of Christ’s Faithful, coll. Gratianus, Montréal, Wilson & Lafleur Ltée, 2008, 24×16, p. 113/174 p.

[100] Navarro (L.), Diritto di associazione e associazioni di fedeli 1991, pp. 290,, cf. Nte 2.

[101] Pagé (Roch), « La reconnaissance des associations de fidèles » in Studia canonica, 19, (1985), p. 332-333.

[102] Pettinato (S.), « Le associazioni dei fedeli: la condizione giuridica dei battezzati », in Il fedele cristiano, Bologna, 1989, p. 234 Cité par P.A. Bonnet, « Recognitio statutorum consociationum privatum », in Periodica 90 (2001) 3-43, p. 41 note 184.

[103] Feliciani (Giorgio). “Il diritto di associazione e le possibilità della sua realizzazione ell’ordinamento canonico”, in Das konsoziative Element in der Kirche. Akten des VI. Internationalen Kongresses für kanonisches Recht, München, 14.-19. September 1987, St. Ottilien, EOS, 1989, pp. 397-418. Cité par P.A. Bonnet, Recognitio statutorum consociationum privatum, in Periodica 90 (2001) 3-43, p. 41 note 184.

[104] Bonnet (Piero Antonio),  La « recognitio degli statuti delle associazioni private quale granzia di pluralismo nella chiesa (can 299 § 3 CIC), Periodica 89 (2000) 531-563 et Periodica 90 (2001), p. 3-43.

[105] c. 300 § 3. Aucune association privée de fidèles n’est admise dans l’Église à moins que ses statuts ne soient reconnus par l’autorité compétente.

[106] Riposte catholique, 23 juin 2017.

[107] https://agape-lepuy.fr/qui-sommes-nous/historique-agape-nd-du-puy/ consulté le 11 juillet 2017.

[108] Salon Beige 9 juillet 2017 ;  Riposte catholique, 10 juillet 2017.

[109] ASS (2014), p. 845.

[110] Navarro (Luis) “La tutella giudiziaria dei sogetti senza personalità giuridica canonica » in Studi giuridici XLV, Roma 1977, p. 211-228.

[111] Numéro d’enregistrement (Prot) non indiqué, Cf. ASS (1989), p. 1218, 9ème cas.

[112] Conseil pontifical pour l’interprétation des textes législatifs. « A propos du canon 299 §3 » DC 86 [1989] 214

[113] Prot. 39305/CA, RR (2007), p. 43-44. « Canon 1311 and followings ».

[114] Prot. 48091/13 CA, in Monitor eccelsiasticus, CXXXI (2016), p 37-39.

[115] Echappé (Olivier), « Les biens des associations d’Église », L’année canonique, 47, 2005, p. 51-62.

[116] Notitiae 26 (1990) 711-713 et Ministerium Iustitiae, op. cit., p. 603.

[117] Mbala-Kyé (Achille) « une paroisse de Yaoundé en recherche d’autofinancement, Rigueur de gestion et coresponsabilité », recherches africaines n°3, imprimerie saint Paul Yaoundé, 1998 p. 8.

[118] Bidzogo (Emmanuel), Eglises en Afrique et autofinancement, L’Harmattan, Paris 2006, p. 87 et 88/140.

[119] Zalbidea (Prof. Diego) Significato e limiti del concetto di trasparenza nella gestione dei beni. 19ème congrès de la Consociatio, www.consociatio.org/congresso2017/doc

[120] C. 1287 §2. Les administrateurs rendront compte aux fidèles de l’usage des biens que ceux-ci ont offerts à l’Église, selon des règles à établir par le droit particulier.

[121] Forum de la famille catholique, http://forumfc.clicforum.com/t2736-Refus-de-la-communion-a-genoux.htm

[122] Ibidem

[123] Cogan (Patrick J.), the protection of rights in hierarchical churches: an ecumenical survey, The Jurist, 46 (1986), p. 227. Traduit de l’anglais par l’auteur.

[124] Medina Estevez (cardinal Jorge), Notitiae, revue de la Congrégation pour le Culte divin et la Discipline des Sacrements, novembre-décembre 2002, cité par le forum de la famille catholique.

[125] Pour ma part, j’aurais tendance à penser qu’un recours hiérarchique voire contentieux, est théoriquement possible, mais que ses chances d’aboutir favorablement dans des délais raisonnables sont minimes, si bien que les diocésains lui préfèrent la voie diplomatique ou la voie médiatique.

[126] Wackenheim (Charles), Une Église au péril de ses lois, Montréal, 2007, Novalis, p. 27/204 p.

[127] www.canonistes.org/un-pretre-peut-il-mettre-des-conditions-a-linscrition-au-catechisme-et-notamment-le-fait-davoir-paye-le-denier-du-culte/

[128] Il en a notamment résulté le film Spotlight. Celui-ci a obtenu un oscar au festival de Cannes de 2016, par un jury qui n’avait sans doute pas une position très objective par rapport à l’Église catholique.

[129] François (Pape), Lettre apostolique en forme de motu proprio : « Comme une mère aimante »

[130] Cf. Apic et KNA, www.news.va/fr/news/les-depenses-faramineuses-de-leveque-de-limbourg-e

[131] Zenit, 8 juin 2017, Anne Kurian

La giustizia di fronte ai carismi

Ecco un estratto del libro sul « La giustizia amministrativa nella chiesa cattolica » (imprimatur del testo francese ricevuto il 11 ottobre 2017)

 

Capitolo 7: La giustizia amministrativa di fronte ai carismi

Questo capitolo si differenzia dai precedenti, poiché non si concentra molto sulla giurisprudenza dei ricorsi gerarchici o di contenzioso amministrativo[1], ma piuttosto sulle pratiche amministrative ecclesiastiche di fronte ai carismi.

Nella prima parte, l’analisi si concentra sul fenomeno delle rivelazioni private con il diritto applicabile, le prove e le sanzioni imposte ai veggenti ed ai loro amici, ed infine sui ricorsi di contenzioso amministrativo, presso la giustizia ecclesiastica e la giustizia civile.

Una seconda parte si concentra sulla giustizia di fronte ai nuovi movimenti religiosi ed alle presunte sette, con il diritto applicabile, le sanzioni imposte e i possibili ricorsi.

  1. Le rivelazioni private

 

Dal tempo di Gesù, suo zio Zaccaria, sua madre Maria e suo padre Giuseppe hanno ricevuto la visita dell’Angelo, mentre gli apostoli hanno ricevuto la visita di Gesù risorto[2]. In seguito, un gran numero di santi hanno ricevuto rivelazioni private[3]. Infatti,

apparizioni e segni soprannaturali scandiscono la storia, entrano nel vivo delle vicissitudini umane e accompagnano il cammino del mondo, che sorprende credenti e non credenti [4]

 

 

Ancora oggi, ci sono più rivelazioni private che pensiamo, ma la maggior parte di esse restano segrete. Come avviene di solito quando sono rivolte ad una persona per incoraggiarla o aiutarla a realizzare la sua vocazione. A volte la fiducia di un amico o la lettura di un libro permette di prenderne conoscenza come, per esempio, nel caso di S.E. Giovanni Pierre Kutwa, cardinale arcivescovo di Abidjan:

Sai, Francesco, (così ama chiamare l’autore) durante questo passaggio in ospedale, sono stato visitato da colui che avevo scelto di servire: Gesù Cristo. Un giorno, ho provato dei minuti di dolore atroce, ho sofferto terribilmente e improvvisamente tutto si è fermato e mi sono addormentato. E’ stato in quel momento, che ho visto Gesù. Era molto luminoso ed io, in un gesto spontaneo, mi sono subito inginocchiato ai suoi piedi e li ho stretti tra le mie braccia. Gesù mi ha chiesto: « Perchè hai paura ? Non temere. La tua missione non è terminata. Ritorna. »[5]

Definiremo queste rivelazioni «private di carattere personale».

Invece, altre rivelazioni private comportano messaggi che il beneficiario è invitato a far conoscere. Queste rivelazioni, che definiremo «private a scopo pubblico» pongono un problema culturale nel mondo occidentale, segnato dal materialismo, che respinge gli aspetti mistici e persino l’idea stessa di Dio. Si pone anche un grave problema di discernimento alla Chiesa riguardo alla natura ed al contenuto delle presunte apparizioni, e alle manifestazioni che le accompagnano. E’ esattamente ciò che ha detto la Congregazione per la dottrina della fede nella sua lettera sulla gerarchia ed i carismi:

  1. Tra i doni carismatici, distribuiti liberamente dallo Spirito, numerosissimi sono quelli che, accolti e vissuti dalla persona all’interno della comunità cristiana, non necessitano di norme particolari. Invece, quando un dono carismatico si presenta come «carisma originario» o «fondatore», ha bisogno di un riconoscimento specifico in modo che una tale ricchezza si articoli adeguatamente nella comunione ecclesiale e si trasmetta fedelmente nel tempo. Qui compare il compito decisivo di discernimento che appartiene all’autorità ecclesiastica. Riconoscere l’autenticità del carisma non è sempre un compito facile, ma è un servizio necessario che i pastori sono tenuti a svolgere[6].

Il sito americano «Miracle hunter[7]» elenca circa 700 rivelazioni private[8], in forte aumento nel corso del tempo: in media ce n’è una all’anno negli anni dal 1900 al 1925, poi circa 35 in media all’anno negli anni dal 1970 al 2000[9], per un totale di 410 apparizioni nel periodo dal 1967 al 2016. L’abate Laurentin spiega questo aumento improvviso non con una più grande frequenza di rivelazioni private ma con l’evoluzione del diritto canonico in vigore:

Questo è dovuto all’abolizione del Canone 1399, § 5 del vecchio Codice di diritto Canonico che «vietava i libri ed i libelli che raccontano nuove apparizioni, rivelazioni, visioni, profezie e miracoli, o lanciano nuove devozioni, anche con il pretesto che sono private» (e del Canone 2318 che scomunicava i trasgressori)[10].

 

 

Numero di apparizioni per decade censite da Miracle Hunters

 

Senza contare quella di Lipa, di cui parleremo in seguito, la Chiesa ha riconosciuto 16 apparizioni di Maria, di cui 5 durante il periodo del nostro studio[11]. La pietà popolare che le accompagna è una delle espressioni del «sensus fidei», ma questa va controcorrente rispetto alla società razionale attuale:

Le apparizioni, onorate dalla pietà popolare nei nostri santuari, sono disprezzate nella comunità teologica, compresa quella laica.[12]

Questa ipotesi può essere illustrata in particolare con le parole del vescovo di Quimper e Léon a proposito di Kérizinen:

La fede cristiana non fa parte dell’ordine dei sentimenti: è accoglienza di Gesù Cristo, del suo Vangelo, della sua Chiesa. […] Coloro che si sono lasciati fuorviare da queste presunte rivelazioni, possano aprire gli occhi alla sola verità di Gesù Cristo, che non esclude la Vergine ma la mette al suo posto, invece di rinchiudersi in un ghetto senza apertura o senza speranza! Che essi meditino su tutte queste forti parole di San Giovanni della Croce, mistico, autentico ed inoltre Dottore della Chiesa: «Dandoci suo Figlio come l’ha fatto, lui che è la sua ultima e definitiva parola, Dio ha detto a tutti ed una sola volta e non ha più nulla da dire»[13].

Certamente, la Rivelazione è chiusa con la morte dell’ultimo apostolo, come scrisse San Giovanni della Croce commentando He 1,1-2, ma il catechismo aggiunge:

Eppure, anche se la Rivelazione è compiuta, non è completamente esplicitata; spetterà alla fede cristiana coglierne gradualmente tutta la portata. Nel corso dei secoli, ci sono state delle rivelazioni dette «private», di cui alcune sono state riconosciute dall’autorità della Chiesa. […] Il loro ruolo non è quello […] di «completare» la Rivelazione definitiva del Cristo, ma di aiutare a viverla più pienamente in un determinato momento della storia[14].

Poiché vi è tensione tra la fede popolare e la razionalità di alcuni[15], esaminiamo ora il diritto canonico applicabile.

 

  • Il diritto delle rivelazioni private

 

Quando un profeta parla in nome di Dio o quando una persona evoca o fa conoscere une rivelazione privata a carattere pubblico, si traduce inevitabilmente in una tensione tra lui e l’autorità della Chiesa, poichè entrambi pensano di agire in nome di Dio. Questa situazione pone un problema più grave di discernimento, per l’Ordinario del luogo di fronte alle parole di San Paolo:

Non spegnete lo Spirito, non disprezzate le profezie, ma sappiate discernere il valore di ogni cosa, quello che è buono, conservatelo (Tessalonicesi 5, 19-21)

Ma anche di San Matteo:

Sentirete parlare di guerre e di rumori di guerra. Fate attenzione! Non abbiate paura, perchè deve accadere, ma non è la fine. […] Molti falsi profeti sorgeranno, e sedurranno molte persone. (Matteo 24, 6-11)

Tre regimi di diritto positivo hanno regolato il metodo di discernimento nel corso del periodo studiato:

  • il 29 dicembre 1966, poco prima dell’inizio del nostro periodo di studio, la Congregazione per la dottrina della fede pubblica un decreto[16] approvato da Papa Paolo VI il 14 ottobre 1966, che abroga i canoni 1399 e 2318[17] del Codice del 1917 sull’imprimatur ed i libri religiosi, e che rende più flessibile la disciplina ecclesiastica relativa alle apparizioni, riconosciute o non[18]. Invece, in quel momento, non esistono norme procedurali particolari sulla condotta da tenere, al di fuori dei principi generali del diritto;
  • nel mese di novembre 1974, la sessione plenaria annuale della Congregazione per la dottrina della fede lavora sulle apparizioni private, e le sue conclusioni sono rivolte ai vescovi, ma non pubblicate[19];
  • il 14 dicembre 2011, la Congregazione per la dottrina della fede pubblica i criteri di discernimento, che consentono alle persone interessate di sapere qual è la legge in vigore[20]. Nella prefazione di questa pubblicazione, il cardinale prefetto indica:

Qesta Congregazione spera vivamente che la pubblicazione ufficiale delle norme procedurali per il discernimento delle apparizioni e rivelazioni presunte potrà aiutare i Pastori della Chiesa cattolica nel compito impegnativo del discernimento delle apparizioni, delle rivelazoni, dei messaggi e delle frasi sospette o, più generalmente, dei fenomeni straordinari o di presunta origine soprannaturale[21].

Queste norme procedurali invitano l’Autorità ecclesiastica ad agire con prudenza, in tre tappe

  1. giudicare innanzitutto secondo criteri positivi e negativi[22];
  2. poi, se questo esame porta ad una conclusione favorevole, consentire certe manifestazioni pubbliche di culto o di devozione, osservandole con grandissima prudenza (che equivale alla formula: «pro nunc nihil obstare»);
  3. infine, alla luce del tempo e dell’esperienza (in particolare l’abbondanza dei frutti spirituali procurati dalla nuova devozione), portare, eventualmente, un giudizio sull’autenticità e sul carattere soprannaturale.

Per la realizzazione della prima tappa, la Congregazione invita le autorità a realizzare un’indagine seria sui fatti, che pone la questione di sapere in quale misura questa raccomandazione crea o meno un diritto per i fedeli interessati.

Speriamo che questi nuovi elementi di procedure saranno rispettati nel futuro e che non si assisterà a battaglie di argomenti ad hominem che nascondono giochi di potere, come è avvenuto, per esempio, nelle apparizioni di Tilly-sur-Seulles, in Normandia, di cui l’arcivescovo di Parigi bloccò il riconoscimento, mentre esso era sulla buona strada a Roma[23].

 

  • Le difficoltà incontrate

 

In passato, l’indagine seria prevista attualmente per ottenere un discernimento positivo sul carattere dei fatti era molto spesso respinta a favore di un’applicazione affrettata dei criteri negativi, interpretati in modo unilaterale, senza nemmeno interpellare le persone interessate:

  • a Garabandal, Monsignor Juan Antonio del Val Gallo istituì una nuova indagine (completata nel 1986) tenuto conto degli errori che avrebbe riscontrato nel lavoro della prima commissione[24];
  • a Kérizinen in Bretagna (Francia), un duplice divieto imposto dal vescovo di Quimper e Léon, il 12 ottobre 1956 ed il 24 marzo 1961, che vietava ai fedeli di costruire una cappella privata e di andare a pregare il rosario sui luoghi delle presunte apparizioni, mentre nessuna inchiesta ha avuto luogo[25].
  • A Montichiari in Italia, Mons. Abate Francesco Rossi, allora curato della parrocchia, ha detto in privato che era assolutamente convinto dell’autenticità delle apparizioni di « Rosa mystica[26] » in quel luogo. Egli testimonia l’inchiesta canonica: il vescovo Giacinto Tredici nominò una commissione d’inchiesta. Ma, a mio parere, questa ha deciso di lavorare con un pregiudizio assolutamente negativo e non ha adempiuto in alcun modo al suo dovere poiché 1. Nesssun miracolo è stato esaminato, 2. Nessun testimone è stato sentito, 3 un medico ha dichiarato Pierina Gilli morfinomane, una calunnia assolutamente maligna.
  • A Dozulé in Francia, Padre Curty critica severamente la serietà dell’indagine canonica fatta[27], mentre il rifiuto del messaggio sembra provenire da false considerazioni[28];
  • A Lipa, nelle Filippine, né il vescovo sul luogo al momento delle apparizioni, né il suo coadiutore sono stati interrogati durante l’indagine fatta dai loro successori nel 1950. Al suo arrivo nel 2003, il nuovo arcivescovo, Monsignor Ramon Argüelles, non trovò nessun dossier negli archivi della diocesi. La nuova indagine che fece fare nel 1991 ha condotto ad un risultato contrario che gli ha permesso di riconoscere la soprannaturalità dell’apparizione e della pioggia di rose che è avvenuta dopo. Egli stesso scrive nel decreto di riconoscimento: il decreto del 1951 che negava il carattere soprannaturale dei fatti era «fin dall’inizio»  infangato da un’ «ombra di dubbio»,  poiché i vescovi firmatari del decreto che erano contro hanno finito per dichiarare, alla fine della loro vita, che credevano nella veridicità delle apparizioni[29]. Secondo Rafael M. Villongco[30], i membri della Commissione d’indagine sarebbero stati obbligati a firmare il decreto sotto la minaccia di scomunica.

Consapevole delle difficoltà derivanti dall’impatto con i carismi e dall’autorità, Papa Francesco ha approvato la lettera «Iuvenescit Ecclesia» della Congregazione per la dottrina della Fede, in data 14 marzo 2016, sul rapporto tra le donazioni gerarchiche e carismatiche per la vita e la missione della Chiesa:

Diversi carismi non hanno mai smesso di nascere in tutta la storia della Chiesa; eppure, è solo in tempi recenti che si è sviluppato una riflessione sistematica su questi temi. Questo è dovuto storicamente allo scisma montanista, venuto dall’antichità cristiana, e poi alle dottrine apocalittiche medioevali che hanno lasciato un segno negativo duraturo su ogni pretesa carismatica, associata ad un’epoca fantomatica dello Spirito Santo. Lumen Gentium supera completamente quest’eredità problematica, che distingue tra donazioni gerarchiche e carismatiche e che sottolinea «la loro differenza nell’unità». Queste grazie, dalle più eclatanti alle più semplici e a quelle più ampiamente diffuse, devono essere ricevute con azione di grazia e portare consolazione[31].

Il documento della Congregazione specifica i criteri di discernimento dei carismi, di cui uno consiste nell’accettazione dei momenti di prova che i loro beneficiari subiranno da parte della gerarchia ecclesiastica

Dato che il dono carismatico può possedere «una certa dose di vera innovazione, nella vita spirituale della Chiesa, e d’iniziativa nell’azione, che, a volte, può sembrare scomoda», un criterio di autenticità si manifesta nell’umiltà per sostenere gli imprevisti; il corretto rapporto tra autentico carisma, prospettiva di innovazione e sofferenza comporta una costante storica: è il collegamento tra il carisma e la croce. La nascita di eventuali tensioni esige da parte di tutti la pratica di una carità più grande, in vista di una comunione e di un’unità ecclesiale sempre più profonde[32].

Si pone la questione di sapere se l’accettazione passiva, che costituisce uno dei criteri di discernimento, è compatibile o non con la possibilità canonica offerta ai fedeli di rivendicare i loro diritti tenendo conto del bene comune della Chiesa.

Per tentare di rispondere, esaminiamo quali tipi di prove sono imposti ai profeti del nostro tempo e quali risposte sono date.

 

  • Le prove imposte

 

Dopo la realizzazione dell’indagine «seria», la Congregazione per la dottrina della fede raccomanda alle autorità competenti un percorso appropriato, che dipende dai tipi di situazioni incontrati[33]. E’ possibile:

correggere o prevenire abusi nell’esercizio del culto o della devozione, condannare dottrine errate o evitare pericoli di un misticismo falso o sconveniente, ecc.

Il decano Philippe Greiner chiarisce questa nozione di abuso nella sua tesi sull’inquadramento giuridico del proselitismo, distinguendo il proselitismo di buonafede e malafede.

A seconda delle circostanze, la pratica del proselitismo di cattiva lega può essere considerata come una colpa e giustificare misure disciplinari o corrispondere ad un reato punito dalla legge canonica e comportare l’applicazione di una pena a persone fisiche[34].

I suoi propositi possono applicarsi alle rivelazioni private, di cui i beneficiari applicano a essi stessi le parole degli apostoli: «non possiamo non parlare di ciò che abbiamo visto e sentito» (Atti 4,20), e a fortiori: «bisogna obbedire a Dio piuttosto che agli uomini» (Atti 5,29). Philippe Greiner descrive poi due principali misure disciplinari previste dal diritto canonico nei confronti di persone che si sarebbero rese colpevoli di proselitismo di malafede, o almeno giudicato come tale, cioè la revoca di un incarico pastorale e la soppressione di una associazione. Amplieremo il dibattito, distinguendo tre tipi di persone sanzionate:

  • I beneficiari delle presunte rivelazioni, e i loro amici,
  • I curati ed i religiosi che li accompagnano,
  • I pellegrini che praticano una forma particolare di devozione collegata a queste rivelazioni.

Esamineremo in seguito le vie di ricorsi, e il modo di considerare i diritti e doveri dei fedeli.

  • Le sanzioni verso i «veggenti » e gli amici

L’abbondante letteratura relativa alle revelazioni private fornisce numerose testimonianze sulle misure disciplinari che la Chiesa ha imposto ai fedeli che beneficiano di rivelazioni private e ai loro amici.

La misura più semplice consiste nel lasciare nell’ombra il veggente, e nel raccogliere i frutti della rivelazione all’interno della parrocchia:

Nel 1980, nel cuore del quartiere musulmano di Anoumambo ad Abidjan, a Gabriel, un immigrato del Burkina Faso, è stato chiesto dai suoi vicini di sotterrare un cristiano lasciato senza sepoltura. Dopo averlo fatto, si rende conto che i cristiani del quartiere non si conoscono. Dice il rosario con quelli che si presentano ed il loro numero aumenta, tanto che comincia ad aver paura dei musulmani che li circondano. Poi fa un sogno: la Vergine Maria lo invita a non aver paura e a costruire una cappella in quel luogo. Oggi, la cappella di  «Santa Maria Bangtaba [35]» è collegata alla parrocchia di San Pietro d’Anoumambo, e si trasformerà in parrocchia indipendente dedicata a Santa Maria madre di Dio. Il sogno è dimenticato e Gabriel è ormai solo e infermo.

 

Ecco un altro esempio in cui « la veggente » è stata sottoposta a dura prova prima che il Vescovo riconosca l’apparizione:

Dal 1931, Elisabeth Ravasio, divenuta poi madre Eugenia[36], nella Congregazione Nostra Signora degli Apostoli, vive in Francia una serie di esperienze estatiche e mistiche. Dialoga con il Padre, implorando la sua misericordia nel mondo e ricevendo le stimmate, conformemente al suo desiderio di soffrire con Gesù. Il 1° luglio 1932, riceve il suo primo messaggio del Padre per gli uomini[37], e il suo caso è sottoposto a Monsignor Caillot, vescovo di Grenoble. Nel mese di settembre 1933, quest’ultimo nomina una commissione d’inchiesta sui fatti. Gli esaminatori in un primo momento non ci credono ed aumentano le loro vessazioni fino a farla rinchiudere nell’ospedale psichiatrico di San Giovanni di Dio spiegando alla sua superiora: «Questa è la casa di salute delle donne, vi rimarrà fino a quando non dice la verità. Le verranno rimossi l’abito ed il velo, non farà più la comunione né la meditazione né la via crucis: potrà assistere alla santa messa. Poi la rimanderemo in Italia dove sarà imprigionata per il male che ha fatto alla Chiesa di Francia con i suoi interventi del Padre». La suora superiora la fa uscire e, il 28 dicembre, le viene ordinato di lasciare il noviziato e di andare in un’altra casa, come sanzione canonica. Per ordine del vescovo, parte per Pommiers… per 8 giorni. Poi l’indagine continua, ed ecco che il parere dei teologi evolve favorevolmente. Verso il 1935, la Commissione d’inchiesta dà un parere favorevole, e verso il 1943, Monsignor Caillot conclude con 1° virtù solide di suor Eugenia, 2° carattere preciso, legittimo e appropriato della sua missione, [contenuta nei messaggi] dal punto di vista della dottrina 3° intervento soprannaturale e divino come unica spiegazione logica e soddisfacente dei fatti accertati, 4° presenza del dito di Dio.

 

In quest’episodio, che avviene davanti al Concilio ma che oggi non è regolamentato manterremo il carattere sorprendente della pena canonica ufficiosa (la chiusura nell’ospedale psichiatrico) e ufficiale (il trasferimento a Pommiers), a titolo di sanzioni che sono state inflitte a suor Eugenia «per il male che ha fatto alla Chiesa di Francia». Di quale male si tratta, poichè il carattere soprannaturale delle rivelazioni è stato ufficialmente riconosciuto dall’Ordinario del luogo?

Veniamo al secondo episodio della sua vita:

Il 7 agosto 1935, nel capitolo generale della congregazione ND degli apostoli, Elisabeth è eletta superiora generale poi è rieletta il 7 agosto 1947. La sua fecondità è importante, al punto che il numero di case passa da 50 nel 1932 a 144 nel 1944 e che è l’ispiratrice dell’opera di Raoul Follereau a favore dei lebbrosi, del centro mondiale dei lebbrosi d’Adzopé in Costa d’Avorio. Per questo, la sua congregazione riceve la corona civica dal presidente della Repubblica francese, il 4 giugno 1950 a Parigi. In questa data, madre Eugenia è allontanata su richiesta della Congregazione della propagazione della fede, che le fece firmare una lettera di dimissione  «per motivo d’incapacità». Cosa ha fatto di male? Sappiamo che è stata denunciata a Roma da una suora gelosa che voleva essere nominata sua segretaria, per poter viaggiare con lei. A quanto pare, non ha saputo ciò che le veniva rimproverato e non ha potuto, né, forse, voluto difendersi. Ha poi avuto dei disagi importanti facendosi più volte togliere, poi rimettere l’abito religioso. Crea diverse opere per i poveri, poi l’Unitas cattolica nel 1953 che è riconosciuta come una pia unione nel 1964. Più volte, decisioni amministrative le impongono di chiudere le case che ha creato, e di cambiare città. Ogni volta obbedisce, attirando l’incomprensione delle sorelle che l’hanno seguita «Espellerci?Ma cosa abbiamo fatto ?»  Madre Eugenia testimonia: «L’arcivescovo di Reggio ha messo come superiora e Direttrice generale tre persone senza che queste nomine siano state approvate dalle case. Ero considerata come una semplice pensionata, senza nessuna voce in capitolo, con divieto di andare dalle autorità religiose e civili. Divieto di agire per l’Unitas cattolica […] Per 11 anni, dal 1957 al 1968, ho vissuto nella contraddizione! Quando cominciavo a fare qualcosa per l’opera, mi mettevano nell’impossibilità di continuare …»  Nonostante la Santa Sede sia intervenuta in suo favore nel 1966, la memoria di madre Eugenia oggi è offuscata da un fascicolo a carico, tenuto segreto alla casa madre delle sorelle ND degli apostoli, e dalla causa civile promossa dalle sue oppositrici. Attualmente, un numero crescente di fedeli cattolici vorrebbe che sia fatta luce su questa questione, tra le sorelle della congregazione ND degli apostoli.

 

Siamo testimoni di sanzioni canoniche che consistono nella revoca di incarichi pastorali delle tre superiore delle case delle case dell’Unione Cattolica, dell’impedimento dei diritti di voto di Madre Eugenia all’interno della sua congregazione. Non si conosce il motivo che è alla base di queste sanzioni, che restano sconosciute, ma che hanno un collegamento con una rivelazione privata, il cui carattere soprannaturale tuttavia è stato riconosciuto[38]. Anche se il caso di madre Eugenia è vecchio, riguarda il nostro studio, poichè la questione oggi non è risolta. In effetti, il cancelliere della diocesi di Grenoble continua a prendere decisioni amministrative relative a madre Eugenia, rifiutando per esempio, il 26 agosto 2014, di aprire i suoi archivi per questo lavoro di ricerca:

Non diamo notizie sul dossier di madre Eugenia Ravasio.

Allo stesso modo Papa Benedetto XVI risposta ad un compatriota bavarese rivolto a lui per chiedergli l’istituzione di una festa di Dio il Padre nel mese di agosto, come richiesto nei messaggi del Padre a Madre Eugenia. Gli scrive che il caso è stato già risolto negativamente nella lettera enciclica Divinum Illud Munus di Leone XIII, il 9 maggio 1897[39]. Oltre al fatto che questa informazione sia poco conosciuta, sembra che i teologi possano trovare facilmente una soluzione, istituendo per esempio la festa del Padre misericordioso, in occasione dell’anno della misericordia.

Ritorniamo al caso di Lipa, nelle Filippine:

Le suore ricevettero l’ordine di distruggere tutte le prove relative all’apparizione, il vescovo ed il suo coadiutore furono trasferiti, come la superiora del Carmelo. Tutti coloro che erano direttamente collegati all’apparizione ebbero da soffrire. Il Carmelo fu messo in quarantena. Uno psichiatra, il Dr Pardon, minacciò Teresina di essere imprigionata se avesse confermato la sua testimonianza. Più tardi, la sua ammissione al Carmelo fu rifiutata a causa delle apparizioni, con il pretesto che si era allontanata per un po’ di tempo dal Carmelo, quando le era stato chiesto[40].

 

Esaminiamo un caso attuale, che si è verificato nel Burundi, riportato di seguito da diverse testimonianze[41], concordanti nei fatti, ma non nella loro interpretazione[42],

Nel 1990, una contadina di nome Eusébie Ngendakumana (Zebiya in Kirundi), dichiara di aver beneficiato di rivelazioni private che verrebbero dalla Santissima Vergine Maria che si presenta con il nome «Regina dell’Africa». Le apparizioni si svolgono innanzitutto nella sua proprietà, nel luogo chiamato Businde, nella parrocchia di Rukago, a nord del Burundi, poi nella capitale, Bujumbura. A poco a poco, delle persone si associano a lei, e testimoniano grazie e conversioni ricevute in abbondanza. Irritati dalle frequenti veglie di preghiera, dei vicini si lamentano alle autorità civili che arrestano la veggente ed il suo entourage, e bastonano alcuni fino allo svenimento. Il 21 ottobre 2012, si verifica un alterco tra gli amici di Zébiya che vogliono entrare nella chiesa di Rukago ed il curato che vuole impedirlo[43], in modo che l’autorità civile è chiamata per mettere ordine. Nel mese di novembre 2012, il vescovo di Ngozi vieta formalmente ogni culto a Businde e chiede alla signora Eusébie e ai suoi «seguaci» di fermare ogni attività che danneggia l’unità e la comunione della Chiesa. Nel mese di gennaio 2013, alcuni studenti sono espulsi dall’università di Ngozi perchè hanno diffuso una pubblicazione «profetica» giudicata « mendace » dalle autorità dell’Università. Essi sporgono denuncia e vincono la causa presso il Tribunale di grande istanza di Ngozi, tuttavia l’università rifiuta di reintegrarli, poiché dipende dal Vescovo. Nei mesi di marzo e aprile 2013, la polizia spara proiettili sugli adepti, uccide tra cinque, dieci persone, arresta più di duecento di essi e condanna alcuni a pene da cinque a sei anni di prigione. Nel mese di luglio 2013, il sito di Businde è trasformato in campo militare, mentre l’orfanotrofio che era stato costruito da Zebiya ed i suoi amici viene demolito[44].

 

In questo caso, le decisioni amministrative ecclesiastiche nei confronti di Zebiya e i suoi amici sono piuttosto discutibili.[45]Tuttavia ci si può lamentare di una mancanza di dialogo che avrebbe permesso loro di rispettare il discernimento del vescovo, in particolare in considerazione della gravità dell’indagine prevista dalle norme. Si può anche mettere in discussione il grado di connivenza tra la Chiesa e lo Stato, che ha portato all’arresto, a lesioni o alla morte di molti fedeli cattolici.

Tornando al nostro caso sul collegamento tra l’accettazione passiva e il fatto di rivendicare i propri diritti tenendo conto del bene comune della Chiesa, constatiamo che in tutti i casi citati, i beneficiari di apparizioni private hanno subìto con pazienza le prove, spesso illegali, che l’autorità gerarchica ha inflitto loro. Così per esempio, l’attuale arcivescovo di Lipa ritiene che le sofferenze e le umiliazioni che ha subìto la veggente conferiscono una forte credibilità alle sue visioni e dichiarazioni. La Vergine aveva avvertito la giovane carmelitana «Soffrirai, ti derideranno, ma non temere, poiché la fede ti condurrà in Cielo».

Citiamo per finire il caso di Giovannine-Louise Ramonet in Bretagna:

Giovannine-Louise Ramonet, una contadina di Plounévez-Lochrist in Bretagna, sostiene che la Vergine Maria ed il Cristo le sono apparsi in un luogo chiamato Kérizinen nel Nord Finistère, tra il 1938 ed il 1968. Da allora, il Rosario è recitato ogni giorno e vengono molti pellegrini a chiedere alla Madonna del Santissimo Rosario di intercedere per la guarigione della mente e del corpo. Tuttavia, il magnifico santuario privato costruito in questo luogo il 17 settembre 1978 non è sempre autorizzato ad ospitare la presenza reale del Cristo nonostante oltre trent’anni di preghiere da parte di migliaia di pellegrini[46] ed un’indagine canonica affrettata[47].

 

Esaminiamo ora le sanzioni applicate alle autorità ecclesiastiche vicine ai veggenti.

  • Le sanzioni verso i curati ed i religiosi favorevoli

Il provvedimento disciplinare più facile da prendere per un vescovo di fronte ad un caso di rivelazione privata consiste nel trasferire il curato che sostiene i beneficiari di una presunta apparizione, così come i religiosi che li accompagnano.

Come abbiamo visto, la revoca di un incarico pastorale è disciplinato dal canone 184 §1, mentre la procedura è specificata nei canoni 1740[48], 1741 e 1742 quando si tratta di un curato. Inizia con una richiesta di rinuncia in teoria preceduta da una fase di discussione con due preti, scritta e motivata. Il primo dei motivi di trasferimento del curato evocato dal canone 1741 è «un modo di agire che provoca un grave danno o un grave disturbo nella comunione ecclesiale».

In pratica, quando un gruppo di fedeli crede ad una rivelazione privata, oppure, almeno ad una presunta rivelazione, in genere si verifica una divisione tra il gruppo di pellegrini che ci credono ed il gruppo di parrocchiani che non ci credono. Anche se i gruppi restano cauti, in attesa del giudizio del vescovo, è probabile che si verifichi una divisione e, qualunque sia l’atteggiamento del curato, può essere ritenuto responsabile, il che comporta, di facto, un motivo di trasferimento. Tuttavia, è normale che si verifichino dei turbamenti nella vita della Chiesa appena che lo Spirito Santo interviene: «i miei pensieri non sono i vostri pensieri» (Isaia, 55, 9), ha detto l’Eterno, mentre Gesù, principe della pace, ha confermato:

Pensate che io sia venuto a portare la pace sulla terra? Vi dico di no, ma la divisione. Non credete che io sia venuto a portare la pace sulla terra. Non sono venuto a portare pace, ma una spada. Ormai, infatti, in una casa di cinque persone, saremo divisi, tre contro due e due contro tre: saremo divisi, padre contro figlio e figlio contro padre, madre contro figlia e figlia contro madre, suocera contro nuora e nuora contro suocera. Poichè sono venuto a contrapporre l’uomo a suo padre, la figlia a sua madre e la nuora a sua suocera. Avremo per nemici le persone della propria famiglia. (Matteo 10, 34-36).

All’occorrenza, ecco alcune sanzioni regolarmente applicate a curati, religiosi e religiose che frequentano luoghi di presunte rivelazioni private, non riconosciute, e/o che sostengono coloro che le frequentano:

  • divieto di recarsi sui luoghi, come nel caso di Kérizinen[49], o di Lipa[50],
  • trasferimenti di curati[51], di religiose[52] e di vescovi[53],
  • espulsioni di religiosi[54],
  • interdetto (c. 1332) e sospensione (c. 1333), vale a dire minaccia di scomunica[55],
  • denuncia o neutralità di fronte al potere secolare[56].

In Francia, Monsignor René Laurentin[57], che abbiamo incontrato, ha dedicato la sua tesi di dottorato in teologia al sacerdozio della Vergine e, per tutta la vita, ha studiato le rivelazioni private. Ecco alcuni estratti delle sue memorie:

Avevo accettato di entrare nell’oscuro campo [delle apparizioni] su richiesta delle autorità della Chiesa, compreso il cardinale Seper, predecessore del cardinale Ratzinger, che mi ha consultato prima di stabilire le sue regole sulle apparizioni (1978). Ma l’autorità che si collegava al mio nome in materia è fallita: troppe persone l’utilizzavano impropriamente, come se dialogo o indagine equivalessero all’ autentificazione. […] Il seguito vedrà la mia lenta discesa agli inferi, ma senza dramma né splendore, poichè ne ho limitato i danni senza battermi con nessuno e obbedendo all’ordine stabilito. Così ho perso, in silenzio, buona parte della libertà che avevo apprezzato nella Chiesa, fino ai miei ottanta anni, e verificato la profezia di Gesù al suo discepolo Pietro: «Nella tua giovinezza, ti cingevi la veste da solo…» (Jn 21, 18). Qualsiasi notorietà fa del suo beneficiario un uomo da abbattere, e la mia duplice preoccupazione di chiarire le questioni in sospeso e di riabilitare reputazioni diffamate ha aggravato considerevolmente il mio caso. […]  Certamente, le repressioni sono meno rigorose e meno enigmatiche rispetto al tempo di padre Congar, ma i vari metodi sono analoghi per ridurre le libertà umane, cristiane, sacerdotali, mediatiche, accademiche o altro, che interferiscono con le azioni in corso al riparo dai segreti ufficiali.[58]

 

  • Le sanzioni verso i pellegrini

Un’altra sanzione, o almeno una « misura disciplinare » che Philippe Greiner cita a proposito del proselitismo di malefede, è la soppressione di una associazione. Egli stesso cita per esempio la soppressione dell’associazione pubblica «Arca di Maria» da parte del cardinale arcivescovo del Québec, il 4 maggio 1987, mentre era stata costruita dal suo predecessore nel 1975[59].

Altri tipi di sanzioni applicate correntemente, e in particolare sono:

  • il divieto di costruire un santuario, privato, o di aurorizzarvi la celebrazione del culto[60];
  • il divieto ai pellegrini di recarsi sui luoghi della presunta rivelazione[61];
  • il divieto di parlare e di testimoniare, come per esempio a Dozulé[62].
  • il divieto di pubblicare opere[63];
  • divieti di abbigliamento, come a Businde;
  • l’attacco alla repuzione dei pellegrini, considerati comme dei creduloni a Dozulé, vale a dire nemici della Chiesa[64];
  • l’abbandono al braccio secolare [65].

Ci si può interrogare sulla legalità di queste decisioni, e sul loro carattere di atto amministrativo che consente di depositare un ricorso.

 

In alto, santuario privato di Kérizinen

 

 

A sinistra, modello della Croce gloriosa di Dozulé su scala di costruzioni reali.

 

  • Le vie di ricorso e la giustizia

 

I capitoli da 4 a 6 presentano un vasto panorama di ricorsi amministrativi gerarchici e contenziosi che coprono l’intero diritto canonico, ma non abbiamo incontrato quelli realtivi alle controversie sulle rivelazioni private. Questo significa che la giustizia amministrativa della Chiesa non è applicabile in questo campo, che l’intervento della giustizia è sconosciuto poiché tenuto segreto, o ci sono dei motivi perché fedeli cattolici, vittime di decisoni amministrative non depositano ricorsi?

Abbiamo visto che Mons. Laurentin è stato testimone di ciò che chiama i  «diversi metodi» della gerarchia ecclesiastica per occultare le rivelazioni private. Nelle sue memorie, precisa che le rivelazioni private a carattere pubblico conferiscono immancabilmente una certa notorietà ai loro autori, facendo di essi «uomini da abbattere». Di fronte a questi atteggiamenti della gerarchia, lui stesso ha scelto la via del silenzio e della sottomissione dove preserva per sé un minimo di libertà di scrivere sacrificando il resto. Con questa scelta potrebbe essere diventato complice di violazione dei diritti dei fedeli con l’autorità ecclesiastica. Lascia intendere che ha usato la via diplomatica e mediatica per sostenere in modo discreto alcuni «veggenti», ma, ovviamente, non ha utilizzato la via legale. La ragione di questa scelta è legata alla sua volonta di non depositare ricorsi per non inasprire le situazioni, o ad una impossibilità di agire efficacemente per i «segreti ufficiali», che, secondo lui, costituiscono «un riparo» contro i ricorsi contenziosi ? Non lo sappiamo.

Nel caso di Garabandal[66], il vescovo di Santander ha continuato ad applicare nel 1968 il canone 1399 del codice del 1917 mentre questo era stato abrogato. I parrocchiani non hanno fatto alcun ricorso, poiché, indubbiamente ignoravano i loro diritti[67].

Nel caso di Kérizinen, dei ricorsi graziosi sono stati formulati regolarmente dall’associazione degli Amici di Kérizinen presso l’ordinario del luogo, con risultati più o meno positivi in funzione della personalità dei vescovi successivi. L’associazione ha cercato sempre di mantenere il dialogo rinunciando alla cieca sottomissione e alla via del contenzioso. A volte ne deriva una certa apertura:

Troverete allegata una nota […] che qui […] prende atto della positività, ed indica nello stesso tempo i passaggi che sono ancora da superare. […] E’ assolutamente necessario che [nel fascicolo] sia indicato chiaramente che Giovannine-Louise ha detto di aver avuto, tra il 1938 ed il 1965, più di 70 apparizioni della Vergine Maria e/o del Signore Gesù, e di aver ricevuto, durante queste apparizioni, dei messaggi che ha trascritto nei suoi quaderni: che queste apparizioni e questi messaggi non sono mai stati riconosciuti come aventi un’origine soprannaturale[68]

Nel caso di Zebiya nel Burundi, si nota un riferimento alla giustizia canonica da parte dell’ordinario di Ngozi, in una lettera del 2 aprile 2013 all’avvocato Segatwa Fabien, che si appellava a lui per far uscire di prigione i seguaci di Zebiya:

…nel caso in cui vi sembrerà che il vescovo di Ngozi abbia violato una legge canonica nelle disposizioni prese per chiedere ai fedeli che sono affidati al suo compito di comportarsi da cristiani cattolici, sappiate che vorrà meglio rispondere davanti ad una giurisdizione di Chiese competenti in questo ambito …

Ci si può chiedere se la prospettiva di ricorso citata sia credibile, nella misura in cui l’avvocato Segatwa non disponeva di nessun atto amministrativo scritto del vescovo che avrebbe potuto impugnare, né di competenze canoniche che gli avrebbero permesso di portare la questione davanti al Consiglio dei laici, passaggio obbligato verso la Segnatura Apostolica. Sembra d’altronde che l’impossibilità pratica, per Zebiya ed i suoi amici, di dialogare in modo sano con il curato ed il vescovo, sia stato una delle fonti di violenza che è scoppiata. Riguardo a padre Hermann, ha preferito la fuga al ricorso.

Un certo dialogo si è avuto in altri luoghi come a Dozulé, dove un abitante ha depositato un ricorso grazioso presso il vescovo di Bayeux-Lisieux, dopo aver ricevuto la lettera del 2 marzo 2006 di seguito:

Il mio predecessore, Monsignor Badré, nel dicembre del 1985, io stesso, in diverse occasioni e soprattutto a Lourdes, nel settembre del 1989, il cardinale Ratzinger, attualmente Papa con il nome Benedetto XVI, nell’ottobre del 1985, aveva vietato: qualsiasi pubblicazione di libri, opuscoli, cassette. Ed ogni propaganda e raccolta di fondi per la costruzione di un santuario o di una croce gigantesca di 738 metri. Qualsiasi spostamento a Dozulé. Inutile riunirsi su questa presunta collinetta dei prodigi. Non possiamo dichiarare autentiche le apparizioni di Dozulé. Quindi, cara Signora, bisogna conformarsi alle decisioni della Chiesa[69].

Questa lettera sarebbe stata oggetto di contestazione[70], ma il destinatario non ha depositato ricorso gerarchico né di contenzioso. L’atteggiamento di dialogo rispettoso produce un minimo di frutti, poiché la domenica del 29 maggio 2011, in presenza del vescovo e di una folla di fedeli, il curato di Dozulé impone le sue due mani sulla testa di una parrocchiana e pronuncia queste parole:

Signora M., in nome della Chiesa, la nomino responsabile dell’accoglienza dei pellegrini sulla Butte di Dozulé. Nella difficoltà sarò lì per aiutarla[71].

 

Dalla pubblicazione del libro francese, il 3 gennaio 2017, dei pellegrini di Dozulé sono informati, da fonte affidabile, che il vescovo del luogo ha avviato un’ulteriore indagine canonica sulle presunte apparizioni di Dozulé ma che la Congregazione per la dottrina della fede gli avrebbe chiesto di fermare l’indagine prematuramente, e così ha fatto. I fedeli locali rimangono perplessi davanti a questa situazione che sembra inverosimile, in quanto in contrasto con le raccomandazioni della stessa Congregazione.

 

Tuttavia questa situazione presenta alcune similitudini con i recenti sviluppi di Lipa nelle Filippine. Dopo aver condotto un’indagine approfondita, il Vescovo di Lipa ha riconosciuto come soprannaturali le rivelazioni, segnalando il carattere « incerto » del decreto di divieto del 1951[72]. Anche in questo caso, la Congregazione per la dottrina della fede è intervenuta riesumando un documento tenuto segreto per oltre cinquant’anni, nel quale Papa Pio XI avrebbe convalidato in forma specifica l’inchiesta fortemente viziata di illegalità, constatando il carattere non soprannaturale delle apparizioni e della pioggia di petali di rose[73]. Annunciando il decreto della Congregazione per la dottrina della fede che annulla il proprio decreto[74], Monsignor Argüelles ha precisato che non avrebbe impugnato questa decisione. Senza conoscere le ragioni, notiamo che Monsignor Argüelles è stato invitato a rinunciare al suo incarico di vescovo di Lipa il 2 febbraio 2017, due anni prima del limite di età, e che è stato nominato immediatamente un nuovo vescovo al suo posto.

Un eminente dottore in diritto canonico ha criticato la scelta dell’autore di citare le rivelazioni private in quest’opera:

Sono sorpreso di leggere, per esempio, il passaggio (con foto!) in cui ricorda le pseudo rivelazioni di Dozulé o altri luoghi…Attenzione a non scendere ad un livello giornalistico che stona in un’opera che si considera di buon contegno[75].

Ci sembra importante mantenere la questione delicata poichè abbiamo visto che le presunte rivelazioni hanno dato luogo a molti atti amministrativi specifici relativi a colpire a torto o ragione i diritti dei fedeli cattolici. Inoltre, ci sembra che, se non bisogna considerare pubblicamente soprannaturale una presunta rivelazione, non bisogna nemmeno considerarla pseudo apparizione visto che l’ordinario non si è pronunciato ufficialmente alla luce dell’indagine approfondita richiesta dalla Congregazione per la dottrina della fede.

 

Tenuto conto di questi elementi, un’indagine presso associazioni di pellegrini di molti luoghi di apparizioni non riconosciute ha permesso di capire perchè i loro membri non ricorrono alla giustizia ecclesiastica, in quanto sono convinti di una profonda ingiustizia rispetto ai veggenti ed ai messaggi:

  • la gerarchia ecclesistica è particolarmente sensibile alle presunte rivelazioni che potrebbero essere fonte di divisione nella comunione ecclesiale;
  • le persone interessate sono legate alla Chiesa e non vogliono interrompere il dialogo con il loro vescovo, sebbene sia difficile e debole;
  • nessuna associazione di pellegrini ha ricevuto la personalità giuridica che permetterebbe di agire;
  • i loro membri non dispongono di sufficienti conoscenze in materia di diritto canonico per far valere i loro diritti, e i sacerdoti che potrebbero disporre di queste conoscenze sono sottoposti al divieto di frequentare i luoghi in questione;
  • le decisioni del vescovo non sono chiaramente degli atti amministrativi suscettibili di ricorso;
  • le eventuali decisioni della Congregazione per la dottrina della fede sono comunicate soltanto dal vescovo del luogo, e quindi non sono contestabili dai fedeli cattolici interessati. Inoltre, queste, a volte, sono approvate dal Papa in forma specifica, dando loro un carattere definitivo;
  • i documenti del dossier, e in particolare l’indagine canonica, non sono divulgati, quindi non è possibile contestarli.

Abbiamo anche trovato un’eccezione con un ricorso di contenzioso depositato presso il Supremo Tribunale per una questione legata ad una rivelazione privata[76].

Il 10 marzo 1975, l’associazione «L’Esercito di Maria» è fondata canonicamente dall’arcivescovo del Québec secondo il codice 1917. Successivamente sembra che l’associazione sia sulla scia della comunità di Notre Dame de Tous les Peuples che si basa sulla vita mistica della sua fondatrice e sui messaggi che ha ricevuto tra il 1940 ed il 1959. La devozione a Maria madre di tutti i popoli è stata condannata sotto Pio XII. Anche il Cardinale arivescovo del Québec invita l’associazione a cessare di  «impegnarsi in percorsi pericolosi e non completamente ortodossi», poi raccoglie il seguente consiglio della Congregazione per la dottrina della fede: «Dopo aver studiato gli scritti diffusi dell’Esercito di Maria, questa congregazione […] approva questi avvertimenti e li conferma, che consente di avere la libertà di adottare tutte le misure necessarie senza escludere la possibilità di sopprimere l’associazione ad normam iuris». Con decreto del 4 maggio 1987, l’Arcivescovo abolisce il riconoscimento dell’associazione. Il decreto è oggetto di un ricorso gerarchico, poi di contenzioso amministrativo, ma non è ammesso alla discussione per evidente mancanza di fondamento, conformemente alle sentenze del Congresso del 17 marzo 1989 e del 1 marzo 1990, e del Collegio del 20 aprile 1991.

 

Si noterà che la decisione del Tribunale non porta in nessun modo sulla fondatezza della posizione della Congregazione per la dottrina della fede, che non è considerata come un decreto amministrativo, ma sul decreto di soppressione dell’associazione, convalidato dal Consiglio pontificio per i laici, basato sulla posizione della Congregazione.

Questa decisione del vescovo rispetto all’Esercito di Maria ci porta ad approfondire un secondo argomento trasversale, vale a dire quello dei nuovi movimenti religiosi e delle presunte sette.

 

  1. I nuovi movimenti religiosi e le presunte sette

 

Alle origini del cristianesimo, i cristiani erano considerati, giustamente, come una setta, poichè la parola setta viene dal verbo latino sequor, sequeris, che significa seguire, e i cristiani seguivano Gesù Cristo. Nel XXI secolo, la comprensione della parola setta si è evoluta, con un significato differente nel mondo civile e religioso. Diventa di nuovo di attualità in Francia, come negli altri paesi, a causa dell’attualità civile e religiosa.

Il 12 giugno 2001, la Francia ha adottato una legge «che tende a rafforzare la prevenzione e la repressione dei movimenti settari» […] questa legge è stata impugnata immediatamente dai Testimoni di Geova davanti alla Corte Europea dei diritti dell’uomo; ma il loro ricorso è stato rigettato il 6 novembre 2001. […] E’ principalmente nel cattolicesimo che questo concetto di setta presenta una connotazione peggiorativa: il codice del 1917 definiva negativamente tutti i gruppi che considerava scismatici o ostili, sette «cattoliche», «massoniche», ecc. Le altre grandi religioni hanno un atteggiamento più positivo o almeno più neutrale di fronte ai gruppi minoritari o ai «nuovi movimenti religiosi», anche se questi sorprendono o disturbano l’ordine religioso costituito[77].

Il 29 aprile 2016 a Digione, durante la conferenza del mondo secolare «Lotta « anti-sette »: bilancio e prospettive[78] », Thierry Bécourt conferma le sue intenzioni del 2002:

E’ chiaro che una corrente intollerante attraversa la Francia e si propaga in Europa. Ci ricorda i periodi più bui della nostra storia. Lo spettro di Vichy ci spia… Questa intolleranza nazionalizzata che viviamo oggi nel nostro paese dice «diritti dell’Uomo», segna l’inizio della vera privazione della libertà, quella del pensiero… che, se noi perdiamo la nostra vigilanza, aprirà la porta al totalitarismo[79].

Nonostante il carattere soggettivo e quindi parziale di queste intenzioni, è interessante sapere come si comporta la Chiesa e la sua giustizia in ciò che Thierry Bécourt chiama «una nuova caccia alle streghe».

 

  • Il diritto applicabile

Nel diritto canonico, il codice del 1917 cita più volte le persone che hanno dato il loro sostegno, o che hanno aderito pubblicamente ad una setta eretica o scismatica o alla setta massonica, o alle società dello stesso genere[80], vietando loro di partecipare ai voti (canone 167), di essere ammesso al noviziato (canone 542), di appartenere ad una associazione (canone 693), di essere padrino (canone 765), di sposarsi religiosamente (canone 1060), di avere una sepoltura cristiana ((canone 1240).  Devono essere dichiarati infami e ricevere una pena di scomunica (canoni 1214 §1[81] e 2335). Sono proibiti anche i libri che si occupano delle sette massoniche e altre società dello stesso genere che sostengono che esse sono utili e che non sono dannose per la Chiesa e per la società civile (canone 1399).

Attualmente, il codice del 1983 riprende in parte questi canoni[82], senza utilizzare il termine setta, ma conservando quello di eresia, sapendo che l’affiliazione ad una setta atea è paragonabile all’eresia[83]. Oltre al Codice, diversi pronunciamenti specificano la posizione del magistero.

Nel 1981, il Consiglio permanente della Chiesa di Francia crea il gruppo «Pastorale e sette» guidato da Giovanni Vernette[84].

Il 3 maggio 1986, la Curia romana pubblica un documento intitolato «il fenomeno delle sette o nuovi movimenti religiosi: sfida pastorale». Considerando l’approccio ecumenico e del dialogo interreligioso, Philippe Le Vallois distingue tre casi:

  • le sette di origine cristiana, cioè gruppi che aggiungono alla Bibbia altri libri, altri messaggi profetici;
  • i gruppi religiosi che hanno una propria visione del mondo particolare, che deriva dagli insegnamenti di una delle principali religioni del mondo
  • i gruppi particolari che abitualmente sono come una minaccia per la libertà delle persone e in genere per la società.

Il 5 aprile 1991, la IV riunione plenaria del concistoro dei cardinali ha per tema «le sette o i nuovi movimenti religiosi», nei cinque continenti. Il cardinale Arinze, allora presidente del Consiglio pontificio per il dialogo interregionale, espone  «la sfida delle sette o dei nuovi movimenti religiosi, approccio pastorale[85]» facendo evolvere il termine «setta» giudicato troppo polisemico e negativo verso l’espressione «Nuovi movimenti religiosi» più adatta  per coprire i nuovi movimenti di origine protestante, i gruppi detti settari che hanno un retroterra cristiano, i nuovi movimenti orientali o africani, e quelli di tipo gnostico o esoterico. Invita i vescovi al discernimento, giudicando eccessive alcune delle loro reazioni sul posto, e invitandoli a respingere le condanne, le discriminazioni, le generalizzazioni che consistono nell’applicare a tutti i Nuovi movimenti religiosi gli aspetti negativi di alcuni.

Il 15 novembre 1991, la Conferenza dei vescovi di Francia pubblica «L’Église catholiques, les Sectes et Nouveaux mouvements religieux en France[86]»

Nel 1997, l’Opus Dei reagì contro il rapporto sulle sette dei parlamentari belgi, che lo rende simile a questa categoria tacciandolo di «cattolicesimo integrale e elitario».

Nel 2013, Yves Hamant, presidente d’Istina, nonché altre persone, inviano ai Vescovi di Francia «un appello vigoroso per denunciare pratiche di derive settarie anche all’interno delle istituzioni della Chiesa». Il Presidente della Conferenza deiVescovi di Francia risponde loro il 7 novembre con queste parole:

L’abbiamo ricevuto come il grido di persone che soffrono nel cuore della Chiesa per quello hanno vissuto personalmente o per quello che i loro cari hanno vissuto o vivono ancora. Pensiamo a coloro che sono feriti, a volte in modo duraturo, dal comportamento di alcuni membri della Chiesa. Come Presidente della nostra Conferenza vorrei, a nome di tutti noi, dirvi che queste pratiche ci urtano e ci scuotono. Pregare per loro non basta; vogliamo portare con essi la loro sofferenza, per assicurare loro la nostra compassione, aiutarli nella loro ricostruzione[87].

Il risultato è la creazione di una Cellula per le derive settarie in comunità cattoliche all’interno della Conferenza dei vescovi di Francia[88] nonchè la pubblicazione, nel settembre del 2014, dell’elenco dei criteri di discernimento per l’identificazione dei comportamenti di tipo settario[89]. Nulla viene detto però sulla procedura da seguire nei casi di presunta deriva settaria, e, in particolare, sulla protezione dei diritti dei fedeli cattolici membri delle comunità incriminate.

 

  • Le difficoltà e le sanzioni

In un contesto caratterizzato da delazione, esclusione e paura che ricorda periodi bui della storia, tre tipi diversi di difficoltà appaiono:

  • le violazioni dei diritti delle vittime di processi devianti all’interno stesso della Chiesa;
  • l’amalgama tra gruppi devianti e gruppi religiosi, che generano esclusioni e sanzioni nei confronti dei membri di questi gruppi;
  • la connivenza di alcuni sacerdoti cattolici con lo Stato francese e con le logge massoniche, che a volte hanno strumentalizzato la paura delle sette per attaccare le religioni.

Nessuno è in effetti immune da fenomeni di esclusione, che derivano da una stigmatizzazione di gruppi devianti, come ha testimoniato il Santo Padre Benedetto XVI stesso quattro anni prima delle sue dimissioni.

A volte, si ha l’impressione che la nostra società ha bisogno di un gruppo, almeno, al quale non riservare nessuna tolleranza, contro il quale poter tranquillamente lanciarsi con odio. E se qualcuno osa avvicinarsi, in questo caso il Papa, perde anch’esso il diritto alla tolleranza e può anche lui essere trattato con odio, senza timore né riserbo.[90].

L’Opus Dei l’ha imparato a sue spese quando Monsignor Jacques Trouslard, canonico onorario, delegato alla documentazione sulle sette, gli ha prestato dieci caratteristiche settarie[91]. Inoltre fu ricompensato dallo Stato francese con la la più alta onorificenza di Cavaliere della Legione d’onore[92].

Alcuni vescovi francesi sono stati destinatari dei rapporti delle Informazioni generali che sono alla base del rapporto parlamentare sulle sette del 1995 o di quelli dei gruppi anti sette come l’UNADFI, ampiamente sovvenzionati dal governo francese. A volte col pretesto di queste informazioni non verificate rifiutano i diritti ai membri dei movimenti considerati settari, o attentano alla loro reputazione senza lasciar loro il diritto di difesa.

Adottando la forma della lettera aperta, il presidente della Conferenza dei vescovi di Francia rende pubblico il problema, lasciando alla stampa il compito di commentare il suo intervento, quello che non ha mancato di fare la stampa, citando possibili «abusi spirituali» da parte delle Beatitudini, dei Legionari di Cristo, dei Points-Cœurs, della Comunità di San Giovanni… Contrariamente alle procedure canoniche che proteggono la reputazione delle parti, si teme che

la chiamata in causa nei media, a volte danneggia irreparabilmente la reputazione di persone innocenti[93].

 

  • I possibili ricorsi

 

Accade che dei membri di gruppi designati come settari facciano ricorsi di contenzioso amministrativo contro prese di posizione dell’autorità amministrativa. Dopo i ricorsi dei membri dell’«Esercito di Maria» e dell’associazione «Call to Action Nebraska», ecco un terzo esempio:

Un membro di una associazione privata, che è oggetto di un avvertimento esposto in un monastero, si lamenta di una lesione alla sua reputazione a causa di una lettera dell’autorità ecclesiastica inviata ad una persona che aveva chiesto informazioni su questa associazione. Il Supremo Tribunale non ammette alla discussione il ricorso, ritenendo « che non è stato dimostrato che la risposta contestata è un atto amministrativo, poiché la gerarchia rispose solo ad una donna che l’interrogava sull’affiliazione alla Chiesa di questa associazione, riprendendo il rapporto di un senatore francese e di altre fonti internet[94].

 

 

Di fronte a questa situazione, il canonista può solo interrogarsi sulla validità delle fonti che la gerarchia utilizza, citando il rapporto parlamentare sulle sette portato da franchi massoni notori,  e il sito www.sos-dérive-sectaire.fr, che fa esplicito riferimento all’«accusatore dei fratelli» come si chiama lui stesso foneticamente il webmaster del sito[95].

 

S’interroga anche sulla credibilità dei consiglieri scelti dall’episcopato francese, vale a dire Mons. Trouslard, che sosteneva di essere «ossessionato dalle sette[96]», e Mons. Vernette, che ha contratto un matrimonio[97]. Si rammarica infine che nessuno dei tre ricorsi depositati di cui è venuto a conoscenza sia stato ammesso alla discussione, il che potrebbe essere un problema strutturale e non solo congiunturale.

Per quanto riguarda la risposta del Presidente della Conferenza dei vescovi di Francia sulle derive settarie all’interno della Chiesa, ci si può stupire che invii vittime verso la giustizia dello Stato francese, senza menzionare alcuna procedura canonica in vigore nella Chiesa.

Vogliamo dirvi con forza che desideriamo continuare ad agire affinché si chiariscano le situazioni, in modo che la verità possa apparire quando è necessario e coloro che sono state vittime di processi devianti trovino presso i vescovi un orecchio in ascolto e comprensione. […] Alcuni comportamenti che denunciate evidenziano giustizia penale. Nessuno è al di sopra della legge. Spetta alle vittime, che lo desiderano, sporgere denuncia davanti alla giustizia quando occorre[98].

Omettendo di menzionare la giustizia amministrativa ecclesiastica, sembra che i Vescovi di Francia considerino che non svolga il suo ruolo per identificare, limitare e risolvere le difficoltà legate alle presunte derive settarie all’interno della Chiesa. Non c’è dubbio che questo è dovuto in parte alla mancanza di forza degli organismi di dialogo, come i comitati diocesani di mediazione, che Papa Francesco sembra valorizzare nella sua esortazione Evangelii gaudium:

Nella sua missione di favorire una comunione dinamica, aperta e missionaria, [il vescovo] dovrà stimolare e ricercare la maturazione degli organismi di partecipazione proposti dal Codice di diritto Canonico e altre forme di dialogo pastorale, con il desiderio di ascoltare tutti, e non solo alcuni, sempre pronti a fargli dei complimenti.

Alla conclusione di queste pagine, abbiamo meditato sulle parole di Papa Francesco applicandole alle comunità ecclesiali respinte dalla gerarchia:

Una Chiesa senza martiri… è una Chiesa senza Gesù […] oggi,  la più grande forza della Chiesa è nelle piccole Chiese, piccole piccole, … perseguitate[99].

 

 

Chiesa di San Georges des Gardes (Francia), distrutta nell’estate 2006[100]

 

 

 

Madre Eugenia dei lebbrosi

 

 

[1] La Congregazione competente delle rivelazioni private è la Congregazione per la dottrina della fede. Eppure il database delle pubblicazioni nel capitolo 3, riporta solo quattro ricorsi relativi a decreti emanati da questa Congregazione, su circa duemila pubblicazioni relative a ricorsi di contenzioso. Inoltre, nessuno dei casi segnalati fa esplicitamente riferimento ad una rivelazione privata. Mentre è possibile che esiste una giurisprudenza per il trasferimento di curati o per l’espulsione di associazioni, che è uno dei provvedimenti disciplinari imposti dal vescovo per presunta apparizione, ma in questo caso, la giurisprudenza è molto abbondante ed il riferimento alla rivelazione privata non è indicato nell’oggetto dei ricorsi.

[2] Cf. Ratzinger, (Cardinale Joseph), luoghi teologici delle rivelazioni private, commento del terzo segreto di Fatima, Fatima 13 maggio 2000. Distingue il tempo della rivelazione, detta pubblica, in opposizione alle « rivelazioni private » sapendo che tra queste due realtà, c’è una differenza non solo di grado, ma di natura.

[3] Pensiamo per esempio a Sant’Agostino, San Martino, Santa Giovanna di Chantal, Santa Teresa d’Avila, Santa Caterina Labouré, San Giovanni della Croce, Bernadetta di Lourdes ed i bambini di Fatima, Suor Faustina, Padre Pio …

[4] Lebry (Léon, Francis), Jean-Pierre Kutwa, miraculé et cardinal, Abidjan NEI-CEDA, 2015, 262 p.

[5] Lebry (Léon Francis), Giovanni-Pierre Kutwa, miracolato e cardinale miraculé et cardinal, Abidjan NEI-CEDA, 2015, 262 p.

[6] Congregazione per la dottrina della fede, lettera del 15 maggio 2016, in occasione della festa di Pentecoste 2016, www.vatican.va/roman_curia/congregations/cfaith/documents/rc_con_cfaith_
doc_20160516_iuvenescit-ecclesia_fr.html

[7] Il sito è sviluppato da « Miracle Hunter » Michael O’Neill, laureato all’università di Stanford University, e membro della  Mariological Society of America. S.E. il Cardinale Seán O’Malley, Boston, MA. commenta così: «Thank you for sending me your site. It is excellent».

[8] Identifica oltre 1 000 miracoli, o almeno presunti miracoli, con immagini miracolose, stimmate, cadaveri intatti, miracoli eucaristici e apparizioni.

[9]Questo aumento si traduce nella crescita del loro numero reale, ma può essere anche il risultato di una migliore conoscenza delle apparizioni a causa di una grande mediatizzazione.

[10] Laurentin (Padre René) «Moltiplicazione delle apparizioni della Vergine oggi» (Fayard 1995). L’abrogazione è stata fatta da Paolo VI, il 14 ottobre 1966 (Decreto della Congregazione della dottrina della fede, Acta Apostolicae Sedis, 29 dicembre 1966, Pagina 1186)

[11] Guadalupa (Messico, 1531), Aparecida (Brasile, 1717), Roma (a Alfonso Ratisbonne nel 1842), La Salette (France, 1846), Lourdes (France, 1858), Pontmain (France, 1871), Giertzwald (Pologne, 1877), Fatima (Portugal, 1917), Beauraing (Belgique, 1932), Banneux (Belgique, 1933), Amsterdam (Pays-Bas, 1945), Betania (Venezuela, 1976), Akita (Japon, 1973), Kibeho (Rwanda, 1981), Le Laus (France, 1664) et Champion (États-Unis, 1859).

[12] Laurentin, (Mgr. René), Memorie. Cammino verso la luce, Paris, 2005, Fayard, p. 332/624.

[13] Barbu, (Mons. Francis), « Que penser de Kerizinen ? Une réponse de Rome, la position de l’Evêque diocésain », Quimper, juin-juillet 1975, tratto dagli archivi dell’associazione degli amici di Kérizinen.

[14] Catechismo della Chiesa cattolica, n° 66 e 67

[15] Cantalamessa (Padre Raniero)  www.totus-tuus.fr/article-2220137.html

[16] AAS 58/16.

[17] Can. 2318: § 1 Nella scomunica riservata specialamente alla Sede apostolica, incorrono gli editori di libri apostati, eretici e scismatici, che difendono l’apostasia, l’eresia, lo scisma; cosi gli altri che difendono consapevolmente questi libri o altri prohibiti nominatamente con lettera apostolica, o li leggono e li ritengono. Autori  ed editori che senza licenza fanno stampare libri della Scrittura, note o commenti, incorrono subito la scomunica non riservata.

[18] Ottaviani (Cardinale). Estratto del decreto della Congregazione, tradotto a partire dalla versione inglese scaricata il 20 maggio 2016 dal sito  www.lovingmother.org/misc/canonsofthechurcheng.htm:
Canone 1399: Limitando il diritto di pubblicazione, questo canone vieta alcuni libri come quelli che trattano  rivelazioni, visioni, profezie e miracoli. Questo canone è stato abrogato il 29 marzo 1967. Questo significa che per queste pubblicazioni, il divieto derivante dal diritto ecclesiastico è elevato. Ormai i cattolici sono autorizzati, senza aver bisogno d’imprimatur, nihil obstat, o di altro permesso, a pubblicare resoconti delle rivelazioni, visioni, profezie e miracoli. Certamente, queste pubblicazioni non devono mettere in pericolo la fede o la morale. Questa è la regola generale, che ogni cattolico deve seguire  in tutte le sue azioni, lo stesso, ed in particolare, i giornalisti. A maggior ragione, è consentito per i cattolici frequentare i luoghi delle apparizioni, anche non riconosciuti dagli Ordinari delle loro diocesi o dal Santo Padre, dopodiché i visitatori cattolici che frequentano questi luoghi devono rispettare la fede e la morale. Tuttavia non sono soggetti a nessuna disciplina ecclesiastica, nemmeno per le loro preghiere pubbliche. L’autorizzazione è richiesta soltanto per la celebrazione della Santa Messa o per altri servizi religiosi.

Canone 2318: Questo canone prevede sanzioni contro coloro che hanno violato le leggi di censura e divieto. Questo canone è stato abrogato [revoca] dal 1966. Nessuno può subire più una censura ecclesiastica per frequentare luoghi di apparizioni, anche quelli non riconosciuti dagli Ordinari delle loro diocesi o dal Santo Padre. Inoltre, « quelli che sarebbero incorsi nella censura prevista dagli Ordinari delle loro diocesi o dal Saonto Padre. Inoltre, “coloro che sarebbero incorsi nella censura prevista nel Canone 2318 saranno anche assolti a causa dell’abrogazione [revoca] di questo canone. »

[19] www.vatican.va/roman_curia/congregations/cfaith/documents/rc_con_cfaith_
doc_19780225_norme-apparizioni_fr.html

[20] I criteri sono rimasti segreti per trentasette anni, poi resi pubblici dopo che versioni ufficiose sono circolate un po’ ovunque nel mondo. Infatti, la pubblicazione delle norme procedurali non è soltanto utile ai pastori, che erano già informati, ma anche e soprattutto ai fedeli che possono informarsi delle leggi che sono loro applicabili, quindi cercare di discernere le presunte rivelazioni ed effettuare i ricorsi che riterrebbero appropriati, nel caso in cui si sentissero lesi da decisioni amministrative giudicate illegittime.

[21] www.vatican.va/roman_curia/congregations/cfaith/documents/rc_con_cfaith_doc_20111214_prefazione-levada_fr.html

[22] A. Criteri positivi:

  1. Per quanto riguarda l’esistenza del fatto, certezza morale o, almeno grande probabilità, acquisita dopo un’indagine seria.
  2. Circostanze particolari relative all’esistenza ed alla natura del fatto:
  1. qualità personali del o dei soggetti (in particolare equilibrio psichico, onestà e rettitudine della vita morale, sincerità e docilità abituali verso l’Autorità ecclesistica, capacità a ritornare alla normalità di una vita di fede, ecc.);
  2. Riguardo alla rivelazione, dottrina teologica e spirituale vera e priva di errori;
  3. Devozione sana e frutti spirituali abbondanti e costanti (per es. Spirito di orazione, conversioni, testimonianze di carità, ecc..).
  4. Criteri negativi:
  5. Errore manifesto sul fatto.
  6. Errori dottrinali attribuiti a Dio stesso, alla beata Vergine Maria o a un santo nelle loro manifestazioni, tuttavia, tenuto conto della possibilità che il soggetto abbia aggiunto – anche inconsciamente – elementi puramente umani, vale a dire qualche errore di ordine naturale, ad una rivelazione veramente sopranaturale (cf. Sat’Ignazio, Esercizi, n°336).
  7. Evidente ricerca di lucro in stretta relazione con il fatto stesso.
  8. Atti gravemente immorali compiuti al momento o in occasione del fatto stesso, dal soggetto e dai suoi accompagnatori.
  9. Malattie psichiche o tendenze psicopatiche del soggetto, che ha esercitato sul presunto fatto soprannaturale una certa influenza, o psicosi, isteria e cose dello stesso genere.

Bisogna notare anche che questi criteri, positivi o egativi, sono indicativi, e non limitativi, e devono essere presi insieme o secondo la loro complementarietà.

[23] Lesserteur (R.P.), il 5 agosto 1909: Già da molto tempo, il Sant’Uffizio aveva riconosciuto che non c’era niente di condannabile nelle apparizioni di Tilly, ed il Sovrano Pontefice, che aveva letto lui stesso con viva emozione il giornale delle religiose della scuola, aveva dato l’ordine di terminare l’informazione e di prendere una decisione. Monsignor Amette [cardinale di Parigi] avvertito, accorso a Roma, fece valere ragioni d’opportunità, per chiedere di sospendere la proclamazione di una decisione favorevole. […] Nei primi mesi dello scorso anno (1908), Pio X ordinò di nuovo di riprendere la causa. Monsignor Amette accorse ancora una volta. […] Il Papa si sarebbe lasciato convincere, e avrebbe ordinato di attendere. Pierre-Marie Grünneissen «  Présence mariale à Tilly sur Seulles » ed. Les amis de Tilly (1996) p. 104-105

[24] www.lesamisdegarabandal.com/l’eglise%20et%20garabandal.html

[25] Fauvel (Mgr. André) «Inoltre abbiamo vietato a tutti i preti, religiosi e religiose di andare a Kérizinen o di consigliarlo a chiunque. Apprendendo che dei fedeli continuano ad andarci, abbiamo vietato ogni forma di devozione e di culto a Kérizinen» in La settimana religiosa di Quimper, 24 marzo 1961.

[26] http://www.rosamisticafontanelle.it

[27] Curty (Padre Christian): L’inchiesta canonica del suo predecessore è stata condotta secondo tutte le norme giuridiche richieste dalla Legge ? E’ stato veramente e separatamente interrogato ciascun testimone ? Dal momento che la dimensione soprannaturale non è stata mantenuta, quale spiegazione è stata trovata riguardo alle 120 citazioni latine di origine scritturale o liturgica che chiaramente Maddalena non ha potuto improvvisare né attingere nella parte inconscia della sua memoria, e che non ha potuto subire l’influenza del suo Curato superato anche dai fatti? Sono stati realmente studiati i ‘frutti’ di questo Albero: le guarigioni complete e definitive riconosciute ‘inspiegabili’ dalla Medicina, le conversioni profonde e talvolta sorprendenti e durature, sia ottenute in modo spontaneo sulla Butte, in occasione di un pellegrinaggio, sia collegate indirettamente ai fatti di Dozulé ? Siamo sicuri che molte vocazioni (seminaristi consacrazione religiosa) hanno conosciuto a Dozulé, il loro punto di partenza e di risveglio ? Queste sono alcune delle numerose domande, che per il momento non hanno ancora ricevuto risposta e che lasciano perplessi molti nostri fratelli cristiani impegnati nella pastorale, mentre il Concilio Vaticano II chiede loro di superare l’obbedienza passiva alla quale erano abituati per esercitare ormai un’obbedienza attiva e intelligente, quindi chiara e motivata. www.ressource.fr/devoilement/esprit_saint_devoile/E(p205-217).pdf

[28] Il messaggio è stato rifiutato dal vescovo sulla base del fatto che la presunta richiesta di Gesù a Maddalena Aumont, «dite alla Chiesa di innalzare una croce [di 738 m] e ai suoi piedi, un santuario» gli sembrava impossibile. Tuttavia, uno studio approfondito che dimostrava la sua fattibilità è stato presentato agli eletti locali il 8 gennaio 1997, e da allora, una torre di 828 m è stata innalzata a Dubai nel 2010.

[29] Argüelles (Mgr Ramón Cabrera): estratti del decreto di riconoscimento del 9 dicembre 2015.

[30] http://www.marianmessenger.ph/index.php/maian-feature

[31] Ouellet (Cardinale Marc), Presentazione del documento della Congregazione per la dottrina della fede «La Chiesa ringiovanisce» https://fr.zenit.org/articles/importance-ecclesiale-des-charismes-par-le-card-ouellet/

[32] Congregazione per la dottrina della fede, lettera del 15 maggio 2016. www.vatican.va/roman_curia/congregations/cfaith/documents/rc_con_cfaith
_doc_20160516_iuvenescit-ecclesia_fr.html

[33] 1. Se, in occasione del presunto fatto soprannaturale, un culto o una qualsiasi forma nasce spontaneamente dai fedeli, l’Autorità ecclesiastica competente ha il grave dovere di informarsi senza indugio e di essere particolarmente vigile.

  1. Se dei fedeli fanno domande legittime (cioè in comunione con i pastori e senza essere spinti da uno spirito settario, L’autorità ecclesiastica competente può intervenire, per autorizzare e promuovere alcune forme di culto e di devozione, a condizione che nulla vieti loro di attenersi ai criteri sopra descritti. Tuttavia, si farà in modo che i fedeli non acquisiscano questo modo di agire per un’approvazione dalla Chiesa del carattere soprannaturale del fatto (cf. Nota preliminare,c).
  2. A causa del suo compito dottrinale e pastorale, l’Autorità competente può intervenire di propria iniziativa e deve anche farlo in circostanze gravi, ad esempio per correggere o prevenire abusi nell’esercizio del culto o della devozione, condannare dottrine errate o evitare i pericoli di un misticismo falso o sconveniente, ecc.
  3. Nei casi dubbi, che non incidono sul bene della Chiesa, l’Autorità ecclesiastica competente si asterrà da ogni giudizio e da ogni azione diretta (poiché può accadere che con il tempo l’evento qualificato soprannaturale cada nell’oblio); che rimanga vigile e pronta ad intervenire prontamente e con prudenza, se necessario.

[34] Greiner (Philippe), decano della facoltà di diritto canonico di Parigi, «il quadro giuridico del proselitismo, nel diritto greco, francese, europeo (1950) e nel diritto canonico cattolico romano». Tesi presentata e difesa il 19 febbraio 2005, all’Istituto cattolico di Parigi, p. 455.

[35] Nel linguaggio Moreh, Bangtaba significa: «Sediamoci e facciamo conoscenza»

[36] Sebbene sia la stessa persona, distingueremo sorella Eugenia Ravasio per il periodo 1931-1935 da madre Eugenia per il periodo 1935-1990 che riguarda il nostro studio.

[37] Quest’avvenimento trasforma la rivelazione privata da personale a pubblica.

[38] Le detrattrici di Madre Eugenia hanno intentato una causa civile contro di lei, e l’hanno fatta arrestare nel 1972, poi l’hanno fatta condannare con rinvio di chiamata nel 1977. Era accusata principalmente dalle sue detrattrici di aver creato l’Unitas Catholica per interesse, e non per onorare Dio Padre per mezzo di Gesù.

[39] Il pericolo, nella fede o nel culto, è quello di confondere tra loro le persone divine o di dividere la loro natura unica; poiché la fede cattolica adora un solo Dio nella Trinità e la Trinità nell’unità. Inoltre, Innocenzo XII, Nostro predecessore, rifiutò assolutamente, nonostante le suppliche, di autorizzare una festa speciale in onore del Padre. Se si festeggiano in particolare i misteri del Verbo incarnato, non esiste nessuna festa che onori soltanto la natura divina del Verbo, e le solennità della Pentecoste stesse sono state stabilite fin dai primi tempi, non per onorare esclusivamente lo Spirito Santo per se stesso, ma per ricordare la sua discesa, vale a dire la sua missione esterna.

[40] Cf. https://en.wikipedia.org/wiki/Teresita_Castillo et www.marianmessenger.php nonché i riferimenti che essi citano

[41] Una decina di media riportano gli eventi. Tra di essi molti media del Burundi di cui Iwacu, the Africa report, il bollettino di collegamento e di informazione dei Salesiani dei grandi laghi, nonché quelli del ministero dell’interno del Burundi e del mistero della giustizia canadese https://www.justice.gov/sites/default/files/
eoir/legacy/2014/09/04/BDI104471.E.pdf

[42] Gli amici di Zébiya vogliono essere dei cristiani come gli altri, senza il divieto di pregare come meglio credono. Lo Stato li invita a fondare una loro propria Chiesa fuori dalla Chiesa cattolica. Il curato sostiene di essere scampato a violenze fisiche. Il vescovo ritiene che la disobbedienza, l’arroganza, la ribellione, la menzogna, ecc.; caratterizzano il gruppo.

[43] NSENGIYUMVA (P. Rémy, SDB), Curato della Parrocchia, « L’attacco dei seguaci di Eusebie NGENDAKUMANA alla parrocchia di Rukago »  in  Bollettino di collegamento e d’informazione per la Quasi-Provincia salesiana dell’Africa dei Grandi Laghi (AGL),  AGL News, Marzo 2013, http://www.sdbagl.org/PDF/aglnewsmars03.pdf   consultato il 5 maggio 2016.

[44] Segatwa (avvocato Fabien): estratto di una lettera del 10 marzo 2013 al vescovo di Ngozi: «Con le loro risorse limitate, hanno costruito un orfanotrofio moderno che aveva accolto fin dall’inizio 50 orfani di giovane età».

[45] Il Consiglio parrocchiale di Rukago ha preso la decisione di vietare l’accesso alla chiesa ad ogni ragazza o donna con capo coperto. L’Ordinario ha vietato formalmente ogni culto a Businde ed ha chiesto alla Sigra Eusébie e ai suoi  «seguaci» di fermare ogni attività che pregiudica l’unità e la comunione della Chiesa.

[46] Più di 12 000 persone hanno partecipato all’inaugurazione.

[47] La veggente è stata ricevuta per tre quarti d’ora dal vescovo il 28 dicembre1974, dopo un terzo divieto da parte sua il 20 maggio 1973 e prima di un quarto divieto del 12 luglio 1975.

[48] Can. 1740 — Quando il ministero di un parroco per qualche causa, anche senza sua colpa grave, risulti dannoso o almeno inefficace, quel parroco può essere rimosso dalla parrocchia da parte del Vescovo diocesano.

[49] Venerdì 12 ottobre 1956, Monsignor Fauvel, vescovo di  Quimper e Léon, lancia un primo Divieto su Kérizinen che fu pubblicato nella Settimana Religiosa di Quimper: « Sulle presunte apparizioni di Kérizinen nel Plounévez-Lochrist, precisiamo i punti seguenti: 1.- L’edificio che vi si trova è stato costruito nonostante il nostro divieto scritto, e notificato all’interessata. Nessun prete ha ricevuto da noi di poter benedire questo edificio. 2.- Facciamo divieto a tutti, preti, religiosi e religiose di recarsi a Kérizinen o di consigliare a chiunque di andarci. (Questa nota sarà letta in chiaro domenica prossima 14 ottobre, a tutte le messe delle chiese e cappelle). A questo divieto, l’associazione degli amici di Kérizinen risponde che il divieto fu fatto senza indagine canonica e senza avvertimento e che, contrariamente all’affermazione del vescovo, Giovannine-Louise non ha mai ricevuto espresso divieto relativo alla costruzione di un edificio, ma aveva ricevuto un’autorizzazione verbale del Vicario Generale di costruire un oratorio nella sua proprietà.

[50] A Lipa, il Carmelo è stato messo in quarantena con divieto a ogni persona di entrare e alle sorelle di uscire (tranne il divieto per le compere)

[51] L’abate L’Horset, curato di Dozulé, è stato trasferito quando ha scritto un libro su questo argomento

[52] A Lipa, la madre superiora del Carmelo fu trasferita.

[53] A Lipa (Filippine), i due vescovi del luogo favorevoli agli avvenimenti del 1948 sono trasferiti per lasciare il posto ad un vescovo che decreta nel 1951 il carattere non soprannaturale degli avvenimentil. Dopo la sua partenza, si apprende il 2 febbraio 2017 « la « rinuncia » dell’arcivescovo Mons. Ramon C. Argüelles, poco dopo che abbia riconosciuto il carattere soprannaturale delle apparizioni

[54] Padre Herman Harakandila fu il superiore della congregazione missionaria degli apostoli del Buon Pastore, creata nel 1989 da Mons. Ruhuna, arcivescovo di Gitega nel Burundi, con lo scopo di incoraggiare le vocazioni sacerdotali e la misssione, nel momento in cui il governo del Burundi espelleva in modo massiccio i religiosi stranieri. Dopo aver sostenuto l’apparizione mariana di « Nostra Signora regina dell’Africa », gli fu vietato di celebrare la messa, mentre lo Stato lo imprigionava. Secondo un testimone, lo Stato gli avrebbe proposto di uscire di prigione a condizione di non promuovere l’apparizione. Avrebbe rifiutato. Più tardi i vescovi ottennero la sua liberazione e lo mandarono presso un prete che gli fece firmare un accordo con cui rinunciava all’apparizione. Quindici giorni dopo, ritrattò e scomparve nell’anonimato, in modo che il suo ordine religioso dovette effettuare un decreto di esclaustrazione. In seguito alla scomparsa dei suoi due fondatori, Mons. Ruhuna, assassinato nel 1996, e padre Herman, nuovo superiore generale della giovane congregazione fece appello all’Aiuto alla Chiesa che Soffre per sopravvivere. Fonti: Padri  bianchi de Gitega, Chiesa che Soffre,

www.youtube.com/watch?v=sJ1ktdUzieA consultato il 21 settembre 2014, ecc.…

[55] A Lipa, Sul suo letto di morte, uno dei vescovi interessati avrebbe detto che erano stati forzati i membri della commissione del 1951 a riconoscere il carattere non soprannaturale delle apparizioni su minaccia di scomunica.

http://www.marianmessenger.ph/index.php/maian-feature

[56] In Italia, madre Eugenia non ha ricevuto il sostegno della Chiesa quando fu arrestata dallo Stato italiano, su denuncia, probabilmente falsa, di religiose della congregazione che aveva diretto. Nel Burundi, Padre Hermann è stato imprigionato dal potere civile e la Chiesa l’ha fatto uscire al prezzo della sua rinuncia alla sua fede nelle apparizioni del Businde.

[57] Mons. René Laurentin, prelato di Sua Santità, e andato in cielo il 10 di settembre 2017, nel suo centesimo anno.

[58] Laurentin (Mgr René), Mémoires, chemin vers la lumière, Paris 2005, Fayard, p. 351, 558, 559.

[59] Vachon (cardinale Louis-André), Decreto di soppressione dell’associazione pubblica « Arca di Maria » 4 maggio 1987, in La Documentazione cattolica, t 84, n° 1946, 6-20 settembre 1987, p. 864.

[60] A Kerizinen, una lettera supplica del 7 ottobre 1956 indirizzata a Monsignor Fauvel, Vescovo di Quimper e Léon, e controfirmata da 356 persone, è conservata negli archivi, (chiedeva la messa al posto delle apparizioni). Non fu inviata, a causa del divieto arrivato 5 giorni dopo. http://kerizinen.free.fr/messagef2.htm

[61] Il 24 marzo 1961, Monsignor Fauvel, vescovo di Qimper e Léon, fa uscire nella Settimana Religiosa di Quimper un secondo Divieto su Kérizinen : «In una nota apparsa nella Settimana Religiosa del 12 ottobre 1956 e letta in tutte le chiese e cappelle della diocesi, la domenica seguente il 14 ottobre, avevamo precisato che un edificio era stato costruito a Kérizinen nonostante il nostro divieto. Inoltre avevamo vietato a tutti i sacerdoti, religiosi e religiose di andare a Kérizinen o di consigliare a chiunque di andarci. Sapendo che dei fedeli continuano ad andarvi, vietiamo formalmente ogni forma di devozione e di culto a Kérizinen. Speriamo che questo divieto sarà osservato e di non dover ricorrere a misure più severe». A tale divieto, l’associazione degli amici di Kérizinen risponde che secondo lei, questo secondo divieto fu lanciato senza un’indagine canonica e senza preavviso.

[62] Il 28 marzo 1975, dopo la celebrazione della Passione delle ore 20.30, il sacerdote raccomandò vivamente ai cinquanta assistenti di tacere su quello che avevano visto e sentito e che non capivano.

http://www.ressource.fr/francais/messages/messages21a30.html

[63] Cf messaggio di Mons. Pican, supra.

[64] Il vescovo di Quimper e Léon pubblica la decisione della Congregazione per la dottrina della fede del 21 giugno 1975[64] che commenta così: «… La devozione racchiusa in questo luogo ed il culto che si vuole instaurare non sono in armonia con la fede cattolica, e non devono essere favoriti dai responsabili della Chiesa. […]  coloro che diffondono questi messaggi e promuovono un culto fondato su di essi lo fanno forse in buona fede, ed è la loro scusa un’opera nefasta all’interno del popolo di Dio».

[65] Nel Medio Evo, la Chiesa consegnava ai « criminali della fede » il potere secolare. Oggi, vediamo che la Chiesa denuncia il potere secolare, o almeno non riesce a difendere i fedeli cattolici beneficiari di apparizioni, come la Sigra Maddalena Aumont, messa sotto tutela e alloggiata contro la sua volontà in una casa di riposo di Livatot.

[66] Dal 1961 al 1965, moltissime persone sono state testimoni di avvenimenti inspiegabili, che sono al centro della cronaca e hanno dato luogo ad una commissione d’inchiesta che ha lavorato in condizioni a dir poco controverse: «Il 22 agosto 1961, i membri della Commissione, nominati dal vescovo, arrivarono a Garabandal con il compito di studiare questi fenomeni strani. Erano due o tre preti, un medico ed un fotografo. Il loro comportamento nel corso di questa serata non sembra che si possa citare come esempio: sia che si tratti dell’osservazione degli avvenimenti stessi, le loro disposizioni d’imparzialità, la misura dei loro gesti, la loro spudoratezza. […] Per quest’ultima [Conchita], cominciò il giorno stesso [il 27 luglio 1961]  la verifica programmata dai membri della Commissione, il medico Don José Luis Pinal ed il sacerdote Francisco Odriozola. Alle prove più o meno fisiche o psicologiche si aggiunse un cambiamento intenso di ambiente: presenza alla spiaggia, agli spettacoli, ai divertimenti, ecc. […] Con questo trattamento intensivo di mondanità, che utilizza durante le interviste con la ragazza alcuni processi: miscela di lusinghe e minacce, quelli che agivano in nome della Commissione alla fine raggiunsero quello che volevano, strappare a Conchita delle «prove» contro la veridicità di tutto ciò che accadeva». (Cf. Eusebio Garcia de Pesquera, «Garabandal, faits et dates» Résiac 2008, p. 31/152 p.)

[67] Il 9 ottobre 1968, la segreteria del Vescovo di Santander pubblica una nota nel bollettino ufficiale della diocesi  (Boletin O. del Obispado, noviembre 1968 p. 496-498.) riguardo alle presunte apparizioni di Garabandal, appellandosi al canone 1399 n°5 del Codice del1917, mentre questo è abrogato. Secondo padre Eusebio Garcia de Pesquera, «Garabandal, faits et dates» Résiac 2008, p. 103-104/152 p., non si trattava di una condanna canonica, dal momento che nessun processo canonico, nessuno studio degno di questo nome aveva preceduto questa nota. invece ricorda che in Spagna, a quell’epoca, la parola di un vescovo era considerata iindiscutibile. (Cf. Eusebio Garcia de Pesquera, «Garabandal, faits et dates» Résiac 2008, p. 103-104/152 p.)

[68] Guillon (Mgr. Clément), estratti della lettera e della nota del 16 novembre 2007 rivolta al Presidente dell’Associazione degli Amici di Kérizinen. (Archivi dell’associazione)

[69] www.ressource.fr/fdn/Dossier/Classeur2/BEElementsDeReponse_MgrPican_190306.htm

[70] Abbiamo visto, in particolare che l’imprimatur era stato tolto per la pubblicazione di libri relativi alle apparizioni.

[71] http://apotres.amour.free.fr/page33/DOZULE.htm

[72] Nel 1951, nessun ricorso di contenzioso amministrativo era possibile poiché la Seconda sezione del Supremo Tribunale non era ancora creata. Anche se fosse stata creata, un ricorso di contenzioso-amministrativo sarebbe stato impossibile da vincere, poiché gli elementi di prova di un’eventuale violazione della legge non erano conosciuti della veggente né dei suoi amici.

[73] Cf. Zulueta, Lito (June 1, 2016). « Vatican overrules Batangas bishop; declares 1948 Marian apparitions not genuine ». The Philippine Daily Inquirer. Retrieved 6 June 2016.  Eugenio, Damiana L. (1996). Philippine folk literature: the legends. University of the Philippines. p. 109. ISBN 978-971-8729-05-2.; « Vatican reverses ruling on Lipa Marian apparition ». GMA News. June 3, 2016. Retrieved June 6, 2016.

[74] Hoyeau (Céline), in La Croix urbi & orbi del 13/06/2016: E’ questo decreto che la Congregazione per la dottrina della fede ha dichiarato «nullo e vuoto», «alla luce del fatto che la dichiarazione del 1951 è stata una decisione confermata dal Sommo Pontefice e di conseguenza definitiva». «Il tema del fenomeno di Lipa non dipende dall’autorità del vescovo diocesano locale», ha precisato il decreto della CDF.

[75] Lettera rivolta all’autore il 3 febbraio 2017.

[76] Prot 18881/87/CA, Studia Canonica, 25 (1991), p 403-415. Traduzione francese del giudizio e commento dell’abate Roch Pagé           .

[77] Werckmeister (Giovanni), «les sectes», in Revue du droit canonique, 51/1, 2001,
p. 3-4. Si noterà che, nella stessa rivista (p. 44), Le Vallois (Philippe) si oppone all’apprezzamento d’intolleranza per i soli cattolici, ricordando quanti protestanti sono stati intransigenti nei confronti della setta anabattista.

[78] http://www.coordiap.com/press3012-conference-lutte-anti-sectes-bilan-et-perspectives.htm

[79] Bécourt (Thierry), La nouvelle chasse aux sorcières, Paris, Omnium éditions, 1992, 111 p.

[80] Prima del 1954, si trattava principalmente dei francomassoni, dei socialisti, dei vecchi cattolici, dei comunisti e della lega dell’insegnamento di Giovanni Macé, poi nel 1954, due fratelli predicatori hanno specificato il contesto, vale a dire H. CH. Chary L’offensive des sectes, Paris Cerf et M B.  Lavaud Sectes modernes et foi catholique, (Paris Aubier), incorrendo nelle ire di autori protestanti come Jean Seguy, Les sectes protestantes dans la France contemporaine, Paris 1956, Beauchesne & Fils.

Messner (Francis), Les Nouvelles religions, corso reprografato, Strasbourg, USHS, 1988, p. 33 citato da Le Vallois (Philippe) «Definitio d’une secte della setta e comportamenti verso le sette nella Chiesa cattolica romana»  in Revue du droit canonique, 51/1, 2001, p. 53-73.

[81] Can. 2314 § 1 Gli apostati, gli eretici e scismatici incorrono scomunica; se ammoniti non resipiscono, saranno privati di benefici, dignità, pensioni, uffici o altro; saranno dichiarati infami e se chierici, dopo ammoniti inultilmente, saranno degradati.

[82] Cf. c. 316 per l’adesione ad un’associazione pubblica, c.1041 per ricevere validamente il sacramento dell’ordine, c. 1124 per il matrimonio, c. 1184 per l’ammissione alle esequie ecclesiastiche,

[83] Risposta della CPI/17-67 del 30-07-1934 (AAS 26 [1934] 494; DC 32 [1934] col. 901-902).

[84] Vernette (Giovanni Maurice), nato il 26 febbraio 1929 a Port Vendres, ordinato prete della diocesi di Montauban il 30 marzo 1952, dottore in teologia, laureato in filosofia e diritto canonico, era conosciuto per la sua grande conoscenza delle sette. Nel 1973, il Consiglio permanente della Conferenza dei vescovi di Francia lo nomina delegato dell’episcopato per le questioni sulle sette e le nuove correnti religiose. Pubblica molti libri sulle sette tra il 1976 ed il 2001, tra i quali: Sectes et réveil religieux Quand l’occident s’éveille, Salvator, Mulhouse, 1976 e Les sectes, Paris, Presses universitaires de France, coll. «Que sais-je ?», n° 2519, 1990 ou Dictionnaire des groupes religieux aujourd’hui, avec Claire Moncelon, Presses universitaires de France, 2001.

[85] Arinze (Cardinale Francis), La sfida delle sette o dei movimenti religiosi, approccio pastorale, in DC 19 maggio 1991, n° 2028, p. 483-499.

[86] Document-Episcopat n° 15, novembre 1991, p. 3, col 2. (La Chiesa cattolica, le Sette e i Nuovi movimenti religiosi in Francia)

[87] http://ec.cef.fr/wp-content/uploads/sites/2/2014/05/pontier_reponse_hamant.pdf

[88] http://www.eglise.catholique.fr/structure/cellule-pour-les-derives-sectaires-dans-des-communautes-catholiques/

[89] Sorlin (Sorella Chantal-Marie), responsabile dell’Ufficio delle Derive Settarie http://www.eglise.catholique.fr/wp-content/uploads/sites/2/2015/03/CRIT%C3%88RES-sep.-2014.pdf

[90] Benedetto XVI, «Lettera contro la revoca dei 4 scomunicati», Vaticano, 10 marzo 2009 pubblicata dalla conferenza dei vescovi di Francia

[91] Trouslard (Jacques), communication aux chefs d’Établissement de l’Enseignement Catholique. Questo documento messo on line dalla Chiesa di Scientologia il 18 ottobre 2002 è stato ritirato il 11 giugno 2006, su richiesta del Nunzio apostolico. http://scientologie.fraude.free.fr/12/opus-dosnon.htm Si trovano invece delle tracce su altri siti come www.prevensectes.com/opus11.htm consultato il17  consultato il 17 dicembre 2016.

[92] Decreto del 13 luglio 2001 sulla promozione e nomina alla legione d’onore, JORF n°162 del du 14 luglio 2001 p. 11337.

[93] Cotton (Marc-André) « L’Etat inquisiteur », Editions des 3 monts, 3° edizione, Auxerre 2010, p. 14.

[94] Prot 49737/14 CA, caso sottoposto ai canonisti senza frontiere.

[95] http://www.sos-derive-sectaire.fr/AIcourrier.htm consultato il 22 settembre 2013.

[96] http://opuslibre.free.fr/v/spip.php?article22

[97] Vernette Mgr. Giovanni-Maurice si è sposato il 24 luglio 2002 a Tolosa con la Sigra Liliane Josette Moncelon, che si chiama Claire, Liliane, Josette, come lo ha ricordato il 20 dicembre 2002 il giudice delle questioni familiari del Tribunale di grande istanza di Tours (Francia).

[98] http://ec.cef.fr/wp-content/uploads/sites/2/2014/05/pontier_reponse_hamant.pdf

[99] Francesco (Papa) omelia del 30 gennaio 2017, durante la messa della mattina nella cappella della Casa di Santa Marta in Vaticano

[100] Source = Observatoire du patrimoine religieux.

La Giustizia per i consacrati

Ecco un estratto del libro sul « La giustizia amministrativa nella chiesa cattolica » (imprimatur del testo francese ricevuto il 11 ottobre 2017)

Capitolo 6: La giustizia per i consacrati

A rigor di termini, il titolo dovrebbe essere «la giustizia per gli istituti di vita consacrata per la professione dei consigli evangelici, le società di vita apostolica nonché per i loro membri» ma questo titolo è lungo e tuttavia non copre tutta la varietà dei carismi e dei diritti, poichè esistono istituti religiosi e secolari, religiosi attivi e contemplativi, eremiti ecc. Pertanto useremo i termini generici di «religiosi» per i membri degli istituti religiosi, e di «consacrati» intesi in senso ampio, per tutte le persone coperte dal titolo di cui sopra.

Innanzitutto, esprimiamo la nostra profonda gratitudine verso i nostri contemporanei che dedicano la loro vita all’intercessione e all’azione altruista per il mondo e per noi stessi nella vita consacrata all’interno  della Chiesa. Sono numerosi:

Nel 2014, i religiosi professi non preti sono 54 559 nel mondo, mentre le religiose professe sono 682 729, quasi [270 000] (39%) in Europa, 177 000 in America e 170 000 in Asia[1].

Ed ecco la loro suddivisione in Francia:

  • 23 527 religiose di vita apostolica[2], suddivise in 315 istituti, di cui 2 413 religiose straniere in Francia e 1 463 religiose francesi all’estero;
  • 5 741 religiosi suddivisi in 86 istituti e monasteri, di cui 1 081 monaci in 59 monasteri;
  • 3 131 suore suddivise in 228 monasteri[3].

 

  1. Il diritto e la sua applicazione

Il diritto dei consacrati è fortemente segnato dal consiglio evangelico dell’obbedienza.

  • Diritto e obbedienza

Dopo il decreto del Concilio Perfectæ caritatis sul rinnovamento e sull’adattamento della vita religiosa, il magistero dedica loro cinque grandi testi specifici[4], mentre Papa Francesco ricorda questo ai suoi collaboratori:

Coloro che sono disobbedienti devono apprendere la bellezza e la necessità dell’obbedienza, la tranquillità dell’anima che essa dà […] In effetti, come insegnano i santi ed i Dottori della Chiesa, è l’obbedienza che forma veramente il religioso.[5]

Il Codice di diritto canonico dedica ai religiosi la terza parte del libro II, con 158 canoni relativi agli Istituti di vita consacrata (c. 573 à 730) e 19 canoni relativi alle Società di vita apostoliche (c. 731 à 749). Autori come Giovanni Beyer hanno pubblicato molte opere per commentare questi canoni, tuttavia senza affrontare la giustizia del diritto risultante dai 177 canoni corrispondenti.

I diritti e doveri dei religiosi derivano dalla combinazione di cinque diritti diversi specificati nel canone 1427:

  1. i diritti e doveri dei fedeli cattolici;
  2. in base al loro stato, i diritti e doveri dei laici o dei chierici;
  3. i diritti e doveri dei membri degli istituti di vita consacrata e delle società di vita apostolica, a seconda del loro stato;
  4. il diritto particolare della diocesi da cui dipendono o della Congregazione romana alla quale sono collegati;
  5. i diritti e doveri che figurano nei loro statuti e regolamenti interni ai loro istituti, società o congregazioni.

Rispetto ai semplici fedeli, i religiosi che hanno fatto voto di obbedienza sono sottoposti a ulteriori privazioni di libertà, come d’altronde lo sono i dipendenti di un’azienda. Ecco un esempio:

al suo ritorno dalla Svezia, Papa Francesco risponde ai giornalisti a proposito del rinnovamento carismatico. Ricorda i suoi timori durante la nascita di questo movimento, quando impose delle regole specifiche ai gesuiti che dirigeva: «sono stato uno dei primi oppositori in Argentina – perchè ero Provinciale dei gesuiti a quell’epoca (…) ed ho vietato ai gesuiti di avere legami con loro. Ho detto pubblicamente che quando si faceva una celebrazione liturgica bisognava fare una cosa liturgica e non una “scuola di samba” (escuela do samba). Questo è quello che ho detto. Ed ora penso il contrario»[6].

In generale, i religiosi accettano le restrizioni imposte dal loro superiore in segno di amore, ma a volte, a torto o ragione, non capiscono o non accettano tali restrizioni. Elisabeth Mc Donough[7] fa una sintesi dei loro diritti, come previsti dal Codice di diritto canonico:

Il Codice di diritto canonico esprime direttamente o indirettamente pochissimi diritti per i membri degli istituti religiosi; d’altra parte molti diritti sono loro limitati a causa della loro professione religiosa. Così, i tre soli diritti chiaramente identificati per i religiosi sembrano essere:

  • il diritto di non rivelare la propria coscienza al loro superiore[8];
  • il diritto di vivere la vita religiosa[9];
  • il diritto dei mezzi di sussistenza per svolgere la loro vocazione[10].

Quando sorgono delle tensioni all’interno di una comunità religiosa, i religiosi in questione devono rispettare il voto di obbedienza, sapendo che non sono tenuti ad obbedire ad un ordine se questo è illegale o contrario allo spirito e al carisma dell’istituto, come indica in particolare l’esortazione apostolica Evangelica testificato sul rinnovamento della vita religiosa[11]:

Eppure, non ci sono possibili conflitti tra l’autorità del superiore e la coscienza del religioso, «questo santuario dove l’uomo è solo con Dio e dove la sua voce si fa sentire» (GS16) ? Inutile dire ancora una volta: la coscienza non è il solo arbitro del valore morale delle azioni che suggerisce, deve fare riferimento a criteri oggettivi, e se occorre, riformarsi, correggersi. Ad eccezione di un ordine che sarebbe chiaramente contrario alle leggi di Dio o alle costituzioni dell’istituto, o che implicherebbe un male grave e serio, nel qual caso l’obbligo di obbedire non esiste, le decisioni del superiore riguardano un ambito in cui l’apprezzamento del migliore può variare a seconda dei punti di vista. Infine, dal momento in cui un ordine dato appare oggettivamente meno buono, quindi illegittimo e contrario alla coscienza, ignorerebbe in modo poco realistico l’oscurità e l’ambivalenza di tante realtà umane. Inoltre, la disobbedienza è spesso causa di gravi danni al bene comune. Un religioso non saprebbe accettare facilmente che vi sia contraddizione tra il giudizio della sua coscienza e quello del suo superiore. Questa situazione eccezionale comporterebbe a volte un’autentica sofferenza interna, come in Cristo stesso, «che apprese attraverso la sofferenza ciò che è l’obbedienza» (He 5, 8).

Dopo l’esortazione apostolica evoca la sofferenza salutare tra il punto di vista del religioso e quello della sua gerarchia, che deve mantenere la comunione ecclesiale con sanzioni adeguate, nel rispetto delle norme giuridiche. Normalmente, i diritti e doveri dei consacrati sono rispettati all’interno degli istituti religiosi secolari o di vita apostolica stessi, per il fatto che i superiori esercitano la loro autorità con «fermezza senza rigore e dolcezza senza debolezza», nel rispetto della legge e delle persone umane, in conformità ai canoni 617[12] e 618[13]. Si pone la questione di sapere ciò che accade quando la legge non viene rispettata dal religioso o dal suo superiore.

  • La protezione dei diritti e doveri

Nella sua tesi di dottorato, Scolastica Empela Ankonelle[14]  evoca situazioni in cui la comunità religiosa diventa un luogo soffocante di sofferenza e disperazione:

«La vita comunitaria è visibilmente marcata da comportamenti contrari a ciò che si intende per una comunità unita nel nome del Signore […] dove i funzionari o le autorità tendono a favorire la loro etnia a scapito dell’interesse generale, […] L’indifferenza degli uni e degli altri, la denigrazione, la critica negativa, la pigrizia e la gelosia, la diffamazione e la mancanza di fiducia rendono la fratellanza un giogo difficile da sopportare.

Ritiene che:

la crisi dell’autorità influenza quella del voto di obbedienza per la mancanza di consapevolezza dei diritti e degli obblighi di entrambi.

In nessun momento l’autrice menziona il ricorso ad un terzo o alla giustizia della Chiesa nella storia delle suore di Santa Teresa del Gesù Bambino di Lisala (Congo DRC), o le loro  proposte per rafforzare la loro identità come consacrate, ricordando la legge, per fare giustizia e portare la pace.

Cita Josu Mirena Alday[15], riferendosi a sei diversi modi di vivere l’appartenenza a istituti religiosi contrassegnati da problemi di autorità e di vita fraterna:

  1. rinnovata appartenenza, dalla vocazione;
  2. fedeltà e silenzio, fiducia nei superiori come sono;
  3. critica e tensione, con un forte senso di appartenenza e critica;
  4. afflizione e nostalgia, con un atteggiamento fatalista;
  5. evasione, con graduale abbandono delle pratiche dell’istituto;
  6. inesistente, con un collegamento totalmente lontano.

Anche qui, l’autore non menziona esplicitamente il ricorso alla giustizia della Chiesa per obiettare la situazione e cercare soluzioni in conformità con la legge della Chiesa.

Ci sono, tuttavia, molti casi di religiosi che, a torto o ragione, si sentono tormentati dalla propria comunità religiosa e che ricorrono alla loro gerarchia o  ad un canonista per avere un supporto alla loro situazione.

Ecco innanzitutto un caso interessante in cui si vede un superiore, prima che diventi papa, applicare delle sanzioni per proteggere il bene comune della comunità, rispettando il diritto di difesa dei religiosi in questione.

Quando era superiore provinciale dei gesuiti dell’Argentina, Jorge Mario Bergoglio ha imposto delle sanzioni alla fine degli anni 1970, contro due padri gesuiti Orlando Y. e Francisco J. che sperimentavano una forma giudicata inaccettabile della teologia della liberazione. Li ha formalmente richiamati, ordinando loro di trasferirsi altrove e di sciogliere la comunità che hanno creato. Al loro rifiuto, ha ribadito il suo ordine, ma hanno fatto obiezione di coscienza, allora Bergoglio si è rivolto al superiore generale dei gesuiti a Roma, Pedro Arrupe, il quale ha risposto che entrambi devono obbedire[16].

In questo esempio, si ha quasi l’impressione che è il superiore provinciale che fa un ricorso gerarchico contro l’obiezione di coscienza di religiosi gesuiti.Tuttavia il caso più frequente proviene da ricorsi di religiosi contro decisioni del loro superiore che essi giudicano illegali o almeno, illegittime. In effetti esistono casi in cui un religioso subisce molestie, in teoria punibili dalla legge francese[17], ma che spesso le sopporta a causa del voto di obbedienza. In tali situazioni, i ricorsi sono rari, dal momento che, in generale, il conflitto si conclude con una sottomissione o con un accordo cortese, dimissione del religioso, o trasferimento in un altro luogo, come nei due esempi riportati di seguito da Marco Politi:

Dal 1970, il numero 152 di via Ostiense è la sede della comunità di San Paolo, creata dopo la destituzione dell’ex abate-vescovo, Giovanni F., del vecchio monastero di San Paolo fuori le mura, per aver denunciato la responsabilità della gerarchia ecclesiastica nella speculazione immobiliare a Roma[18].

Nel 1995, la Congregazione per la dottrina della fede impone due anni di silenzio alla sorella Ivone G., ex professoressa di teologia  all’Università di Sao Paolo in Brasile: divieto di insegnare, di pubblicare, di parlare in pubblico e di rilasciare interviste. Attualmente è esiliata in Belgio[19].

Non abbiamo né informazioni sufficienti, né l’esperienza necessaria per evocare giustizia all’interno degli istituti religiosi, comunque questo non è un nostro argomento. Parliamo innanzitutto dell’importanza delle misure di prevenzione:

Il vescovo di Nouakchott (Mauritania) celebra tutti i giorni la messa in una comunità parrocchiale o religiosa diversa, per cui frequenta regolarmente le comunità religiose della sua città episcopale.  Pertanto, le conosce abbastanza per accorgersi di un’eventuale tensione tra i membri. In tal caso, prende tempo per identificare il problema con le persone interessate e risolverlo prima che sorga. Per quanto riguarda le case religiose sparse nella sua diocesi su più di un milione di km², si mantiene informato su ciò che accade, accogliendo i visitatori di ogni tipo che arrivano.

In altri casi, i superiori non sono così vigili e le situazioni peggiorano, in modo che i religiosi fanno appello alle autorità superiori:

In Africa, un monaco contemplativo scopre un commercio illegale tra il superiore del convento e le signore della città, associato a trasgressioni di leggi ecclesiastiche legate all’amministrazione temporale dei beni e alla pedopornografia. In qualità di membro del consiglio superiore, secondo il suffragio della comunità, chiede chiarimenti e rispetto della costituzione, ma le sue richieste sono ignorate. Poi si dissocia esplicitamente da queste pratiche che coinvolgono diversi membri della comunità,  il moderatore supremo che lo invita alla pazienza. Nel marzo del 2016 l’abate generale effettua una visita canonica, ma le lamentele del monaco sono apparentemente ignorate, tanto da essere esiliato in un’altra comunità dell’ordine religioso per motivi di «disturbo alla pace». Dal febbraio 2017 viene istituito un dialogo pacifico tra il monaco e «Canonisti senza frontiere», nel tentativo di oggettivare il diritto e la giustizia nello spirito di insegnamento sull’autorità e l’obbedienza[20], e considerazioni sull’opportunità di fare ricorso, come discusso nel capitolo 12 di questo libro. Questa situazione ricorda una delle canzoni del poeta francese Guy Béart: «Il primo che dice la verità, deve essere giustiziato».

Se le misure preventive non sono state attuate o sono insufficienti e le tensioni non si risolvono all’interno dell’istituto, evochiamo il ruolo della giustizia ecclesiastica quando dei consacrati fanno appello ad altri organi della Chiesa. Questa situazione si verifica in genere quando un consacrato non ha più speranza di risolvere il conflitto con il dialogo, ossia quando dopo anni di vita consacrata, in cui ha dato tutto di se stesso, viene minacciato di espulsione temporanea (esclaustrazione) o definitiva e si comincia a dare esecuzione a questa minaccia.

Il problema generalmente è che i religiosi non conoscono i loro diritti e ancor meno i mezzi per difenderli. Inoltre, i superiori impediscono, a volte, ai religiosi di avere contatti esterni quando si accorgono dell’esistenza di una situazione d’ingiustizia nella loro comunità, come dimostra la mozione di espulsione di un religioso brasiliano, che comporta la seguente clausola che vieta al religioso di continuare ad avere contatti con canonisti, senza autorizzazione[21]:

Le chiedo di sollecitare le normali autorizzazioni (uscite, spostamenti, contatti esterni…) al Padre…

In caso di difficoltà non risolvibili con il dialogo, un primo livello di mediazione dovrebbe permettere di risolvere le tensioni interne. A tale scopo, diverse organizzazioni agiscono a favore degli istituti religiosi e / o dei loro membri.

I primi agiscono a favore dei religiosi, ma l’assenza di procedimenti contraddittori può tuttavia creare un rischio di pregiudizi a favore di false vittime:

  • l’Avref, un’associazione per aiutare le vittime delle derive di movimenti religiosi in Europa e le loro famiglie[22], svolge un ruolo importante di dialogo e di discernimento, consentendo alle vittime di fare un passo indietro rispetto a quello che stanno vivendo[23].
  • L’ICSA, International Cultic Studies Association[24], che è il partner internazionale di AVREF.
  • Il Servizio diocesano « Pastorale”, credenze nuove e derive secolari[25] è stato creato in connessione con la cellula per le derive settarie in comunità cattoliche della Conferenza dei vescovi francesi[26].

I due seguenti agiscono a favore degli istituti, cercando di proteggerli legalmente, senza necessariamente mettere in discussione alcune delle loro azioni:

  • la Corref, una conferenza di religiosi e religiose francesi[27], raggruppa i superiori principali e prevede esplicitamente di fornire « aiuto e sostegno agli istituti » se non possono essere portati ai religiosi e religiose.
  • A livello internazionale, il Consiglio internazionale dei Canonisti[28], fondato il 9 maggio 2016 dall’Unione Internazionale delle Superiori Generali (IUGS) per fornire consulenza legale ai suoi membri. Purtroppo, questo organismo non ha attualmente l’intenzione di assistere legalmente i consacrati, ma solo le superiori generali. Così, nonostante la sua bassa competenza, l’associazione « Canonisti senza frontiere » rimane necessaria per informare i consacrati che fanno appello ad essa sulla legge applicabile a loro e sui mezzi per farla rispettare.

Esiste inoltre un organismo che agisce in modo diverso, rispettando il diritto di difesa delle due parti, ossia il «Servizio Accoglienza Mediazione per la Vita religiosa e Comunitaria» (SAM), creato sotto l’autorità del Comitato di coordinazione della Commissione Episcopale della vita consacrata e delle Conferenze dei Superiori Maggiori all’interno della Conferenza dei vescovi di Francia. Il suo scopo è il seguente:

Accogliere e ascoltare persone (genitori, membri di comunità vecchie o nuove, ex membri) che ritengono di aver subito un danno a causa delle azioni di una comunità cattolica e/o che denunciano malfunzionamenti (abusi di potere, cattiva gestione dei beni, manipolazioni…)[29]

La sua origine ed il suo funzionamento sono specificati in una nota del 2006[30]. Per quanto riguarda i risultati, Christelle Javary[31] precisa:

Il SAM supporta uno scarso volume di mediazioni, ma svolge un ruolo essenziale per ascoltare e tranquillizzare le persone che hanno contatto con [esso]. Il risultato più importante è, senza dubbio, quello di aver tratto profitto dalla sua esperienza per ispirare delle raccomandazioni volte a prevenire futuri conflitti. E’anche probabile che la discrezione (che si può giudicare eccessiva) del SAM limita il numero di ricorsi di cui è destinatario. […] Il SAM è un’innovazione della Chiesa di Francia, che apparentemente non ha equivalenti altrove. Il SAM ha condiviso i frutti della sua esperienza in modo molto interessante ed utile, pubblicando due note su elementi di attenzione da seguire: una nell’aprile 2005 sui « Rapporti psicologici e spirituali nelle comunità. Errori da evitare»; l’altra, nel settembre 2008, sui « Punti di vigilanza relativi alla vita religiosa o comunitaria ». […] La Chiesa non è priva di mezzi per assicurare la protezione dei fedeli che si impegnano nella vita religiosa.

Avendo ricevuto richieste di religiosi, i Canonisti senza frontiere a volte hanno consigliato loro di rivolgersi al SAM, ma, per ora, i tentativi non hanno avuto successo:

L’11 maggio 2016, una religiosa del Niger viene a sapere che non è autorizzata ad avere i voti definitivi dopo cinque anni di voti temporanei. Siccome insiste, la superiora del convento la butta fuori con i suoi bagagli ma, non sapendo dove andare, resta seduta davanti al convento fino a che, due giorni dopo, i fedeli si commuovono, ed informano il vescovo che la ospita nei locali della cattedrale. A prima vista, la decisione di non ammissione ha tre irregolarità poiché proviene dalla Vice provinciale e non dalla Superiora generale, non è stata preceduta da nessuna ammonizione di cui al canone 697, e non contiene elementi precisi di pena che permetterebbero alla religiosa di esercitare il proprio diritto di difesa. La sorella poi fa ricorso gerarchico presso la superiora generale che la chiama diverse volte al telefono annunciandole una risposta scritta, ma non arriva niente. Ella si affida al servizio di accoglienza e di mediazione della Conferenza dei vescovi di Francia, che risponde l’8 dicembre 2016 senza averla nemmeno interrogata: «La superiora generale è responsabile delle fasi della vita religiosa, [la sorella] deve accettare questa decisione. Il termine per il ricorso è di 10 giorni, scaduto da molto tempo. Il SAM non può aiutarla». Interrogato su questo rifiuto, il SAM risponde, informalmente a Canonisti senza frontiere, che per una mediazione bisogna essere in due, il che lascia intendere che la congregazione della sorella è stata contattata dal SAM, e che ha rifiutato il principio di una mediazione. Il 21 dicembre 2016, la sua Congregazione le manda una lettera di espulsione, datata 8 novembre 2016, chiedendole di lasciare l’abito religioso.

A volte, invece, l’intervento è vantaggioso:

Essendo stato scartato dalla sua congregazione, i cui responsabili si comportavano in modo totalitario ed essendo  senza mezzi di sussistenza, lo stato di salute di un religioso si era profondamente degradato quando si rivolse a « Canonisti senza frontiere« . Gli fu consigliato di mantenere la sua fiducia in Dio, evitando i due ordini di vergogna e odio e di difendere i suoi diritti contattando il SAM. Quest’ultimo poi fece una mediazione, che gli permise di ottenere gradualmente un indulto di esclaustrazione in condizioni soddisfacenti.

Segnaliamo anche l’esistenza del Consiglio Internazionale dei canonisti[32], fondato il 9 maggio 2016 dall’Unione internazionale delle superiore generali (UISG) per offrire una consulenza giuridica ai suoi membri. Purtroppo questo organismo non pensa di aiutare dal punto di vista giuridico i consacrati, ma solo le superiore generali. Così, nonostante la loro debole competenza Canonisti senza frontiere[33] sono necessari per informare i consacrati che fanno appello a loro sulla legge applicabile e sui mezzi per farla rispettare.

Il secondo livello di ricorso giurisdizionale è quello dei ricorsi gerarchici amministrativi classici, in virtù del canone 1732 e sq. Dalla sua indagine nelle diocesi americane, James Provost rileva che il numero di ricorsi gerarchici da parte dei consacrati è poco elevato, poiché conta solo due ricorsi gerarchici su 141 diocesi in 16 anni. Ecco due ipotesi per cercare di spiegare questo risultato sorprendentemente basso:

  • sia che la protezione dei diritti all’interno delle comunità religiose è sufficientemente efficace perchè i consacrati non abbiano bisogno di rivolgersi all’esterno;
  • sia che la difficoltà per i consacrati di fare un ricorso gerarchico è tale che essi preferiscono lasciare la loro comunità volontariamente[34] o che sono esclusi da questa, prima di fare appello alla giustizia ecclesiastica.

Ecco un primo esempio di ricorso inefficace:

Dopo aver ricevuto la lettera di espulsione, una sorella invia immediatamente un ricorso gerarchico alla Congregazione romana, responsabile dei religiosi e riceve per e-mail una risposta negativa che specifica che il rifiuto di rinnovo dei voti non è assimilabile ad una procedura di espulsione e le chiede di obbedire. La sorella chiede, allora, che il suo ricorso venga esaminato di nuovo, allegando il passaggio degli statuti che non sono stati rispettati, e in caso di rifiuto, si prepara a lasciare l’abito ed a ricominciare una nuova vita, chiedendo al Signore la forza di perdonare.

Ed ecco un esempio di ricorso efficace:

Avendo ricevuto due ammonizioni di espulsione dal suo superiore generale, un religioso ha contattato la « Cellula per le derive settarie nelle comunità cattoliche[35] » della Conferenza Episcopale di Francia, che ha rilevato dieci irregolarità giuridiche nel comportamento del superiore generale. Su consiglio della cellula, il religioso depositò un ricorso gerarchico che chiedeva l’annullamento del capitolo generale della sua congregazione, che si era svolto illegalmente, poiché egli stesso non era stato convocato. Informato di questo ricorso gerarchico che lo infastidiva il Superiore Generale è intervenuto presso il dicastero competente della Curia romana, vale a dire l’Ecclesisa rei, e questa Commissione ha infine risposto al religioso che gli aveva scritto diverse lettere rimaste senza risposta. Una soluzione di compromesso è stata trovata e messa in atto.

Il terzo livello è quello dei ricorsi di contenzioso amministrativo, il cui numero è relativamente importante. In effetti, la consultazione del nostro database dimostra che:

  • i religiosi danno origine a 162 ricorsi, rappresentanti il 22% di 742 ricorsi il cui richiedente è informato [36];
  • I decreti della Congregazione per gli istituti di vita consacrata e le società di vita apostolica sono oggetto di 270 ricorsi, rappresentanti il 31% di 857 ricorsi il cui dicastero è informato.

In realtà, i ricorsi coprono due grandi ambiti che formeranno il nostro capitolo. Il primo riguarda la giustizia per i consacrati e altre persone fisiche, mentre il secondo riguarda la giustizia per le persone giuridiche che sono gli istituti di vita consacrata e le società di vita apostolica.

Il seguito di questo capitolo cercherà di chiarire la situazione a partire dalla giurisprudenza di contenzioso amministrativo relativa ai consacrati. Ci baseremo in particolare sull’analisi effettuata nel 1986 da Francesco d’Ostilio[37] su 90 ricorsi di contenzioso amministrativo presentati dai religiosi o dai loro istituti.

 

  1. La giustizia per i consacrati

 

Il rapporto di attività della Santa Sede per l’anno 1978 specificava che, tra i tre tipi di atti amministrativi che sono più spessso oggetto di un ricorso amministrativo presso il Supremo Tribunale, due riguardavano i religiosi, ossia i casi di esclaustrazione ed i casi di dimissione[38].

Più precisamente, F. d’Ostilio[39] classifica i ricorsi secondo le seguenti principali rubriche:

  1. i conflitti con i superiori ed i capitoli (c. 596, 617);
  2. l’ammissione (c. 597, 641-658, 720-723, 735), la formazione (c. 659-661, c. 724, c. 735), l’esclusione geografica (c. 679), l’esclaustrazione temporanea (c. 686, 745) e l’uscita definitiva di un membro (c. 686-704; c. 729; c. 742-743);
  3. l’elezione e la revoca dei superiori (c. 623 & sq.) o degli uffici (c. 682);
  4. la visita pastorale o apostolica (c. 628).

Dalle opere di Ostilio, Javier Canosa¹ cerca le «grandi sentenze» favorevoli ai religiosi, che caratterizzano i primi 40 anni di giurisprudenza amministrativa. Evoca:

  1. Il riconoscimento del diritto di difesa, riconosciuto dalla seconda sezione dal 1973, sulla base del diritto naturale e non di un particolare canone (Prot. 2973/72 CA).
  2. Il richiamo dei principi (carità) e della funzione del diritto (curare e non punire), tenendo conto della situazione delle persone, nella fattispecie una sorella che aveva vissuto e lavorato per molti anni nella sua congregazione Prot 10460/78 CA) ²
  3. La possibilità offerta dal Segretariato di Stato al Tribunale di giudicare un caso sul merito, che ha posto le basi per il risarcimento dei danni nel caso di un professore ingiustamente eliminato (Prot. 10977/76 CA)¹.
  4. Il rifiuto di accettare un ordine di espulsione sulla base della certezza morale e non di fatti obiettivi che supportano tale certezza (Prot 17156/85 CA)

Senza affrontarli tutti, cominciamo con le uscite dagli istituti, prima di trattare gli altri atti amministrativi.

 

  • L’uscita dagli istituti

 

La relazione di attività della Congregazione per i religiosi[40] riporta per il 2015:

  • 369 richieste di esclaustrazioni concesse;
  • 8 esclaustrazioni imposte;
  • 2 073 indulti di uscita concessi;
  • 213 decreti di dimissione confermati.

Ecco un tentativo di spiegazione:

Una delle realtà che non tarda a colpire ogni nuovo arrivato tra i dipendenti del Dicastero [La Congregazione per gli istituti di vita consacrata e le Società di vita apostolica] è la continua crescita di uscita dagli istituti di vita consacrata e particolarmente dagli istituti religiosi. I nostri servizi trattano fino a 3 000 richieste all’anno di uscita dagli istituti! […] Secondo le statistiche, le ragioni addotte a sostegno delle richieste di uscita sono legate principalmente alla crisi di fede, poi alle difficoltà nella vita fraterna ed infine, in minore misura, alla  mancanza di affetto […] Tuttavia, nonostante le uscite numerose, bisogna ricordare che un albero che cade fa più rumore di una foresta che cresce. Se c’è infedeltà, ricordiamoci che c’è soprattutto molta santità nella vita religiosa.[41]

Nel diritto, l’uscita dalla loro comunità da parte dei membri consacrati (in senso largo) è disciplinata dai canoni 686 e 687 per gli istituti religiosi, dal 726 al 727 per gli istituti secolari e dal 742 al 745 per le società di vita apostolica, nonchè per gli statuti della loro comunità. Le situazioni sono diverse, come indica Yuji Sugawara[42] in occasione di una serata di studio sulla vita consacrata[43]:

  • uscita di un novizio (cfr. 653 §1);
  • esclaustrazioni imposte dalla Santa Sede (c.668 §3);
  • uscita imposta di un professo temporaneo (689)
  • uscite volontarie dagli istituti (cfr. 691-3);
  • dimissioni «ipso facto» dei membri (c. 694-700 °
  • dimissioni obbligatorie (695)
  • dimissioni facoltative ordinarie, che in effetti sono espulsioni a discrezione dei superiore (v. 696-700);
  • espulsione immediata in seguito ad un errore molto grave (c. 703);

Senza entrare in tutti i casi possibili, esaminiamo quelli più frequenti.

 

2.1.1. L’uscita volontaria da un istituto

 

Le ragioni di uscita dagli istituti sono molteplici[44]. Alcuni religiosi lasciano il loro istituto in seguito al non rinnovamento dei loro voti provvisori, sia volontariamente[45], che per decisione dei superiori. Altri cercano di fare un passo indietro e chiedono di assentarsi dal loro istituto, il che richiede un’autorizzazione di assenza per una durata massima di un anno in virtù del canone 665[46]; un indulto di esclaustrazione per una durata massima di tre anni in virtù del canone 686§1; delle autorizzazioni di passaggio in un altro istituto in virtù dei c. 684 e sq., cioè un indulto di uscita in virtù del canone 691[47].

Le autorizzazioni e gli indulti corrispondenti sono considerati come delle grazie, che possono essere rifiutate. All’occorrenza, colui che viene respinto può fare un ricorso che è accettato[48], rifiutato, non ammesso alla discussione o risolto con transazione, a seconda dei casi.

2.1.2. Le esclaustrazioni imposte

 

A volte, il religioso non vuole assentarsi o uscire dall’istituto ma sono i suoi superiori che vogliono allontanarlo. Una delle soluzioni che si presenta ai superiori consiste nell’imporre al religioso una esclaustrazione in virtù del canone 686 §3, per una grave causa come, ad esempio, l’incapacità di vivere insieme, l’assenza prolungata dall’istituto religioso, la violazione dei voti di obbedienza e di povertà.

  1. 686 § 3. Su richiesta del Moderatore supremo, con il consenso del consiglio, l’esclaustrazione può essere imposta dalla Santa Sede ad un membro che appartiene ad un istituto di diritto pontificio o dal Vescovo diocesano ad un membro di un istituto di diritto diocesano, per cause gravi, rispettando l’equità e la carità.

Il religioso in questione è esentato dagli obblighi incompatibili con la sua nuova condizione, ma continua a dipendere dai suoi superiori. Alcuni presentano dei ricorsi che sono accettati[49], respinti[50], non ammessi alla discussione [51], abbandonati o regolati per transazione[52], a seconda dei casi. Ecco un esempio di giurisprudenza:

Nel caso Prot 18061/86 CA[53], la giurisprudenza ricorda che l’esclaustrazione imposta per tre anni in virtù del canone 686 non richiede una colpa grave ma un grave motivo.

 

Raccomandiamo le opere di Madeleine Ruessmann[54] e di Delfina Moral Carvajal[55]  al lettore che vuole approfondire la questione, precisando, tuttavia, che l’esclaustrazione definitiva imposta in caso di colpa grave è riservata alla Santa Sede per gli istituti di diritto pontificio ed al Vescovo diocesano per gli istituti di diritto diocesani, «sempre nel rispetto dell’equità e della carità».

2.1.3. Le espulsioni

 

A volte, i superiori vogliono la partenza di un membro dal loro istituto, e lo allontanano in virtù dei canoni dal 696 al 701[56], per un motivo «grave, esterno, imputabile e giuridicamente provato». Javier Hervada commenta così l’evoluzione della legge applicabile:

Ormai, ogni espulsione lecita – vale a dire provocata da una causa sufficiente ed effettuata secondo una procedura stabilita – comporta ipso facto la cessazione dei voti e degli altri diritti e doveri. Le procedure variano a seconda dell’espulsione, e non in funzione della situazone giuridica del religioso. Esse sono:

  1. l’espulsione automatica quando sono soddisfatte le condizioni di cui al canone 694;
  2. l’espulsione obbligatoria quando sono stati commessi alcuni reati, secondo la procedura prevista al canone 695;
  3. l’espulsione per altre cause che non costituiscono necessariamente un reato, stabilite nel c. 696;
  4. l’espulsione quando c’è un «caso urgente», cioè quando si verifica un grave scandalo esterno o un danno molto grave imminente per la comunità, secondo il canone 703. 4).

Per quanto riguarda le possibili cause di espulsione, la lista (soltanto indicativa, non esaustiva) che dà il canone 69§1, è una novità importante. Il legislatore non ha voluto che questa materia delicata sia determinata in modo esclusivo dalla legge propria, ma ha posto dei limiti concreti affinchè, restando salvi i diritti del religioso, il bene comune dell’istituto, e in definitiva, quello della Chiesa siano anche protetti[57].

Spesso, il motivo invocato dal superiore è il rifiuto di obbedienza, previsto al canone 601:

Can. 601 — Il consiglio evangelico dell’obbedienza, accolto con spirito di fede e di amore per seguire Cristo obbediente fino alla morte, obbliga a sottomettere la volontà ai Superiori legittimi, quali rappresentanti di Dio, quando comandano secondo le proprie costituzioni.

Vediamo che il rifiuto di obbedienza non è sempre motivo di espulsione, poichè:

Un religioso è tenuto ad obbedire al suo superiore ma questi non ha il potere assoluto di ordinare qualsiasi cosa a chiunque[58].

Così, un religioso non è tenuto ad obbedire ad un ordine illegale o contrario allo spirito e al carisma dell’istituto. Il canone 618 specifica gli obblighi che spettano al superiore:

Can. 618 — I Superiori esercitino in spirito di servizio quella potestà che hanno ricevuto da Dio mediante il ministero della Chiesa. Docili perciò alla volontà di Dio nell’adempimento del proprio incarico, reggano i sudditi quali figli di Dio e, suscitando la loro volontaria obbedienza nel rispetto della persona umana, li ascoltino volentieri e promuovano altresì la loro concorde collaborazione per il bene dell’istituto e della Chiesa, ferma restando l’autorità loro propria di decidere e di comandare ciò che va fatto.

I tre testi precedenti hanno lo scopo di prevenire ed evitare gli abusi che potrebbero derivare da una tutela insufficiente del principio di autorità o dei diritti dei fedeli[59]. La loro interpretazione è oggetto di commenti dei canonisti, tra i quali quelli di Christian Begus, basati su due casi di giurisprudenza[60], da cui trarremo la conclusione seguente:

  • la mancanza di carattere assoluto dell’obbedienza comporta la possibilità per il religioso di procedere ad una valutazione della legittimità dell’ordine ricevuto, formalmente o sostanzialmente;
  • nel caso di disobbedienza di religiosi, oltre al criterio d’imputazione che fa riferimento ad un elemento di colpa, sembra possibile identificarne un altro, considerando l’importanza data al nesso di causalità tra la condotta del religioso, i fatti e la disobbedienza, in assenza di valutazione della propria negligenza;
  • la tutela dei diritti di difesa ha un valore assoluto, ed è oggetto di una particolare attenzione nella dimissione facoltativa, tenendo conto dei suoi molteplici aspetti, anche non espliciti, che coprono tutto il percorso della procedura: ammonizione iniziale, momento probatorio, e possibilità di presentare una difesa adeguata. Al contrario, questa procedura non include necessariamente la presenza di un difensore canonicamente competente. Il religioso può nominarne uno ma non può aspirare alla nomina di un difensore d’ufficio[61].

In realtà, la situazione è a volte meno chiara, come abbiamo visto con la religiosa del Niger ed il religioso brasialiano (Cf. infra).

Eccetto i casi di dimissione ipso iure per matrimonio[62] o abbandono notorio della fede cattolica di diritto o di fatto (es. passaggio al protestantesimo o all’ortodossia), il decreto di espulsione diventa esecutorio entro 10 giorni, per lasciare eventualmente tempo al religioso di fare un ricorso, che è poi sospensivo. In effetti, una sentenza del 24 febbraio 1973[63] ha fatto giurisprudenza in materia ed ha ispirato il canone 700, che afferma che il ricorso ha effetto sospensivo.

Dal momento che è necessario l’intervento della Curia per la dimissione forzata, si pone la questione di sapere se un religioso revocato deve fare un ricorso gerarchico prima o dopo la decisione della Curia. In seguito alla promulgazione del Codice, la Commissione per l’interpretazione dei testi legislativi[64] ha risposto a questa domanda precisando, il 21 marzo 1986, che la dimissione dei religiosi, dei membri delle società di vita apostolica e degli istituti secolari deve essere notificata alla persona interessata soltanto dopo essere stata confermata dalla Santa Sede. Questa può poi depositare un ricorso gerarchico presso la Congregazione romana, ma non immediatamente al Supremo Tribunale[65].

In pratica, dei religiosi espulsi depositano ogni anno ricorsi gerarchici e di contenzioso amministrativo. A seconda dei casi, questi ricorsi sono considerati irricevibili[66], non ammessi alla discussione[67], abbandonati in corso di procedura[68], rifiutati[69] o accettati[70], il che dimostra che la giustizia svolge il suo ruolo. A titolo illustrativo, ecco un primo esempio di ricorso accettato:

Nel caso Prot 31290[71], il Tribunale ha constatato che l’obbligo di dare all’imputato il diritto di difesa richiede che gli siano comunicate le dichiarazioni dei testimoni e che, nella fattispecie, questo diritto non è stato rispettato, e quindi la sua espulsione è stata considerata illegale sia nella procedura che nella sostanza.

 

Ecco un esempio di ricorso respinto

Nel caso Prot 37163[72], un religioso che viveva fuori dalla sua provincia riteneva di essere stato leso poichè il decreto di espulsione preso contro di lui in conformità al canone 697 non gli lasciava la scelta tra il pentimento o l’espulsione, ma proponeva soltanto la soluzione dell’espulsione. La Segnatura Apostolica ha ritenuto che il pentimento gli era stato proposto, ed ha respinto il ricorso.

 

Ed ecco un secondo esempio di rigetto:

Nel caso Prot 18061[73], la sorella Monica si è lamentata poichè non le sono state comunicate le motivazioni della esclaustrazione forzata e di conseguenza non ha potuto far valere correttamente il diritto di difesa. Il Tribunale ha giudicato diversamente considerando che, anche se le motivazioni dell’esclaustrazione non le sono state comunicate per iscritto, sapeva sufficientemente di cosa si trattava. Certamente, il canone 51 specifica che «il decreto sarà dato per iscritto, con l’esposizione delle motivazioni se si tratta di una decisione» ma il Tribunale ha ritenuto che una vaga spiegazione era sufficiente nella misura in cui i documenti precedentemente trasmessi contenevano dei chiarimenti e potevano essere considerati come dei decreti ai sensi del canone 49.

 

Le espulsioni hanno conseguenze sulle persone che lasciano gli istituti e la loro situazione, a volte, è oggetto di contenzioso nel diritto secolare.

 

 

 

2.1.4. Le conseguenze delle espulsioni

 

Una delle controversie che a volte accompagna l’espulsione di un religioso riguarda i diritti sociali che ha acquisito mentre era al servizio della sua congregazione[74].

In Francia, la legge del 9 dicembre 1905, sulla separazione tra Chiesa e Stato, ha rimandato i voti religiosi nella sfera delle attività private, sotto il controllo dei tribunali[75]. Questi ultimi prendono in considerazione il voto di obbedienza di alcuni religiosi, distinguendo la loro attività spirituale e i loro rapporti di lavoro. Ne deriva una giurisprudenza secolare incerta, quindi complessa, riportata da Patrick Boinot[76] a partire da giudizi sfumati della Corte di Cassazione, di cui ecco alcuni esempi:

A proposito di una religiosa che aveva lavorato come infermiera presso le Piccole Suore dell’Assunzione, l’assemblea plenaria della Corte di Cassazione, l’8 gennaio 1993 ha stabilito che la Signora … aveva esercitato la sua attività solo per conto e beneficio della sua congregazione, il che escludeva l’esistenza di un contratto di lavoro.

 

Invece,

a proposito di due sposi membri di una nuova comunità che non ha lo statuto di congregazione religiosa, la camera sociale della Corte di Cassazione ha giudicato il 29 ottobre 2008 che «indipendentemente dalla natura spirituale del loro impegno», queste due persone hanno «lavorato per conto dell’associazione in un rapporto di subordinazione che caratterizza un contratto di lavoro».

 

Infine,

a proposito della Signora…, impegnata con voti religiosi nella comunità della Croce Gloriosa, poi avendo lasciato questa comunità, la camera sociale della corte di Cassazione ha giudicato il 29 ottobre 2008 che «l’esistenza di un rapporto di lavoro dipendente non dipende né dalla volontà espressa dalle parti, né dal nome che hanno dato al loro accordo, ma dalle condizioni di fatto nelle quali è stata esercitata l’attività lavorativa; l’impegno religioso di una persona è suscettibile di escludere l’esistenza di un contratto di lavoro solo per attività che essa compie per conto e beneficio di una congregazione o di una associazione culturale legalmente costituita. ». In questo caso essa ha riconosciuto l’esistenza di un contratto di lavoro con le conseguenze che ne derivano.

 

Per quanto riguarda il trattamento pensionistico, Patrick Boinot ci dice che l’1 luglio 2006, la cassa di protezione sociale (CAVIMAC) tiene conto degli anni di postulato e di noviziato per il calcolo della pensione, in base alla giurisprudenza della Corte di Cassazione, che è stata poi tradotta nella legge francese n° 2011 – 1026 di finanziamento della previdenza sociale per il 2012 e l’articolo della L. 382-29-1 del codice della previdenza sociale.

 

  • Gli altri ricorsi per i consacrati

 

  1. D’Ostillo segnala l’esistenza di ricorsi di contenzioso amministrativo per i consacrati su vari argomenti come:
  • il rifiuto di ammissione alla professione temporanea o definitiva;
  • la revoca di un incarico d’insegnamento in applicazione del c. 192-5[77];
  • la revoca della facoltà di ascoltare confessioni[78];
  • il trasferimento in un’altra casa;
  • la privazione di voti attiva e passiva;
  • l’espulsione dalla diocesi con decreto del vescovo;
  • il rifiuto della facoltà di dedicarsi agli studi.

Consigliamo al lettore articoli specializzati per approfondire la questione.

 

 

  1. La giustizia per le istituzioni di consacrati

 

L’annuario pontificio dell’anno 2001 riporta 1992 istituti di vita consacrata e società di vita apostolica suddivisi come segue:

Istituti maschili Istituti femminili Totale
Istituti religiosi 193 1641 1834
Istituti secolari 16 95 111
Società di vita apostolica 35 12 47
Totale 244 1748 1992

Tra questi, gli istituti religiosi sono ampiamente maggioritari, quindi tratteremo principalmente la loro situazione, non senza qualche divagazione per gli istituti secolari e le società di vita apostolica.

Il rapporto di attività della Congregazione per il 2015 riporta 136 autorizzazioni di erezione di case religiose[79]. Oltre ai ricorsi da parte dei religiosi e dei consacrati, esistono anche ricorsi da parte degli istituti di vita consacrata e delle società di vita apostolica o del loro superiore. Riguardano i tre tipi di difficoltà di seguito:

  • le soppressioni di case religiose;
  • le rivendicazioni di diritti di proprietà;
  • gli nterventi nella gestione degli istituti.

 

  • La creazione e la soppressione

 

Il diritto relativo alle case religiose è definito dai seguenti canoni:

  • L’approvazione (c. 576, 579, 587, 595, 605); il raggruppamento
    (c. 580); la divisione (c. 581); la fusione (c 582); la modifica (c. 583, 595); la soppressione (c. 584, 585); l’esenzione (c. 591), l’erezione di case (c. 609 e sq. ; 733);
  • La gestione dei beni materiali degli istituti (c. 634-640; c. 718, 741) e dei loro membri (c. 668-670).

Questo diritto si arricchisce regolarmente, come dimostra per esempio l’interpretazione del Consiglio Pontificio per i testi legislativi, che ha stabilito il 14 luglio 2016 che i superiori maggiori degli istituti clericali di diritto pontificio non sono competenti ad erigere fondazioni religiose ai sensi del canone 312 §2[80].

L’annuario pontificio indica la data di fondazione degli istituti di vita consacrata e delle società di vita apostolica così come la data del loro riconoscimento canonico, che permette di misurare la durata media di riconoscimento. Effettuando questo lavoro sull’annuario dell’anno 2011, compare una ripartizione quasi uniforme con le scadenze di riconoscimento comprese tra alcuni mesi e più di 50 anni, che mette in evidenza il fatto che non si tratta di un diritto ma di una grazia:

 

Da questo, non abbiamo trovato ricorsi contro non riconoscimenti di istituti religiosi o secolari.

Va diversamente per le decisioni di soppressione di monasteri[81], di divisione (Prot 39257/06 CA) o di unione (Prot 40608/07 CA) di istituti religiosi. Ecco, tra l’altro, un esempio di ricorso:

Dopo accordo preliminare della Congregazione per i religiosi e gli istituti secolari, un vescovo diocesano sopprime una casa religiosa, per decreto del 29 luglio 1970, a causa dell’età avanzata delle religiose. Dopo delibera nel loro capitolo, le religiose depositano un ricorso gerarchico, poi un ricorso di contenzioso amministrativo presso la Seconda sezione ed il Papa stesso dà mandato ad una commissione pontificia di esaminare la causa a fondo e non soltanto dal punto di vista legale. Il 24 febbraio 1973, il Collegio del Tribunale annulla la decisione ed impone la restituzione del monastero ritenendo sulla base dei c. 493 e 498 del CIC/17 che il vescovo non era abilitato a prendere tale decisione, di competenza di Roma. (Prot 896/70 CA)

 

  • I diritti di proprietà

 

La questione dei diritti di proprietà, a volte, è così delicata riguardo ai raggruppamenti o alle soppressioni di istituti al punto che provoca ricorsi che si risolvono a volte con transazioni dopo che la CIVCSVA o il Supremo Tribunale ricorda il diritto (es.: Prot 384/68 CA).

I diritti di proprietà sono anche occasione di controversie tra il vescovo diocesano o una parrocchia ed un istituto religioso, così come si legge più volte nel rapporto di attività dell’anno 1987[82]. Ecco un esempio del 1972:

Un edificio conventuale che apparteneva ad un istituto religioso era diventato proprietà di una parrocchia in seguito al Concordato del 1818 con il Regno di Napoli. 150 anni più tardi, l’istituto ha rivendicato i suoi diritti ed ha ottenuto successo presso la Congregazione del Concilio (attualmente per il clero), ma la parrocchia ha fatto un ricorso di contenzioso amministrativo presso il Supremo Tribunale. Il 12 dicembre 1972, il Collegio dei Padri ha annullato la decisione del Dicastero, che aveva un vizio di forma[83].

 

Ci sono altri casi in cui i conflitti di proprietà terminano con una transazione tra le parti durante l’istruttoria di un ricorso di contenzioso amministrativo (es. Prot. 384/68 CA)

Ecco infine una controversia tra un istituto religioso ed un fedele cattolico, che si è risolto grazie alla giustizia ecclesiastica:

Nel 1950, un individuo aveva prestato una somma di denaro ad una congregazione religiosa francese. La superiora ha rimborsato le prime annualità ma il suo successore non ha continuato. I’individuo si è rivolto al Tribunale diocesano, il quale gli ha dato ragione. La provincia religiosa ha depositato un ricorso alla Rota che ha confermato la decisione dell’Ufficialità, e le ha dato mandato per calcolare gli interessi delle somme prestate. Contestando questa decisione, la superiora infine si è rivolta alla Segnatura Apostolica che non ha ammesso il suo ricorso (Prot n° 923/70 C.G.)

 

 

Senza entrare nei dettagli, potremmo citare anche:

  • una richiesta alla Congregazione per gli istituti di vita consacrata e le società di vita apostolica per un tetto del debito[84];
  • altri tipi di ricorsi riguardanti i diritti di proprietà degli istituti sui beni derivanti da pie volontà (ex: Prot 11876/79 CA).
    • La gestione degli istituti

 

Federico d’Ostilio identifica cinque ricorsi di contenzioso amministrativo contro una decisione della Congregazione per i religiosi e gli istituti secolari, relativi alla gestione interna degli istituti. Le decisioni del Tribunale, a volte, sono a favore dei richiedenti:

La superiora generale di un istituto secolare lionese è stata espulsa alla fine del suo mandato con una decisione della Congregazione per i religiosi e gli istituti secolari, provocando elezioni anticipate. La vecchia e la nuova superiora generale hanno adito il Supremo Tribunale, che ha annullato la decisione del Dicastero con sentenza del 26 giugno 1976. (Prot 6508/75 CA)

 

ed a volte a favore del Dicastero:

Dopo essere stata invitata dalla Congregazione per i religiosi e gli istituti secolari a consegnare le proprie dimissioni in seguito a gravi irregolarità nella gestione di un istituto, una superiora generale rifiuta l’invito ed è depositato dal vescovo diocesano. Fa ricorso contro la decisione ed il suo ricorso è ammesso alla discussione, ma il Collegio giudica infine, il 14 dicembre 1964 che la deposizione era conforme alla legge.

 

Altri casi simili terminano con un accordo tra le parti durante l’istruttoria di un ricorso di contenzioso amministrativo contro una decisione della Congregazione per i religiosi e gli istituti secolari, (Prot. 5868/74 CA).

Attualmente si cerca questo accordo con un’associazione di religiosi:

Nel 2012, la Congregazione per la dottrina della fede pubblica un rapporto molto duro sulla LCWR, che raggruppa quasi l’80% di circa 50 000 religiose degli Stati Uniti, accusandole di «femminismo radicale», di imprecisioni dottrinali, di aver perso il senso della Chiesa, di avere posizioni inaccettabili sulla sessualità e di rischiare di «distorcere la fede in Gesù e nel Nostro Padre amorevole»[85]. Le religiose replicano che si tratta di accuse infondate, potenzialmente distruttive per il seguito della loro missione. Da allora, le trattative proseguono tra il delegato del Vaticano, l’arcivescovo Peter Sartain e gli organi dell’associazione[86].

 

In conclusione, riteniamo che i ricori gerarchici e di contenzioso amministrativo costituiscono una realtà che contribuisce effettivamente al rispetto e/o al ristabilimento della giustizia in relazione ai religiosi. Questa giustizia interna alla Chiesa è particolarmente importante in un’epoca in cui, almeno in Europa, la società fa fatica ad accettare il consiglio evangelico di obbedienza. Così, alcuni reclami fondati o meno di religiosi o della loro famiglia, la portano a considerare che un istituto religioso ha un comportamento settario. Affronteremo questa questione nel capitolo seguente, dopo aver parlato della situazione trasversale delle sanzioni relative alle persone in possesso di carismi.

Tribunale ecclesiastico metropolitano di Ouagadougou (Burkina-Faso)

 

[1]Cf.  www.viereligieuse.fr/La vitaLa-vie-religiosa religieuse-in en-cifre chiffres-nel dans-le-mondo monde

[2] In opposizione alle religiose di vita contemplativa, chiamate monache.

[3] Fonte = COREF http://www.viereligieuse.fr/I- responsabiliLes-responsables

  • Il 15 agosto 1969, l’istruzione Venite seorsum sulla vita contemplativa e la clausura delle monache della Congregazione per i religiosi e gli istituti secolari,
  • il 2 febbraio 1990, l’istruzione Potissimum institutioni, della Congregazione per gli istituti di vita consacrata e le Società di vita apostolica,
  • il 25 marzo 1996, l’esortazione apostolica post sinodale «Vita consacrata»
  • il 13 maggio 1999, l’istruttoria sulla vita contemplativa e la clausura delle monache Verbi sponsa della Congregazione per gli istituti di vita consacrata e le Società di vita apostolica[4].
  • Il 29 giugno 2016, la costituzione apostolica Vultum Dei quaerere (alla ricerca del Volto di Dio).

[5] Acquaviva (Claudio S.I.) Industriae pro Superioribus eiusdem Societatis ad curandos animae morbos, Roma, 16 aprile 1600, citato da Papa Francesco il 22 dicembre 2016 (Zenit ,www.ignaziana.org/accorgimenti.pdf

[6] Zenit, 1° novembre 2016.

[7] McDonough (Elizabeth), «The protection of rights in Religious institutes», The Jurist, (1986) 164-204.

[8] Cf. c. 630 I religiosi riconosceranno ai membri la libertà che è loro dovuta per quanto riguarda il sacramento di penitenza e la direzione di coscienza, fatta salva la disciplina dell’

istituto.

[9] Cf. c. 654 Con la professione religiosa, i membri si impegnano con voto pubblico ad osservare i tre consigli evangelici; essi sono consacrati a Dio mediante il ministero della Chiesa, e sono incorporati all’istituto con diritti e doveri definiti dalla legge.

[10] Cf. c. 740 L’Istituto deve fornire ai suoi membri tutto ciò che è necessario secondo le costituzioni, per raggiungere lo scopo della loro vocazione.

[11] Paolo VI, Evangelica testificato, AAS, LXIII (1971), p. 512-513, n° 28: coscienza ed obbedienza.

[12] Can. 617 — I Superiori adempiano il proprio incarico ed esercitino la propria potestà a norma del diritto universale e di quello proprio.

[13] Can. 618 — I Superiori esercitino in spirito di servizio quella potestà che hanno ricevuto da Dio mediante il ministero della Chiesa. Docili perciò alla volontà di Dio nell’adempimento del proprio incarico, reggano i sudditi quali figli di Dio e, suscitando la loro volontaria obbedienza nel rispetto della persona umana, li ascoltino volentieri e promuovano altresì la loro concorde collaborazione per il bene dell’istituto e della Chiesa, ferma restando l’autorità loro propria di decidere e di comandare ciò che va  fatto.

[14] Empela Ankonelle (Scholastique), L’identité de la vie consacrée face aux actuelles mutations socioculturelles en Afrique, Université du Latran, Corona Lateranensis 47, Rome 2011, p. 267 et 272 / 406 p.

[15] Alday (Josu Mirena) «Il senso di appartenensa al proprio istituto», in Vitcons 37 (2002) 166-179.

[16] Politi (Marco), Francesco parmi les loups, versione francese, ed Philippe Rey, Paris 2015, p. 141-142/284.

[17] La molestia può definirsi come il ripetersi di parole e comportamenti aventi lo scopo e l’effetto di un peggioramento delle condizioni di vita della vittima. Secondo la legge francese, le molestie sul posto di lavoro sono un reato punibile nel settore privato come nel settore pubblico, dal momento che la legge prevede la protezione dei lavoratori, degli agenti pubblici e dei tirocinanti.

[18] Politi (Marco), Francesco tra i lupi, versione francese, ed Philippe Rey, Paris 2015, p. 122/284.

[19] Politi (Marco), Francesco tra i lupi, versione francese, ed Philippe Rey, Paris 2015, p. 117/284.

[20] Congrégation pour les instituts de vie consacrée et les sociétés de vie apostolique: Instruction du 11 mai 2008, Faciem tuam, Domine, requiram (le service de l’autorité et l’obéissance)

[21] Dei canonisti intervistati ritengono che il divieto di contatti esterni senza autorizzazione sia illegale. Ciò nonostante Canonisti senza frontiere hanno raccomandato al religioso di rispettarlo fino a quando non riceve formalmente una lettera di espulsione, in tal caso, il diritto di difendersi sembra prevalere sul dovere di obbedienza.

[22] https://www.avref.fr/

[23] Ecco un’intervista tradotta dal sito web di Avref il 30 giugno 2017:

Sei vittima di una Comunità, di un Movimento o di una persona che ha preso l’autorità su di lei:

  1. Tu che avevi pronunciato il voto di castità: hai provato l’isolamento, la rottura emotiva con i tuoi cari;
  2. Tu che hai pronunciato il voto di povertà: hai vissuto estorsioni, abbandono, miseria intellettuale e spirituale;
  3. Tu che hai fatto il voto di obbedienza: hai vissuto sottomissione, molestia, abuso del potere;

Quindi reagisci. Niente è perso.

  • Se sei ancora lì, scappa senza guardare indietro, ritrova la libertà;
  • Se hai lasciato, sei stato più duro, puoi ricostruire, devi farlo.

 L’AVREF ti accoglie e ti aiuta : manifestati ! Supporto confidenziale fornito da famiglie e ex membri delle Comunità.

[24] www.icsahome.com

[25] http://gamaliel21suite.pagesperso-orange.fr

[26] http://www.eglise.catholique.fr/conference-des-eveques-de-france/cef/autres-services-et-instances/418017-derives-sectaires-dans-des-communautes-catholiques/

[27] www.viereligieuse.fr

[28] www.crc-canada.org/fr/conseil-international-canonistes-IUSG

[29] Nota pubblicata dalla diocesi d’Evry: http://evry.catholique.fr/Service-Accueil-Mediation-pour-la e consultata il 3 marzo 2015;

[30] Si compone ad oggi di 9 membri (2 laici, padre e madre di famiglia, un prete secolare, 2 religiosi, 4 religiose) nominati dal Consiglio permanente dell’Episcopato per un mandato di tre anni. Sono tenuti al segreto professionale. […] Le persone ritenendo di essere, per se stesse o per un parente, in una situazione che rientra nell’ambito del SAM possono rivolgere una richiesta d’intervento al […] Vice Segretario generale della CEF […che…] affiderà il dossier ad uno o spesso a due membri del SAM. Spetta ai membri del SAM ai quali è stato affidato il dossier:

  • fare il punto della situazione ascoltando tutte le persone coinvolte nel conflitto (denunciante, superiori, responsabili di comunità),
  • aprire, quando è possibile, la via alla mediazione, a percorsi di comprensione e di riconciliazione,
  • informare fin dall’inizio il vescovo interessato e trasmettergli, alla fine del processo, un rapporto su quanto è stato fatto come mediazione, o dirgli che non può essere completata.

Fin dall’inizio, i vescovi hanno insistito sul fatto che siano sentite le persone che si interrogano su ciò che percepiscono, da dentro o fuori, come deviazioni in questa o quella particolare comunità. Servire il dinamismo del Vangelo richiede sempre, se necessario, di segnalare e di correggere ciò che fa da ostacolo.

[31] Javary (Christelle), «La médiation dans l’Église catholique de France»: l’exemple du SAM (Servizio Accoglienza Mediazione per la vita religiosa e comunitaria), mémoire d’IFOMENE 2008-2009.

[32] www.crc-canada.org/fr/conseil-international-canonistes-IUSG

[33] Vedere presentazione in allegato.

[34] Secondo ASS (2915), p. 745, 2073 indulti di uscita sono stati concessi nel 2015

[35] http://www.eglise.catholique.fr/structure/cellule-pour-les-derives-sectaires-dans-des-communautes-catholiques/

[36] I sacerdoti religiosi si contano sia tra i chierici che tra i religiosi.

[37] D’Ostilio (Francesco), Segnatura Apostolica in Dizionario degli Istituti di perfezione, volume VIII, Saba-Spirituali, sotto la direzione di Pelliccia (Guerrino) e Rocca (Giancarlo), Roma, Edizioni Paoline, p. 1236-249.

[38] ASS (1978), p. 625

[39] D’Ostilio (Francesco), Segnatura Apostolica in Dizionario degli Istituti di perfezione, volume VIII, Saba-Spirituali, sotto la direzione di Pelliccia (Guerrino) e Rocca (Giancarlo), Roma, Edizioni Paoline, p. 1236-249.

[40] ASS (2015), p. 745.

[41] Carballo (Mgr. José Rodriguez, ofm), «Les voeux religieux aujourd’hui» in Revue de Droit canonique, Strasburgo 2015, tomo 65/1, p. 237.

[42] Sugawara (Prof. Yuji), «Separazione imposta ai membri dell’istituto religioso», Periodica 106 (2017), p. 177-189.

[43] Serata organizzata il 4 dicembre 2015 presso la Pontificia Università Gregoriana sul tema «separazione imposta ai membri degli istituti religiosi».

[44] Cf. Hervada (Javier), Codice di diritto canonico bilingue e annotato, op. cit. p.886

[45] Nel caso Prot. 14997/83 CA, la religiosa non aveva rinnovato i suoi voti e si considerava fuori dall’istituto ma la sua congregazione la pensava diversamente, cosicché ne è risultato un ricorso dell’ex religiosa.

[46] ou c. 740 per il membro di una società di vita apostolica

[47] Ou c. 727-728 per il membro di una società di vita apostolica

[48] Prot 3671/72 CA; Prot 7607/76 CA.

[49] Prot 10896/79 CA come indicato da F D’Ostilio (Dizionario, op. cit. p. 1245) o Prot 10896/75 CA più probabilmente.

[50] Prot 7084/75 CA

[51] Prot 227/69 CA; Prot 3356/72 CA; Prot 10218/78 CA; 16616/84 CA

[52] Nel caso Prot 4064/73 CA, il religioso è stato riammesso nel monastero. Nel caso 6277/75 CA, la Congregazione romana ha ammesso una esclaustrazione provvisoria di tre anni e la religiosa ha ritirato il suo ricorso.

[53] Ministerium Justitiae, op. cit. p. 255-274.

[54] Ruessmann (Madeleine), Exclaustrations, its nature and use according to the current law, Roma 1995, Editrice Pontificia Universita Gregoriana, 550 p.

[55] Carvajal (Prof. Delfina Moral), «Esclaustrazione imposta vdi un religioso. Applicazione pratica». Periodica 106 (2017), p. 190-216.

[56] A titolo di esempio, il codice del 1983 ha abolito le differenze di diritto tra religiosi e

religiose, che prevalevano tra il 1917 ed il 1983.

[57] Cf. Hervada (Javier), Code de droit canonique bilingue et annoté, op. cit. p. 621-622.

[58] Huels (John M.), «Unlawful Command by a Major Superior», Roman Replies (1997), p. 53.

[59] cf. Comm 9 [1977] 53-61). Cf. VC 43.

[60] Prot. 30199/99 CA e Prot. 33358/02 CA

[61] Begus (Christian), Adnotationes in decreta, Apollinaris 2011 (44/2), p. 501, tradotto dall’italiano.

[62] Il diritto considera matrimonio, un matrimonio civile ma non un altro tipo di unione come uno PACS.

[63] Prot 150/70 CA, citata da Lobina, ME (1973) 1-4, p. 313

[64] Il 2 gennaio 1984, ha sostituito la Commissione per l’interpretazione dei decreti del Concilio.

[65]AAS 78 (1986), p. 1323.

[66] Prot 8031/76 CA; 9690/77 CA; 10218/78 CA; 14997/83 CA; 15721/83 CA…

[67] Prot 150/70 CA; 2089/71 CA; 2848/72 CA; 8474/76 CA; 9242/77 CA; 12618/80 CA; 13557/81 CA…

[68] Prot. 9993/78 CA.

[69] Prot 9498/77 CA; 8984/77 CA

[70] Prot 3671/72 CA; 10460/78 CA; 11390/79 CA; 11391/79 CA; 15721/83 CA; coram Sabattani, 23/1/88, n° di registrazione non indicato, Cf. ASS (1988), p. 1405.

[71] Ministerium Justitiae, op. cit. p. 314.

[72] The Jurist, 73 (2013):1, p. 222-227

[73] Ministerium Justitiae, op. cit. p. 255-274.

[74] Esclaustrazione e previdenza sociale. Regime di pensione, Roman Replies (2006), p. 56-57.

[75] Cf. Coulombel, (P.) Il diritto privato francese di fronte al fatto religioso dopo la separazione fra Chiese e Stato, Rev. trim. dr. civil 1956, p. 1, n° 3 et 15.

[76] Boinot (Patrick), «Voti religiosi e rapporti di lavoro», in Revue de Droit canonique, Strasburgo 2015, tomo 65/1, p. 143-163.

[77] Il ricorso è stato accettato nella causa Prot 10997/79 CA, contro una decisione di revoca di un incarico d’insegnante in una facoltà pontificia per presunta immaturità scientifica. Con decisione del 27 ottobre 1984, cioè cinque anni dopo la deposizione del ricorso, il religioso è stato reintegrato nel posto di insegnante.

[78] Il ricorso Prot 1063/69 CA è stato rifiutato, mentre il ricorso Prot. 2207/71 CA è stato abbandonato dal richiedente.

[79] ASS (2015), p. 745.

[80] Consiglio Pontificio per i testi legislativi, Prot 15389/2016 in Archiv für Latolisches Kirchenrecht n° 184/1 (2015), p. 155-156.

[81] Prot 3672/72 CA; 27406/96 CA; 33121/02 CA; 37162/05 CA

[82] ASS (1987), p. 1292 et 1293.

[83] Prot 324/69 CA citato da D’Ostilio, op. cit. p. 1239.

[84] Roman Replies (2012) 21

[85] Congregazione per la dottrina della fede, Doctrinal Assesment of the Leadership Conference of Women Religious, 18/04/2012.

[86] Politi (Marco), Francesco parmi les loups, versione francese, ed Philippe Rey, Paris 2015, p. 121/284.