Chapitre 1 : Eclairage historique
Dans toute démarche innovante, une approche historique s’impose, comme le rappellent nos amis africains « si tu ne sais pas où tu vas, regarde d’où tu viens », ou comme l’expliquent Mgr. Jean-Louis Bruguès, « la mémoire permet d’accéder à l’identité et à la confiance[1] » ainsi que le préfet du Secrétariat pour la communication (SpC) du Saint-Siège :
Nous devons avoir très à cœur l’histoire, la mémoire, l’avenir » et accepter « de renaître une seconde fois. Renaître d’en-haut pour voir à la manière de Dieu les événements du monde[2].
Ce premier chapitre apporte un aperçu historique de la justice de l’Église depuis l’origine du christianisme jusqu’au 15 août 1967, lorsque le bienheureux pape Paul VI promulgue la Constitution apostolique Regimini Ecclesiae Universae qui réorganise la Curie romaine et donne compétence au Tribunal suprême de la Signature apostolique en matière de contentieux-administratif.
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Aperçu sur le legs d’une évolution historique[3]
Traiter de la justice administrative dans l’Église telle qu’elle fonctionne depuis un demi-siècle n’implique pas nécessairement une étude historique, ne serait-ce que parce que cette « justice administrative » ne fut pas une réalité organisée comme telle au cours des temps. Il nous semble néanmoins nécessaire, pour appréhender la situation actuelle, d’évoquer brièvement quelques traits de ce que fut l’histoire de la justice ecclésiastique au cours de l’histoire de l’Église.
Certes, le Nouveau Testament ne prévoit pas la justice ecclésiastique, mais il formule certaines propositions en ce sens : saint Matthieu (18, 15-20) incite le chrétien à corriger son frère avec charité ; saint Paul
(I° Cor., 6, 1-8) demande aux chrétiens de ne pas recourir aux juges païens mais de résoudre les difficultés entre eux. Telles sont les bases de la « Correction fraternelle », dont le pape François rappelle régulièrement l’importance, en précisant qu’elle est une action pour guérir le corps de l’Église[4].
Dès l’origine, des litiges éclatent et l’existence d’une justice semble nécessaire. Jusqu’à la fin du iii° siècle, l’Église est soit ignorée, soit persécutée par le pouvoir impérial romain ; dans ce contexte, elle s’organise néanmoins et une justice ecclésiastique se met en place ; celle-ci fonctionne en étant essentiellement aux mains de l’évêque bien que, parfois, le litige soit porté devant une réunion d’évêques, l’une des fonctions des premiers conciles locaux étant de trancher les litiges. Il est intéressant de noter ces deux modalités d’action (qu’il serait sans doute abusif de qualifier de « procédure » au sens juridique du terme) : soit intervention de l’évêque, autorité « monarchique », soit sentence d’une assemblée d’évêques, autorité « collégiale ». L’alternative entre les deux mécanismes d’autorité se retrouvera tout au long de l’histoire de l’Église.
Au iii° siècle, le christianisme est tout d’abord toléré et reconnu (édit de Milan en 313 sous Constantin), puis déclaré seule religion de l’Empire romain (édit de Thessalonique en 380 sous Théodose I°)[5]. Les relations entre la nouvelle religion et le pouvoir politique prennent alors des caractères qu’elles ne retrouveront jamais par la suite : un soutien mutuel dans une sérénité quasi-absolue. L’Église possède le message évangélique mais doit construire ses structures d’autorité et son droit. Elle trouve dans l’empire, un gouvernement, une administration, des instances judiciaires et un droit étonnamment construits et affinés. En conséquence, elle emprunte à l’empire tout ce qui peut être utile à son organisation, dès lors que cela ne contrarie pas le message évangélique qui reste naturellement sa Loi supérieure. Dans ce contexte, la justice ecclésiastique s’épanouit, dans une parfaite collaboration entre les deux pouvoirs. La législation impériale règlemente l’audientia episcopalis, le tribunal de l’évêque : les chrétiens soumettent leurs différends à l’évêque ; les juges séculiers ont obligation de reconnaître les sentences épiscopales et de veiller à leur exécution. L’audientia episcopalis prend place au sein de l’ensemble du système procédural de l’empire chrétien. Les constitutions impériales favorisent considérablement le développement de sa compétence, ratione materiae et ratione personae, à tel point qu’Augustin en vient à déplorer le temps passé à juger, au détriment de l’exercice de sa charge pastorale. En outre, désormais, l’essor du christianisme permet à chacun de s’adresser à un juge séculier qui soit également chrétien. Il serait vain de rechercher, dans l’empire romain, les origines d’une justice ecclésiastique spécialisée dans les causes administratives. De cette période, retenons cette quasi parfaite entente entre les deux puissances, en particulier en matière d’organisation judiciaire ; une totale confiance accordée aux évêques par l’empereur ; un recours constant de l’Église à une législation séculière dont elle sait ne pas pouvoir se passer. Peut-être l’Église vit-elle alors la seule période de son histoire où les relations entre les deux pouvoirs ne s’analysent pas en termes de rivalité et de supériorité de l’un sur l’autre.
À partir de la chute de l’empire romain d’Occident (476), Orient et Occident connurent des évolutions bien distinctes et nous limitons notre propos à l’Occident où s’affirme la primauté pontificale. Au cours du Moyen-Âge, la justice d’Église prend une importance considérable. La société est chrétienne ; la justice ecclésiastique semble organisée et efficace, alors que les justices séculières (seigneuriales essentiellement) fonctionnent souvent mal car des juges peu compétents laissent trainer les procès en longueur.
Progressivement, les pouvoirs séculiers tentent d’affermir l’autorité de leurs propres officiers et de leurs propres tribunaux. Telle est la politique royale en France, notamment à partir du règne de saint Louis. Néanmoins, les causes jugées par l’Église demeurent nombreuses : ratione personae, l’Église et les clercs défendent le privilège du for permettant aux clercs (et à d’autres catégories protégées par l’Église) de n’être jugés que par la justice ecclésiastique ; dans un même mouvement, clercs et canonistes s’entendent pour lutter contre les tribunaux séculiers tendant à réduire leurs compétences ratione materiae. Le xii° et davantage le xiii° siècle, période de l’apogée du droit canonique classique, correspondent à la toute-puissance des officialités, tranchant les litiges selon la procédure romano-canonique du droit savant.
Parallèlement, l’autorité pontificale évolue, passant de la primauté pontificale à la plenitudo potestatis. Cette mutation a des conséquences sur l’organisation de la justice dans l’Église. La doctrine de primauté pontificale s’était élaborée dès la fin du iv° siècle et atteint sans doute son apogée à partir de la Réforme grégorienne. Elle s’exprime notamment par les Dictatus Papae, recueil datant de 1075. Cette primauté implique de reconnaître l’autorité suprême du pontife romain dans l’Église, donc sur l’ensemble des clercs, de la discipline et des structures ecclésiastiques. La doctrine de la plenitudo potestatis accompagne, quant à elle, l’affirmation de la théocratie pontificale qui atteint son apogée au xiii° siècle ; il s’agit ici de proclamer la toute-puissance du pape, au temporel comme au spirituel ; Rome tend à exercer le dominium mundi. Dès lors, le pape doit développer les instances de gouvernement de ce « monde ». La chancellerie pontificale s’étoffe et, pour ce qui nous intéresse ici, des tribunaux romains structurés voient le jour : le tribunal de la Pénitencerie pour le for interne, et celui de la Rote pour le for externe. Si, théoriquement, ces instances demeurent sous l’autorité immédiate du pape et si elles jugent au nom du pape, toutefois, en pratique, la question du degré d’indépendance de ces tribunaux se pose, interrogation qui demeurera constante dans les siècles suivants : la justice pontificale, rendue par des juges délégués agissant au nom du pape au sein des tribunaux romains, est-elle toujours conforme à la décision du pontife lui-même ? Juridiquement, l’interrogation est essentielle ; pratiquement, elle est tout aussi fondamentale pour le justiciable.
La tendance à la centralisation romaine est dès lors établie et ne cessera de croître : des officialités locales jugent de la plupart des litiges et des tribunaux pontificaux statuent, parfois en première instance mais le plus souvent en appel. Le schéma demeure. À côté de la Pénitencerie et de la Rote, la Signature apostolique est progressivement mise en place. Le pape signe des suppliques, puis confie cette mission à son chancelier ou à son vice-chancelier, tout en se réservant la possibilité d’intervenir personnellement dans diverses hypothèses. Dans la seconde moitié du xv° siècle, la Signature papale se distingue de la Signature commune, embryon d’une Signature apostolique qui évoluera encore dans ce processus général de centralisation romaine.
Inutile de nous appesantir ici sur diverses crises que traverse l’Église et qui, parfois, semblent remettre en cause cette centralisation pontificale (en particulier le Grand Schisme d’Occident et la crise conciliaire).
Dans ce schéma historique retracé à très grands traits, la justice administrative ne semble pas avoir revêtu, au cours des siècles, des caractères particuliers : pas de tribunaux spécifiques, suivant une procédure elle aussi spécifique, pour un certain nombre de catégories de litiges.
Pour compléter cette perspective historique, au cours de ces mêmes siècles, on peut se poser une question : l’organisation judiciaire séculière possédait-elle une justice administrative ? Les historiens du droit en débattent. Dès l’époque médiévale, un plaideur peut se plaindre en justice d’un acte de la puissance publique, émanant le plus souvent d’un seigneur à l’époque féodale. Jean-Louis Mestre en déduit qu’il existe une justice administrative. Toutefois, François Burdeau soutient la thèse inverse, estimant qu’il n’y a pas « justice administrative » tant qu’il n’existe pas deux ordres de juridictions distincts ; or cette distinction entre juridiction civile et juridiction administrative n’est pas concevable dans l’ancienne France qui n’envisage aucune séparation des pouvoirs. Sans doute ces deux thèses ne se contredisent pas totalement, mais sont partiellement conciliables ; pourtant, notre objectif n’est pas l’analyse de cet ordre judiciaire séculier.
Sur un point, peut-être, peut-on voir une relative similitude, dans l’histoire, entre le système ecclésiastique et le système séculier. Dans l’un et l’autre cas, des actes de nature administrative peuvent faire l’objet de recours : recours judiciaire, extra-judiciaire, peut-être recours gracieux. Peu importe. Dans cette étude, retenons seulement que l’Église pour sa part, les pouvoirs séculiers pour leur compte, admettaient d’examiner un acte administratif, et ceci depuis l’époque médiévale pour le moins. Dans une organisation qui ne comptait pas un « pouvoir administratif », distinct des autres autorités, il ne pouvait guère être question de confier l’examen de ces actes à une instance spécifique, détenant une compétence pour statuer sur les litiges administratifs.
En ce qui concerne l’État en France, des instances particulières se mettent progressivement en place au début du xix° siècle (conseils de préfecture et conseil d’État) ; elles n’acquièrent que progressivement leur indépendance par rapport au pouvoir exécutif et au gouvernement (1871).
Qu’en est-il pour l’Église ? La Signature apostolique connaît plusieurs réformes au cours de son histoire. Deux sont fondamentales : celle opérée par Sixte Quint en 1588, dans la constitution Immensa Aeterni, puis celle de Pie X en 1908 par la constitution Sapienti consilio. Ni l’une ni l’autre ne créent un tribunal administratif. En 1908, l’Église et le gouvernement de la curie romaine sont marqués par la doctrine dite de la Société Parfaite ; l’un des points essentiels de cette théorie consiste à souligner que l’Église possède tous les attributs d’un État et d’un gouvernement étatique. Les rédacteurs du Code de 1917 construisirent leur système en fonction de la Societas Perfecta. Toutefois, ils n’instituent pas une juridiction administrative, à l’instar de ce que connaissaient les États. Tout juste peut-on déceler, dans le Code de 1917, une ébauche d’organisation d’une telle juridiction, qui n’est pas encore réalité[6]. Il faut attendre 1967 pour que le bienheureux Paul VI crée un tribunal, ou plus exactement une section à l’intérieur du tribunal qu’est la Signature apostolique, chargée de régler le contentieux né de l’exercice d’un pouvoir administratif dans l’Église.
En 2017, l’Église célèbre donc le jubilé de tribunal !
Pour entrer dans le concret, illustrons les propos ci-dessus, par quelques exemples de ce que nous appelons aujourd’hui justice administrative, en nous attachant en particulier aux épisodes qui ont marqué la mémoire collective.
2.1. La justice des premiers temps
Dans les premiers temps de l’Église, de nombreux textes du Nouveau Testament évoquent une situation où l’autorité religieuse adopte ou envisage d’adopter une décision contestable, voire injuste, qu’une autre autorité religieuse invite à rectifier. En voici un exemple :
Jean, l’un des Douze, disait à Jésus : « Maître, nous avons vu quelqu’un expulser les démons en ton nom ; nous l’en avons empêché, car il n’est pas de ceux qui nous suivent. » Jésus répondit : « Ne l’en empêchez pas, car celui qui fait un miracle en mon nom ne peut pas, aussitôt après, mal parler de moi ; celui qui n’est pas contre nous est pour nous »[7]
A cette époque, il existe déjà des controverses et aussi des divisions[8] que les premières communautés chrétiennes cherchent à résoudre en leur sein. Ainsi, une veuve qui s’estime lésée par un diacre peut demander à être entendue par un prêtre, un évêque ou un apôtre[9]. La justice ecclésiastique s’applique à résoudre les tensions à l’intérieur de l’Église, comme l’illustrent Eusèbe de Césarée[10], Kevin Matthews[11] ou Charles-Henri Hefele :
Si un prêtre a un conflit avec son évêque ou avec un autre évêque, il doit porter la dispute devant le synode de l’Eparchie (province). Si par contre un évêque ou un clerc a un conflit avec le Métropolitain de la province lui-même, il doit choisir l’exarque du diocèse ou le Siège de Constantinople, et porter l’affaire devant lui[12].
Il en résulte une activité juridique ecclésiastique intense, au point que :
Certains évêques, dont saint Augustin, se plaignirent d’être surchargés de procès, qui les détournaient de leur vraie mission[13].
Méditons un de ses sermons à propos de la justice :
L’ivraie est partout. Où l’ennemi n’a-t-il pas semé l’ivraie ? […] En a-t-il semé parmi les laïcs sans en semer parmi les clercs, et parmi les évêques ? […] Parfois d’ailleurs le jugement humain pense que tels sont du froment, et ils sont de l’ivraie ; et on pense que tels sont de l’ivraie, mais au vrai, ils sont du froment. […] A cause de ces destinées cachées, l’Apôtre dit : « Ne jugez pas avant le temps jusqu’à ce que vienne le Seigneur, et il illuminera les secrets des ténèbres et manifestera les pensées des cœurs ; alors chacun recevra de Dieu la louange » (1 Cor. 4, 5-6) La louange de l’homme passe ; souvent l’homme loue ce qui est mal, et il ne le sait pas ; parfois l’homme accuse un saint, et il ne le sait pas. Que Dieu pardonne à celui qui ne sait pas et qu’il vienne en aide à celui qui souffre. [14]
2.2. L’Inquisition
A l’approche de l’an mille, et au XIème siècle, l’hérésie constitue une menace grave qu’il fallait éliminer par le signe de la croix et, en cas de besoin, par le glaive et le feu[15]. Des bûchers apparaissent en 1022 à Orléans, sous l’instigation du Roi Robert II :
Le roi Robert a fait brûler vives plus de quatorze personnes d’entre les meilleurs clercs et les premiers laïcs de la ville[16].
Il semble s’être agi d’une innovation, encore que la décision du souverain ait été légitimée par le consentement de cinq évêques et des grands laïcs présents.[17].
Certains ecclésiastiques essayent de tempérer la sévérité du pouvoir séculier et la vindicte populaire.
_ Ce verdict sévère et, semble-t-il, inouï[18], suscita d’ailleurs des réactions mitigées dans les milieux ecclésiastiques[19].
_ Dans certains cas, on vit même des prélats s’opposer de façon très ferme contre l’usage de la violence contre les hérétiques.
_ Wazon de Liège condamne la praecipitam Francorum rabiem qui, dans beaucoup de cas, avait abouti à massacrer des suspects sans même les avoir jugés[20].
_ En 1135, l’évêque Albéron II de Liège et son clergé s’opposèrent avec un certain succès au massacre des premiers cathares arrêtés dans le diocèse, et réussirent à arracher la plupart d’entre eux à la fureur populaire[21].
Rome joue également un rôle croissant d’arbitre judiciaire en matière de discipline ecclésiastique[22] :
Après la victoire de la réforme grégorienne et la fin du schisme de 1130[23], l’Église romaine était devenue une véritable haute cour de justice vers laquelle affluaient de plus en plus fréquemment des appels de toute sorte. […] Bien que l’initiative ne partît jamais de Rome, les appels venus de l’extérieur incitèrent la Curie romaine à assumer le rôle d’arbitre[24].
Après avoir tenté en vain de raisonner les responsables cathares, l’Église et l’Etat adoptent une triple réponse : pastorale avec les frères prêcheurs, militaire avec la croisade contre les Albigeois, et juridique avec l’Inquisition.
Les faits sont en tout état de cause incontestables : après avoir longtemps hésité et fluctué, la papauté a choisi, à partir de la fin du XIIème siècle et surtout du XIIIème siècle, d’utiliser la manière forte contre toutes les formes de dissidence religieuse, qu’il s’agisse de la croisade contre les Albigeois lancée par Innocent III en 1209, ou des sanctions extrêmement rigoureuses qui furent prises contre les hérétiques dans les années 1215-1230[25].
Formellement, l’Inquisition médiévale[26] est introduite devant les tribunaux diocésains ecclésiastiques par le pape Innocent III en 1199, tandis que Grégoire IX l’organise en février 1231 avec la constitution Excommunicamus qui prescrit la détention à vie pour les hérétiques repentis, et la peine de mort pour les hérétiques obstinés[27]. Son histoire est porteuse de nombreux préjugés, qu’il convient d’objectiver.
On a fait courir sur l’Inquisition de si fantastiques légendes que le simple rétablissement d’une perspective adéquate, avalisée par l’accord unanime de ceux que la communauté scientifique reconnaît comme les meilleurs spécialistes, peut ressembler à un plaidoyer. [28]
En 1542, le pape Paul II a institué une commission de six cardinaux ayant pour mission de veiller aux questions de foi, pour la préserver des erreurs et de fausses interprétations. Cette commission, connue somme Sainte inquisition romaine et universelle, avait au début le caractère exclusif de tribunal pour les causes d’hérésie et de schisme[29].
En 1998, l’Église a fait un retour historique sur l’Inquisition, lors d’un colloque international tenu à Rome du 29 au 31 octobre 1998, dont les actes ont été publiés en 2003[30]. Le côté négatif de l’Inquisition y est reconnu :
Nous admettons aujourd’hui d’un commun accord que ce combat implacable [de l’inquisition] n’a connu que des victoires amères dont le christianisme catholique paie encore le prix : encore faut-il, à distance prudente d’une apologétique à courte vue comme d’une culpabilité anachronique, saisir sur le vif, en toute lucidité historique et doctrinale, l’évolution pluriséculaire des rapports complexes entre fides e mores, entre foi et hérésie, entre orthodoxie et hétérodoxie. [31]
A l’inverse,
Il faut cependant dire que l’inquisition a été un progrès, car plus personne ne pouvait être jugé sans un inquisitio, c’est-à-dire sans qu’il y ait eu un examen, une enquête[32].
En effet, le volet positif de l’Inquisition n’a pas été assez mis en valeur car, à tout prendre, il vaut mieux une justice entachée d’irrégularités[33] qu’une expédition militaire[34] caractérisée par ce dicton « Tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens », formulé au cours de la croisade contre les Albigeois[35]. Il semble également que l’Inquisition ait permis de limiter le nombre des exécutions, dans un contexte où tout le monde était suspect :
Aux XIVème et XVème siècles, les accusations d’hérésie se multiplient et visent désormais tous ceux qui désobéissent à l’Église ou s’opposent à son autorité, y compris dans le domaine temporel. Le cercle des poursuites ne cesse de s’élargir, et l’on finit par considérer comme des hérétiques des hommes et des femmes dont le seul tort était de dénoncer publiquement les abus du clergé et les dérives autoritaires de la hiérarchie ecclésiastique[36].
Un cas célèbre de la justice ecclésiastique de l’époque est celui des Templiers.
Entre 1307 et 1312, une série de bulles pontificales régissent l’ordre des Templiers à la suite d’un procès en hérésie sur fond de rivalités entre le pape Clément V et le roi de France Philippe Le Bel. Voici quelques points de repère dans cette affaire complexe. Au matin du 13 octobre 1307, Philippe Le Bel fait arrêter les Templiers en France et demande aux autres souverains européens de faire de même. En 1307, le pape Clément V publie la bulle Pastoralis præminentiæ, qui ordonne aux souverains européens d’arrêter les Templiers qui résident chez eux et de mettre leurs biens sous la gestion de l’Église. En 1308, la bulle Subit assidue prévoit deux procédures distinctes dans le cadre du procès de l’ordre du Temple : l’une concerne les personnes physiques et l’autre l’Ordre en tant que personne morale. Plus tard, la bulle Faciens misericordiam définit les accusations portées contre l’Ordre du Temple. La même année, le pape Clément V absout secrètement Jacques de Molay et les autres responsables de l’ordre du Temple des péchés que l’Inquisition leur avait reprochés[37]. En 1312, la bulle Vox in excelso supprime l’Ordre du Temple, puis la bulle Ad providam transfère les biens du Temple à l’Ordre de l’Hôpital, tandis que la bulle Considerantes dudum établit la situation juridique des anciens Templiers en trois catégories.
En général, l’opinion publique considère l’Inquisition comme un tribunal pénal, pourtant les archives du Saint Office ouvertes en 1998, montrent que le droit administratif y était majoritaire :
Il suffit de feuilleter un des volumes de décrets de la congrégation [romaine et universelle de l’Inquisition] pour constater le très faible nombre d’examens doctrinaux par rapport au grand nombre de causes administratives.[38] … /… La gamme de procès administratifs était au contraire très vaste : elle allait des hérésies formelles ou suspectées, qui relevaient plus spécifiquement de la compétence du Saint-Office, à ceux d’apostasie, de bestialité, magie, sortilèges, polygamie, et tant d’autres qui n’étaient qu’indirectement de sa compétence. Les procès les plus nombreux consistaient à résoudre les cas qui lui étaient soumis par les instances inférieures : nonces, évêques et inquisiteurs. Il y avait un contact régulier, étonnamment rapide, avec les instances précitées, et une grande masse de travail [39]» […] pouvant inclure huit réunions des cardinaux dans le cas de Cristoforo Sapone[40].
2.3. Les saints juristes
Au XIIIème siècle, la justice du Moyen-Âge se situe dans une culture bien différente de celles de nos jours, aussi convient-il d’en donner une autre vision, comme le recommande le cardinal Kasper :
Au cours de l’histoire de l’Église, il n’a cessé d’y avoir des sursauts et des mouvements charismatiques qui l’ont secouée, lui évitant le danger et la tentation de l’embourgeoisement. C’est pourquoi on ne peut pas écrire l’histoire de l’Église seulement comme l’histoire d’une institution et encore moins comme une histoire des crimes de l’Église. Elle est avant tout une histoire des saints et une histoire des mouvements de sanctification et de renouveau.[41]
Arrêtons-nous donc sur la vie de deux saints qui ont eu une influence importante sur la justice du Moyen-Âge français, à savoir un laïc, saint Louis (1214-1270) et un clerc, saint Yves (1253-1303).
Selon Jean Foyer[42],
il faut en effet attendre Saint Louis, au milieu du XIIIe siècle, pour qu’un retour s’amorce vers les preuves rationnelles, qui n’étaient demeurées en vigueur que devant les tribunaux ecclésiastiques.
Louis IX, qui règne en France de 1226 à 1270, entreprend une vaste réforme des institutions judiciaires à partir de 1254, avec l’aide des enquêteurs royaux assurant le lien avec la Curia in parliamento, qui jouent le rôle de juridiction d’appel des décisions des tribunaux de bailliage[43]. Il renouvelle la « Quarantaine-le-roi[44] », ordonne la présomption d’innocence, interdit l’ordalie[45] et institue une forme civile de supplicatio[46], permettant de faire appel au roi en cas de litige entre un responsable féodal et un de ses assujettis. Il fait porter sur la justice ses recommandations à son fils[47].
Saint Yves est le saint patron des avocats et de toutes les professions de justice et de droit[48]. De son procès de canonisation[49], mené en 1330 à Tréguier en Bretagne et présenté au pape Jean XXII le 4 juin 1331[50], il ressort qu’Yves Hélory de Kermartin (1253-1303)[51] est un homme honnête et de bonne vie[52], chaste et humble, assidu à la prière, d’une grande austérité et d’une grande bonté envers les pauvres. La plupart des témoins soulignent son grand amour de la justice et de la paix. Voici quelques extraits des témoignages figurant dans l’enquête de canonisation :
Dom Yves […] plaidait en justice gratuitement pour les pauvres, les mineurs, les veuves, les orphelins et toutes les autres personnes malheureuses ; il soutenait leurs causes ; même sans être demandé il s’offrait à les défendre, si bien qu’on l’appelait partout l’avocat des pauvres et des malheureux. … /… Je l’ai vu Official de l’Archidiacre de Rennes et par la suite Official de l’évêque de Tréguier. Il s’est comporté dans ses fonctions d’une manière sainte et juste, rendant à chacun la justice rapidement sans faire de choix ni de différence entre les personnes.[53]
Il était un homme d’un grand esprit de justice, car il s’efforçait d’amener la paix entre les gens en désaccord, respectant leurs droits autant qu’il le pouvait, et quand il ne pouvait pas les amener à faire la paix entre eux, étant official de Tréguier, il leur rendait une justice rapide.[54]
A l’époque en effet où il occupait la charge d’official, il encourageait tous ses collaborateurs à être justes, comme on le disait publiquement, et, quand il le pouvait, il faisait tous ses efforts pour ramener la paix chez les parties adverses. J’ai vu bien des fois dom Yves en personne établir la paix entre beaucoup de gens en désaccord et en procès[55].
Comme elle n’avait pas de quoi payer les mémoires dont elle avait besoin, il demandait aux notaires de la cour en question d’établir leurs mémoires pour l’amour de Dieu, et il les y engageait.[56]
Un chevalier pauvre, nommé Richard Le Roux, de la paroisse de Trédez, diocèse de Tréguier, était en procès contre l’abbé de la Bienheureuse Marie du Relecq, diocèse de Quimper, et n’avait pas de quoi poursuivre son action. Sa pauvreté lui aurait au contraire fait perdre tout son procès, si Dom Yves n’était intervenu pour favoriser et soutenir son action gratuitement et par bonté, et il obtint gain de cause. Cependant, maître Yves Hélory n’accepta de prendre en main l’affaire de ce pauvre que ce dernier n’ait juré sur les Saints Evangiles qu’il se croyait dans son bon droit. Il se fit aussi une obligation d’entendre les témoignages de ceux qui savaient sa cause juste. Dans ces régions-là, ces faits sont de notoriété publique[57].
Il défendait les causes des pauvres, des veuves et des autres personnes malheureuses dans la mesure de ses moyens[58].
Il jouissait d’une grande autorité et d’un si grand respect qu’il remettait d’accord les gens en contestation. C’était d’ailleurs à cela qu’il s’appliquait beaucoup et souvent. Ceux qui étaient en désaccord avaient beau ne pas faire confiance à d’autres, ils se fiaient à lui et il arrivait à les mettre en paix.[59]
S’agissant des peines médicinales, saint Yves n’en administre pas seulement dans ses procès canoniques :
Quand il [Dom Yves] est arrivé dans cette paroisse [de Louannec], l’incurie du recteur précédent, peu ou pas préoccupé du progrès des âmes, avait fait que bon nombre de gens aux mœurs dépravées s’y trouvaient. Dès son arrivée, Dom Yves se mit à prêcher à ses paroissiens la parole de Dieu, et sa prédication fut suivie d’effet au point que les gens honnêtes et bons s’améliorèrent et que les paroissiens mauvais, dépravés ou malhonnêtes, furent remis dans la voie du salut grâce à ses prédications saintes et bonnes, et il amena aussi à faire pénitence ceux qui s’adonnaient publiquement à la luxure ou à l’usure ; ils s’amendèrent grâce à lui, il les fit jeûner au pain et à l’eau certains jours et à certaines époques, à se déplacer sans chemise, à faire des pèlerinages.[60]
Voici comment il se comporte :
Entre moi d’un côté et de l’autre côté Geoffroy de l’Ile et ma mère, il y avait un différend et un procès important concernant des biens meubles et immeubles. Dom Yves insistait auprès des parties pour qu’elles fissent entre elles la paix par arrangement amiable. Mais le plus souvent, Geoffroy n’en voulait pas. Enfin un jour, dom Yves dit aux plaignants qu’il voulait célébrer la messe, qu’ils devaient attendre que la messe fût achevée, car il avait dans le Seigneur espoir et confiance qu’ils aboutiraient après la messe à la paix et la concorde. Enfin la messe dite, dom Yves revint aux plaignants ; et notre Geoffroy qui s’opposait beaucoup avant la messe à la paix et à la concorde, y fut amené par les saintes prières de Dom Yves, c’est ce que je crois, et il offrit de s’en tenir, sur les points litigieux, à l’arbitrage et à la décision de dom Yves, quelle qu’elle fût. Par la suite, dom Yves mit entre les parties bonne paix et concorde et donna à ce procès une fin qui donna satisfaction à chacune des parties.[61]
Enfin, l’évocation de Saint Yves, après sa mort, est à l’origine de très nombreux fait miraculeux et guérisons inexplicables, ainsi que de la résurrection de plus de dix personnes[62].
2.4. L’index et la condamnation des livres
Au XVIème siècle, après l’émergence du protestantisme, un nouvel épisode marque la justice de l’Église, à savoir la publication de l’Index librorum prohibitorum, l’Index des livres interdits, créé en 1559 et actualisé jusqu’à la suppression en 1966[63], par ajout du pape ou de la Sacrée Congrégation de l’Inquisition romaine et universelle. De très nombreuses décisions administratives sont prises à l’encontre d’écrivains, clercs ou non, avec un droit de défense plus ou moins important accordé aux auteurs concernés.
A titre d’exemple, Galilée est convoqué par le Saint Office à propos de son livre à succès Dialogue sur les deux grands systèmes du monde de Ptolémée et de Copernic qui a reçu l’imprimatur, mais qui rallie la théorie de l’héliocentrisme de Copernic condamnée quinze ans plus tôt. Le 22 juin 1633, au couvent dominicain de Santa-Maria, une sentence est rendue contre le Galilée[64] qui, sous la menace de la torture, prononce alors la formule d’abjuration que le Saint Office a préparée[65]. Le 31 octobre 1992, il est réhabilité par saint Jean-Paul II à l’occasion de son discours de l’Académie pontificale des sciences, où il reconnaît les erreurs de certains théologiens des siècles passés, sans d’ailleurs fustiger la justice ecclésiastique de l’époque qui avait assigné Galilée à résidence, plutôt que de l’envoyer en prison.[66].
2.5. Les procès en sorcellerie
Le 5 décembre 1484, le pape Innocent VIII promulgue la bulle Summis desiderantes affectibus qui conduit les deux inquisiteurs dominicains Heinrich Kramer et Jacob Sprenger à mener en Allemagne, une chasse aux sorcières cruelle. En 1486, à Strasbourg, les inquisiteurs publient Malleus Maleficarum, c’est-à-dire le Marteau des Sorcières, en essayant notamment d’expliquer pourquoi les femmes sont plus concernées par la sorcellerie que les hommes. Ce livre, qui fait l’objet de vingt-sept éditions entre 1487 et 1669, est un manuel destiné au combat contre le démon, écrit à l’usage d’inquisiteurs et de magistrats participant à la lutte contre la sorcellerie. Michelet note en 1862 :
Aux anciens pénitentiaires, aux manuels des confesseurs pour l’inquisition des péchés succédèrent les Directoria pour l’inquisition de l’hérésie qui est le plus grand péché. Mais pour la plus grande hérésie qui est la sorcellerie, on fit des Directoria ou manuels spéciaux, des marteaux pour les sorcières. Ces manuels ont atteint leur perfection dans le Malleus de Sprenger[67]
Juridiquement, les affaires de sorcellerie relèvent des tribunaux civils et non de l’Inquisition, mais cela n’empêche pas certains inquisiteurs de pouvoir faire partie des magistrats. En effet, dans les anciens Pays-Bas et dans les principautés de Liège et de Stavelot-Malmédy, la Nemesis Carolina[68] de Charles Quint autorise les cours de justice locales à arrêter, interroger et punir par le feu ceux et celles qui sont suspectés de s’adonner à la sorcellerie. Un peu partout en Europe, la justice civile sévit contre les sorcières, en collaboration plus ou moins étroite avec l’Église[69], avec un apogée entre 1550 et 1650. En Allemagne, dans les années 1620 à 1630, les bûchers de sorciers et de sorcières s’allument par centaines, tandis que :
Les réserves exprimées en 1631 par le jésuite rhénan Frédéric Spee à l’égard des procédures judiciaires qui mènent au bûcher tant de prétendues sorcières n’ont pas été entendues[70].
A cette époque, le mécanisme des procès civils est loin de respecter les droits de la défense :
Quelle que soit la juridiction devant laquelle ils se déroulent, le mécanisme des procès en sorcellerie est pratiquement toujours le même. Les choses commencent par le « commun bruit », la rumeur qui désigne un homme ou une femme. […] La rumeur se fait accusation, cet homme ou cette femme est un ou une sorcière ; un juge intervient, qui fait arrêter le ou la suspecte ; le procès s’engage. Dès lors, le but principal du juge va être d’obtenir l’aveu du prévenu. Qu’il avoue quoi ? Non pas des maléfices : le commun bruit, confirmé par les dépositions de quelques témoins, suffisent pour l’établir. Mais qu’il avoue ses relations avec le diable, car ce sont elles qui, juridiquement, le qualifient comme sorcier. […] La plupart des procès font état d’aveux de cette sorte. […] Au reste, pour confirmer ou suppléer les aveux, le juge a aussi le moyen d’administrer la preuve que l’accusé s’est livré au démon. Cette preuve, c’est la marque du diable, un point du corps insensible, qu’un chirurgien s’emploie à rechercher en piquant partout le malheureux avec une aiguille. Et s’il réagit à toutes les piqûres ? La réponse du juge est prête : le démon vient au secours de sa créature en dissimulant la fameuse marque. […] Puisque, en fait, le mécanisme est monté pour que toute personne qu’il saisit soit presque immanquablement vouée à la condamnation, la torture, finalement, sert moins à accabler le sorcier qu’à lui faire avouer ses complices. […] Il est certain qu’on a brûlé beaucoup plus de sorciers durant ce demi-siècle, que d’hérétiques durant le demi-siècle précédent[71].
Ainsi, l’Inquisition tant critiquée, n’a pas à rougir face à la cruauté des tribunaux civils. Signalons en outre que des procès concernent aussi les animaux[72], avec des condamnations à mort pour avoir tué des personnes ou abîmé des récoltes[73], mais aussi pour crime de sorcellerie[74] ! Les dernières condamnations à mort pour crime de sorcellerie sont notées vers 1679 en France.
2.6. La justice pour les « indigènes »
Dans les colonies, des voix se font entendre dès le début du XVIe siècle, comme celle d’Antonio Montesinos, pour dénoncer les exactions commises par des colons chrétiens contre les populations d’Amérique du Sud.
En 1537, le pape Paul III condamne officiellement l’esclavage des Indiens « ou de tout autre peuple qui viendrait à être découvert ». Cette interdiction est respectée quelque temps par l’Espagne, mais non pas par le Portugal.
Treize ans plus tard, la controverse de Valladolid, tenue en 1550-1551 à la demande de Charles Quint et des autorités ecclésiastiques, est l’une des étapes du débat juridique de l’époque, qui conduit finalement à protéger les Sud-Américains, alors que les Noirs d’Afrique et les Indiens d’Amérique du Nord sont réduits en esclavage ou décimés.
Quant à la mise en pratique du droit positif en faveur des esclaves, elle ne va pas de soi :
Ainsi au Mexique, il est, par exemple, du devoir des citoyens de dénoncer à l’Inquisition et à l’Audienca tout comportement illégal, mais cette protection juridique n’a guère d’impact réel sur l’institution de l’esclavage. L’esclave demeure entièrement à la merci de son maître[75].
A plusieurs reprises, des religieux qui protestent contre l’esclavage au sein de leur ordre sont rappelés en métropole, comme les jésuites Marcia Garcia et Gonçalo Leite, ou excommuniés, comme les capucins Francisco José de Jaca et Epifanio de Moirans, dès lors qu’ils dépassent la simple dénonciation des mauvais traitements faits aux esclaves, en remettant en cause l’injustice de l’institution[76].
2.7. La justice pendant les guerres de religion
Après la Réforme[77] et le Concile de Trente[78] ainsi que son adoption progressive par les synodes provinciaux, la France est secouée par les guerres de religion, avec des épisodes sanglants, comme la conjuration d’Amboise (1560), la Saint-Barthélemy (1572), les dragonnades[79] et la guerre des Cévennes ou guerre des Camisards[80], malgré la trêve entre l’édit de Nantes (1598) et l’édit de Fontainebleau (1685). A cette époque la justice royale a pris le pas sur la justice religieuse. Parmi d’autres, une affaire a défrayé la chronique, à savoir l’affaire Calas, que Voltaire a qualifiée de « procès de l’intolérance et du fanatisme religieux »[81].
Diplômé en droit, Marc-Antoine Calas veut devenir avocat mais il se heurte à la législation antiprotestante qui interdit cette profession aux « prétendus réformés ». Il travaille alors dans la boutique de son père à Toulouse, où il est retrouvé mort le 13 octobre 1761. L’enquête ne permet pas de trouver le meurtrier, et son père, Jean Calas, soumis deux fois à la question ordinaire et extraordinaire, confirme qu’il est innocent ainsi que son entourage, et ne confesse rien au Père Bourges près de lui, excepté qu’il veut mourir protestant. Il prend Dieu à témoin et le conjure de pardonner à ses juges. En 1762, le Parlement de Toulouse le condamne cependant à la peine de mort. Deux ans plus tard, une assemblée de quatre-vingt juges casse l’arrêt du Parlement de Toulouse et ordonne la révision entière du procès. En février 1765, le capitoul David de Beaudrigue est destitué, et le 9 mars 1765, Jean Calas et sa famille sont définitivement réhabilités à l’unanimité par la Chambre des requêtes de l’hôtel[82].
Un autre sujet évoqué au XVIIème siècle concerne l’habitude de certaines familles de disposer de leurs enfants, en les mariant ou en les mettant au couvent, y compris contre leur gré.
Quoiqu’il n’y ait dans les couvents que trop de ces victimes qui aient été forcées d’embrasser l’état religieux, aucun auteur n’a encore écrit sur cette matière que l’intérêt a rendue commune[83].
S’agissant du recours à la justice ecclésiastique, la mémoire collective a conservé le cas de Marguerite Delamarre, qui aurait inspiré le roman anticlérical « La religieuse » que Diderot a écrit en 1760 et 1780 et qui a été publié à titre posthume en 1796.
L’histoire est inspirée de celle d’une religieuse française de l’abbaye de Longchamp nommée Marguerite Delamarre, née en 1717 et décédée après 1790. Elle a fait parler d’elle en 1758 pour avoir vainement demandé à la justice ecclésiastique d’être libérée du cloître où ses parents l’avaient enfermée.
2.8. La justice française après la Révolution
Alors que le Siècle des Lumières cherchait à s’affranchir de la tutelle ecclésiastique, des philosophes comme Locke ou Montesquieu proposent la théorie de la séparation des pouvoirs législatif, exécutif[84] et judiciaire[85]. Par ailleurs,
La revendication d’une séparation de l’administration et de la justice apparaît dans les cahiers de doléance, lorsqu’ils évoquent la suppression des intendants[86].
Ainsi, la loi du 16-24 août 1790 sépare les autorités administratives et judiciaires et, dans la logique de séparation des pouvoirs, elle défend aux tribunaux de prendre part à l’exercice des pouvoirs législatif et exécutif.
Le juge ordinaire ne peut pas intervenir dans l’activité de l’administration, sous peine de forfaiture (art. 13)[87].
En matière de jurisprudence, son application est notamment marquée par l’arrêt Blanco[88], où le Tribunal des conflits[89] consacre à la fois la responsabilité de l’État pour les dommages causés à des citoyens par des services publics, et la compétence de la juridiction administrative pour trancher le litige :
Considérant que l’action intentée par le sieur Blanco contre le préfet du département de la Gironde, représentant l’État, a pour objet de faire déclarer l’État civilement responsable, par application des articles 1382, 1383 et 1384 du Code civil, du dommage résultant de la blessure que sa fille aurait éprouvée par le fait d’ouvriers employés par l’administration des tabacs ; considérant que la responsabilité, qui peut incomber à l’État, pour les dommages causés aux particuliers par le fait des personnes qu’il emploie dans le service public, ne peut être régie par les principes qui sont établis dans le Code civil, pour les rapports de particulier à particulier ; que cette responsabilité n’est ni générale, ni absolue ; qu’elle a ses règles spéciales qui varient suivant les besoins du service et la nécessité de concilier les droits de l’État avec les droits privés ; que, dès lors, aux termes des lois ci-dessus visées, l’autorité administrative est seule compétente pour en connaître.
Il convient de lire les travaux des historiens du droit, comme Jean-Louis Mestre[90] ou François Burdeau[91] pour approfondir la manière dont le droit et la justice administratifs se sont mis en place après la Révolution, avec des règles exorbitantes du droit commun.
2.9. La justice ecclésiastique après 1917
L’histoire du Tribunal suprême de la Signature apostolique, qui hébergera plus tard le tribunal administratif de l’Église, fait l’objet de nombreux travaux, comme ceux de P. Santini[92], J.D. Mc Clunn[93], H Schmitz[94], C. Lefebvre, K. Matthews[95], Frederico D’Ostilio[96], Gianfranco Ghirlanda[97], Edouardo Labanderia[98], John J. Coughlin[99], Ignatius Gordon[100], Niccolo del Re[101].
En 1917, cette mesure est reprise dans des termes très voisins, au canon 1601 du code de 1917[102] qui, avec les canons 1552 §2 et 1667, donne une base à la justice administrative de l’Église.
Voici un exemple de recours hiérarchique datant de 1927, contre un refus d’imprimatur pour un livre évoquant la mystique stigmatisée bavaroise, Thérèse Neumann.
En 1926, Thérèse Neumann fait l’objet d’un discours bienveillant de l’archevêque de Munich, futur cardinal Faulhaber, mais en 1927, le livre Das Leid einer Glückseligen[103] qui parle d’elle, reçoit un refus d’imprimatur de la part de l’évêque de Ratisbonne. Cette décision fait l’objet d’un recours hiérarchique auprès de la Curie romaine[104] mais il n’a pas de résultat positif car, d’après Agnès Demazière[105], « L’appel adressé à Rome par Witt reflète également une contestation de l’autorité épiscopale. Traditionnellement, le Saint-Office préfère laisser à l’évêque le soin de se prononcer sur la naturalité ou la surnaturalité des phénomènes mystiques et évite d’intervenir. Quand elle intervient, la Congrégation vise avant tout à restaurer l’autorité de l’évêque mise en cause. Le refus d’imprimatur de l’évêque est ainsi confirmé. » Par la suite, le Saint-Siège, et le pape Pie XI en personne, cherchent à conserver une neutralité pontificale sur ce dossier, en laissant se dérouler des enquêtes diocésaines et une libre discussion entre la médecine psychiatrique et la psychologie religieuse catholique à propos des stigmates et l’inédie de Thérèse Neumann. En fin 1937, la Congrégation romaine demande cependant le transfert dans une autre paroisse du curé de Konnersreuth, directeur spirituel de Thérèse, car elle craint une capacité inconsciente de suggestion réciproque[106]. Le 13 février 2005, Gerhard Ludwig Müller, évêque de Ratisbonne, ouvre une procédure de béatification, qui n’est pas conclue à ce jour.
Pour revenir en France, trois tensions avec Rome ont marqué l’histoire du début du XXème siècle, à propos de Marc Sangnier, de l’Action française et des prêtres ouvriers. Sans vouloir remuer le passé, évoquons-les rapidement pour nous souvenir de la situation de la justice ecclésiastique avant la période que nous nous proposons d’étudier.
A gauche de l’échiquier politique français, Marc Sangnier, est co-fondateur du Sillon.
Le Sillon a pour but de réaliser en France la république démocratique. Ce n’est donc pas un mouvement catholique, en ce sens que ce n’est pas une œuvre dont le but particulier est de se mettre à la disposition des évêques et des curés pour les aider dans leur ministère propre. Le Sillon est donc un mouvement laïc, ce qui n’empêche pas qu’il soit aussi un mouvement profondément religieux.
Ce projet reçoit tout d’abord un satisfecit du pape Léon XIII car il permet de rallier de nombreux ouvriers à l’Église catholique :
Il m’est agréable de vous faire savoir que le but et les tendances du Sillon ont hautement plu à Sa Sainteté[107].
Cependant, la trop grande proximité du Sillon avec les partis anticléricaux de la gauche française aboutit en 1910 à une condamnation du mouvement par le pape Pie X. Protestant de son attachement à l’Église, Marc Sangnier dissout alors le mouvement et arrête la publication de sa revue.
Un scénario voisin se produit à droite de l’échiquier politique, après que Charles Maurras a donné une impulsion monarchique et antisémitique à l’Action française fondée en 1898 lors de l’affaire Deyfus. Dans les années 1910, il reçoit la bénédiction du pape Pie X en raison « d’immenses services rendus à l’Église ». En 1926, le mouvement est condamné par le cardinal Andrieux puis par le pape Pie XI et, le 29 décembre 1926, plusieurs livres de l’Action française sont mis à l’index. Le 18 juin 1939, l’Action française signe un document de compromis dans laquelle elle reconnaît ses erreurs passées et proteste de son attachement à l’Église. Le pape Pie XII lui accorde son pardon en juillet 1939[108].
Une troisième tension concerne l’épisode des prêtres ouvriers, créés en réponse à la lettre encyclique Rerum novarum du pape Léon XIII :
Nous sommes persuadé, et tout le monde en convient, qu’il faut, par des mesures promptes et efficaces, venir en aide aux hommes des classes inférieures, attendu qu’ils sont pour la plupart dans une situation d’infortune et de misère imméritées.
A partir de 1942, plusieurs prêtres deviennent ouvriers et, bien souvent, ils dénoncent leurs conditions de vie mais leur attitude ne convient pas au patronat catholique français qui les dénonce aux évêques et à la Curie romaine[109]. Le 7 mars 1953, les cardinaux Liénard et Feltin demandent au maître général des frères prêcheurs d’éloigner le RP. Maurice Montuclard, et le 16 mars 1953, son article « l’événement de la foi » est mis à l’index. Le 27 mai 1953, les prêtres-ouvriers A. Piet (O.P), A. Gauche et C. Monnier (S.J.) doivent quitter leur diocèse. Le 27 juillet 1953, le cardinal Pizzardo interdit les stages en usine pour tous les séminaristes. Les 30 et 31 juillet 1953, les RP. Avril et Liégé sont convoqués par la Curie généralice de l’ordre des frères prêcheurs à Rome. Le 29 août 1953, la Curie envoie une circulaire sur le retrait progressif des prêtres-ouvriers religieux. Le 6 septembre 1953, le séminaire de la mission de France est fermé. Le 11 novembre 1953, le père Feret est traduit devant le Saint Office. Le 26 décembre 1953, le cardinal Feltin reçoit les prêtres-ouvriers jésuites, et ceux-ci quittent le travail le surlendemain. Le 7 février 1954, le Père Avril, prieur provincial des Dominicains, démissionne. Le 8 février 1954, le père Chenu est exilé à Rouen et perd ses privilèges de maître en théologie, le Père Feret interrompt son enseignement à Paris, le Père Boisselot quitte Paris et cesse d’être le directeur du Cerf, le père Congar s’exile. Le 1er mars 1954, le Vatican met fin aux prêtres-ouvriers. Le 27 avril 1954, l’Assemblée plénière de l’épiscopat publie une déclaration pastorale en matière sociale à l’usage du clergé.
Ces positions de l’Église face aux prêtres-ouvriers sont relayées par la presse[110], et donnent lieu à des incompréhensions relatées par de nombreuses publications[111]. Au plan dogmatique et ecclésiologique, la position très dure de l’Église doit être interprétée à la lumière du contexte historico-politique de l’époque, marqué par la guerre froide et par l’encyclique Quadragesimo anno (1931), où Pie XI condamnait la doctrine socialiste dans des termes abrupts : « Personne ne peut être en même temps bon catholique et vrai socialiste », que Jean-Paul II a expliqués plus tard dans Centesimus Annus (1991).
C’est l’erreur fondamentale du socialisme qui est de nature anthropologique, c’est-à-dire que le socialisme considère que l’individu est un simple élément, une molécule de l’organisme social, de sorte que le bien de chacun est tout entier subordonné au fonctionnement du mécanisme économique et social.
Au plan canonique, les publications relatives aux prêtres-ouvriers mettent en évidence les limites des recours hiérarchiques de l’époque[112]. Elles ont peut-être contribué au changement majeur apporté par le Concile Vatican II, pour une meilleure prise en compte des droits des fidèles.
Indépendamment de l’aspect politique, l’ecclésiologie préconciliaire pose des problèmes comme le raconte le cardinal Robert Sarah lui-même lorsqu’en 1966, il était séminariste en France :
Pendant les vacances, nous travaillions dans des fermes ou des ateliers pour gagner un peu d’argent. [Notre évêque] se montrait intransigeant dans la gestion des sommes que nous gagnions. Il ne voulait pas que nous puissions garder un centime de nos salaires. Un jour, le plus âgé d’entre nous n’a pas respecté la consigne et a gardé l’argent pour s’acheter une moto. […] Notre évêque s’est mis en colère contre tout le groupe, y compris ceux qui s’étaient conformés à ses consignes comme moi. […] J’ai alors traversé une période de doutes. Dans une profonde confusion, j’ai vaguement envisagé de quitter le séminaire. J’ai été voir mon père spirituel, le père Denis pour lui exprimer ma déception. Il m’a déclaré : « écoute-moi bien Robert. J’ai connu quatre évêques à Nancy, avec leurs défauts, parfois difficiles et leurs qualités, très édifiantes. Tu ne seras pas prêtre pour l’évêque mais pour le Christ, malgré ou avec ton évêque. Certes c’est lui qui t’appellera au sacerdoce mais tu seras prêtre pour l’Eglise. Aujourd’hui, tu dois composer avec Mgr. Tchidimbo, et demain, tu devras apprendre à apprivoiser le caractère de son successeur. La seule surprise fut que le successeur de Mgr. Tchidimbo [archevêque de Conakry] par une mystérieuse volonté de Dieu, s’avéra être moi…[113].
Laissons maintenant le survol historique pour approfondir la période retenue pour notre recherche, à savoir les années 1967 à 2017.
[1] Bruguès (Mgr Jean-Louis op.) Archiviste et bibliothécaire de la Sainte Église romaine, depuis 2012 Église et mémoire – Conférence donnée à Albi le 14 novembre 2015, http://catholique-tarn.cef.fr/Église-et-memoire-Conference
[2] Vigano (Mgr Dario Edoardo), propos rapportés par l’agence catholique italienne SIR le 19 juillet 2017.
[3] Ce chapitre est principalement constitué d’apports d’historiens du droit actuels, qui ont souhaité préserver leur anonymat.
[4] François (pape), La correction fraternelle s’exerce avec amour et humilité, homélie à Sainte Marthe du 12 septembre 2014.
[5] Gaudemet (Jean), L’Église dans l’empire romain (iv°-v° siècles), Paris, Sirey, 1989, coll. Histoire du Droit et des Institutions de l’Église en Occident, 818 p. ; sur l’organisation judiciaire, voir notamment p. 229 et sq.
[6] Pour le Code de 1917 et la suite des évolutions historiques, voir l’article de P. Valdrini, dans Pouvoirs, 1981.
[7] Marc, 9, 38-39.
[8] Kasper (Card. Walter), L’Église catholique. Son être, sa réalisation, sa mission, Paris 2014, Cerf, p. 230.
[9] Cf. Actes 6, 1-3 ; 1. Tim. 5, 16 ; Jacques 1, 27.
[10] Emefu (Clément Chimaobi), CSSp, « La déontologie du juge ecclésiastique », mémoire de master 2 de recherche en histoire du droit canonique, soutenu le 7 septembre 2016 à l’Université Paris-Sud et à l’Institut catholique de Paris.
[11] Matthews (Kevin), « The Development and Future of the Administrative Tribunal », Studia Canonica, XVIII, (1984), p. 3-233. Voir notamment le chapitre 3 sur l’appel extrajudiciaire et le recours hiérarchique.
[12] Hefele (Charles Joseph) A history of the Christian Councils (Trans W.T. Clark), 2nd ed. revised, Edinburgh, T. & T. Clark, 1894-1896, vol. 3, p. 395, traduit de l’anglais par l’auteur.
[13] Gaudemet (Jean), Église et cité, histoire du droit canonique, Paris, Cerf, Montchrestien, 1994, p. 112.
[14] Augustin (Saint) Sermon à Caillau, 11, 5 ; M. A. 250-251 dans Saint Augustin, Le visage de l’Église, p. 311-312.
[15] Vauchez (André), Les Hérétiques au Moyen Âge. Suppôts de Satan ou chrétiens dissidents ? Paris, CNRS éditions, 2014, p. 35.
[16] Ripoll (Jean de), lettre à l’abbé-évêque Oliba, citée par André de Fleury, in Vie de Gauzlin, abbé de Fleury, R. H. Bautier & G. Labory (éd), Paris 1969, p. 18, cité par André Vauchez, op. cit. p. 35 note 66.
[17] Vauchez (André), op. cit. p. 35.
[18] Celui du roi Robert à propos des hérétiques d’Orléans.
[19] Vauchez (André), op. cit. p. 36.
[20] Idem, p. 39.
[21] Idem, p. 40.
[22] Il s’agit notamment des cas de simonie (trafic de biens spirituels), nicolaïsme (« incontinence » du clergé) ou d’investiture des clercs par les laïcs.
[23] Anaclet II devient antipape après l’élection contestée d’Innocent II. Le schisme s’éteint en 1238 lorsque Victor IV, successeur de Roger de Sicile défenseur d’Anaclet II, se range du côté d’Innocent II.
[24] Paravicini Bagliani (Agostino,) « L’Église romaine de Latran I à la fin du XIIème siècle », in Histoire du Christianisme : Apogée de la papauté et expansion de la chrétienté, sous la direction de J-M Mayeur et al. Paris, Desclée, 1993, Volume 5, 973 p. (p. 201).
[25] Idem, p. 61 et note 42.
[26] Il ne faut pas la confondre avec l’Inquisition espagnole qui était en fait un tribunal du roi d’Espagne, contre lequel les papes ne manquèrent pas de protester.
[27] Corpus iuris canonici X, 5, 7, 14.
[28] Dedieu (Jean-Pierre), L’inquisition, Paris, Cerf, 1987, p. 8/126.
[29] Amato (Mgr Angelo), alors secrétaire de la Congrégation pour la dioctrine de la foi, « La Congrégation pour la doctrine de la foi a toujours été un tribunal » in Zenit, 1er avril 2004, traduit par Anne Kurian.
[30] Comitato del grande jubile dell’anno 2000, Commissione teologico-storiale, L’Inquisizione, Atti del simposio internazionale, Biblioteca apostolica vaticana, 2003, coll Studi e testi, n° 417, 783 p.
[31] Veneu (Bruno), « Y a-t-il une hérésie inquisitoriale ? », in « L’Inquisizione, Atti del simposio internazionale. », Rome, Biblioteca apostolica vaticana, 2003, coll Studi e testi, n° 417, p. 491/788.
[32] Ratzinger (Cardinal Joseph) Déclaration dans l’émission Contrastes du 03/03/2005 sur la chaîne de télévision allemande ARD, à propos de son titre de « Grand Inquisiteur moderne ».
[33] Palès-Gobilliard (Annette), « Pénalités inquisitoriales au XIVe siècle », in Crises et Réformes dans l’Église (Actes du 115e congrès national des sociétés savantes, Avignon, 1990), Paris, 1991, p. 143-154 : « l’analyse des archives de Bernard Gui a montré qu’en seize ans (1307-1323) d’exercice à Toulouse, l’Inquisition a prononcé 501 peines et 243 remises de peine, la plupart du temps pour mettre fin à une détention. Plus précisément, il ordonne 29 sentences capitales, 80 condamnations au bûcher concernant des cadavres exhumés, 13 peines de mur étroit (prison ferme), 231 peines de mur large (assignation à résidence) et 107 peines infamantes. Le plus important bûcher, ordonné le 5 avril 1310, fait 17 victimes. »
[34] La prise de Bézier aurait fait entre 5 000 et 10 000 morts.
[35] Berlioz (Jacques), Tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens : la croisade contre les Albigeois vue par Césaire de Heisterbach, Toulouse, Loubatières, 1994, 135 p.
[36] Vauchez (André), Les Hérétiques au Moyen Âge. Suppôts de Satan ou chrétiens dissidents ? Paris, CNRS éditions, 2014, 309 p.
[37] Cette information résulte du parchemin de Chinon conservé aux archives secrètes du Vatican, et étudié par l’historienne italienne Barbara Frale, puis publié par le Vatican en 2007. De ce fait, la condamnation et mise à mort des Templiers sur le bûcher résulte principalement de la responsabilité du roi Philippe le Bel et non de celle du pape ou de l’Église.
[38] Garuti (Adriano), « La santa romana e universale inquisizione : strutture e procedure », in: L’inquisizione. Atti del Simposio Internazionale Rome, Biblioteca apostolica vaticana, 2003, coll Studi e testi, n° 417, p. 383, traduit de l’italien par l’auteur.
[39] Garuti (Adriano), op. cit. p. 388.
[40] Idem, note 33. Cf. Archivio della Congregazione della Dottrina della Fede. (ACDF)
[41] Kasper (Card. Walter), L’Église catholique. Son être, sa réalisation, sa mission, Paris 2014, Cerf, p. 245.
[42] Foyer (Jean), Histoire de la justice, PUF, 1996
[43] Collectif, Encyclopédie Larousse (version en ligne www.larousse.fr/encyclopedie/personnage/Louis_IX/130421 consultée le 7 janvier 2016) Louis IX.
[44] La quarantaine-le-roi est un délai de quarante jours institué par Philippe Auguste ou Philippe le Hardi et renouvelée par Louis IX en 1245. Elle permettait d’éviter des guerres privées, en instituant un temps de réflexion obligatoire, on demandait et exigeait des deux clans d’attendre pendant 40 jours avant de régler un conflit.
[45] L’ordalie est une forme de procédure en justice, d’origine religieuse, aussi appelée jugement de Dieu. Elle consiste en une épreuve judiciaire employée au Moyen-Âge pour établir l’innocence ou la culpabilité de l’accusé.
[46] Enregistrées à partir de 1342, les suppliques, demandes de toute sorte, adressées au pape, forment l’un des fonds les plus anciens des Archives du Vatican. […] il est essentiel de ne pas isoler les sources pontificales des requêtes adressées aux autres puissances souveraines de l’Europe médiévale, cités italiennes ou royaumes de France, d’Espagne ou d’Angleterre. La comparaison des archives exprimant les demandes des sujets face à leur prince dans l’Occident de la fin du Moyen-Âge montre l’existence d’une forme particulière d’exercice de la souveraineté, qu’on peut qualifier de « gouvernement par la grâce » Cf. Millet (Hélène) Suppliques et requêtes : le gouvernement par la grâce en Occident : 12e-15e siècle, Roma : École française de Rome, 2003, Collection de l’École française de Rome 310, 435 p.
[47] Louis IX : S’il advient que tu deviennes roi, prends soin d’avoir les qualités qui conviennent à un roi ; c’est-à-dire que tu sois juste, que, quoi qu’il arrive, tu ne t’écartes pas de la justice. […] Soutiens de préférence le pauvre contre le riche jusqu’à ce que tu saches la vérité ; et quand tu la connaîtras, fais justice. […] Si tu apprends que tu possèdes quelque chose à tort, rends-le tout de suite, quelque grande soit cette chose, terre, deniers ou autres biens.
[48] Les canonistes ont choisi comme saint patron Raymond de Penyafort qui, en 1234, compila les cinq livres des Décrétales, par ordre de Grégoire IX.
[49] En breton, Zant Erwan.
[50] Le Guillou (Jean-Paul), traduction française de l’enquête qui fut faite à Tréguier « sur la vie, les mœurs et les miracles d’Yves Hélory de Kermartin en vue de sa canonisation », et qui fut présentée le 4 juin 1331 au pape Jean XXII. Saint Yves, ceux qui l’ont connu témoignent, ceux qu’il a guéris témoignent, 2ème édition française, Saint Brieuc, Teck impressions, avril 2003, 160 p.
[51] Né au Minihy de Tréguier en 1253, sous le règne de Saint Louis ; mort là, à deux kilomètres de Tréguier, le 19 mai 1303.
[52] Fuit homo bone vita, fuit homo honeste.
[53] de Kerc’hoz (Jean), clerc et jurisconsulte, paroissien de Pleubian, diocèse de Tréguier, âgé de 90 ans. Témoin n° 1, p. 15-16.
[54] Jaquet, fils de feu Rivallon, de la paroisse de Saint Pierre de Louannec âgé de 50 ans, témoin n° 43, p. 63.
[55] de Trégroin (Darien), recteur du diocèse de Tréguier, âgé de 50 ans et plus, témoin 47, p. 68.
[56] Le frère Pierre, religieux, abbé du monastère de Bégard, de l’ordre de Cîteaux, au diocèse de Tréguier, âgé de 50 ans, témoin n° 19, p. 37-38.
[57] Thomas de Ploulec’h (Alain), diocèse de Tréguier, âgé de 70 ans. Témoin n° 31, p. 49, 50.
[58] de Croyfrooc (Jean), écuyer, paroisse de Ploubezre, diocèse de Tréguier, témoins n° 34, p. 53.
[59] Toulefflam (Hamon), de la paroisse de Plestin au diocèse de Tréguier, ermite de bonne réputation, témoin n° 20, p. 40.
[60] Menguy (Yves), de la paroisse de Louanec, diocèse de Tréguier, témoin n° 35, p. 63.
[61] Portier (Raoul), clerc de Lanmeur, diocèse de Dol, témoin n° 12, p. 30 et témoin n° 13, p. 31.
[62] Il s’agit des personnes suivantes, pour lesquelles plusieurs témoins ont témoigné :
- Alain Guigon, fils d’Alain et Adénoro Guidon (témoins 53 à 55)
- Yves Rivallon Cohozer, natif de Plouguiel, et mort à Angers (témoins 56 et 57),
- Théophanie, fille d’Alain et Mobilia de Roscnezne, de la paroisse de Ploelan, (témoins 58 à 60)
- Guenutera, fille de Rivalon Maguet, de la paroisse de saint Scilien (diocèse de Léon), (témoin 61)
- Amicie, fille d’Agnès et J. Brancie, de la paroisse de Pommerit le Vicomte (diocèse de Tréguier), (témoin 62)
- Henri Olivier ou de Mostier de Léon, paroissien de Plouvenez (diocèse de Quimper) (témoins 63 et 64)
- Alain, fils de Cadioc Scalart, paroissien de Pleubian (témoins 65 à 67)
- Raymond, fils d’Alain Le Roux, paroissien de Saint Briac (Bourbiac) diocèse de Tréguier, (témoins 68 à 70)
- Rolland, fils de Geoffroy, de la paroisse de Pédernec, diocèse de Tréguier, (témoins 71 et 72)
- Aymeri, fils de Hamon Gogeesay, de la paroisse de Lannion, diocèse de Tréguier, (témoins 73 à 75),
- Guillaume, fils d’Alain Guidomar, de la paroisse de Gazvallon, (Plouescat-Guerrand), diocèse de Tréguier, (témoins 76 à 78)
[63] Le dernier livre mis à l’Index l’a été, en 1961, sous le pontificat de Jean XXIII.
[64] Il est paru à Florence un livre intitulé Dialogue des deux systèmes du monde de Ptolémée et de Copernic dans lequel tu défends l’opinion de Copernic. Par sentence, nous déclarons que toi, Galilée, t’es rendu fort suspect d’hérésie, pour avoir tenu cette fausse doctrine du mouvement de la Terre et repos du Soleil. Conséquemment, avec un cœur sincère, il faut que tu abjures et maudisses devant nous ces erreurs et ces hérésies contraires à l’Église. Et afin que ta grande faute ne demeure impunie, nous ordonnons que ce Dialogue soit interdit par édit public, et que tu sois emprisonné dans les prisons du Saint-Office.
[65] Moi, Galiléo, fils de feu Vincenzio Galilei de Florence, âgé de soixante-dix ans, ici traduit pour y être jugé, agenouillé devant les très éminents et révérés cardinaux inquisiteurs généraux contre toute hérésie dans la chrétienté, ayant devant les yeux et touchant de ma main les Saints Évangiles, jure que j’ai toujours tenu pour vrai, et tiens encore pour vrai, et avec l’aide de Dieu tiendrai pour vrai dans le futur, tout ce que la Sainte Église catholique et apostolique affirme, présente et enseigne. Cependant, alors que j’avais été condamné par injonction du Saint-Office d’abandonner complètement la croyance fausse que le Soleil est au centre du monde et ne se déplace pas, et que la Terre n’est pas au centre du monde et se déplace, et de ne pas défendre ni enseigner cette doctrine erronée de quelque manière que ce soit, par oral ou par écrit ; et après avoir été averti que cette doctrine n’est pas conforme à ce que disent les Saintes Écritures, j’ai écrit et publié un livre dans lequel je traite de cette doctrine condamnée et la présente par des arguments très pressants, sans la réfuter en aucune manière ; ce pour quoi j’ai été tenu pour hautement suspect d’hérésie, pour avoir professé et cru que le Soleil est le centre du monde, et est sans mouvement, et que la Terre n’est pas le centre, et se meut. J’abjure et maudis d’un cœur sincère et d’une foi non feinte mes erreurs.
[66] Ainsi la science nouvelle, avec ses méthodes et la liberté de recherche qu’elle suppose, obligeait les théologiens à s’interroger sur leurs propres critères d’interprétation de l’Écriture. La plupart n’ont pas su le faire. …/… Galilée, croyant sincère, s’est montré plus perspicace sur ce point que ses adversaires théologiens.
[67] Michelet (Jules), Histoire de France – tome 7 Renaissance
[68] Code de justice criminelle promulgué par Charles Quint en 1532
[69] Bennasar (B), L’inquisition espagnole XVème-XIXème siècles, Paris, 1979, p. 233-234 : l’Espagne de l’Inquisition a échappé à la grande chasse aux sorcières.
[70] Vénard (Marc), « La fin d’une époque » in Histoire du Christianisme : l’Âge de raison (1620-1750), volume 9, sous la direction de J-M ; Mayeur et al. DESCLEE, 1997, p. 1149/1214.
[71] Vénard (Marc), « La hantise du diable », in Histoire du Christianisme, le temps des confessions (1530-1620), volume 8, sous la direction de J-M ; Mayeur et al., Paris, Desclée, 1992, p. 1038-1039/1236.
[72] Chauvet (David), La personnalité juridique des animaux jugés au Moyen Âge XIIIe-XVIe siècles, L’Harmattan, 2012.
[73] Les procès intentés aux animaux étaient des procès dans lesquels l’accusé était un animal qui se voyait reprocher un délit, un crime ou un dommage comme il l’aurait été à un être humain, en principe seul sujet de droit ou justiciable. Ainsi, au Moyen Âge et bien après, on condamna à la potence ou au bûcher des vaches, ou des truies. De même, l’Église étendit ses excommunications des hommes aux animaux : rats, mouches, sauterelles, taupes, poissons ; tout membre de la faune pouvait y succomber.
[74] Voltaire raconte qu’un procès fut intenté en 1610 à un cheval et à son maître, accusés tous deux de sortilèges. Siècle de Louis XVI, chapitre II.
[75] Deslandres (Dominique), « Le christianisme dans les Amériques », in Histoire du Christianisme : l’Âge de raison (1620-1750), volume 9, sous la direction de J-M ; Mayeur et al, DESCLEE, 1997, p. 711/1214.
[76] Deslandres (Dominique), op. cit. p. 714/1214.
[77] Luther (Martin) publie ses 95 thèses en 1517.
[78] Convoqué en 1542 il se déroule entre le 13 décembre 1545 et le 3 décembre 1563.
[79] Arnaud (Florent), Le Grand Livre de l’Histoire du Monde des Hommes. Tome IV, Paris, 2010, Lulu.com 276 p. (p. 231) : Après l’Edit de Fontainebleau qui révoquait l’édit de Nantes, Louvois a écrit aux intendants du Limousin et du Poitou d’accabler d’impôts les protestants : « Si, suivant une répartition où ils en devraient porter dix, vous pouvez leur en faire donner vingt. ». Il fut notamment obéi par René de Marillac, intendant du Poitou, qui ordonna de faire le rôle des tailles et de marquer les réformés à la marge pour les grever, tant pour l’impôt que pour le logement des gens de guerre. Les nouveaux convertis étaient, au contraire, exempts de l’un et de l’autre. Tous les excès étant encouragés, l’effet de ce genre de persécution au sein de chaque famille dépassa l’espérance de Louvois. Des milliers de protestants se déclarèrent catholiques, tandis que ceux de l’Aunis et de Saintonge émigraient en foule.
[80] Soulèvement de paysans protestants dans les Cévennes et Bas-Languedoc sous le règne de Louis XIV.
[81] Voltaire, « Traité sur la tolérance » Paris, 1763.
[82] Portail de la justice : www.justice.gouv.fr/histoire-et-patrimoine-10050/proces-historiques-10411/laffaire-calas-22774.html
[83] Brunet de Brou, La religieuse malgré elle. Amsterdam 1720, Préface, p. 7.
[84] Montesquieu, L’esprit des lois, XI, 6 ; e. XIX, 27.
[85] Labandeira observe que Montesquieu ne fait pas référence à la fonction administrative ou exécutive telle qu’on l’entend aujourd’hui.
[86] Mestre (Jean-Louis), « L’histoire du droit administratif » in Traité de droit administratif, sous la direction de Pascale Gonod, Fabrice Melleray et Philippe Yolka, Paris, Dalloz, 2011, tome 1, 841 p. (p. 13)
[87] La loi des 16-24 août 1790 (articles 13) et le décret du 16 fructidor an III (2 septembre 1795) proscrivent aux tribunaux judiciaires de « troubler, de quelque manière que ce soit, les opérations des corps administratifs ».
[88] Un enfant, qui passait sur la voie publique devant l’entrepôt des tabacs de Bordeaux, a été renversé par un wagon que les employés de l’Etat ont poussé de l’intérieur de l’établissement et il a dû subir une amputation. Le père de l’enfant a intenté une action en dommages-intérêts contre lesdits employés et contre l’Etat solidairement comme civilement responsable du fait de ses agents par application des articles 1382, 1383, 1384 du Code civil. Le conflit fut élevé et le Tribunal des conflits attribua à la juridiction administrative la compétence pour connaître du litige.
[89] Tribunal des conflits statuant au contentieux N° 00012 Publié au Recueil Lebon.
[90] Mestre (Jean-Louis), Introduction historique au droit administratif français ; Paris : Presses universitaires de France, 1985 ; in-8°, 294 pages [Collection Droit fondamental].
[91] Burdeau (François), Histoire du droit administratif : de la Révolution au début des années 1970, Paris, PUF, 1998, 512 p.
[92] Santini (P.), De referendariorum ac Signaturae historico-iuridica evolutione, Romae, 1945.
[93] Mc Clunn (J . D.), Administrative Recourse: A Commentary With Historical Notes, Washington, 1946.
[94] Schmitz (H.) « Appelatio extraiudicialis, Entwicklungslinien einer kirchlichen Gerichtsarbeit über die Verwaltung im Zeitalter der klassischen Kanonistik » in Münchener theologische studien, III Kanonistische Abteilung, 28 Band, München 1970.
[95] Matthews (K.), « the Development and Future of the Administrative Tribunal », Studia Canonica 18 (1984) 1-233.
[96] Ostilio (Frederico D’), Il diritto amministrativi della chiesa, Rome, Libreria Editrice Vaticana, 1995, 580 p.
[97] Ghirlanda Gianfranco, Introduzione al diritto ecclesiale, Roma, GBP ed. 2013, p. 72-86/223.
[98] Labandeira, (Edouardo) « La Signatura apostolica y los Tribunales Administrativos », in « IC » 42, 1981, p. 665-772.
[99] Coughlin, (J.J.) ofm, « The historical development and current procedural norms of administrative recourse to the Apostolic Signatura”, in Periodica 90 (2001) p. 455-496; 661-690.
[100] Gordon (Ignatius S.I.), « Normae speciales supremi tribunalis signaturae apostolicae: editio aucta introductione, fontibus et notis», in Periodica V. 59, fasc. 1, 1970, p. 75-113. Dans son article publié en 1970, Gordon introduit une publication des normes spéciales du Tribunal de la Signature apostolique, précédemment approuvées le 23 mars 1968, mais pas promulguées officiellement. Il distingue les étapes suivantes :
La création initiale :
- les référendaires au XIIIème siècle,
- l’office de la signature au XVème siècle,
- La double Signature du XVIème au XXème siècle, qui introduit une double histoire :
S’agissant de la Signature de la justice, les principales étapes sont les suivantes :
- sa création par la constitution Cum nuper nos de Pie IV, le 1er juillet 1562, publiée dans le Bullarium Romanorum, t. VII, p. 224-226,
- son développement au cours des XVIème et XVIIème siècles, raconté par différents auteurs,
- sa suppression en 1809 par Napoléon, quand il a envahi les Etats pontificaux et les a intégrés dans l’Empire napoléonien, régi par le code éponyme,
- son rétablissement provisoire en 1814, lorsque le Latium et l’Ombrie ont été restitués au pape,
- ses différentes réformes dans la période 1814-1870,
- sa suppression définitive en 1870
S’agissant de la Signature des grâces, les principales étapes sont les suivantes :
- sa création en 1588 par Sixte V,
- ses développements plus ou moins marqués jusqu’en 1839
La Signature Apostolique, réunifiée par la constitution Sapienti consilio de Pie X en 1908.
[101] Del Re (Niccolo) La Curia romana. Lineameti storico-giuridici, Libreria Editrice Vaticana (collana Diritto canonico), 1998, 708 p.
[102] Ce canon, repris à l’article 16 de la loi propre de la Rote romaine, a fait l’objet d’une interprétation authentique
[103] Witt (Leopold), Das Leid einer Glückseligen, Waldsassen 1927.
[104] Angerer (A.), lettre à Pie X du 1er juin 1927 (ACDF, SO, Dev. V. 1927 7, 1).
[105] Desmazières (Agnès), « La gestion ecclésiale des phénomènes mystiques sous Pie XI. Le cas Thérèse Neumann », version préliminaire d’un passage tiré de : Pie XI et la France : L’apport des archives du pontificat de Pie XI à la connaissance des rapports entre le Saint-Siège et la France, Rome, Jacques Prévotat ed., Collection de l’Ecole française de Rome, 2011, 481-493.
[106] S.S.Congregazione del S. Offizio, « Intorno al caso di Teresa Neumann. Relazione di una visita a Konnersreuth », mars 1938 (ACDF, SO, Dev. V. 1927 7, 125), cité par Agnès Demazières, in op. cit.
[107] Rampolla (Cardinal) www.civitas-institut.com/content/view/305/28/
[108] Cf. Sérant (Paul), Les déchirements des catholiques français, Paris 1989, Librairie Perrin, p. 94-116/283.
[109] Loew (Jacques) : N’oublions pas la très grande influence des grands patrons intelligents, organisés et imbattables au point de vue économique. Ils se défendent [contre les grèves auxquelles participent des prêtres-ouvriers…] Ils viennent à Rome. […] Il faut nous méfier terriblement de nos imprudences apostoliques, sociales ou doctrinales. Des Français semblent n’avoir pour fonction que de venir les raconter ici. C’est sans doute écœurant, mais sachons au moins que tout se sait (et même un peu plus que tout).
[110] Le 17 février 1954, après avoir appris le limogeage du 8 février, le Canard enchaîné publiait un article intitulé « Rappel à l’Ordre de saint Dominique » où l’on pouvait lire « Il suffit que « Rivarol » ou « Aspects de la France » écrive un libelle contre tel ou tel catholique vaguement libéral pour que l’article soit pris pour argent comptant, versé au dossier et serve de pièce à conviction. Tout accusé, pourvu qu’il soit libéral, est déclaré un coupable. Comme sous l’Inquisition. Et on attend maintenant que les foudres apostoliques tombent sur les laïcs. Contrairement à ce que l’on croit, l’épiscopat français ne serait pas tout-à fait innocent non plus dans l’histoire des Dominicains. Les mesures disciplinaires qui ont atteint lesdits auraient été dénoncés en partie à la suite d’une pétition dont aurait pris l’initiative Mgr Richaud, archevêque de Bordeaux.
[111] Cesbron (Gilbert), les saints vont en enfer, Collonge (André), alias Gardey (Bernard), prêtre–ouvrier dominicain, Le scandale du xxe siècle et le drame des prêtres–ouvriers, Paris, Olivier Perrin, 1957, Poulat Emile, Les prêtres ouvriers, naissance et fin. ; Leprieur (Francis), Quand Rome condamne Keck (Thierry) Jeunesse de l’Église: 1936-1955, aux sources de la crise progressiste en France ; Suaud (Charles) et Viet-Depaule (Nathalie), Prêtres et ouvriers. Une double fidélité mise à l’épreuve 1944-1969.
[112] Valet (Paul) A l’époque, j’avais employé le terme de marâtre pour qualifier le comportement de l’Église envers les prêtres-ouvriers. Le terme était inapproprié car en l’occurrence, les prêtres-ouvriers n’ont pas été seulement privés de l’amour maternel, ils ont été maltraités. Certains furent même écrasés : même ceux qui se sont soumis en ont gardé des cicatrices. Le procès qui leur était fait était un procès à charge. Les avocats qui auraient pu les défendre, les pères Féret, Liégé, Chenu, que j’ai eu le privilège de rencontrer, furent réduits au silence et mis à l’écart. » (Valet p. 75)
[113] Sarah (Cardinal Robert), Dieu ou rien, Propos recueillis par Nicolas Piat, Paris 2016, ed Pluriel, p. 58/420.
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